- Le ministère fait aussi très attention à Londumor… dit Kingsley.
- Comment ? s’étonna Harry.
- Londumor est un cimetière de sorciers, expliqua Hermione.
Cela faisait maintenant très longtemps que Harry n’avait plus eu de surprise due à son enfance chez les moldus. Mais il ignorait totalement qu’il existait un cimetière des sorciers.
- Si vous voulez mon avis, c’est une perte de temps, grogna Maugrey. Vous-Savez-Qui a déjà à sa disposition tous les cimetières moldus, il ne va pas aller piocher dans le seul qu’on puisse vraiment protéger.
La réunion se termina et ils sortirent de la Salle.
Ils se couchèrent immédiatement, et Harry dut encore tourner la tête afin d’éviter de voir Ron et Hermione s’embrasser pour se souhaiter une bonne nuit. Quelle ironie du sort… Harry et Ginny qui se trouvaient dans une situation plutôt critique tandis que Ron et Hermione filaient le parfait amour… C’était vraiment le monde à l’envers. Le pire, se dit Harry, c’était qu’il n’y pouvait rien, on les avait forcés à rompre. Maintenant il devait tout faire pour récupérer Ginny…
Le lendemain matin, il apparut que la jeune fille avait dû rentrer au cours de la réunion de l’Ordre car elle était sortie normalement, comme si de rien était, par la porte du dortoir des filles. Harry, qui n’avait pas voulu la brusquer, l’avait juste embrassée sur la joue en lui disant qu’il était heureux de son retour. Elle l’avait remercié et, l’air embarrassé, elle avait rejoint ses amis après s’être également fait accueillir par son frère, Hermione et Neville. Elle prit son petit déjeuner le plus loin possible d’eux, mais Harry savait pertinemment qu’elle ne cherchait qu’à l’éviter lui. La tâche ne serait pas facile…
En cours de défense contre les forces du Mal, ils firent les révisions prévues sur les créatures maléfiques, et Abelforth leur remit leurs devoirs corrigés. Il avait donné des notes de BUSE et d’ASPIC. Harry vit avec ravissement qu’il avait eu deux E. Hermione, qui ne prenait pas vraiment soin de cacher ses copies, avait obtenu deux O. Sur le chemin de la cour de récréation, Neville confia qu’il avait décroché deux A, quant à Ron, il marmonna qu’il avait eu un A pour les sortilèges multiples et un P pour les sorts sans baguette.
- Tu n’avais pas assez travaillé, c’est tout, dit Hermione. Neville a réussi malgré ses difficultés, lui, or toi, tu n’en as pas, quand tu travailles vraiment.
- Et bien ça m’apprendra à être jaloux pile au moment où j’ai deux rédactions à faire…
Et des devoirs, ils en avaient encore pour le prochain cours, mais comme ils avaient déjà vu le sujet l’année dernière, ce fut beaucoup moins difficile.
Harry décida de maintenir cette nouvelle habitude de s’avancer dans les devoirs : faute d’avoir une vie amoureuse, il avait au moins la satisfaction d’avoir des résultats qui n’étaient presque jamais plus mauvais qu’un « Effort Exceptionnel ». Ron aussi progressait, notamment parce que faire ses devoirs consistait à passer du temps avec sa petite amie. Harry avait entendu par mégarde cette dernière promettre qu’elle viendrait voir les essais et certains entraînements de Quidditch si elle le pouvait. Ginny lui manquait terriblement…
Il ne réussissait jamais à la voir bien longtemps, et Harry était absolument convaincu qu’elle l’évitait.
- Elle doit avoir peur d’entamer une relation avec toi, lui dit Hermione le vendredi matin, sur le chemin de son cours d’étude des anciennes Runes.
- Mais pourquoi ? s’étonna Harry. Qu’est-ce que je lui ai fait ?
- Rien, répondit Hermione. Mais tu dois la comprendre. Elle ne se souvient pas de toi, elle ne se souvient pas d’être sortie avec toi, mais on lui a dit que tu es son petit ami. Elle doit avoir peur de se sentir obligée d’être avec toi, alors que pour elle, tu n’es encore qu’un inconnu.
- Mais je ne veux pas du tout la brusquer ! protesta Harry. Je veux appliquer le conseil de Neville : refaire sa connaissance pour qu’elle tombe amoureuse de moi, ou pas…
- Je ne vois pas pourquoi elle ne retomberait pas amoureuse de toi, répondit Hermione avec un sourire. Mais même si tu as de bonnes intentions, tu l’as quand même brusquée, ajouta-t-elle sur un ton accusateur.
- Comment ça ? Je ne vois pas…
- Tu l’as embrassée, lundi, tu te souviens ?
- Oui, mais sur la joue, répliqua Harry, et parce qu’elle rentrait de Ste Mangouste !
- Pour elle, ça a dû être beaucoup plus, dit Hermione. Elle croit sûrement que tu t’attends à plus de sa part. Bon, je vais devoir te laisser.
Ils venaient d’arriver devant la salle d’étude des Runes.
