Se connecter

Savoir & Culture

Philosophie

Sujet : Le non être n'est pas
1
toitoine5
Niveau 10
09 novembre 2019 à 12:55:26

Je souhaitais discuter à propos de cette citation de l’énigmatique philosophe présocratique Parménide " Le non être n'est pas"
La premiers fois que je l'ai lu j'ai cru a une tautologie mais je me suis dit que ce Parménide n'etait peut-être pas si con et en creusant un peu, j'ai découvert une phrase puissante qui bouleverse l'idée de ma perception du monde. D'habitude ce que je lis des philosophes ( à part la phénoménologie) ne m'implique pas vraiment. Comme si je regardais un film dont l'histoire qui se déroule ne me regarde pas. Mais cette citation implique obligatoirement le lecteur et donc ontologiquement l'être qui observe cette citation. Pour la comprendre vraiment, d'un point de vu phénoménologique, j'ai du transformer ma perception. Parménide allait loin puisque, d’après cette déduction quasiment mathématique, il estimait que le mouvement et la mort étaient des illusions.
Je crois effectivement que l'être ne peut pas ne pas être

matrisK
Niveau 10
09 novembre 2019 à 14:39:40

pourtant c'est une posture purement logique qui nie précisément notre expérience phénoménologique, notamment notre perception du temps et du mouvement, que tu ne peux changer ou transformer (c'est-à-dire que même si tu penses que le mouvement n'existe pas, tu percevras toujours le mouvement, et tu constateras toujours empiriquement que l'être (vivant par exemple) peut ne pas être (vivant, donc peut être mort - certes pas en même temps, mais rien ne se fait en même temps puisque le temps existe, justement))

autrement dit sa citation n'est pertinente que d'un point de vue logique, pas phénoménologique, puisqu'elle revient à nier le temps, qui est pourtant au cœur de notre expérience

un autre problème avec cette affirmation "Le non être n'est pas", c'est que si on est capable de nommer le non-être, le néant, c'est soit qu'il existe, soit qu'on est capable de nommer quelque chose qui n'existe pas, et dans ce cas qui nous dit qu'on ne fait pas la même chose avec l'être ?

d'ailleurs les paradoxes de Zénon montrent les implications absurdes d'une telle position

je préfère Héraclite mais il a également tort ; Héraclite (thèse) + Parménide (antithèse) = Platon (synthèse)

toitoine5
Niveau 10
09 novembre 2019 à 14:45:34

Justement, la phénoménologie me semble nier l’expérience de la réalité en tant que phénomène sensible (sensualisme) On sait bien que l’expérience par les sens (vue,ouïe, touché, gout, odorat) varie est variable et parfois fausse mais plus fondamentalement en tant qu’expérience de conscience c a d comment l'objet en tant que concept idéal m’apparaît consciemment. L'être est un concept et l'être existe parce que j'en suis conscients .et la conscience existe par ce qu'elle est consciente de l'objet . L'acte de conscience noématique. L’expérience du temps est rythmé pas les cycles jours/nuits et des saisons mais reste malgré tout variable et flou surtout si on n'enferme seule une personne dans un endroit hermétique a tout ces stimulus.
Il existe peut-être deux plans mais l'un est probablement plus vrai que l'autre, tu ne crois pas ?

matrisK
Niveau 10
09 novembre 2019 à 15:15:32

Justement, la phénoménologie me semble nier l’expérience de la réalité en tant que phénomène sensible

? si c'était le cas elle s'appellerait pas "phénoménologie"

Il existe peut-être deux plans mais l'un est probablement plus vrai que l'autre, tu ne crois pas ?

bah ça dépend, de quels plans tu parles ?
le plan des idées intelligibles (logique/Parménide) et le plan des apparences sensibles (phénoménologique/Héraclite) comme chez Platon ?
plus vrai c'est-à-dire plus réel ? pour Platon c'est le premier plan qui constitue la vraie réalité
moi je crois plutôt qu'il n'existe qu'un seul plan

toitoine5
Niveau 10
09 novembre 2019 à 15:58:45

? si c'était le cas elle s'appellerait pas "phénoménologie"

