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Sujet : La présomption d'innocence et la chasse aux sorcières
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toto_au_bistro
Niveau 10
07 mars 2020 à 03:17:55

Wikipédia nous dit :
La présomption d'innocence est le principe selon lequel toute personne, qui se voit reprocher une infraction, est réputée innocente tant que sa culpabilité n’a pas été légalement démontrée.

Ce principe signifie que tant que le juge n’a pas tranché, je suis considéré comme innocent. Cependant, la justice peut mettre du temps à trancher. Pire, dans certains cas l’exécution de jugements peut être suspendu tant que toutes les voies de recours n’ont pas été épuisées. Ainsi, une peine d’inéligibilité peut être suspendue tant que tous les recours n’ont pas été purgés. Eh oui, si les Balkany se pourvoient en cassation ils peuvent se présenter à nouveau aux élections.

A l’inverse, avec #MeToo on peut avoir dans certains cas le sentiment d’une chasse aux sorcières. Sur la base de simples accusations, des gens voient leur carrière se briser. Placido Domingo est décommandé. Christophe Ruggia se fait virer du conseil d’administration de la société de réalisateurs de films.

Pourtant, j’ai quand même envie de trouver un équilibre. Ca ne me semble pas satisfaisant qu’on suspende notre jugement pour un édile qui cherche tous les subterfuges juridiques. Ca ne me semble pas non plus satisfaisant qu’on ne fasse comme si de rien n’était quand des dizaines de témoignages affluent sur Placido Domingo.

Alors quel équilibre trouver entre la présomption d'innocence et la chasse aux sorcières ? L'exemple des ministres mis en examen

Au préalable, je précise que je ne parle d’un équilibre juridique. Le droit est clair, tant qu’on n’a pas été condamné, on est considéré comme innocent d’un point de vue juridique. Par exemple, le droit préserve la présomption d’innocence pour les ministres en examen.

Pourtant, nous avons une règle tacite qui est qu’un ministre mis en examen démissionne. Alors pourquoi cette règle tacite ? On peut trouver différentes raisons :

  • Le ministre doit démissionner pour pouvoir se défendre correctement
  • Le ministre incarne une autorité publique et le fait que le ministre soit individuellement mis en examen peut rejaillir négativement sur l’autorité publique qu’il entend incarner
  • Le gouvernement veut prévenir les effets négatifs dans le cas où le ministre est reconnu coupable
  • On évite la collusion entre le ministre incriminé et le Garde des sceaux qui chapeaute le parquet

Ces différentes raisons sont probablement justes, mais elles sont utilitaristes et elles ne recouvrent pas à mon sens le phénomène en entier. Au fond, il s’agit aussi d’une demande des citoyens pour plus de moralité et d’exemplarité. Or, comment peut-on apparaître moral et exemplaire s’il y a suffisamment de doutes pour qu’on soit mis en examen par le pouvoir judiciaire ?

Si on revient aux artistes, qu’est-ce qui peut nous motiver à les boycotter ?

Je pense qu’on peut reprendre le critère de la mise en examen qui me semble sain. La mise en examen implique qu’il “existe des indices graves ou concordants rendant vraisemblable qu'elle ait pu participer, comme auteur ou complice, à la commission d'une infraction”.

A partir de là, on peut estimer qu’il faut décommander la personne des spectacles pour différentes raisons :

  • La personne sera mieux à même de se défendre (un peu hypocrite comme raison)
  • La mise en examen et la potentielle future condamnation peuvent rejaillir négativement sur les organisateurs et le reste du spectacle (vue utilitariste)

Mais au fond, j’ai toujours l’impression qu’il s’agit ici aussi de morale. L’artiste n’est pas le représentant d’une autorité publique, mais il est néanmoins une figure publique. Continuer à employer l’artiste pourrait être vu comme une forme de soutien et/ou de cautionnement des actes de l’artiste car il est une personnalité publique et que certains de ses actes, qui relèveraient chez les autres du domaine privé, ne peuvent être totalement séparés de sa personnalité publique. Après tout, les artistes usent bien de leur pouvoir médiatique pour mettre en lumière des causes nobles (ONG, environnement…), donc on peut tout à fait comprendre qu’à l’inverse ils pourraient être vus comme des cautions à des pratiques abjectes (viols, harcèlement…).

