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Politique

Sujet : Topic des communistes
14-Novembre
Niveau 10
06 mai 2015 à 23:49:37

Comme je l'ai dit c'est pas possible de résumer le boulangisme et les première ligues à un discours anti-élite, ça fait parti de la forme mais c'est pas le plus important

Du coup pour toi c'est quoi ? t'aurais des références sur le sujet ?

Pseudo supprimé
Niveau 10
06 mai 2015 à 23:53:30

Effectivement MLP fait maintenant bien sa bien pensante, évinçant JM et laissant le côté le discours ultralibéral et même anti union européenne (préférant une hypothétique renégociation des traités).

Trisom
Niveau 10
07 mai 2015 à 00:21:43

Justement c'est très compliqué, et c'est pas pour rien que c'est l'un des sujets les plus débattus au niveau historiographiques (au niveau histoire contemporaine de la france). Y a beaucoup de facettes et comme d'hab en histoire il s'agit rarement d'en garder qu'une mais de voir comment elles s'articulent et lesquelles sont prépondérantes. Voilà quelques éléments de réponses pour le boulangisme (qui est lui même distinct des ligues même si les héritages sont là) :

-la contestation des hommes dans un contexte d'affairisme (gendre de Grévy etc.), ce que tu pointais.
-la division du mouvement républicain (déjà acté à la naissance de la IIIe) de plus en plus importante et ce d'autant plus que l'opposition monarchiste décline avec le Ralliement
-la révisionnisme (le vrai moteur) càd la mise en cause non pas de la République mais de sa forme parlementaire au profit de la république césarienne et plébiscitaire. C'est l'idée fondamentale et elle est objet de débat bien avant Boulanger et le sera après (Barrès).
-l'espoir à droite d'un rétablissement monarchique/bonapartiste
-à gauche : le parlementarisme comme échec pour certains rad-soc alors que ça fait un siècle que la république est le projet phare + la possibilité révolutionnaire pour certains blanquistes + dans une perspective moins large l'anticléricalisme (Boulanger a obligé le religieux au service militaire) et l'anti monarchisme (il a aussi virer les princes de l'armée)
-pour certains rad-soc/socialistes/blanquistes l'espoir d'une politique sociale plus radicale que ce que la république a mis en place (aka pas grand chose)
-pour tout le monde, le revanchisme a un moment ou une partie des politiques ne regardent plus tant la ligne bleue des Vosges.

Autre difficulté, le boulangisme c'est un mouvement pas très construit qui n'a pas forcément de programme défini, qui promet à beaucoup de gens et dont les soutiens pour divers raisons vont des blanquistes aux monarchistes aux bonapartistes. Sans compter les tractations secrètes en Boulanger et ses financeurs, monarchistes pour la plupart (la duchesse d'Uzès entre autre).

Bref c'est un bordel pas possible qui se concrétise sur des frustrations politiques > la République n'a finalement pas été la grande libération promise du fait de sa forme parlementaire (ce qui fout en l'air peu ou prou 80 ans d'espérance politique à gauche, c'est pas rien) et en plus le contexte de corruption et de revanchisme était propice à l'émergence du mouvement. Mais c'est loin de se résumer au contexte qui rendrait Boulanger comme simple populiste prônant un coup de balai contre les mauvais (en gros les républicains opportunistes).

Et au niveau des conséquences que ça a eu c'est encore plus le bordel > consolidation du régime républicain parlementaire, reconfiguration du nationalisme français (qui passe comme on le dit rapidement "de gauche à droite"), restructuration du mouvement ouvrier français tant au niveau syndical que partisan etc.

Trisom
Niveau 10
07 mai 2015 à 00:32:44

Pour les références : Sternhell est très intéressant si on prend bien en compte que sa thèse c'est une interprétation de ce qui s'est passé et non pas la vision unique téléologique qui donne Boulanger en oncle de Mussolini (pour caricaturer). Plus classiques > Jean Garrigues et Bertrand Joly. Je rajoute Girardet ( :coeur: ) pour la liaison et l'impact sur le nationalisme.

Sinon c'est un mouvement qui est étudié dans l'histoire des droites très souvent dans la perspective rémondiste càd comme premier représentant de la droite révolutionnaire > à ce titre Sirinelli, Rémond. Pour des aspects plus particuliers (monarchistes, blanquistes, implantations) >Levillain, Rudelle et André Siegfried+François Goguel.

Dans le même genre iconoclaste sur le fascisme (italien cette fois) Renzo de Felice est très intéressant > il détache le fascisme d'un contexte européen tant idéologiquement (politique de masse, brutalisation post 14-18 etc) que "pratiquement" (parenté du nazisme, régimes totalitaires etc), pour en faire le dernier acte de la construction de l'Etat-nation italien.