A-tu étudié vraiment la phénoménologie? Il faut peut-être que tu m 'expliques alors. Il me semble que pour Husserl, cela ne se réduit pas a un adjectif qui consiste a décrire ce que l'on perçoit du monde sensible en suspendant les a priori mais comme je te l'ai montré la phénoménologie étudie les phénomènes de conscience en soi c a d comment la réalité apparaît dans la sphère de la conscience . La réduction phénoménologique consiste justement à pratiquer une pensée eidétique c a d a faire abstraction des contenus habituels liés au monde sensible mais aussi penser le monde sensible comme constitutif de la conscience et non le contraire comme le pensent les matérialistes . Cela revient comme pour Platon a étudier le concept de l'arbre plutot que l'arbre lui-même puisque l'arbre est une invention de la conscience . C'est dans sa sphère de perception que se situerait le réel

bah ça dépend, de quels plans tu parles ?

le plan des idées intelligibles (logique/Parménide) et le plan des apparences sensibles (phénoménologique/Héraclite) comme chez Platon ?
plus vrai c'est-à-dire plus réel ? pour Platon c'est le premier plan qui constitue la vraie réalité
moi je crois plutôt qu'il n'existe qu'un seul plan

Le plan de l’intelligible c a d le plan des idées selon Platon le monde "extérieur" n’étant qu'une projection de la conscience.

matrisK
Niveau 10
09 novembre 2019 à 16:25:42

c'est un peu un retour à la philosophie platonicienne du coup non (avec un nouveau vocabulaire) ?

xxxt3ntacion
Niveau 10
09 novembre 2019 à 16:36:00

et qu'est ce qui mène à "Le non être n'est pas" ?

matrisK
Niveau 10
09 novembre 2019 à 16:36:56

et comment t'articules ça avec la phrase de Parménide, qui n'est vraie que tant qu'il y a quelqu'un pour la prononcer, que tant que le Dasein est ?
L'être c'est la conscience de la conscience quoi, "l'être est" = je suis conscient, j'ai conscience ; "le non être n'est pas" : je ne suis pas inconscient (donc je suis conscient)

xxxt3ntacion
Niveau 10
09 novembre 2019 à 16:39:31

ça veut bien dire "tout est" ?

RedGrill
Niveau 10
09 novembre 2019 à 17:02:03

En phéno l'Être ne se résume pas seulement à une manifestation sensible, il fait aussi parti de doctrines essentialistes (cf. eidétique).

Lorsque Parménide dit que « le non-être n'est pas », cela signifie : il n'« existe » aucune sorte d'origine qui puisse résider dans l'éternité sans raison d'être.

matrisK
Niveau 10
09 novembre 2019 à 17:10:12

je pense que c'est plus un problème de philo du langage qu'autre chose en fait
la langue grecque permet de tout substantiver et nos philosophes ne s'en sont pas privés
c'est comme ça qu'à partir de choses particulières relatives et subjectives (on considère une chose bonne ou mauvaise, juste ou injuste, belle ou laide, etc.) on a fait des concepts généraux absolus et objectifs (le Bien, le Mal, la Justice, le Beau, etc.)
c'est peut-être aussi le cas de "l'Être", parce que dans la réalité le verbe être est toujours en relation avec quelque chose, il n'existe pas en soi

xxxt3ntacion
Niveau 10
09 novembre 2019 à 17:17:23

est-ce que le fait que tout soit utile implique que tout est ?

matrisK
Niveau 10
09 novembre 2019 à 17:27:03

Lorsque Parménide dit que « le non-être n'est pas », cela signifie : il n'« existe » aucune sorte d'origine qui puisse résider dans l'éternité sans raison d'être.

quelle distinction tu fais entre origine et raison d'être ?
et quelle est la raison d'être de l'origine de l'être ?

RedGrill
Niveau 10
09 novembre 2019 à 17:28:05

toitoine5 > La philosophie d'Husserl n'était pas non plus idéaliste.
Toute la phénoménologie repose sur un dualisme affirmé qui est expliqué dans les « Méditations cartésiennes ».
Et d'ailleurs Merleau-Ponty a renforcé cette vision avec le concept du corps phénoménal.

toitoine5
Niveau 10
09 novembre 2019 à 17:33:13

et qu'est ce qui mène à "Le non être n'est pas" ?

