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Philosophie

Sujet : Nietzsche : un idéaliste ?
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HigherPower
Niveau 9
30 novembre 2017 à 10:13:40

Pourquoi Nietzsche critique Platon, Socrate, Jesus et autres en les reprochant de vouloir instaurer un idéal et des valeurs fixes pour tout le monde et de brider la volonté individuelle, lorsqu'il fait exactement pareil avec ses concepts de surhomme et de volonté de puissance ?

Nietzsche fait l'apologie de la liberté, du moi créateur qui enfante et suit ses propres valeurs comme c'est présenté dans la premiere partie d'ainsi parlait Zarathoustra, jusqu'ici tout va bien, mais le problème vient aussitôt que les valeurs qu'on défend sont contraires à l'idéal Nietzschéen de l'homme, en gros c'est : Fais ce que tu veux, à condition que ça corresponde à ce que je veux moi.

Le Chrétien, par exemple, qui s'identifie aux écrits et aux enseignements bibliques, qui pratique l'ascèse et trouve du bonheur dans la religion est étiqueté négativement et dévalué dans la philosophie de Nietzsche, de même pour celui pratique le contentement de soi, il est appelé " Dernier Homme "

Nietzsche dans son incapacité à accepter le fait qu'on puisse défendre et suivre des valeurs contraire à ceux qu'il prêche, contraire à l'idée de Surhomme ou de volonté de puissance sans pour autant être inférieur ou plus bas qu'un autre devient un idéaliste, il devient un de ces maître à penser, tout à fait détestable, qui croit connaitre ce qui est "mieux" pour les hommes.

Ne prêche pas la liberté si toute ta philosophie est faite d'interdiction, d'idéaux et de concepts qui réduisent justement la liberté qu'ont les individus de faire ce qu'ils veulent.

C'est pourquoi je préférerai toujours Stirner à Nietzsche.

Pseudo supprimé
Niveau 9
30 novembre 2017 à 12:10:42

Hmmm... J'ai pas lu Stirner mais celui-ci fait partie des sources officieuses de Nietzsche.

D'après mes lectures, Nietzsche est plutôt pour une réévaluation de toutes les valeurs. Il voulait une régénération de la culture sur le modèle de l'antiquité grecque, une nouvelle renaissance. Il voulait de nouveaux horizons pour l'humanité. Il visait très haut, voulant dépasser l'influence de Socrate et Jésus sur l'histoire de l'humanité.

Quand il traîne dans la boue ses adversaires, c'est pour rabaisser ce qui est placé le plus haut. Et inversement il rehausse ce que l'on place en-dessous comme les instincts.

HigherPower
Niveau 9
30 novembre 2017 à 13:09:38

Le 30 novembre 2017 à 12:10:42 Asticot44 a écrit :
Hmmm... J'ai pas lu Stirner mais celui-ci fait partie des sources officieuses de Nietzsche.

D'après mes lectures, Nietzsche est plutôt pour une réévaluation de toutes les valeurs. Il voulait une régénération de la culture sur le modèle de l'antiquité grecque, une nouvelle renaissance. Il voulait de nouveaux horizons pour l'humanité. Il visait très haut, voulant dépasser l'influence de Socrate et Jésus sur l'histoire de l'humanité.

Quand il traîne dans la boue ses adversaires, c'est pour rabaisser ce qui est placé le plus haut. Et inversement il rehausse ce que l'on place en-dessous comme les instincts.

C'est justement cette antinomie entre un Nietzsche idéaliste plein de projets et d'idéaux pour les hommes, la civilisation et l'humanité et un autre un Nietzsche ennemie de tous les idéaux qui fait l'apologie de la liberté individuelle, de cette volonté créatrice qui engendre et suit ses propre valeur, qui pose problème.

