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Histoire

Sujet : L'affaiblissement de l'autorité abbasside
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agentskyblue2
Niveau 10
11 juillet 2018 à 13:46:23

Vers les années 945-950, les Buyhides famille d'origine sh'îte personne prendra de plus en plus d'emprise, à tel point qu'ils sapperont (ça se dit ça :hap: ) l'autorité califale
.

Puis tour à tour vers le milieu et la fin du 9eme siècle des villes declareront leurs indépendances tout en reconnaissant le calife (Kairouan, etc..)

Ça me fait penser que si le calife avait renforcé son pouvoir central et arrêté de tout déléguer comme le fait de déléguer l'armée amir ul ummara en 936, il serait peut-être resté plus longtemps en place.

On pourrait comparer ce fait à l'histoire de certains etats d'Europe qui centralisèrent le pouvoir au détriment des seigneurs là chez les abbassides c'est le contraire.

agentskyblue2
Niveau 10
11 juillet 2018 à 13:47:19
  • Famille shi'îte d'origine persane *
ShinyMetalAss
Niveau 6
11 juillet 2018 à 20:53:21

Ça me fait penser que si le calife avait renforcé son pouvoir central et arrêté de tout déléguer comme le fait de déléguer l'armée amir ul ummara en 936, il serait peut-être resté plus longtemps en place.

Les mamelouks turcs des califes abbassides leur mettaient déjà des gifles depuis le milieu du huitième siècle, d'ailleurs le premier amir al-umara était sans surprise un Turc, un Khazar nommé ar-Raik.

Volten751
Niveau 5
11 juillet 2018 à 21:42:53

Le 11 juillet 2018 à 20:53:21 ShinyMetalAss a écrit :

Ça me fait penser que si le calife avait renforcé son pouvoir central et arrêté de tout déléguer comme le fait de déléguer l'armée amir ul ummara en 936, il serait peut-être resté plus longtemps en place.

Les mamelouks turcs des califes abbassides leur mettaient déjà des gifles depuis le milieu du huitième siècle, d'ailleurs le premier amir al-umara était sans surprise un Turc, un Khazar nommé ar-Raik.

Les abbassides ont pu se débarrasser de l'emprise de la garde turque, notamment sous le règne du calife al-Mu'tadid et de son fils.
Sinon, les Abbassides venaient à peine de renverser les Omeyyades au 8ème siècle. :hap:

ShinyMetalAss
Niveau 6
11 juillet 2018 à 23:38:54

L'emprise des Turcs est pourtant demeurée très forte dans cette période, en dépit du fait que Samarra (bâtie à l'origine pour abriter la garde turque) n'était plus capitale califale depuis 892. Les troupes les plus solides du califat à l'époque étaient d'ailleurs composées pour une importante partie d'entre elles de cavaliers turcs (à côté de laquelle existaient aussi d'autres troupes très réputées, comme l'infanterie daylamite dont sont issus les Bouyides, mais je m'éloigne). Prenons le calife al-Muqtadir : en dépit du fait qu'il ait réussi à régner de 908 à 932, il était la marionnette de vizirs (sans doute plus persans ou arabes que turcs) et d'émirs turcs, comme Mu'nis.

Un calife est dans sa cage, entre deux Turcs ses géoliers
Il répète leur langage, semblable à un perroquet

Ce poème satyrique irakien du dixième siècle que rapporte Ibn Khaldun (avec plusieurs siècles de distance, certes) illustre assez bien la situation politique et militaire de l'époque, ainsi que le point de vue de la majorité civile arabe, je trouve.

Sinon, les Abbassides venaient à peine de renverser les Omeyyades au 8ème siècle. :hap:

Ils étaient déjà largement entré dans leur période de déclin (lequel constitue un phénomène complexe, il ne s'agit pas de se contenter de pointer du doigt les faiblesses des califes).

