Création

Que dire... J'ai pris en compte vos remarques de la dernière fois et ai apporté un semblant de "réflexion" rendant le texte moins gratuit.
Je me suis surtout amusé comme un gamin immature en réalité, "prenez-le comme c'est".

Texte :

Socrate : Dis-voir Empédocle.

Empédocle : Oui?

Socrate : Les portes de ton cul m'appellent, j'entre!

Empédocle : Maintenant?

Socrate : J'y suis déjà.

Empédocle : Et maintenant?

Socrate : Je te laboure de part en part!

Empédocle : Et après?

Socrate : Eh! Qu'est-il besoin d'un après? A chaque minute qui passe, des milliers de cellules meurent et des milliers de cellules naissent en toi. Qu'est-il besoin de se soucier de l'après, alors que supposément tu es peut-être déjà mort dix-mille fois en vingt ans? Hein?!

Empédocle : C'est terrible ce que tu dis là, Socrate!

Socrate : Et après? Seul compte l'instant présent! Tout sera oublié et tout finira par mourir. Au regard de l'infiniment passé et de l'infiniment lointain, nos actes et nos tourments revêtent une légèreté... Ah, je crains de n'avoir percé le colon.

Empédocle : Non non, tout va bien, poursuis donc.

Socrate : Après donc... Regarde les grands empereurs d'antan, s'en souvient-on encore?

Empédocle : Eh bien...

Socrate : Ne réponds pas tout de suite je te prie. Si l'on se souvient des maladies d'Auguste, des orgies de Tibère, de la folie de Caïus, du ridicule de Claudius et de la mégalomanie de Néron, se souvient-on vraiment du genre d'homme qu'ils furent? N'en possédons-nous pas là qu'une image ancienne et tronquée, qui ne survivra d'ailleurs pas au millénaire suivant, et qui ne survit déjà que marginalement dans quelques esprits, esprits qui se sont déjà tués et recomposés dix-mille fois en vingt ans?

Empédocle : Maintenant que tu le dis... Mais que faire alors? Vivre pour l'instant présent, pour la seconde même?

Socrate : C'est exact : la prévoyance est vaine, dis-toi que tu peux mourir à chaque instant. Et je sais de quoi je parle : un ami est mort écroulé sur ses toilettes, dans sa cacade, l'autre jour... d'une crise cardiaque entre deux prouts. Je te laisse concevoir le caractère imprévu de son décès, le caractère insensé de ses aspirations brisées, ainsi que le ridicule jeté sur sa mémoire, et les fou-rires lors de son enterrement. Vacuité donc, vacuité d'autant plus qu'en l'espace de trois générations, tout de lui sera oublié. Ne restera qu'un vieil état-civil dans des archives quelconques qui bientôt disparaitront elles aussi.

Empédocle : Je réitère. Vivre dans le présent, fort bien! mais que faire?

Socrate : Le plaisir, toujours le plaisir, toujours le bonheur et la joie!

Empédocle : Et donc?

Socrate : La sodomie, Empédocle.

J'ai pas tout compris mais j'ai bien rigolé

Si ça a pu vous faire rire, on peut considérer que le but est atteint.

Enveloppe Soleau

J'aime beaucoup pour tout te dire, je l'avais lu il y a une semaine ou deux rapidement avant d'aller me coucher, et j'y ai pensé plusieurs fois depuis sans être repassé sur le forum

L'introduction absurde, très visuelle en une poignée de mots, excellent.

Le rythme est bien contrôlé, ce style soutenu et pastiche aussi. J'aurais juste à dire que le thème du "memento mori" est un peu éculé même si éternellement séduisant, et que les passages où c'est trop explicitement de cela dont il est question ne sont pas les plus remarquables, mais quand c'est bien associé (et toujours avec élégance !), au contexte, c'est drôle et riche. Puis même les généralités semblent être ironisées, finalement, par le rappel régulier de la situation ("Ah, je crains de n'avoir percé le colon"), donc ça fonctionne plutôt bien.

Bonne chute aussi, bref, bien joué co-passionné de Julien Gracq