C'est de la logique pure comme le dit matrisK. Mais c'est, il me semble bien plus qu'une figure de style du langage car on parle bien de concepts. L'être est bien l'entité référente par lequel il y a observation du monde et donc de ce qui existe. "le monde existe parce que je suis la pour penser qu'il existe" Le non-être ne peut exister car cela serait une contradiction du moins par son apparence sémantique mais d’après Parménide cela semble aller plus car cela remettrait même en question de manière effective le non-être et comme tu dis "tout est" . Le non-être ne peut pas être ça n' a pas de sens et c'est pour cela que Parménide en arrive probablement a la conclusion que le non-être n'est pas.

matrisK
Niveau 10
09 novembre 2019 à 17:38:29

Lorsque Parménide dit que « le non-être n'est pas », cela signifie : il n'« existe » aucune sorte d'origine qui puisse résider dans l'éternité sans raison d'être.

et aussi : pourquoi préciser "dans l'éternité" ? enfin "résider dans l'éternité" ça veut dire quoi ? exister ?

toitoine5
Niveau 10
09 novembre 2019 à 17:57:54

oitoine5 > La philosophie d'Husserl n'était pas non plus idéaliste.
Toute la phénoménologie repose sur un dualisme affirmé qui est expliqué dans les « Méditations cartésiennes ».
Et d'ailleurs Merleau-Ponty a renforcé cette vision avec le concept du corps phénoménal.

Justement, j'ai lu Méditations cartésiennes et cela a modifier completement ce que je croyais avant de la phénoménologie par les vulgarisations qui sont souvent trompeuses ou maladroites . Je ne sais pas si c'est vraiment du dualisme d’après ce que j'ai compris car pour Husserl tout est perçu ( même la conscience) et n'existe que dans la sphère de la conscience. Cela a été une grosse galipette mentale pour finir par accepter que le monde n'existe que dans la sphère de ma conscience. Par rapport a ça il se défend de ne pas tomber dans le solipsisme très a la mode aujourd'hui avec le subjectivisme (chacun sa vérité). C'est là ou il se démarque de Descartes car pour Husserl si le réel existe bien il est quand même toujours situé dans la sphère de la conscience. La question que je posais; c'est comment distinguer dans l'espace subjectif de ma conscience? Puisque justement subjectif renvoie a quelque chose de relatif ou apriorique. De la intervient pour sortir du solipsisme, l'idée d'objectivité ou d'intersubjectivité. C'est la subjectivité première que Socrate appelait l'âme. Pour accéder a cette conscience pure, il faut procéder par réduction phénoménologique.

RedGrill
Niveau 10
09 novembre 2019 à 18:11:42

Le 09 novembre 2019 à 17:38:29 matrisK a écrit :

Lorsque Parménide dit que « le non-être n'est pas », cela signifie : il n'« existe » aucune sorte d'origine qui puisse résider dans l'éternité sans raison d'être.

et aussi : pourquoi préciser "dans l'éternité" ? enfin "résider dans l'éternité" ça veut dire quoi ? exister ?

En d'autres termes, le non-être (qui est permanent dans ce qu'il n'est pas) se conçoit uniquement dans l'éternité, mais il n'est pas considéré comme une source de « potentialité » à rester ouvert sur des possibilités. Il n'existe pas de réalité cachée qui a échoué à cause d'un mécanisme contingent.

toitoine5 > Oui nous sommes d'accord.

Pseudo supprimé
Niveau 10
09 novembre 2019 à 18:11:56

Je ne commenterai pas le fait de forcer le texte afin de lui appliquer un voile phénoménologique, c'est une lecture personnelle ; pas forcément légitime.

En revanche, je ne peux que te conseiller l'ouvrage suivant, à toi qui semble aimer ce problème métaphysique complexe et riche :

  • Laurent, Jérôme, et Claude Romano. Le Néant. Contribution à l'histoire du non-être dans la philosophie occidentale. Presses Universitaires de France, 2011
matrisK
Niveau 10
09 novembre 2019 à 18:22:27

En d'autres termes, le non-être (qui est permanent dans ce qu'il n'est pas) se conçoit uniquement dans l'éternité, mais il n'est pas considéré comme une source de « potentialité » à rester ouvert sur des possibilités. Il n'existe pas de réalité cachée qui a échoué à cause d'un mécanisme contingent.

c'est encore plus flou qu'avant

1
Sujet : Le non être n'est pas
   Retour haut de page
Consulter la version web de cette page