Volten751
Niveau 5
12 juillet 2018 à 01:04:31

Il est vrai que malgré la fin de l'anarchie de Samarra et de la révolte des Zanj, plusieurs califes sont restés des marionnettes des turcs, qu'ils appartiennent à la garde turque, aux bouyides ou aux seldjoukides. Néanmoins, quelques califes ont pu se défaire de leur autorité, parmi lesquels ont peut citer:
- al-Mu'tadid, surnommé le deuxième as-Saffah, puisqu'il a joué un rôle important dans la répression de la révolte des Zanj et la consolidation du pouvoir califale, gravement détérioré au cours des décennies précédentes. Après je pense que son succès est surtout du aux relations forgées avec ses troupes lorsque son oncle al-Mutamid était encore calife, notamment en combattant les Saffarides et les esclaves révoltés.
- al-Muktafi, qui a mis fin à la dynastie toulounide en Égypte et a repris les villes syriennes tombées sous le contrôle des Qarmates ismaéliens.
- al-Qahir qui a pu se débarrasser de Mu'nis al-Muzaffar après avoir découvert sa conspiration. Bon après sa fin n'a rien de glorieux, mais je pense qu'il mérite d'être mentionné juste pour avoir pu éliminer Mu'nis qui était le principal responsable de la désignation des califes et de leur déposition.
- al-Qadir, qui a pu restauré le sunnisme malgré la tutelle imposée par les bouyides duodécimains, et qui a réussi à désigner son fils al-Qaim comme successeur. Chose qui était impensable à cette époque, puisque les Bouyides contrôlaient tout. Je pense même qu'il avait condamné les sectes déviantes, notamment les mu'tazilites qui avait le soutien des Bouyides, puisque on assista à la renaissance de leur pensée après son abandon par al-Mutawakkil.
- al-Muqtafi, qui a pu repousser le siège seldjoukide contre Bagdad en 1157 et restaurer le pouvoir temporel de la dynastie abbasside, bien que réduit à l'Irak et ses alentours.

Volten751
Niveau 5
12 juillet 2018 à 01:19:33

Le 11 juillet 2018 à 23:38:54 ShinyMetalAss a écrit :

Sinon, les Abbassides venaient à peine de renverser les Omeyyades au 8ème siècle. :hap:

Ils étaient déjà largement entré dans leur période de déclin (lequel constitue un phénomène complexe, il ne s'agit pas de se contenter de pointer du doigt les faiblesses des califes).

En quoi étaient-ils déjà entrés en déclin? À part la perte d'Al Andalus qui fut prise par Abd al-Rahmane ad-Dakhil puis du Maghreb al-Aqsa, je ne vois pas en quoi les Abbassides étaient en déclin. Peux-tu détailler s'il te plait?

ShinyMetalAss
Niveau 6
13 juillet 2018 à 19:48:21

Le 12 juillet 2018 à 01:04:31 Volten751 a écrit :
Il est vrai que malgré la fin de l'anarchie de Samarra et de la révolte des Zanj, plusieurs califes sont restés des marionnettes des turcs, qu'ils appartiennent à la garde turque, aux bouyides ou aux seldjoukides. Néanmoins, quelques califes ont pu se défaire de leur autorité, parmi lesquels ont peut citer:
- al-Mu'tadid, surnommé le deuxième as-Saffah, puisqu'il a joué un rôle important dans la répression de la révolte des Zanj et la consolidation du pouvoir califale, gravement détérioré au cours des décennies précédentes. Après je pense que son succès est surtout du aux relations forgées avec ses troupes lorsque son oncle al-Mutamid était encore calife, notamment en combattant les Saffarides et les esclaves révoltés.
- al-Muktafi, qui a mis fin à la dynastie toulounide en Égypte et a repris les villes syriennes tombées sous le contrôle des Qarmates ismaéliens.
- al-Qahir qui a pu se débarrasser de Mu'nis al-Muzaffar après avoir découvert sa conspiration. Bon après sa fin n'a rien de glorieux, mais je pense qu'il mérite d'être mentionné juste pour avoir pu éliminer Mu'nis qui était le principal responsable de la désignation des califes et de leur déposition.
- al-Qadir, qui a pu restauré le sunnisme malgré la tutelle imposée par les bouyides duodécimains, et qui a réussi à désigner son fils al-Qaim comme successeur. Chose qui était impensable à cette époque, puisque les Bouyides contrôlaient tout. Je pense même qu'il avait condamné les sectes déviantes, notamment les mu'tazilites qui avait le soutien des Bouyides, puisque on assista à la renaissance de leur pensée après son abandon par al-Mutawakkil.
- al-Muqtafi, qui a pu repousser le siège seldjoukide contre Bagdad en 1157 et restaurer le pouvoir temporel de la dynastie abbasside, bien que réduit à l'Irak et ses alentours.

Je suis assez d'accord pour dire que des califes ont tenté, parfois avec un certain succès, de se défaire de la tutelle des Turcs ou des chiites. Ceci dit :

révolte des Zanj

Laquelle s'inscrit aussi dans le phénomène de renforcement de l'influence turque, puisque les troupes qui mâtent la révolte sont composées essentiellement de cavaliers turcs, et dans une moindre mesure de fantassins slaves, dans mes souvenirs.

Je partage ton opinion concernant les succès d'al-Mu'tadid. D'accord également pour dire qu'al-Muftaki a mis fin à la dynastie toulounide (première dynastie importante de mamelouks), ceci dit celle-ci a été remplacé à peine une trentaine d'année plus tard par une autre dynastie turque, celle des Ikhshidides.

- al-Qahir qui a pu se débarrasser de Mu'nis al-Muzaffar après avoir découvert sa conspiration. Bon après sa fin n'a rien de glorieux, mais je pense qu'il mérite d'être mentionné juste pour avoir pu éliminer Mu'nis qui était le principal responsable de la désignation des califes et de leur déposition.