On ne peut pas à la fois louer l'image du moi créateur qui suit et crée ses propre valeurs :

« Peux-tu te fixer à toi-même ton bien et ton mal et suspendre ta volonté au-dessus de toi comme une loi ? Peux-tu être ton propre juge et le vengeur de ta propre loi ? »

« Créer des valeurs nouvelles — le lion même ne le peut pas encore : mais se rendre libre pour la création nouvelle — c’est ce que peut la puissance du lion. Se faire libre, opposer une divine négation, même au devoir : telle, mes frères, est la tâche où il est besoin du lion. Conquérir le droit de créer des valeurs nouvelles — c’est la plus terrible conquête pour un esprit patient et respectueux. »

Et demander ensuite à l'individu de se régler selon un model, un idéal et des valeurs extrinsèque à lui ( volonté de puissance, aspiration vers le surhomme, anti-christianisme, éternelle retour etc)

Dyck
Niveau 10
30 novembre 2017 à 13:22:42

C'est pas propre à Nietzche, tout anarchiste qui ne devient pas cadavre deviendra tyran

Un esprit libre ne peut s'accomplir qu'au sommet de la pyramide, et devenir un leader, et dans sa volonté de libérer les autres, il deviendra leur nouveau bourreau, parce qu'il croit son fouet plus tendre que le fouet du précédent

HigherPower
Niveau 9
30 novembre 2017 à 13:45:12

Le 30 novembre 2017 à 13:22:42 Dyck a écrit :
C'est pas propre à Nietzche, tout anarchiste qui ne devient pas cadavre deviendra tyran

Un esprit libre ne peut s'accomplir qu'au sommet de la pyramide, et devenir un leader, et dans sa volonté de libérer les autres, il deviendra leur nouveau bourreau, parce qu'il croit son fouet plus tendre que le fouet du précédent

Exactement, Nietzsche lui même était conscient de cela : Quiconque lutte contre des monstres devrait prendre garde, dans le combat, à ne pas devenir monstre lui-même.

Nietzsche luttait contre des idéalistes, des maître à penser, des prêtres et des prophètes et en fin de compte il est devenu un des leurs.

Dogy_Bag
Niveau 4
02 décembre 2017 à 11:12:21

Le message final délivré par Nietzsche n'est-il pas justement de s'accomplir sois-même en prenant gardes aux écueils du christianisme et autres "idoles" ? Il a délivré la pensée de ces chaînes, son message ne serait-il pas simplement un avertissement, pour ne pas retomber dedans ? Il a fait table rase, martelé la philosophie avec son marteau d'Héphaïstos, mais son message et ses préceptes ne nous mènent-ils pas à une liberté incroyable, à un véritable amour de la vie ? Il voulait peut-être simplement conservait cette liberté on nous donnant les clefs aux travers de différents concepts, comme le surhomme...

Ma lecture m'a guidé à ce niveau de compréhension pour l'instant, après je ne suis pas un spécialiste, simplement un lycéen curieux qui est réellement fasciné par ce penseur moustachu !

[zeldor]
Niveau 10
03 décembre 2017 à 16:04:45

C'est le reproche que lui fait Cioran aussi: n'avoir détruit toutes les anciennes idoles que pour en ériger de nouvelles. Je ne sais pas s'il n'y a pas une confusion quelque part honnêtement, on n'est pas obligé de découper en deux la pensée de Nietzsche comme ça. On a tendance à voir d'un côté tout le travail de déconstruction des anciennes valeurs et de l'autre le projet d'établissement de valeurs nouvelles, mais c'est aussi sur la base des valeurs nouvelles qu'il déconstruit les valeurs anciennes. Sa critique de la morale, elle se fonde avant tout sur son dégoût du dogmatisme, de l'acceptation passive des valeurs extérieures à soi, de l'effacement de soi face au reste du monde, c'est ça qu'il appelle la négation de la vie. Donc les "idoles" qu'il prône en retour, le surhomme, la morale des maîtres, c'est avant tout l'affirmation de soi et de ses instincts (pas forcément bassement animaliers), et la recherche de ses propres valeurs. Nietzsche respectait Jésus, mais détestait les chrétiens, c'est toute l'idée de sa philosophie, parce que le premier a établit ses propres valeurs là où les seconds les ont érigés en dogmes à ne pas remettre en question. A partir de là c'est difficile de lui reprocher d'être dans une approche d'idéalisme dogmatique, enfin sauf dans la mesure où il érige en dogme le non-dogmatisme mais c'est pas le genre de trucs que je trouve très intéressant, la philosophie regorge de ce genre de paradoxes.

