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Sujet : Haute fréquence (micro nouvelle)
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DonnaldDarko
Niveau 3
19 juin 2023 à 10:06:47

Par une nuit sans lune, calme, propice à la réflexion je marchais calmement en scrutant les alentours. On ne pouvait pas apercevoir d'étoile ce soir-là. Les nuages brumeux les cachaient. Une brise légère faisait frémir les feuilles des arbres et buissons dans un bruissement envoûtant. Pas après pas, je tentais de faire le vide. J’essayais tant bien que mal de chasser les pensées qui m'envahissaient.

La lumière des lampadaires se reflétait sur les vitres et carrosserie des véhicules stationnés çà et là dans une drôle de danse fascinante. En plus du vent on pouvait entendre au loin le son du périphérique qui encerclait la cité. La mélodie des poids lourds me faisait penser aux chants des baleines, berçant, hypnotisant, monotone comme un bruit blanc. J'essayais de me concentrer sur celui-ci pour ne plus penser. J'empruntai le passage que j'avais découvert dans une ruelle adjacente et bifurqua, non sans avoir vérifié au préalable que je n'étais pas suivi. Je ne savais pas si c'était encore là.

Je ne pourrais pas déterminer ce qui avait déclenché le phénomène, ni quel fut l’enchaînement exact. Tout d'abord, il me semble que ça avait commencé par un petit acouphène. Je n'ai pas consulté tout de suite à ce moment-là, pensant que c'était passager, mais l'horrible son aigu persistait en augmentant d'intensité et en me provoquant un mal de crâne intolérable.
Les divers médocs de mon armoire à pharmacie n'arrangeaient rien. Je n'en dormais plus. Après environ une semaine sans sommeil, je m'achetai une bouteille d'alcool de contre-bande, le plus fort que j'ai pu trouver. Je testai alors sans grande conviction ma mixture et cela à ma grande stupeur fonctionna. Je pu alors faire abstraction et m'endormir enfin du sommeil du juste.

Les lendemains de cuites étaient difficiles, atroces même pour être précis, si bien que je devais continuer à boire pour supporter ça. Je pense qu'une quinzaine de jours passèrent avant que je ne réalise que ce fut une fausse bonne idée. Je ne pouvais pas tenir à ce train-là, être saoul à longueur de temps, ni humainement, ni financièrement. Et c'était de plus devenu illégal grâce au Comité d'Hygiène National. J'avais certes des contacts mais l'offre et la demande, par ces temps sombres, font que beaucoup de gens ont quelque chose à oublier. Les prix ne faisaient que grimper et pas que sur le marché noir.

Je décidai finalement à prendre rendez-vous au CHN, celui-ci fut fixé le sur-lendemain. La journée ça allait, il y avait les activités de pleine air autorisées, des programmes intéressants sur le vid-écran qui me permettaient de ne pas faire attention au son.
La nuit en revanche c'était beaucoup plus compliqué, pas d'activités, pas de programmes. Je dérangeais les voisins du complexe d'habitation avec la musique même à bas volume. Celui-ci avait été bâti à la hâte avec peu de moyens pour palier la crise du logement dû à la surpopulation. Il était gris, morne, triste, un immonde bloc de quarante étages. Toutes les unités d'habitation étaient semblables à la mienne si bien qu'on pouvait passer un long moment avant de se rendre compte qu'on s'était trompé d'immeuble, d'étage et même d'appart.
Je le sais ça m'est arrivé. Imaginez la tête de la nana qui m’a vu chez elle, le froc aux chevilles, entrain de m'astiquer. Je pensais être tranquille chez moi votre Honneur ! J'ai été jugé pour intrusion et comportement allant à l'encontre des bonnes mœurs. Ça m'a valu une sale amende, du sursis, un licenciement et une obligation de soins. Le peu d'amis qu'il me reste en rigole encore.
La deuxième nuit avant le rendez-vous chez le toubib, quelque chose se produisit lors d'un changement soudain du bruit. Ma vision se troubla, j'étais dehors, bravant le couvre-feu sans savoir comment diable j'étais arrivé là. Si la milice me chopait j'étais bon pour le bagne mais je ne rentrai pas tout de suite. Une sorte de réflexe protecteur.