- Je te conseille de la traiter de nouveau comme une amie, dit-elle tandis que d’autres élèves rentraient en cours. Sois naturel avec elle, n’essaye pas de la draguer pour accélérer les choses. Elle va elle-même revenir vers toi au bout d’un moment, tu verras.
Et elle rentra dans la classe juste à temps pour ne pas être en retard.
Dépité, Harry s’en retourna vers la tour de Gryffondor et son cœur faillit s’arrêter quand il tomba nez à nez avec Ron. Il poussa un petit cri brusque.
- Salut, dit timidement Ron.
- Bon sang, j’ai failli avoir une crise cardiaque ! s’exclama Harry, la main plaquée sur la poitrine.
Il se remit de son émotion et observa longuement son meilleur ami.
- Et qu’est-ce que tu fais là, d’abord ? interrogea Harry sur un ton soupçonneux. Tu nous espionnes ou quoi ?
- Non, je… enfin, d’une certaine manière, on peut dire que j’espionnais Hermione. Mais je ne suis pas jaloux du tout, rajouta-t-il précipitamment en voyant le regard noir de Harry. Non, j’espérais juste que vous auriez fini avant qu’elle n’aille à son cours…
- Tu n’en as pas un peu marre de l’embrasser à chaque fois que vous vous quittez ou que vous vous retrouvez ? demanda Harry avec un certain agacement.
- Et bien quoi ? s’indigna Ron. J’ai bien le droit d’aimer embrasser ma petite amie, non ? Et puis ça n’a rien à voir avec Lavande, heureusement. On n’essaye pas de s’enfoncer la langue le plus profondément possible dans la gorge…
Harry éclata de rire et ils repartirent en direction de la salle commune.
- Tu sais, j’aimerais vraiment qu’elle se souvienne de toi, dit Ron.
- Et moi donc…
- Oui, mais aussi, je ne voudrais pas qu’un autre en profite… Tu es de loin le moins bête de tous les garçons avec lesquels elle est sortie ou les autres avec lesquels elle pourrait sortir.
- Le moins bête ? Merci pour le compliment, dit Harry avec un sourire ironique.
Il obtint un nouveau E en DCFM ainsi qu’un A en potions, la seule matière dans laquelle il avait encore de sérieuses difficultés pour avoir plus que la moyenne.
Le lendemain était un samedi. Plus précisément, le deuxième samedi depuis la rentrée, c’est-à-dire le jour de la sélection du nouveau poursuiveur. Toute l’équipe y assista, Ginny y compris.
Tout d’abord, se rappelant l’année précédente, Harry vérifia que tous ceux qui se présentaient étaient indiqués sur la liste de candidats que lui avait confiée Abel, en tant que nouveau directeur des Gryffondor. Trois Serdaigle, cinq Poufsouffle, et même deux Serpentard furent ainsi découverts. Harry eut besoin de l’aide des autres joueurs pour chasser ces dix intrus, surtout les deux Serpentard qui leur donnèrent du fil à retordre en sortant leurs baguettes. Mais deux sortilèges d’entrave jetés par Harry et Ginny les décidèrent à suivre les autres exclus. Après avoir remercié la jeune fille avec un léger sourire, les véritables sélections débutèrent.
Le capitaine eut le déplaisir de retomber sur Romilda Vane et sa bande de filles stupides et superficielles de cinquième année. Elles furent bien entendu toutes refusées après des essais lamentables dans lesquels elles ne mirent aucune bonne volonté de joueuses de Quidditch (en revanche, elles mirent toutes tous les moyens en œuvre pour se faire remarquer, en exécutant des figures dont la fonction réelle était de mettre en valeur leur chevelures ou leur sourire insupportable ; Romilda Vane parvint même à forcer Harry à la rattraper sur son balai après s’être laissé tomber exprès juste à côté de lui).
Quand les genres masculins et féminins eurent tous deux montré leurs plus minables représentants, arriva la partie intéressante des essais. D’autres filles et d’autres garçons, tous de Gryffondor, et souhaitant réellement faire partie de l’équipe, montrèrent leurs capacités. Certains furent affligeants, d’autres parvinrent à prouver qu’ils savaient jouer ; il y avait même un couple de sixième année formant un duo formidable mais qui, une fois séparés, n’étaient pas fameux. Harry dut choisir entre eux et Dean Thomas.
A son grand regret, comme il ne pouvait renvoyer ni Demelza Robbins ni Ginny qui étaient toutes deux d’un niveau supérieur, il dut les départager en fonction de leurs capacités en solo et ce fut Dean qui l’emporta incontestablement. Ron ne se montra pas non plus très heureux de ce choix.
- Bon et bien, Dean, tu es notre nouveau poursuiveur, déclara Harry. Tu remplaces Katie alors essaye d’être à sa hauteur, d’accord ?
- Pas de problème, répondit le jeune homme avec un sourire.
Son regard se tourna ostensiblement vers Ginny qui lui rendit son sourire. Ni Harry ni Ron ne manquèrent de le remarquer.