Enfin, cette morale publique doit être mesurée. Un artiste qui aurait été condamné et qui aurait purgé sa peine a le droit de retrouver une vie normale et une vie publique. Je n’ai pas de problème à ce que Bertrand Cantat refasse de la scène par exemple.

En résumé, voici pour moi les questions à se poser pour éviter de faire de la chasse aux sorcières sans être les idiots utiles de la présomption d'innocence :
X est-il mis en examen ?

  • Si non : On ne fait rien
  • Si oui : Est-il une personnalité publique ?
    • Si non : On s’en tient aux raisons utilitaristes (protéger les autres en écartant le suspect, éviter les retombées négatives…)
    • Si oui : On peut user de la morale publique pour ne pas qu’il y ait de doute sur une caution des actes pour lesquels il est mis en examen
thebabouche
Niveau 12
07 mars 2020 à 04:02:00

La conclusion de ton raisonnement repose sur une idée qui était vrai jusqu'à il n'y a pas si longtemps mais qui est désormais complètement fausse: qu'il existe une distinction entre les personnalité publique et les (personnalités privées ?) (personnes privées ?).

Lorsque l'essentiel de la place publique se résumait aux journaux papiers et télévisés, on pouvait en effet faire ce distinguo. Aujourd'hui, avec internet, il n'existe plus.
Toi, tu es une personnalité publique. Tu es lu par des inconnus, tu es cité, tes propos laissent une trace dans le temps long.

Toute personne s'exprimant sur internet est une personnalité publique, et il y a de toutes les nuances. Entre le mecs qui vient de débarquer et le linksthesun/cyprien, il y a tous les niveaux intermédiaires.

C'est le premier problème.
Le deuxième c'est qu'elle tamponne la chasse aux sorcières pour ceux qui sont inculpés et ne touche pas à la chasse de ceux qui ne le sont pas. Elle est donc à la fois nuisible et inutile.

Et je justifie ce que je viens de dire:

Si non : On ne fait rien

Sauf que c'est DEJA ce que dit la loi. Or, on constate que ça n'empêche pas les sjw et autre #metoo de frapper. Donc tu proposes de continuer à faire ce qui ne sert déjà à rien. (d'où : inutile)

Si oui : On peut user de la morale publique pour ne pas qu’il y ait de doute sur une caution des actes pour lesquels il est mis en examen

Ce que tu dis c'est qu'une personne publique n'a plus le droit à la présomption d'innocence. D'où le "nuisible".
Note une petite chose: pourquoi cela pose-t-il problème qu'il y ait "doute sur une caution des actes" ?
Réfléchis 30 secondes à ça.
Ca pose problème parce que ... eh bien parce que si on à ce doute, on va le traiter comme coupable de caution de ces actes. C'est-à-dire que celui qui ne se prête pas à la chasse aux sorcières devient lui-même l'objet de cette chasse. Jusque là probablement rien de nouveau sous le soleil, mais alors que devient ton premier point ? Parce que même si on le considère comme coupable il n'a pas été mit en accusation. Et donc, selon ton premier point, s'il n'est pas mit en accusation (d'être caution de ces actes, donc) il ne faut pas le traiter différemment de s'il était innocent.

La distinction que tu fais n'a pas lieu d'être. La chasse aux sorcières s'en contrefout de la justice, et ce n'est même pas un problème de lenteur de la justice, puisqu'une personne reconnue innocente peut encore être considérée comme coupable par beaucoup.
Et peut-on vraiment leur donner tort ?
"Selon que vous serez puissant ou misérable Les jugements de cour vous rendront blanc ou noir." (la fontaine, bien sur).
C'est pas nouveau cette histoire. On dispose d'une justice qui exige d'être respectée, et ce sans avoir un comportement respectable.

Tu parles de la lenteur des jugements, mais on bien vu cette lenteur lorsque c'est un puissant s'en prenant à un petit.
https://www.lexpress.fr/actualite/societe/pourquoi-le-gifleur-de-valls-a-t-il-ete-juge-si-rapidement_1870720.html

Là d'un coup c'est expéditif. Kom cé bizar.
A côté je ne parlerais pas du déplorable exemple que donne la justice en ce moment avec les policiers et les gilets jaunes.

