Le Village Moga :
- Ryuk on..
- Je sais.
- Non mais nous allons dans la mauvaise direction.
- Je sais, répondit Ryuk pour la deuxième fois avec sa froideur habituelle.
Rokdur haussa ses larges épaules, accompagné d'un signe de négation de la tête.
- Mais, Skell et Edwin..
- Ils survivront.
Rokdur s'étonna de se heurter à ce mur d'impassibilité. Ryuk n'avait jamais été très causant, mais tout de même. Il observa ses yeux en amande dans lesquels se reflétait la lumière du jour levant dans un scintillement azur. Un teint sanguin ornait le blanc de ses yeux. Une mèche blanche soulignait ses sourcils décidés, froncés. Rokdur se décida à lui parler.
- Raconte moi tout, vieille branche, commença t'il d'un ton enjoué. Où va t'on ?
- Au village qui a vu mes premiers pas.
- Je croyais que tu avais été élevé par des Amatsu ?
- Pas à l'aube de ma vie, grinça Ryuk en serrant ses rênes dans sa main. On arrive.
En effet, en contrebas se dressait une immense palissade en bois noir, tandis qu'eux même se dressaient sur une colline fièrement perchée au dessus du vide.
En contrebas se dessinaient des hordes d'Aptonoths broutant paisiblement l'herbe verdoyante qui glissait le long du flanc d'une montagne. La mer, véritable étendue de saphir scintillante, faisait rouler ses vagues sur son côté. Le soleil à peine éveillé se reflétait sur sa surface, ses rayons se perdant parfois sur le dos d'un épioth qui sortait sa tête curieuse.
- C'est splendide, souffla Liam, émerveillée.
- Des épioths ! Cria Nyan qui ne pensait guère à autre chose qu'à son ventre. Tu penses qu'ils en vendent dedans ? Demanda t'il à Pigos.
Ce dernier ne répondit pas. Son armure de fer frappée du sceau des Terres Riches le dérangeait.
- Nous la changerons, dit Ryuk sans se retourner.
Pigos sursauta. Mais comment diable..
- Et je changerai la mienne aussi. J'ai beau avoir la peau dure, je doute que ce soit suffisant pour battre l'Alatreon.
- Tu penses à quoi ? Demanda Rokdur alors qu'ils avançaient vers la palissade.
- J'ai des ressources dans la banque de ce village, dit il en regardant patiemment un kelbi qui le fixait de ses grands yeux innocents. Je dois avoir des bouts d'Akantor et d'Ukanlos pour Pigos, ainsi que des gemmes.
Ce dernier prit une mine gênée. Ryuk se retourna, étonné.
- Qu'y a t'il ? L'interrogea t'il.
- Je suis un humble garde, bafouilla Pigos, une armure en Ukanlos est bien trop prestigieuse pour moi.
Ryuk eut un léger sourire avant de se retourner sur sa selle. Pigos jeta un coup d'oeil plein d'interrogation à Liam auquel elle répondit :
- Il t'aime bien, dit elle avec un grand sourire.
- Pigos, dit soudainement Ryuk alors qu'ils arrivaient au pied de la palissade. A côté de moi. Liam, derrière moi, avec Rokdur. Judith, tu fermeras la.. Où est Judith ?
Les compagnons s'interrogèrent du regard. Elle avait disparu sans qu'aucun d'eux ne le remarque, s'évanouissant dans la nature comme une ombre. Ryuk cracha un juron entre ses dents serrées.
- Bon, Rokdur et Liam fermeront la marche. Rokdur, veille sur Skull.
- Pourquoi une telle formation ? L'interrogea le forgeron, son front ridé plissé en une mine soucieuse.
- Le Village Moga est devenu mal famé depuis la mort de mes parents adoptifs, grommela Ryuk.
Il descendit de son cheval en un saut élégant. Il assena deux légers coups à une porte dérobée de la palissade. Un pan de cette dernière coulissa, laissant apparaître le visage d'un homme passablement saoul.
- C'est pour quoi ? Marmonna t'il.
- Ouvre la porte, vieil ivrogne, grogna Ryuk.
L'homme plissa les yeux :
- Cette voix.. Ryuk ?
- Ouvre.
- Ok, ok, dit l'homme en s'affairant d'un ton geignard.
Le pan se referma, et la palissade s'ouvrit en deux, coulissant vers l'intérieur dans un grincement de bois fatigué. Ryuk remonta sur son cheval sans daigner utiliser les étriers et talonna légèrement les flancs de sa monture. La troupe pénétra dans le village.
Ryuk fronça les sourcils. La situation ne s'était pas améliorée. Une odeur de pourriture et de saleté emplissait l'air. Des enfants pieds nus couraient sur le port, le visage crasseux. Des rues sombres, autrefois éclairées par de petites lanternes, s'étendaient au travers du village telles une toile d'araignée. La pauvreté semblait faire partie intégrante du village. L'on pouvait voir ça et là des magasins fermés, condamnés par de lourdes planches en bois. Les villageois avaient les traits tirés et le visage fermé dans une expression de fatigue intense, une dague toujours à portée de main. Certaines baraques avaient la toiture defoncée, d'autres avaient été réparées à la va vite, les poutres sortant des tuiles comme une fracture ouverte.
- Mon dieu.. Souffla Rokdur.
- Il faut avancer, dit Ryuk.
- Ryuk ! Cria une voix éraillée.
Le Saigneur se retourna. Le chef du village, richement paré, avançait vers lui au bras de deux jeunes femmes, elles même parées de vêtements laissant transparaître leurs courbes.
- Töndrel, dit Ryuk de sa voix basse et rauque, d'un air menaçant.
- Depuis quand as tu des amis ? S'exclama t'il d'un ton enjoué. On ne t'avait pas revu depuis... Depuis quand déjà ?
- Depuis l'assassinat de mes parents.
- Exact, exact ! Approuva le vieil homme sur le même ton enjoué. J'ignorais que tu avais succombé au plaisir de la chair.. Continua t'il en jetant un oeil gourmand à Liam,la déshabillant du regard.
Ryuk sentit sa patience partir en fumée. Il descendit de sa monture, et attrapa Töndrel par le col,repoussant les deux prostituées.
- J'ignorais que le chef du village Moga s'était abandonné à la luxure et s'enirichissaient sur le dos des habitants qui crèvent de faim ! Hurla t'il.
Des gardes s'approchèrent d'un air belliqueux mais se heurtèrent à Pigos. Le titan croisa les bras, un sourire affable sur le visage. Les gardes reculèrent prudemment.
- Mais.. Je.. Grommela le chef.
- La prochaine fois que tu jettes ce regard sur Liam, tonna Ryuk, je te brise la nuque de mes mains. Depuis quand le grand Töndrel laisse son village s'évanouir sous la coupe du vice et de la décrépitude ? Depuis quand ?!
-C'est compliqué...
- Ryuk, dit une voix féminine tandis qu'une main légère se posait sur son bras.
Ryuk relâcha le vieil homme qui s'écroula sur le sol, et se retourna, tombant sur le regard émeraude de Judith.
- Je crois que tu ferais mieux de m'accompagner, dit elle, c'est urgent.
), il te suivrait au moins depuis la beta.