La première séance d’entraînement fut fixée au mardi suivant, et tout le monde repartit de son côté à la sortie des vestiaires. Harry rentrait avec Ron et Hermione quand il vit Ginny parler à voix basse avec Dean près de l’escalier de pierre. Ce dernier finit par quitter la jeune rousse qui fut bruyamment interpellée.
- Hé, Ginny ! cria Ron.
Hermione lui lança un regard de reproche, mais il n’y prêta pas attention.
- Qu’est-ce qu’il y a ? s’étonna-t-elle quand elle les eut rejoint.
- Pourquoi tu parlais avec lui ?
- Je parle avec qui je veux, il me semble, répliqua froidement Ginny.
- Mais…
- Oh, ça suffit, ça ne va pas recommencer ! s’exaspéra la jeune fille. Je vois Dean autant que j’en ai envie ! Et de toutes façons, il est hors de question que je sorte avec lui, si c’est ça qui t’inquiète. Je lui ai bien fait comprendre que je n’ai pas du tout oublié mais anciens petits amis ni pourquoi je les avais quittés et qu’il n’y avait pas beaucoup de chance pour que mes sentiments pour lui changent un jour. Et il a compris qu’il ne devait plus me draguer et que je voulais juste qu’on reste de bons amis.
- Et il a accepté ? demanda Harry.
- Il n’a pas eu le choix ! répondit Ginny en rosissant légèrement. Et puis… j’ai déjà un petit ami, non ?
Harry échangea un regard appuyé avec Hermione et décida de prendre les choses en main.
- Ginny je… je peux te parler une minute… seul à seul ? demanda-t-il timidement.
La jeune fille rougit encore plus et acquiesça. Ils laissèrent Ron et Hermione, les visages inquiets, repartir de leur côté, et s’enfermèrent dans une salle de classe. Ginny n’osait pas croiser le regard de Harry, elle semblait extrêmement mal à l’aise. Harry se décida donc à dire ce qu’il espérait n’être que temporaire…
- Ginny, écoute, je…
C’était beaucoup plus difficile qu’il ne l’aurait cru. Il avait l’impression de renoncer de nouveau à sa plus grande source de réconfort, comme au mois de juin dernier… Une fois encore, c’était pour le bien de Ginny, et il espérait toujours qu’au moment voulu, il pourrait abandonner cette résolution…
- Je… Je crois que…
- Tu ne veux plus être avec moi, c’est ça ? coupa Ginny d’une voix tremblant d’une certaine rage. Tu veux rompre parce que je ne suis plus qu’une amnésique pour toi, une handicapée ? Et bien sache que…
- Quoi !? s’étonna Harry. Je ne pense pas du tout ça de toi ! Je… Enfin je veux rompre, c’est vrai… admit-il piteusement.
Il y eut un silence. Désormais, la tête de Ginny était totalement rouge vive : ses cheveux, sa peau, et même le blanc de ses yeux.
- Mais ce n’est pas pour ce que tu crois, reprit Harry au bout d’un moment. Je veux juste… Je sais que tu ne m’aimes plus, ce serait injuste de te demander à toi de rester avec moi. Ne me dis pas le contraire, ajouta-t-il lorsque la jeune fille ouvrit la bouche. Tu m’as complètement oublié, tu ne me connais plus, tu ne peux pas m’aimer. Je ne t’en veux pas du tout, ce n’est pas de ta faute.
Harry vit de la reconnaissance dans le regard de Ginny. En fait, pensa-t-il tristement, il la libérait certainement d’un terrible poids. « Et ce poids c’est moi… ajouta-t-il. »
Il sortit lentement de la salle et, une fois la porte refermée, il se mit à courir le plus vite possible pour s’enfermer à nouveaux dans une nouvelle classe. Et là, il pleura. Jamais il n’avait pleuré comme cela. Certes, il avait versé une larme quand Dumbledore lui avait expliqué lors de sa première année ce qui l’avait sauvé de Voldemort ; il en avait versé plus d’une lorsque Mrs Weasley l’avait serré contre elle pour le réconforter après le retour du Seigneur des Ténèbres ; mais à chaque fois, il s’était vite essuyé les yeux pour éviter d’être vu. Cette fois, personne ne pouvait le voir. Il avait quitté la seule personne pour laquelle il éprouvait un sentiment indescriptible, et qui n’avait même rien à voir avec ce qu’il avait pu ressentir pour une certaine Cho Chang… et c’était une épreuve bien différente de toutes celles qu’il avait dû affronter jusque là.
La première semaine avait été silencieuse. La rumeur de l’attaque de Harry Potter et de sa petite amie devenue en partie amnésique avait fait grand bruit, mais elle s’était répandue sous forme de chuchotements. Certains élèves se montraient désolés, comme Ernie Macmillan, et le répétaient sans cesse à Harry et à Ginny quand ils les croisaient, ce qui devenait insupportable ; d’autres se contentaient d’en parler entre eux et de suivre du regard les deux concernés quand ils passaient devant eux ; et bien sûr, il y avait les Serpentard, qui trouvaient très amusant que la seule chose oubliée par Ginny soit Harry lui-même.