Les gens se sentent plongés dans un monde d'injustices où là Justice a non seulement cessé d'être de leur côté mais participe au problème. Ca n'a rien d'étonnant que derrière on voit resurgir des comportements de meute comme la chasse aux sorcières.

Julien-Gracq7
Niveau 8
07 mars 2020 à 09:52:00

C'est un sujet qui m'intéresse énormément, ayant déjà été confronté à des oeuvres produites par des contemporains ayant commis des actes criminels et proprement abjects.

Le développement est intéressant, cependant je ne suis pas vraiment d'accord avec le "si non" que tu utilises en premier point, ou du moins ta règle n'est véritablement pas absolue : en effet, il n'est pas besoin d'une mise en examen devant la justice pour reconnaître que Gabriel Matzneff, par exemple, écrivain pédophile patenté, qui décrivait dans ses romans et journaux publiés ses relations sexuelles avec de jeunes filles et de jeunes garçons (notamment son tourisme sexuel en Asie auprès d'enfants de 9-11 ans), est un authentique criminel et un être abject.

Il est difficile de ne rien faire, il est difficile d'admettre également que les éditeurs ont sciemment publiés cela, et que les lecteurs ont délibérément lus son oeuvre, qui est très explicite, très claire, et ne laisse aucun doute sur la véracité de ses pratiques.

Partant de là, la mise en examen est récente, mais à quoi est-elle dûe ? A l'action d'un auteur qui a clamé haut et fort avoir été abusé par lui, et comment. Il a donc agi avant qu'il ne soit mis en examen, ainsi que de nombreux lecteurs avaient agis en le dénonçant sur des réseaux sociaux, ou en prenant l'engagement personnel de ne jamais plus toucher à ses oeuvres.

Dans ce cas-ci on ne peut vraiment parler de chasse aux sorcières puisque c'est une victime qui est revenu sur la scène des années après, mais aurions-nous pu blâmer ceux qui, par exemple, auraient contacté la maison d'édition ? ou l'écrivain ? ou l'auraient affiché sur les réseaux sociaux ou dans la presse, dans sa qualité de pédophile ?

Et peut-on blâmer ceux qui voudraient savoir qui est son éditeur, et qui sont ses amis qu'il décrit comme pratiquant des même actes, tous ces gens qui possèdent les même goûts ou l'ont sciemment protégés ? N'est-ce pas agir en citoyen que de se conduire ainsi ?

Seulement voilà, il faudrait alors accepter les potentiels débordements que toute action citoyenne ne peut manquer de susciter, à savoir qu'un innocent puisse être inquiété pour sa réputation, être pris dans la masse des salopards. Pour autant, faut-il ne rien faire lorsque l'on sait, de peur des débordements ?

Au final, je crains qu'il n'y ait aucune conduite bonne et saine dans l'absolu, mais seulement des individus qui se doivent être suffisamment raisonnables pour engager une action citoyenne là où la justice ignore ou tourne le dos, et de ne pas commettre de chasse aux sorcières, qui se caractérise par l'apparition d'éléments virulents suscitant l'hystérie collective.

matrisK
Niveau 10
07 mars 2020 à 10:58:03

en effet, il n'est pas besoin d'une mise en examen devant la justice pour reconnaître que Gabriel Matzneff, par exemple, écrivain pédophile patenté, qui décrivait dans ses romans et journaux publiés ses relations sexuelles avec de jeunes filles et de jeunes garçons (notamment son tourisme sexuel en Asie auprès d'enfants de 9-11 ans), est un authentique criminel et un être abject.

Je connais ni le bonhomme ni l'affaire, mais je pense pas qu'un livre ou plus généralement une œuvre d'art soit une preuve suffisante de culpabilité, sinon il faudrait incriminer Nabokov pour son Lolita ou l'auteur de cette chanson https://www.youtube.com/watch?v=ppnmlPUr5gk par exemple - et même tous les auteurs qui racontent l'histoire d'un crime quelconque en fait, ça devient vite absurde
Tu peux jamais savoir devant un livre si ça relève de la fiction ou de la réalité, il faut des preuves extérieures, des accusations réelles, de personnes réelles

Second point : est-ce qu'un français peut être mis en examen en France pour actes de pédophilie à l'étranger (tourisme sexuel en Asie auprès d'enfants de 9-11 ans) ?