PetitPaul1999
Niveau 10
13 décembre 2017 à 07:27:40

Le 30 novembre 2017 à 12:10:42 Asticot44 a écrit :
Hmmm... J'ai pas lu Stirner mais celui-ci fait partie des sources officieuses de Nietzsche.

D'après mes lectures, Nietzsche est plutôt pour une réévaluation de toutes les valeurs. Il voulait une régénération de la culture sur le modèle de l'antiquité grecque, une nouvelle renaissance. Il voulait de nouveaux horizons pour l'humanité. Il visait très haut, voulant dépasser l'influence de Socrate et Jésus sur l'histoire de l'humanité.

Quand il traîne dans la boue ses adversaires, c'est pour rabaisser ce qui est placé le plus haut. Et inversement il rehausse ce que l'on place en-dessous comme les instincts.

En quoi Socrate et Jésus sont-ils nihilistes ?
C'est qu'ils proposent la soumission volontaire à Dieu ?

D'après ce que j'ai lu dans Ainsi parlait Zarathoustra, Nietzsche réfute toute théorie apocalyptique et ouvre nos yeux sur le monde inoui. Il n'y aura plus d'oraisons ni d'offrandes, seuls nous-mêmes existent, disait-il.

PetitPaul1999
Niveau 10
13 décembre 2017 à 07:35:04

Le 03 décembre 2017 à 16:04:45 [zeldor] a écrit :
C'est le reproche que....

T'as l'idée de chrétiens de temps de Nietzsche ? :hap:
Ce que je découvre dans les romans classiques ( Balzac, Zora etc), c'est que les bonnes soeurs chrétiennes sont un peu bébettes. Tu trouveras un passage de deux bonnes soeurs qui obéissaient au commandement de l'officier prussien dans le roman "Boule de Suif".
Dans le bouleversement politique de 19e siècle, comme déscrivait Maupassant d'une manière sarcastique, les chrétiens faisaient leur communauté et s'isolaient du monde réel. Cette tendance de dégradation religieuse doit venir de la régne Napoléon. L'empreur a appelé Pape 2 pour son couronnement, ce qui l'a bcp humilié dans son honneur papal.

Pour moi, Nieztsche n'aimait pas le chréstianime pour ça

ggiot
Niveau 10
14 décembre 2017 à 11:32:47

Le 13 décembre 2017 à 07:27:40 PetitPaul1999 a écrit :

Le 30 novembre 2017 à 12:10:42 Asticot44 a écrit :
Hmmm... J'ai pas lu Stirner mais celui-ci fait partie des sources officieuses de Nietzsche.

D'après mes lectures, Nietzsche est plutôt pour une réévaluation de toutes les valeurs. Il voulait une régénération de la culture sur le modèle de l'antiquité grecque, une nouvelle renaissance. Il voulait de nouveaux horizons pour l'humanité. Il visait très haut, voulant dépasser l'influence de Socrate et Jésus sur l'histoire de l'humanité.

Quand il traîne dans la boue ses adversaires, c'est pour rabaisser ce qui est placé le plus haut. Et inversement il rehausse ce que l'on place en-dessous comme les instincts.

En quoi Socrate et Jésus sont-ils nihilistes ?
C'est qu'ils proposent la soumission volontaire à Dieu ?

Je ne pense pas qu'il qualifie Jésus de nihiliste, c'est plus la morale chrétienne qui l'est à ses yeux. Socrate est nihiliste selon Nietzsche car il préfère la mort à la vie («nous devons un coq à Asclèpios» = il dévalue la vie et par du principe que la mort est une délivrance, c'est idéaliser une après-vie qui n'est que néant = nihilisme).

