Bonjour tout le monde
En ce moment je m'intéresse à la question du "soi" et aux philosophies du sous-continent indien comme le bouddhisme ou l'hindouisme.
Je fais ce topic pour en discuter et si possible clarifier ma pensée en tentant de l'expliquer à d'autres personnes.
En m'intéressant au bouddhisme théravada; j'ai découvert l'idée d'anatta.
Citation wiki;
D'après la théorie bouddhique, il n'existe aucun soi (ātman) à trouver, pas d'« entité-ego », mais une simple agrégation de phénomènes corporels et mentaux conditionnés.
Anattā est souvent exposé selon la formule « Chaque chose est sans soi. ». [...] Le théravāda (ancien véhicule) distingue deux niveaux de compréhension :
- l'opinion philosophique présumant un soi ;
- la croyance trompeuse à un soi, le sentiment d'avoir un soi.
L'opinion philosophique sur l'existence du soi est aisément contredite, y compris par des non-bouddhistes. Par exemple Hume écrit dans son Traité de la nature humaine :
Je peux m'aventurer à affirmer que nous ne sommes rien qu'un faisceau ou une collection de perceptions différentes, se succédant avec une rapidité inconcevable, et qui sont dans un flux et un mouvement perpétuels.
Annihiler cette opinion ne suffit pas à supprimer le « sentiment même de soi », qui est profondément ancré et alimenté par les trois soifs (Tṛṣṇā). Selon la formule du Visuddhimagga, Seule la souffrance existe, mais on ne trouve personne qui souffre, les actes sont, mais on ne trouve pas d'acteur.
Ce qui est nié par le bouddhisme n'est pas le « moi empirique » (le corps-esprit), c'est l'opinion qu'il y a un moi permanent et autonome (âme immortelle ou principe vital). Le « moi empirique » est décomposé en cinq « agrégats d'attachement », skandha :
- Le corps (rūpa) ;
- les sensations (vedanā) ;
- les perceptions (samjñā) ;
- les « fabrications mentales » (samskāra) ;
- la conscience (vijñāna).
Ces cinq agrégats d'attachements ne sont pas « soi » ; l'opinion du soi (sakkâyaditthi), croyance erronée en l'existence de la personnalité (attā), émerge de ces cinq agrégats.
[...] Ne suivant la volonté de personne, ces agrégats [les nâma (dénominations) et les rûpa (substances)] apparaissent et disparaissent d'eux-mêmes. Si vraiment ces agrégats étaient à nous, selon notre propre volonté, nous pourrions dire : « Que mon corps ne vieillisse pas, qu'il ne tombe pas malade, qu'il ne meure pas ! » Or, ils ne se plieront jamais à notre volonté ; nous ne maîtrisons rien. C'est pourquoi nous ne pouvons pas dire que cela est notre corps, notre âme ou notre entité propre. (Sayadaw U Jatila, Enseignements sur vipassana, trad. Dhamma Sami)
Les cinq agrégats provoquent l'attachement et la croyance que ces parties sont « soi ». Selon le second discours du Bouddha (l'Anattalakkhanasutta), ces cinq agrégats ne peuvent être considérés comme un « soi » : si c'était vrai, ils mèneraient au bonheur et on en aurait la maîtrise totale, mais ce n'est pas le cas. La souffrance (dukkha) naît du fait que la croyance au soi est en contradiction avec les caractéristiques de l'existence conditionnée (impersonnalité, impermanence, insatisfaction). C'est au stade du sotapanna (première catégorie des quatre êtres nobles) que cette vue erronée est brisée.
On trouve dans le Milindapañha (livre II, 1) une métaphore comparant la personne à un char : aucun des deux n'a une existence autre que nominale, conventionnelle :
De même que la combinaison des pièces donne lieu au mot « char », ainsi l'existence des khandhas donne lieu à la convention d'« être vivant ».
Fin de citation.
Je trouvais cette idée délirante quand je l'ai découverte.. et depuis j'ai pas mal évolué.
J'y ait beaucoup réflechi, je suis aussi tombé sur des vidéos intéressantes. https://www.youtube.com/watch?v=JQVmkDUkZT4 / https://www.youtube.com/watch?v=QOCaacO8wus / sous-titres français disponibles
Que suis-je ?
Est-ce qu'un moi, un soi existe ? Si oui, qu'est-il ? Si le soi existe il ne peut pas être une âme ou une personnalité selon moi. Nos sentiments, nos préférences, nos goûts, nos souvenirs; tout ça change et disparaît mais cette expérience du soi reste. Si le soi existe, je commence à penser qu'il est notre conscience pure. Sans pensées, souvenirs, identifications... juste notre conscience qui expérimente le présent. Si Anotimas est enfant, adulte, vieillard atteint d’Alzheimer, sa personnalité change à chaque seconde, ses souvenirs, ses goûts, ses opinions aussi, son corps, tout change, rien ne reste. Mais il expérimente toujours son présent, même sous Alzheimer.
C'est à ça que je pense par conscience; une expérimentation pure, une conscience pure comme pendant une nuit sans rêve, sans temps sans cesse présente. Comme vous le voyez, c'est encore très brouillon dans mon esprit..
Freud décrit la personnalité, le ça le moi le surmoi, l'inconscient, moi je parle de l'Etre, de ce que je suis; un moi existe-t'il, si oui qu'est-il ? Je ne suis ni mon corps ni mon esprit ni mes souvenirs ni mes opinions ni mes goûts, tout ça change; je pense qu'il ne reste que la conscience pure. L'Anotimas enfant et l'Anotimas adulte n'ont ni le même corps ni le même esprit mais ils sont la même personne, qu'est-ce qui est ce moi que les deux partagent ?