Julien-Gracq7
Niveau 8
07 mars 2020 à 12:51:07

Le 07 mars 2020 à 10:58:03 matrisK a écrit :

en effet, il n'est pas besoin d'une mise en examen devant la justice pour reconnaître que Gabriel Matzneff, par exemple, écrivain pédophile patenté, qui décrivait dans ses romans et journaux publiés ses relations sexuelles avec de jeunes filles et de jeunes garçons (notamment son tourisme sexuel en Asie auprès d'enfants de 9-11 ans), est un authentique criminel et un être abject.

Je connais ni le bonhomme ni l'affaire, mais je pense pas qu'un livre ou plus généralement une œuvre d'art soit une preuve suffisante de culpabilité, sinon il faudrait incriminer Nabokov pour son Lolita ou l'auteur de cette chanson https://www.youtube.com/watch?v=ppnmlPUr5gk par exemple - et même tous les auteurs qui racontent l'histoire d'un crime quelconque en fait, ça devient vite absurde
Tu peux jamais savoir devant un livre si ça relève de la fiction ou de la réalité, il faut des preuves extérieures, des accusations réelles, de personnes réelles

Dans le cas de Matzneff c'est simple : il l'assumait ouvertement dans des plateaux-télé et n'a jamais caché que ses bouquins étaient des journaux intimes.

Dans l'absolu, si on ne peut démêler avec certitude si passage à l'acte il y a eu à travers les oeuvres d'un artiste, on peut au moins reconnaître sans difficulté le caractère pédophile de celui qui écrit : ils emploient vraiment tous un vocabulaire particulier pour désigner l'enfant que n'emploierait pas un homme lambda même en tentant de mimer la pédophilie, de même que le ton est particulier quand il s'agit de décrire leurs désirs, ils ont une manière d'exprimer leur fascination (que je ne saurais préciser mais qui se ressent) qui est très éloignée de la manière dont le font ceux qui ne sont pas pédophiles.

Un exemple : Alain Robbe-Grillet, j'ai reconnu sans difficulté le pédophile qui se cachait derrière l'auteur sans aucune difficulté avant la moindre scène d'abus sexuel dans un de ses ouvrages. La seule manière dont il introduit le personnage de la gamine me l'a fait comprendre. Et après vérification : j'ai trouvé un article dans lequel il revendique clairement son attachement pour les gamines et, en fonction de ce qu'il décrit dans le bouquin, je ne doute aucunement qu'il en a abusé et qu'il connait des pédophiles dans son entourage.

Second point : est-ce qu'un français peut être mis en examen en France pour actes de pédophilie à l'étranger (tourisme sexuel en Asie auprès d'enfants de 9-11 ans) ?

Dans une certaine mesure j'imagine que oui. Normalement la lutte contre le tourisme sexuel est lancée depuis deux bonnes décennies, donc il doit y avoir un minimum d'arsenal juridique.

toto_au_bistro
Niveau 10
07 mars 2020 à 13:16:15

@ thebabouche : La distinction public/privé existe toujours en droit. Pour les personnalités publiques, on présume qu'ils consentent à leur droit à l'image par exemple. Alors que pour moi, il n'y a pas cet accord tacite pour moi. Quand bien même les outils facilitent la confusion des deux, on peut toujours décider de ne pas brouiller les deux. Et c'est ce que je propose. Alors je pisse peut-être dans un violon en proposant ça, mais c'est aussi une responsabilité collective de chacun et c'est pour ça que je propose d'appliquer quelques questions simples. Tu me reproches d'emblée de proposer un truc qui ne correspond pas à la réalité, ben oui je propose de changer le fonctionnement actuel et les chasses aux sorcières.