Oui.

- al-Qadir, qui a pu restauré le sunnisme malgré la tutelle imposée par les bouyides duodécimains, et qui a réussi à désigner son fils al-Qaim comme successeur. Chose qui était impensable à cette époque, puisque les Bouyides contrôlaient tout. Je pense même qu'il avait condamné les sectes déviantes, notamment les mu'tazilites qui avait le soutien des Bouyides, puisque on assista à la renaissance de leur pensée après son abandon par al-Mutawakkil.

Dans mes souvenirs, al-Qadir invoquait, face aux Bouyides (lesquels devait se plier à l'exercice difficile de jongler entre leurs propres convictions religieuses et un certain pragmatisme), la puissance militaire des Ghaznévides (Mahmoud de Ghazni se distingue alors en ravageant l'Inde du Nord). Hors, cette dynastie turque ne dépend qu'en théorie du califat abbasside.

- al-Muqtafi, qui a pu repousser le siège seldjoukide contre Bagdad en 1157 et restaurer le pouvoir temporel de la dynastie abbasside, bien que réduit à l'Irak et ses alentours.

Je suis d'accord.

ShinyMetalAss
Niveau 6
13 juillet 2018 à 19:58:54

Le 12 juillet 2018 à 01:19:33 Volten751 a écrit :

Le 11 juillet 2018 à 23:38:54 ShinyMetalAss a écrit :

Sinon, les Abbassides venaient à peine de renverser les Omeyyades au 8ème siècle. :hap:

Ils étaient déjà largement entré dans leur période de déclin (lequel constitue un phénomène complexe, il ne s'agit pas de se contenter de pointer du doigt les faiblesses des califes).

En quoi étaient-ils déjà entrés en déclin? À part la perte d'Al Andalus qui fut prise par Abd al-Rahmane ad-Dakhil puis du Maghreb al-Aqsa, je ne vois pas en quoi les Abbassides étaient en déclin. Peux-tu détailler s'il te plait?

Le fait que les califes aient été assez rapidement placés sous la tutelle de minorités étrangères (d'origine persane ou turque) est assez significatif. Sans parler du morcellement relativement rapide du territoire et l'établissement de dynasties autonome, même si les dynasties concernées (les Aghlabides, les Samanides, etc.) étaient nominalement les serviteurs des califes. À la décharge des Abbassides, ils ont hérité d'un domaine énorme après avoir renversé les Omeyyades. Ça n'a pas empêché le califat d'avoir ses succès, évidemment, qu'ils aient été d'ordre militaire, économique ou scientifique.

À part la perte d'Al Andalus qui fut prise par Abd al-Rahmane ad-Dakhil puis du Maghreb al-Aqsa, je ne vois pas en quoi les Abbassides étaient en déclin.

Tu m'arrêtes si je dis une bêtise, mais il me semble que le Maghreb al-Aqsa a été perdu par les Omeyyades avant leur remplacement par les Abbassides, lors de la grande révolte berbère de 740-743 (cette région n'étant pas reconquise, contrairement à l'Ifriqiya et à al-Andalus, lors de la répression de la révolte). Quand les Abbassides prennent le pouvoir, le Maghreb al-Aqsa et à tout le moins une partie du Maghreb central constituent déjà une sorte de "Far West" dans lequel se créent des États kharidjites, voire chiites (même si les Idrissides passent du zaydisme au sunnisme malékite en seulement quelques générations). Il me semble que l'autorité (strictement nominale) des califes de Bagdad n'est établie sur la région qu'au onzième siècle avec l'arrivée des Almoravides.

KunnnnaWara
Niveau 6
13 juillet 2018 à 21:20:10

Tu m'arrêtes si je dis une bêtise, mais il me semble que le Maghreb al-Aqsa a été perdu par les Omeyyades

Il n'y a pas que le Maghreb al-Aqsa (c'est à dire l'Ouest du Maghreb, donc le Maroc) qui est tombé aux mains des berbères révoltés, mais également le Maghreb al-Awsat (c'est à dire le Maghreb Central, soit l'Algérie moderne). Les Berbères ont marché jusqu'à Kairouan (en partant de Tanger, au Maroc), ils ont détruit toutes les troupes de renforts omeyyades (souvent issus de junds syriens d'ailleurs), qui avaient été envoyées de Damas pour écraser la révolte, et ont été finalement été stoppés dans leur lancée lors des batailles d'El-Qarn et El-Asnam, autour de Kairouan ou Tunis (à cause de mésententes qui existaient déjà dès l'éclatement de la révolte entre différents chefs de tribus berbères ou factions). Ce fut l'une des plus grandes révoltes auquel ont du faire face les autorités omeyyades de toute leur courte histoire, à cause de celle ci, les Omeyyades ont du stoppé momentanément leurs conquête en Sicile, ont perdu définitivement le Nord de l'Espagne (Asturies), et plus de 70% du Maghreb, et cesser leurs campagnes en Gaule. Cette révolte malheureusement totalement oubliée des consciences aujourd'hui est à l'origine de l'émergence des premiers états musulmans en dehors du califat et également des premiers états berbères musulmans au Maghreb. Les Berbères révoltés n'ont donc pas pris le contrôle de la province d'Ifriqiya.