Fort de toutes ces questions, j'ai découvert qu'une école de pensée philosophique hindoue avait déjà tenté d'y répondre: l'advaida védanta.
Citation wiki;
L’Advaita Vedānta (sanskrit ; devanāgarī : अद्वैत वेदान्त) est la forme la plus répandue de la philosophie du Vedānta. Advaita signifie littéralement « non deux » et se traduit le plus souvent par non-dualité. Son principe fondamental affirme la non différenciation de l'individualité ou l'âme individuelle (jīvātman) et de la Totalité (Brahman) qui est neutre. [...] L'une des personnes à qui l'on doit d'avoir consolidé les principes de l'advaita est Ādi Śaṅkara. Selon Shankara, le Brahman est l'Un, l'ensemble et la seule réalité dans le monde. En dehors du Brahman, rien d'autre, y compris Dieu, l'univers, les objets matériels et les individus, n'est vrai. Le Brahman est au mieux décrit comme la réalité infinie, omniprésente, toute-puissante, incorporelle, impersonnelle, transcendante et immanente, qui est l'essence divine de toute existence. Bien que n'étant pas une substance physique, il est la base du monde matériel, qui est sa transformation illusoire. Le Brahman est la cause du monde. On dit de lui qu'il est la connaissance la plus pure et qu'il resplendit comme une source de lumière infinie.
En raison de l'ignorance (Avidyā), le Brahman est confondu avec le monde matériel et ses objets. Le véritable Brahman est sans-attribut et informe (nirguna-Brahman). En l'être humain, il est partiellement perçu comme étant le Soi, l'Absolu et l'Impérissable (rarement objet d'adoration, mais plutôt de méditation). Le Brahman est en fait indescriptible. Shankara dit que Brahman ne peut pas être identifié avec Śūnyatā ou la vacuité du Bouddhisme. Au mieux, on le considère comme la Vérité infinie (Sat), la Conscience infinie (Chit) et la Félicité suprême (ānanda). Aussi, le Brahman transcende les différences : nul ne lui est semblable (sajatiya bheda) parce qu'il ne peut y avoir deux Brahman. Nul ne lui est différent (vijātīya bheda) car il n'y a personne existant en dehors de la réalité du Brahman. De même, qu'il n'est pas sujet à des transformations substantielles (svagata bheda). Il est Un, uni-substantiel et immuable. [...] Selon la philosophie de l'Advaita Vedānta, le Brahman est la réalité ultime. Par rapport à lui, tout autre, comprenant Dieu et le monde sont une illusion. Quand l'homme essaye de connaître le Brahman sans d'attribut avec son esprit, sous l'influence d'une puissance illusoire de Brahman, appelée la Māyā, Brahman devient le « Dieu (Īshvara) » [...] Le concept de māyā est central dans le Védanta où il désigne l'illusion cosmique, le pouvoir de création qui engendre le monde manifesté sous la forme d'un voile d'ignorance qui se surimpose à l'Absolu, Brahman. Shankara la décrit comme sans commencement, « ni être ni non-être », inexplicable (anirvacanya). [...]
Ishvara (lit., le Seigneur Suprême) : lorsque l'homme essaie de connaître les attributs de Brahman avec son esprit, sous l'influence de Māyā, Brahman est perceptible comme étant Îshvara. Ishvara est Brahman avec la Māyā. Shankara utilise la métaphore suivante : lorsque le « reflet » de l'Esprit Cosmique tombe sur le miroir de Māyā, il apparaît comme le Seigneur Suprême. Le Seigneur Suprême est vrai seulement dans le niveau pragmatique — sa véritable forme dans la sphère transcendantale est l'Esprit Cosmique.
Fin de citation.
Pour l'advaita védanta je suis encore en train de l'étudier donc je ne me prononcerai pas trop dessus.. la citation wikipédia est vraiment superficielle; sans toutes les implications qu'amène cette philosophie, et surtout sans le raisonnement et l'argumentation avancés par les "advaitistes". En effet, là ou d'autres philosophies partent "d'en haut", du postulat que tout est un, la philosophie advaita part de notre expérience, qu'elle ne nie pas au contraire; nous faisons chaque jour l'expérience de multiples objets, réalités, séparations, elle démonte un à un nos préjugés et illusions jusqu'à arriver à la conclusion de l'advaita. Je lis un livre sur ça, je recopierai peut-être un bout du raisonnement.
J'ai en tout cas découvert qu'un saint de l'advaita, Ramana Maharshi, semblait partager mon point de vue;
Citation wiki;
Il a très peu écrit et certains de ses enseignements oraux ont été retranscrits et publiés.
Pour lui, le corps physique est sans importance. Seul le Soi, pure conscience, doit être trouvé grâce à la question : « Qui-suis-je ? » (Atma Vichara). Selon cette vision, le Soi (Ātman) est imperceptible par les sens et inconcevable par l'intellect. Tandis que tout se forme, se transforme et se déforme dans l'univers, "Cela" ne meurt pas, ne naît pas et demeure en chacun.
À des questions de visiteurs, il répond « Qui pose cette question ? », afin de pousser à la méditation et à la recherche d'une véritable identité au-delà de l'illusion de l'ego.
Fin de citation.
Fait intéressant que je n'approfondirai pas trop; il semblerait (à prendre avec des grosses pincettes) que la physique quantique confirme le point de vue philosophique de l'advaita. Je lis actuellement à ce sujet L'Esprit et la Matière de Schrödinger, voir aussi du coté du Paradoxe EPR... je vous en dirai plus quand j'aurai moi même compris ce qu'il en retourne.
Bref comme vous pouvez le voir tout ça est encore extrêmement brouillon dans mon esprit, j'ai toute la vie pour chercher.
Je pose un peu ce qui me vient ici, au fil de la plume... hâte de lire vos avis/commentaires !