Et je ne dis pas qu'une "personne publique n'a plus le droit à la présomption d'innocence". Je distingue le concept juridique et une sorte de morale publique. D'un point de vue juridique tout le monde est réputé innocent avant d'être condamné. Par contre, je peux reporter mon envie d'aller voir Placido Domingo jusqu'à ce qu'il soit considéré comme innocent. Ce n'est pas une mesure juridique, c'est ce que j'ai appelé la morale publique. Je peux considérer qu'aller voir un artiste qui harcèle des gens, c'est une forme de caution. Donc jusqu'à ce que l'affaire soit jugée, je peux suspendre toutes mes actions vis-à-vis de cet artiste.

toto_au_bistro
Niveau 10
07 mars 2020 à 13:30:04

@ Julien-Gracq7 : Sur Matzneff, il y a le délai de prescription qui joue. Pourquoi est-ce qu'on a un tel délai ? Parce qu'il est difficile de se défendre ou de prouver quelque chose pour des faits qui datent de 30 ans. Alors on peut critiquer le système judiciaire pour n'avoir rien fait il y a 30 ans, mais aujourd'hui s'il y avait les mêmes éléments j'ai peu de doute que Matzneff serait dans la merde. Mais là si je comprends bien, il est visé par deux enquêtes maintenant, donc je pense qu'il rentre dans mon cadre de boycott.

P.S. J'ai repris l'idée de la mise en examen, mais je suis pas juriste et il y a des subtilités. Il est très facile de mettre en examen quelqu'un en l'attaquant pour diffamation. Donc il faudrait aller plus dans le détail pour avoir quelque chose de solide.

xxxtentavenom
Niveau 10
07 mars 2020 à 14:15:50

il y a pas matière à topic
la présomption d'innocence est extrêmement importante et logique, et quiconque voudrait l'ébranler
ne serait que corrompu.
bruler le concerné sans preuve c'est effectivement tuer jeanne d'arc

mais comme tu dis on ne voudrait pas être idiot utile d'un flottement de doute
mais tu oublies une symétrie :
on ne voudrait pas être idiot utile d'allégations infondés qu'un quelconque sot pourrait émettre.

Un artiste qui aurait été condamné et qui aurait purgé sa peine a le droit de retrouver une vie normale et une vie publique

euh non , pas si vite, la peine peut être inférieur au crime

matrisK
Niveau 10
07 mars 2020 à 14:17:22

Dans une certaine mesure j'imagine que oui. Normalement la lutte contre le tourisme sexuel est lancée depuis deux bonnes décennies, donc il doit y avoir un minimum d'arsenal juridique.

En effet https://fr.wikipedia.org/wiki/Tourisme_sexuel#La_lutte_contre_le_tourisme_sexuel_impliquant_des_enfants : "Pour contrer ce phénomène, des pays (comme le Canada, la France et la Belgique) ont adopté des lois d'exception permettant de punir eux-mêmes leurs ressortissants lorsqu'ils ont eu de telles relations dans un pays étranger, voire se sont dotés d'une compétence dite universelle afin de punir eux-mêmes quiconque se trouve sur leur territoire et a commis un tel délit à l'étranger"

Mais du coup pourquoi les déclarations de Matzneff sur les plateaux-télé ne pourraient pas être considérées comme des aveux et donc être utilisées comme preuve ?

toto_au_bistro
Niveau 10
07 mars 2020 à 14:29:14

Le 07 mars 2020 à 14:15:50 xxxtentavenom a écrit :

Un artiste qui aurait été condamné et qui aurait purgé sa peine a le droit de retrouver une vie normale et une vie publique

euh non , pas si vite, la peine peut être inférieur au crime

J'ai pas compris.

xxxtentavenom
Niveau 10
07 mars 2020 à 14:39:30

Le 07 mars 2020 à 14:29:14 toto_au_bistro a écrit :

Le 07 mars 2020 à 14:15:50 xxxtentavenom a écrit :

Un artiste qui aurait été condamné et qui aurait purgé sa peine a le droit de retrouver une vie normale et une vie publique

euh non , pas si vite, la peine peut être inférieur au crime

J'ai pas compris.

bah imaginons qu'on pose que le crime mérite peine de mort,
en france tu ne peux avoir cette peine,
le prisonnier est relaché,
et tada, la peine est inférieur au crime
ne se fut-ce le cas, il aurait été pendu

matrisK
Niveau 10
07 mars 2020 à 14:42:05

bah imaginons qu'on pose que le crime mérite peine de mort,

C'est qui "on" ?