J'espère que je me suis fait bien comprendre, si j'ai fait une erreur dites le moi

ShinyMetalAss
Niveau 6
13 juillet 2018 à 21:36:42

Oui, c'est ce que j'ai dit par

cette région n'étant pas reconquise, contrairement à l'Ifriqiya et à al-Andalus, lors de la répression de la révolte

Par ailleurs :

ils ont détruit toutes les troupes de renforts omeyyades (souvent issus de junds syriens d'ailleurs)

Tout à fait, junds syriens qui constituent d'ailleurs l'élite militaire du califat omeyyade, en particulier les cavaliers. En ce sens, leur défaite face à des Berbères sous-équipés et largement méprisés à l'époque par les Arabes, notamment lors de la bataille de Bagdoura, est une humiliation cuisante. Une partie de ces combattants réussit cependant à gagner al-Andalus, où eux et leurs descendants deviennent des partisans acharnés de la domination arabe (face aux Berbères et aux muwalladun) et des Omeyyades de Cordoue.

Cette révolte malheureusement totalement oubliée des consciences aujourd'hui

Tu veux dire au Maghreb ? C'est aujourd'hui une région largement majoritairement sunnite (et arabophone), donc peut-être évite-t-on de louer des insurgés berbères kharidjites, je ne sais pas.

KunnnnaWara
Niveau 6
13 juillet 2018 à 22:13:52

Tu veux dire au Maghreb ? C'est aujourd'hui une région largement majoritairement sunnite (et arabophone), donc peut-être évite-t-on de louer des insurgés berbères kharidjites, je ne sais pas.

Non pas forcément au Maghreb, je parle chez les berbères en général, qu'ils soient de France (comme toi peut être ?) ou au Maghreb.

Tout à fait, junds syriens qui constituent d'ailleurs l'élite militaire du califat omeyyade, en particulier les cavaliers. En ce sens, leur défaite face à des Berbères sous-équipés et largement méprisés à l'époque par les Arabes, notamment lors de la bataille de Bagdoura, est une humiliation cuisante.

Leur défaite cuisante est autant dû aux tensions entre les Arabes et Syriens, qui se détestaient (les Arabes détestaient tout les non-arabes de toute façon, c'était une époque terrible) qu'au fait qu'ils sous-estimaient les Berbères (car mal équipés, ils n'avaient même pas d'armure ! et pas d'épées), au talent militaire et stratégique des Berbères. Il est important de savoir que les Syriens étaient également méprisés par les Arabes, avec des tensions qui remontent parfois à l'Antiquité.

Il va également il y avoir une grande révolte berbère à Al-Andalus qui va être rapidement être mâter (les autorités omeyyade ont vu comment ça s'était passé au Maghreb et ont pris des dispositions), mais il y aura un changement de régime envers les Berbères et ils seront bien mieux traités.

Une partie de ces combattants réussit cependant à gagner al-Andalus, où eux et leurs descendants deviennent des partisans acharnés de la domination arabe (face aux Berbères et aux muwalladun) et des Omeyyades de Cordoue.

Exact, les syriens après avoir été battus à Bagdoura, ont été poursuivis par les berbères, jusqu'au côtes. Il faut savoir que l'émir en place à al-Andalus était opposé à ce qu'on accueille ces réfugiés au départ, car considérés comme des troubles-faits (un homme arabe sera massacré pour avoir essayer d'en nourrir un qui crevait), c'était comme des réfugiés de guerre enfaite. :hap:. Mais au final il va se décider à les prendre et les intégrer dans l'armée pour combattre les berbères révoltés. (sur ce dernier paragraphe je crois que je me trompe, ça fait plus de 5 ans que je n'ai pas lu sur le sujet).

Tu veux dire au Maghreb ? C'est aujourd'hui une région largement majoritairement sunnite (et arabophone), donc peut-être évite-t-on de louer des insurgés berbères kharidjites, je ne sais pas.