HigherPower :d) "le problème vient aussitôt que les valeurs qu'on défend sont contraires à l'idéal Nietzschéen de l'homme, en gros c'est : Fais ce que tu veux, à condition que ça corresponde à ce que je veux moi."

Je ne pense pas que Nietzsche fasse de ses valeurs (surhomme et autre) des idéaux : en reliant sa pensée à celle de Spinoza c'est peut être plus clair : le principe n°1 de Spinoza c'est la joie mais Pierre Zaoui, à propos de cette philosophie, explique : "l’idée de joie, dès qu’elle devient objet de croyance ou de foi, nous empêche de comprendre nos joies singulières et réelles. D’un simple opérateur théorique, on fait une transcendance faussement pratique, c'est-à-dire un faux principe moral intangible : la joie, ce serait le Bien, et il faudrait donc toujours chasser ses passions tristes par des passions joyeuses. Alors que pour Spinoza, […] il s’agit de préserver l’immanence partout, même dans ses principes de vie les plus communs. En l’occurrence accepter d’être triste, quand, de fait, c’est bien le cas. ".

C'est la même chose pour Nietzsche : à partir du moment où on idéalise l'une de ses valeurs, c'est la merde, il n'idéalise rien du tout donc, même pas son surhomme. Il faut prendre la valeur, quelle qu'elle soit, pour ce qu'elle est, l'accepter, l'accueillir chaleureusement, lui dire "oui", mais pas la mettre sur un pied d'estale, car l'idéaliser revient à l'éloigner de nous, alors qu'il faut au contraire comprendre qu'elle est en nous et que c'est avec la volonté [Spinoza]//volonté de puissance [Nietzsche] qu'on peut la développer (il ne s'agit donc plus d'atteindre un idéal, mais de "devenir ce que l'on est", c'est à dire persévérer dans son être, ce qui revient au Conatus de Spinoza). En fait il combat la transcendance en faveur de l'immanence.

"Nietzsche dans son incapacité à accepter le fait qu'on puisse défendre et suivre des valeurs contraire à ceux qu'il prêche [...] devient un de ces maître à penser, tout à fait détestable, qui croit connaitre ce qui est "mieux" pour les hommes."

Le truc c'est que partout où Nitezsche à regardé, les morales étaient antinaturelles et dévalorisaient l'homme pour qu'une caste puisse s'octoyer du pouvoir (religion, société, ...) et la capacité de punir. Il refuse que l'homme se laisse emporter par le nihilisme et... c'est difficile de lui donner tort, non ? Doit-on accepter que les hommes s'enferment dans une morale qui préfère la mort à la vie et qui ne les mène qu'à leur propre détestation, à la détestation de leur monde ? Poussée à l'extrême, cette morale nihiliste amène au pire : « Voici venir la contradiction entre le monde que nous vénérons et le monde que nous vivons, que nous sommes. Il nous reste, soit à supprimer notre vénération, soit à nous supprimer nous-mêmes. Le second cas est le nihilisme. » Nietzsche, Ecce Homo. Le mec écrit ça en 1888 et prévoit ainsi les événements (je pense au terrorisme) qui adviendront un siècle plus tard : sa pensée est étayée par l'Histoire, comment lui dire "mais les hommes peuvent bien trouver leur bonheur dans la religion". Ce n'est pas un bonheur, c'est un aveu de faiblesse. Qu'y a t il de "détestable" dans sa démarche, qui consiste à dire aux hommes : "regardez, vous vous enfermez dans une morale construire contre vous, je vous propose d'en sortir et vous montre une façon de vous accepter pour vivre enfin légèrement". Il ne s'agit surement pas d'idéaliser Nietzsche, mais je trouve difficile de le qualifier de détestable. Sa philosophie, à mes yeux hein, prouve son profond humanisme et son amour inconditionnel de la vie.

Du coup comme je suis plutôt pro-Nietzsche ce serait cool d'avoir un avis divergent ^^

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Sujet : Nietzsche : un idéaliste ?
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