en france tu ne peux avoir cette peine,

Parce que "on" a posé que le crime ne mérite pas peine de mort

toto_au_bistro
Niveau 10
07 mars 2020 à 14:46:48

@ xxxtentavenom : Je parle du système judiciaire. Quand quelqu'un a purgé sa peine dans le système judiciaire, il a le droit à l'oubli. Si tu penses qu'il méritait la peine de mort, ben je m'en fous. On est dans un état de droit. Les sanctions pénales ont été choisies dans un cadre démocratique. Si tu veux continuer à pénaliser un mec qui a purgé sa peine, alors soit ton système judiciaire est nul et il faut que tu le changes, soit tu veux juste te venger et alors ce que tu proposes n'a rien à voir avec la justice.

xxxtentavenom
Niveau 10
07 mars 2020 à 14:51:24

C'est qui "on" ?

demos

Parce que "on" a posé que le crime ne mérite pas peine de mort

et pourtant une portion très considérable voudrait arracher l'ame d'un terroriste jihadeur
faut savoir

xxxtentavenom
Niveau 10
07 mars 2020 à 14:54:46

Je parle du système judiciaire

je sais mais c'est injuste,
tu restes dans le système alors, et tu n'entretiens rien de fondamental qui dépasse le cas français

alors soit ton système judiciaire est nul

d'un seul coup comme ça tu le qualifie de nul ,
maintenant tu vas me dire pourquoi

Si tu penses qu'il méritait la peine de mort, ben je m'en fous.

mais c'est pas moi , c'est demos
et tu es dans demos, et au cas où demos te submerge, c'est de ton avis dont on se fout

toto_au_bistro
Niveau 10
07 mars 2020 à 14:58:37

Pourquoi tu m'opposes le demos alors que je te parle de démocratie. On est dans un système où c'est le peuple qui décide des sanctions. Donc soit ta démocratie est foireuse et tu te retrouves avec un système pénal qui ne répond pas aux souhaits du peuple et alors tu le changes. Ou bien tu es juste dans une logique de vendetta et alors ce que tu proposes n'est pas de la justice.

matrisK
Niveau 10
07 mars 2020 à 16:19:53

Le 07 mars 2020 à 14:51:24 xxxtentavenom a écrit :

C'est qui "on" ?

demos

Parce que "on" a posé que le crime ne mérite pas peine de mort

et pourtant une portion très considérable voudrait arracher l'ame d'un terroriste jihadeur
faut savoir

si c'est le cas la seule conclusion qui s'impose c'est qu'on est pas en démocratie (ou qu'elle ne fonctionne pas, ce qui revient au même)

Agraf
Niveau 10
07 mars 2020 à 18:13:58

Je pense qu'il y a une erreur dans ton raisonnement.

Tu opposes la présomption d'innocence d'un côté et la chasse aux sorcières de l'autre. Comme s'il fallait trouver un juste équilibre entre les deux.

En fait, la chasse aux sorcières est une attaque contre le principe de la présomption d'innocence ; et une attaque contre le système juridique lui-même, qui est perçu comme corrompu.

La chasse aux sorcières c'est dire "Si nous ne faisons pas justice nous-même, personne d'autre ne le fera"
Tolérer ne serais-ce qu'une once de chasse aux sorcières dans une société, c'est tolérer que le système judiciaire ne repose plus sur un large consensus. C'est terrible !

La vrai question c'est plutôt "Pourquoi est-ce que les gens qui partent à la chasse aux sorcières ne croient plus dans le système de la justice ?" Est-ce que la critique est fondée, comment y répondre ?

Par exemple lorsque l'on apprend que le "suspect" lors d'un attentat avait déjà un casier judiciaire long comme le bras et qu'il aurait du être en prison au moment des faits, on peut se poser plusieurs questions :

Est-ce que les juges ne devraient pas être sanctionnés lorsqu'ils relâchent des gens dangereux à répétition ?
Pourquoi est-ce que les gens qui sont condamnés à de la prison n'y vont pas en dessous de certaines peines ?

Ça amène à se demander mais pourquoi les prisons sont surchargées, est-ce que nous avons une population de sauvage, est-ce que certaines lois créent des criminels qui n'auraient pas lieu d'être etc.

On entre dans une démarche de réflexion qualitative.