Après la révolte, les berbères vont progressivement revenir à l'orthodoxie sunnite et abandonner le kharidjisme.

volten1086
Niveau 2
13 juillet 2018 à 22:45:44

Le 13 juillet 2018 à 19:58:54 ShinyMetalAss a écrit :

Le 12 juillet 2018 à 01:19:33 Volten751 a écrit :

Le 11 juillet 2018 à 23:38:54 ShinyMetalAss a écrit :

Sinon, les Abbassides venaient à peine de renverser les Omeyyades au 8ème siècle. :hap:

Ils étaient déjà largement entré dans leur période de déclin (lequel constitue un phénomène complexe, il ne s'agit pas de se contenter de pointer du doigt les faiblesses des califes).

En quoi étaient-ils déjà entrés en déclin? À part la perte d'Al Andalus qui fut prise par Abd al-Rahmane ad-Dakhil puis du Maghreb al-Aqsa, je ne vois pas en quoi les Abbassides étaient en déclin. Peux-tu détailler s'il te plait?

Le fait que les califes aient été assez rapidement placés sous la tutelle de minorités étrangères (d'origine persane ou turque) est assez significatif. Sans parler du morcellement relativement rapide du territoire et l'établissement de dynasties autonome, même si les dynasties concernées (les Aghlabides, les Samanides, etc.) étaient nominalement les serviteurs des califes. À la décharge des Abbassides, ils ont hérité d'un domaine énorme après avoir renversé les Omeyyades. Ça n'a pas empêché le califat d'avoir ses succès, évidemment, qu'ils aient été d'ordre militaire, économique ou scientifique.

Oui tu as raison en ce qui concerne le morcellement territorial rapide, ils ont cédé l'Ifriqiya aux Aghlabides sous le règne de Harun al-Rashid, et les provinces de l'Est aux Samanides et au Tahirides sous le règne d'Al-Mamun, soit pendant la période qui est considérée comme étant l'âge d'Or du califat, voir même de la civilisation arabo-musulmane, cocasse. :hap:

À part la perte d'Al Andalus qui fut prise par Abd al-Rahmane ad-Dakhil puis du Maghreb al-Aqsa, je ne vois pas en quoi les Abbassides étaient en déclin.

Tu m'arrêtes si je dis une bêtise, mais il me semble que le Maghreb al-Aqsa a été perdu par les Omeyyades avant leur remplacement par les Abbassides, lors de la grande révolte berbère de 740-743 (cette région n'étant pas reconquise, contrairement à l'Ifriqiya et à al-Andalus, lors de la répression de la révolte). Quand les Abbassides prennent le pouvoir, le Maghreb al-Aqsa et à tout le moins une partie du Maghreb central constituent déjà une sorte de "Far West" dans lequel se créent des États kharidjites, voire chiites (même si les Idrissides passent du zaydisme au sunnisme malékite en seulement quelques générations).

Il me semble que l'émirat de Nékor était le seul état sunnite qui subsistait au Maghreb al-Aqsa après la Grande Révolte Berbère, et il y avait un autre état qui était hérétique, celui des Berghwata si je me souviens bien.

Il me semble que l'autorité (strictement nominale) des califes de Bagdad n'est établie sur la région qu'au onzième siècle avec l'arrivée des Almoravides.

Les Hammadides, qui se sont déclarés indépendants de la dynastie ziride, et qui ont régné sur le Maghreb central ont prêté le serment d'allégeance aux Abbassides bien avant la conversion d'al-Mu'izz ibn Badis au sunnisme et la reconnaissance de l'autorité religieuse et spirituelle des Abbassides par celui-ci, après pour le Maghreb al-Aqsa je pense qu'effectivement il va falloir attendre l'arrivée des Almoravides pour que l'autorité nominale des Banu Abbas soit établie dans la région, pour ensuite prendre fin avec la prise du pouvoir par les Almohades qui proclameront leur propre califat.

ShinyMetalAss
Niveau 6
14 juillet 2018 à 10:08:05

Le 13 juillet 2018 à 22:13:52 KunnnnaWara a écrit :

Tu veux dire au Maghreb ? C'est aujourd'hui une région largement majoritairement sunnite (et arabophone), donc peut-être évite-t-on de louer des insurgés berbères kharidjites, je ne sais pas.

Non pas forcément au Maghreb, je parle chez les berbères en général, qu'ils soient de France (comme toi peut être ?) ou au Maghreb.

Ah, mais je ne suis pas d'origine berbère ou même Nord-africaine de manière générale ! Je m'étais simplement intéressé à l'histoire médiévale de la région il y a quelques années. :oui:

Leur défaite cuisante est autant dû aux tensions entre les Arabes et Syriens

Les tensions entre Qaïsites et Yéménites étaient effectivement une source de conflits à l'intérieur du califat et elles ont perduré quelques temps en al-Andalus après la chute du califat omeyyade de Damas.