Le jour suivant j'étais dans la salle d'attente. Elle était d’une blancheur immaculée avec des néons qui grésillent dans l’ouïe et grillent la rétine, c'était bien ma veine. Malgré une heure d'entretien prédéfini le doc n’était pas foutu d'être dans les temps, il y avait encore deux personnes avant moi, un homme et une femme. Le gars d'une vingtaine d'années était en face de moi, nerveux, remplit de tics et le regard fuyant. Il me stressait, le genre de mec à qui on ne confirait même pas la garde de son E-dog. Et dans ma diagonale une femme d'un âge indéterminé. La chirurgie esthétique appliquée sur elle respectait à la lettre tous nos critères et standards de beauté actuelle. Un clone, une copie, vaine et insipide. Son regard à elle était perdu dans le vague et son visage lisse et inexpressif laissait croire qu'elle pensait à sa prochaine opération. Je ne la toucherais même pas avec un bâton... quoique...
Elle m'intriguait n’empêche, dans son petit tailleur de cadre réglementaire anthracite, ça n'allait vraiment à personne. Ses fonctions lui avaient payé le ravalement. Mais à quoi bon ? Pour plaire à qui ? On ne pouvait de toute manière plus être en couple et avoir de progéniture.
Je poussai un petit rire nerveux face à ces pensées, troublés, ils me regardèrent tout deux étrangement, je ne m’excusai pas et retournai à mes rêveries.

Quand mon tour arriva je fus pris de vertiges dans la salle d’auscultation. En guise de bonjour le médecin me fit un scan rétinien.
- Insérez votre carte me fit-il froidement,
Après m'être exécuté, il me dit :
- Qu'est-ce qui vous amène au Centre d’Hygiène ? Vos constantes sont bonnes, un peu de tension juste.
Je lui expliquai en tentant de ne rien omettre et en étant le plus précis possible. Je ne lui parlai simplement pas de l’excursion nocturne. Je n'étais pas à l’abri d'un signalement de sa part aux autorités. Il me demanda ensuite si quelque chose avait changé récemment dans mon quotidien ? Je répondis que non, pas à ma connaissance.
Il me préleva ensuite du sang et me fit un scan cérébral. Rien d'anormal. Il me prescrit un traitement et me somma de revenir si ça n'allait pas. La prescription fut inefficace si bien que j'arrêtai de tous les prendre et ne revins jamais.

Je redoutais toujours les nuits. Le son devenait encore plus présent à ce moment-là, ce putain d’acouphène. J'avais réellement peur le soir, du silence, quand tout le monde dort. Ça vient la nuit dans mon petit chez moi, ça veut changer mon esprit je crois. C'est pour ça que je sors. Je fuis en évitant soigneusement les cams, les détecteurs, les drones. Je l’entends. Il ne faut pas l'écouter. Jamais. Je marche et je ne m'arrête pas.

J'ai trouvé un chouette endroit à l'écart, un parc situé en bordure de la ville. Il est assez loin des quartiers résidentiels et commerciaux. Une aire de jeux à l'abandon se trouve en son centre, il y a des arbres tout autour. Je reste là toute la nuit pour avoir du répit. Je peux y dormir un peu mais combien de temps avant qu'ils ne le réhabilitent ? Au début je prenais encore mon smartphone avant d'avoir compris.
Il n'y a pas de réseau ici.

ihjkali
Niveau 16
20 juin 2023 à 18:14:14

sympa cette petite nouvelle

DonnaldDarko
Niveau 3
21 juin 2023 à 08:08:22

Le 20 juin 2023 à 18:14:14 :
sympa cette petite nouvelle

Merci beaucoup

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Sujet : Haute fréquence (micro nouvelle)
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