Moi-même, je ne fais pas particulièrement confiance à la justice, j'ai l'impression qu'elle est assez politisée sur certains domaines, très laxistes dans d'autres ou encore injustement sévère par moment. Mais au fond je n'y connais rien. Je crois qu'aucun effort d'éducation populaire n'est fait sur ces sujets, qui demeurent des débats de spécialistes et d'experts alors qu'en vérité, eh bien nul n'est sensé ignorer la loi.

...

Alors quel équilibre trouver entre la présomption d'innocence et la chasse aux sorcières ? L'exemple des ministres mis en examen

L'exemple des ministres mis en examen me semble bon parce qu'au final, quand un ministre est mis en examen, on se moque bien de savoir s'il est coupable ou non : on le chasse parce que c'est une sorcière ! On le sait que c'est une sorcière, c'est quand la dernière fois qu'un ministre a agit dans notre intérêt ?

Donc la "présomption d'innocence" n'est qu'une pleutre défense. Il s'agit de dire "sur ce sujet là, je ne suis peut-être pas coupable" mais les gens savent bien que sur tous les autres sujets, tous ceux pour lesquels légalement ils ne peuvent rien faire, le type est coupable.

La chasse aux sorcières n'est donc pas un mouvement contraire à celui de la présomption d'innocence. La présomption d'innocence est une tentative de détourner le sujet qui est mis en lumière par la chasse aux sorcières, c'est-à-dire dans ce cas sur l'illégitimité de la politique.

...

Si on revient aux artistes, qu’est-ce qui peut nous motiver à les boycotter ?

Soit le sentiment que l'institution de la Justice est illégitime et qu'il faut en conséquence que nous soyons juge et bourreau.
Soit un sentiment de narcissisme exacerbé qui nous fait secrètement penser que boycotter un artiste c'est entretenir une sorte de rapport spécial avec lui.

toto_au_bistro
Niveau 10
07 mars 2020 à 18:34:58

J'ai pas l'impression qu'on parle de la même chose. La chasse aux sorcières pour moi, c'est de prendre pour argent comptant des accusations et de détruire la vie de quelqu'un par le même processus. On voit bien avec cette définition que la présomption d'innocence n'est pas respectée.

Ma proposition qui à mon sens ne viole pas la présomption d'innocence, c'est de distinguer deux niveaux :

  • Le niveau juridique : à ce niveau tout le monde est présumé innocent
  • un niveau qu'on pourrait appeler "social" où sans violer le niveau juridique on choisit de décommander des artistes ou de faire démissionner des ministres parce qu'ils sont des personnalités publiques et que leurs actions privées ne peuvent être clairement séparées de leurs actions publiques

Et j'ai proposé de subordonner le second niveau à la mise en examen pour avoir un garde fou suffisamment solide. Je sais pas si c'est plus clair dit comme ça ?

xxxtentavenom
Niveau 10
07 mars 2020 à 19:22:32

où c'est le peuple qui décide des sanctions.

ça c'est pas vrai

soit ta démocratie est foireuse et tu te retrouves avec un système pénal qui ne répond pas aux souhaits du peuple et alors tu le changes. Ou bien tu es juste dans une logique de vendetta et alors ce que tu proposes n'est pas de la justice.

je propose rien, je te montre juste que demos a un gout amer parce qu'il estime dans bien des cas
que la peine est inférieure au crime , ça ne vient pas de moi, et il n'y a aucune sorte de relent de vendetta ici

si c'est le cas la seule conclusion qui s'impose c'est qu'on est pas en démocratie (ou qu'elle ne fonctionne pas, ce qui revient au même)

ainsi soit il , moi ce qu'il m'intéresse de dire à toto est que notre système a des sentences inférieures aux crimes
et que se dire "il a purgé donc il est légitime dans la banalité de la vie" systématiquement est débile puisque selon moi
on est légitime que si notre sentence est à la hauteur du crime ...
le laxisme est rompant et ci et ça ...
mais je cherche aussi à aller au delà , parce que sinon c'est juste ridicule de s'enfermer
dans le carcan de la justice française sur le forum de phi

même si je sais que les carcans c'est une signature de toto
la rigidité de toto en écriture affect sa pensée violemment, mais pas dans le bon sens

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Sujet : La présomption d'innocence et la chasse aux sorcières
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