(les Arabes détestaient tout les non-arabes de toute façon, c'était une époque terrible)

Effectivement, le mépris des Arabes envers tous les mawali est à l'origine de la grande révolte berbère (dans l'ouest du califat) et de la révolution abbasside (dans l'est). Ceci dit, le dédain vis-à-vis des Berbères était particulièrement violent, dans le sens où les Arabes, à l'époque, n'hésitaient pas à inventer des hadiths selon lesquels Mahomet lui-même aurait considéré qu'il était légitime de les réduire en esclavage. Dans le Maghreb omeyyade, les Arabes n'hésitaient d'ailleurs pas à accuser les Berbères d'apostasie afin de les asservir, sans parler des inégalités au plan fiscal, juridique et militaire (selon at-Tabari, les combattants berbères étaient utilisés comme chair à canon par leurs émirs arabes, et pourtant touchaient une part de butin moindre que leurs homologues arabes). Le mépris vis-à-vis des Berbères a perduré après la chute du califat de Damas, puisque la plupart des auteurs arabes qui parlent d'eux le font dans des propos généralement négatifs, à l'exception notable du grand Ibn Khaldun.

qu'au fait qu'ils sous-estimaient les Berbères (car mal équipés, ils n'avaient même pas d'armure ! et pas d'épées), au talent militaire et stratégique des Berbères.

Les Berbères sont nus. La plupart d’entre eux n’ont même pas de lance - Balj ibn Bishr al-Qushayri, commandant en second des troupes arabes lors de la bataille de Bagdoura (741), décrivant ici les insurgés berbères kharidjites. Rapporté par al-Udhri, géographe et historien andalou (1003-1085).

Après la révolte, les berbères vont progressivement revenir à l'orthodoxie sunnite et abandonner le kharidjisme.

Dans une certaine mesure, oui. Néanmoins, des États berbères kharidjites continuent à exister plusieurs siècles, comme le royaume des Berghwata, des Masmuda qui pratiquaient un curieux mélange de sufrisme et de paganisme berbère.

ShinyMetalAss
Niveau 6
14 juillet 2018 à 10:26:12

Oui tu as raison en ce qui concerne le morcellement territorial rapide, ils ont cédé l'Ifriqiya aux Aghlabides sous le règne de Harun al-Rashid, et les provinces de l'Est aux Samanides et au Tahirides sous le règne d'Al-Mamun, soit pendant la période qui est considérée comme étant l'âge d'Or du califat, voir même de la civilisation arabo-musulmane, cocasse. :hap:

Al-Ma'mun a ceci dit eu un règne sous lequel la culture du monde musulman oriental commençait particulièrement brillante, il me semble. Mais là, je parle de mémoire, donc j'ai peut-être tort. Il est cependant intéressant de noter que sa tendance accrue à s'appuyer sur des Khorassaniens (auxquels les Abbassides doivent leur trône) annonce dans une certaine mesure la politique d'al-Mu'tasim. Pour Étienne de la Vaissière, la victoire d'al-Ma'mun, l' « homme des Iraniens » sur son frère al-Amin, l' « homme des Arabes », puis l'avènement d'al-Mu'tasim, ont eu des conséquences importantes pour le khalifat abbasside, à savoir la transplantation en Irak de pans entiers de la société militaire centrasiatique, en l'occurrence les aristocrates turco-iraniens, qui amènent avec eux leurs propres troupes, les fameux Shakars.

Volten1086 a écrit : Il me semble que l'émirat de Nékor était le seul état sunnite qui subsistait au Maghreb al-Aqsa après la Grande Révolte Berbère, et il y avait un autre état qui était hérétique, celui des Berghwata si je me souviens bien.

Oui, je crois aussi que c'était le seul État sunnite (d'ailleurs fondé par des Arabes) de la région. Concernant les autres États kharidjites du Maghreb al-Aqsa, il faut aussi mentionner l'existence de l'émirat sufrite de Sijilmassa, qui joue, avec l'imamat rostémide (ibadite) de Tahert, un rôle important dans le commerce transsaharien.

QunaWara
Niveau 6
16 juillet 2018 à 04:46:19

Effectivement, le mépris des Arabes envers tous les mawali est à l'origine de la grande révolte berbère (dans l'ouest du califat) et de la révolution abbasside (dans l'est). Ceci dit, le dédain vis-à-vis des Berbères était particulièrement violent

La structure ethnique d'al-Andalus durant la période omeyyade se composait d'Arabes au sommet de l'échelle sociale suivis, par ordre décroissant, de Berbères, de Muladies, de Mozarabes et de Juifs. Le dédain vis-à-vis des Berbères durant la période omeyyade n'était pas plus violent que celui vis à vis des muwallads, turcs ou des perses, et autres.
Les chrétiens convertis à l'islam ou muwallads étaient considérés comme inférieurs aux Berbères. Les muwallads ont été mis à l'écart les deux premiers siècles d'al-Andalus, alors que des berbères avaient déjà reçu dès les premières années, des hauts titres de commandement dans l'armée (Tariq ibn Ziyad par exemple, Tariq Ibn Malik, Munuza), des terres à gouverner (Munuza par exemple, qui va être nommé gouverneur de Cerdagne, on a pas l'équivalent en muwallads).

En al-Andalus, les Berbères se révoltent peu après les premiers échos des réussites de la révolte berbère au Maghreb. Cette révolte dure de 742 à 743, et est menée pour les mêmes raisons que celle au Maghreb (améliorer la condition sociale), par Abd-ar-Rahman ibn Àlqama al-Lakhmí, avec le soutient d'une tribu arabe, les baladis - les Berbères (et les Baladis arabes) malgré qu'ils ont été battus très rapidement - grâce aux junds syriens qui venaient de débarquer en mer à al-Andalus, après s'être fait battre à Bagdoura en 742 et poursuivis par les Berbères, et ont été incorporer dans les troupes andalouses par le wali, qui ne voulait pas les accueillir au départ d'ailleurs, pour contrer cette révolte - vont obtenir leurs droits, le gouvernement Arabe change de politique vis à vis d'eux. Tandis que les autres peuples persécutés par les arabes n'ont pas bougé le petit doigt, seul les Berbères se révoltaient.

( https://ca.wikipedia.org/wiki/Revolta_berber_del_Valiat_d%27Al-%C3%80ndalus ).

dans le sens où les Arabes, à l'époque, n'hésitaient pas à inventer des hadiths selon lesquels Mahomet lui-même aurait considéré qu'il était légitime de les réduire en esclavage.

J'aimerai une source car je n'ai jamais entendu parler de cette histoire

ShinyMetalAss
Niveau 6
16 juillet 2018 à 12:42:41

Le dédain vis-à-vis des Berbères durant la période omeyyade n'était pas plus violent que celui vis à vis des muwallads, turcs ou des perses, et autres.

C'est discutable. Tous les mawali étaient effectivement des citoyens de seconde zone dans le califat omeyyade de Damas. Ceci dit, le mépris vis-à-vis des Berbères a ceci de particulier qu'il a perduré longtemps après la chute de ce même califat. Je pense que tu dois connaître les principaux auteurs (essentiellement des Arabes, comme Ibn Hawqal, al-Maqdisi, al-Idrissi, al-Bakri, etc.) qui écrivent sur les Berbères après cette période, hors la plupart d'entre eux, même s'ils leur reconnaissent des qualités (courage, bonne capacité à s'organiser, etc.), portent sur eux un jugement globalement négatif. Ibn Hawqal, qui loue leur rudesse, leur volonté de s'instruire au contact des Orientaux et la pureté de leur mœurs (même s'il accuse certaines tribus de prostituer leurs enfants à leurs hôtes de marque) juge néanmoins qu'ils sont brutaux et qu'ils souffrent d'un "défaut de réflexion". Al-Maqdisis les juge "avares et rude", et c'est également peu ou prou le propos d'al-Idrissi. Des Andalous comme al-Bakri et as-Saraqusti font preuve d'un certain mépris à l'égard des Berbères (le premier admire cependant la bravoure et l'organisation militaire des Almoravides), mais il faut sans doute voir ici le dépit d'Arabes d'al-Andalus à l'idée de se retrouver sous la domination des Sahariens. De tous les grands auteurs musulmans du Moyen-Age, Ibn al-Faqih al-Hamadani et Ibn Khaldun sont, du moins à ma connaissance, les seuls à véritablement louer les Berbères.

On pourrait discuter des raisons de ce mépris. Il y a d'une part l'idée de l'époque omeyyade selon laquelle les Arabes constituent une sorte de nouveau peuple élu destiné à étendre la domination de l'islam et à dominer tous les convertis, mais ce n'est pas tout. Peut-être les circonstances de la conquête du Maghreb par les musulmans doivent-elles être prises en compte : de toutes les grandes conquêtes de la première grande période d'expansion de l'islam, c'est celle qui occasionne la réduction la plus massive des populations locales en esclavage, Mohamed Talbi estimant à plus de 400 000 le nombre de Berbères asservis par les Arabes en un demi siècle. Il faudrait aussi se pencher sur l'engouement des Berbères pour le kharidjisme, et la tendance de certains d'entre eux à mêler ce dernier à de vieilles croyances pré-islamiques, ce qui donne comme résultat la religion des Berghouata ou celle des partisans d'al-Muftari ; l'accusation d'hérésie revient assez souvent chez les auteurs arabes qui parlent du Maghreb. Roger Botte écrit que jusqu'au dixième siècle, les Berbères sont, en raison de leur origine africaine qui fait d'eux des fils de Cham, considérés comme des Noirs jusqu'au dixième siècle. C'est, par exemple, effectivement ce que semble écrire Ibn Qutayba, un grand polygraphe irakien du neuvième siècle.

En comparaison, d'autres non-Arabes sont décrits en des termes élogieux par les auteurs arabes ou persans : c'est notamment le cas des Turcs ou des Kurdes, dont on loue la bravoure et les prouesses martiales, en dépit des accusations de violence, voire de saleté (en particulier concernant les Turcs).

Les chrétiens convertis à l'islam ou muwallads étaient considérés comme inférieurs aux Berbères.

C'est exact.

J'aimerai une source car je n'ai jamais entendu parler de cette histoire

« On rapporte que le Prophète -que la bénédiction et le salut d'Allah soient sur lui- a dit : Il n'existe pas sous les cieux ni sur terre de plus méchantes créatures que les Berbères. Quand même je n’aurais rien à donner en aumône dans la voie de Dieu, si ce n’est la poignée de mon fouet, il me serait encore plus agréable de donner cette poignée plutôt que d’affranchir un Berbère » - hadith apocryphe d'époque umeyyade, rapporté par Yaqut ar-Rûmi al-Hamawî, géographe syrien d'origine grecque (1179-1229).

« On rapporte que le Prophète -que la bénédiction et le salut d'Allah soient sur lui- a dit : 'Je préfère faire l’aumône de ma seule part de nourriture que de libérer un esclave berbère » - hadith apocryphe d'époque umeyyade, rapporté par al-Qazwini, polymathe persan (1203-1283).

« Anas ibn Malik a raconté le fait suivant : 'J'ai rendu visite au Prophète (…) accompagné d'un serviteur berbère. Il me demanda : À quelle race appartient ce garçon ? - Il est berbère, répondis-je. - Vends-le, même au prix d'un dinar. -Mais pourquoi, prophète d'Allah ?, demandai-je alors. Il répondit alors : Allah avait envoyé un prophète à cette nation berbère, ils le tuèrent, le cueillirent et mangèrent sa chair ; il envoyèrent la sauce à leurs femmes ! Allah dit alors : Je ne choisirai jamais un prophète parmi vous, et je ne vous en enverrai aucun'' » - hadith apocryphe d'époque umeyyade rapporté par al-Qazwini.

Roger Botte rapporte les deux premiers de ces hadiths dans cet article :

https://journals.openedition.org/anneemaghreb/1106

[-Exoplanetes-]
Niveau 10
16 juillet 2018 à 18:48:22

Les muwallads ont été mis à l'écart les deux premiers siècles d'al-Andalus, alors que des berbères avaient déjà reçu dès les premières années, des hauts titres de commandement dans l'armée (Tariq ibn Ziyad par exemple, Tariq Ibn Malik, Munuza), des terres à gouverner (Munuza par exemple, qui va être nommé gouverneur de Cerdagne, on a pas l'équivalent en muwallads).

Les muwallads dominent également des régions entières, cf ce topic sur lequel j'ai participé sur Al-Andalus :
https://m.jeuxvideo.com/forums/42-59-56097258-1-0-1-0-l-occupation-islamique-en-espagne.htm

ShinyMetalAss
Niveau 6
16 juillet 2018 à 18:56:50

C'est vrai à partir d'un moment mais il faut je pense ajouter qu'après la répression de la sédition des Banu Hafsun et l'éviction relativement pacifique des Banu Qasi, les muwalladun sont évincés du pouvoir. Lorsque al-Andalus se fragmente en de multiples taïfas, aucun de ces petits émirats n'est contrôlé par des descendants d'Hispano-Wisigoths islamisés, alors qu'on trouve des taïfas dominées respectivement par des Arabes, des Berbères ou des Saqaliba.

[Exoplanetes]
Niveau 10
16 juillet 2018 à 19:05:21

Le 16 juillet 2018 à 18:56:50 ShinyMetalAss a écrit :
C'est vrai à partir d'un moment mais il faut je pense ajouter qu'après la répression de la sédition des Banu Hafsun et l'éviction relativement pacifique des Banu Qasi, les muwalladun sont évincés du pouvoir. Lorsque al-Andalus se fragmente en de multiples taïfas, aucun de ces petits émirats n'est contrôlé par des descendants d'Hispano-Wisigoths islamisés, alors qu'on trouve des taïfas dominées respectivement par des Arabes, des Berbères ou des Saqaliba.

Sauf qu'au moment des taifas la catégorie des muwallad perd de son sens et disparaît, vu qu'ils fusionnent avec les éléments ancien berbères et arabes. Ça n'a plus de sens de parler de mullawad voir d'arabe ou de berbères de la premières vague à ce moment. Ce sont plus des titres honorifiques/généalogiques qu'autre chose à cette période.
Les berbères et les saqallibah des taifas font surtout références aux vagues des 10ème siècle, plus récente, c'est encore différent.

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Sujet : L'affaiblissement de l'autorité abbasside
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