Trisom
Niveau 10
07 mai 2015 à 00:35:23

Pour Sternhell - que j'apprécie beaucoup- faut comprendre que son projet est peu ou prou de dire > le fascisme est un héritage des anti-Lumières qui résulte d'une fusion entre socialisme/syndicalisme révolutionnaire et qu'après ça il cherche où et quand la fusion a pu se produire. Premièrement tout le monde n'adhère pas à cette vision de la naissance du fascisme, deuxièmement on peut contester la validité des moments de fusions.

PS : pour plus de détails et une interprétations plus poussées, contact Tailung (il traîne sur le forum histoire) qui après ses concours se fera sans doute une joie de te répondre :rire: Il bosse justement sur la validité ou non de la thèse de Sternhell dans le cadre du boulangisme.

Tyler_Durden_68
Niveau 10
07 mai 2015 à 01:02:04

J'suis pas d'accord sur la vision de Sternhell dans son ensemble, mais il a le mérite de reconnaître qu'il existe un fascisme français... Ce que l'historiographie française refuse, à commencé par René Remond qui sort un truc a base de "Il y a trois droites, une légitimiste, une orléaniste et une bonapartiste", ce à quoi Paxton lui a répondu "Et en 1940, il y a combien de droites ? Une seule et elle collabore massivement" :rire: Disons que cette volonté d'expliquer le fascisme par la dégénérescence d'une grande partie du syndicalisme révolutionnaire ou du pourrissement d'une partie de la gauche révolutionnaire, évacue selon moi le fait qu'il y a aussi et avant tout dans le fascisme, une volonté de "c'était mieux avant" et de se baser sur la tradition, les trucs volkisch, le culte de l'honneur, les trucs un peu ésotérique et une haine du mouvement ouvrier organisé, qui vient couronner le tout. Donc je suis assez mitigé sur l'analyse de Sternhell, car elle évacue quand même toute la droite traditionnelle qui avait une part importante dans la création du fascisme... Faut lutter une bonne fois contre toutes ces fumisteries sur la "gauche fasciste", qui serait le "vrai fascisme", comme Doriot ou Déat en France par exemple. Non, le fascisme c'est pas seulement quelques allumés franc-tireurs qui sont passé du communisme au fascisme, c'est bien plus complexe que ça à mon avis. Voilà pourquoi il faut coupler les analyses de Sternhell avec celles de Daniel Guérin (Son ouvrage Fascisme & Grand Capital est pour moi un classique !), de Dimitrov ou encore celle de Moishe Postone, qui a une analyse globale du fascisme sous l'angle marxien de la critique de la valeur.

Sinon, la base du fascisme c'est souvent une critique anticapitaliste romantique, qu'on retrouve tant chez les SA, que dans le mouvement futuriste et les faisceaux en Italie. Moi je ne dis pas que Proudhon était un fasciste, mais que sa critique de la propriété (qu'il souhaite combattre par une forme mythique de petite propriété) qu'il couple avec son antisémitisme, fait bien rentrer tout ce qu'on nomme dans le "socialisme français" comme faisant partie de toute un rouage qui mène à la réaction pure et simple, pour ensuite se diluer dans le fascisme. Quand l'Action Française dit "La monarchie, c'est l'anarchie plus un" , ça signifi que que le roi est le garant de la répartition 'égalitaire de la propriété', cette dernière ne pouvant devenir absolue justement que grâce au roi, garant de l'équilibre. Lénine a écrit un petit livret là dessus, pour tailler un peu le romantisme économique : http://www.marxiste.fr/lenine/romantisme.pdf ça complète un peu ce que disait déjà Marx de Proudhon dans son Misère de la Philosophie.

Trisom
Niveau 10
07 mai 2015 à 01:40:33

J'suis pas d'accord sur la vision de Sternhell dans son ensemble, mais il a le mérite de reconnaître qu'il existe un fascisme français...

:d) on est d'accord là dessus, et c'est une idée qui est peu ou prou largement partagée maintenant en dehors de la vieille garde qui a contribué à l'éloigné.

évacue selon moi le fait qu'il y a aussi et avant tout dans le fascisme, une volonté de "c'était mieux avant" et de se baser sur la tradition, les trucs volkisch, le culte de l'honneur, les trucs un peu ésotérique et une haine du mouvement ouvrier organisé, qui vient couronner le tout. Donc je suis assez mitigé sur l'analyse de Sternhell, car elle évacue quand même toute la droite traditionnelle qui avait une part importante dans la création du fascisme...

d) la thèse de -entre autres- Georges L. Mosse.

qui mène à la réaction pure et simple, pour ensuite se diluer dans le fascisme.

:d) c'est là qu'il y a débat. Maurras n'est pas George Valois par exemple.

Quand l'Action Française dit "La monarchie, c'est l'anarchie plus un" , ça signifi que que le roi est le garant de la répartition 'égalitaire de la propriété', cette dernière ne pouvant devenir absolue justement que grâce au roi, garant de l'équilibre.

:d) pour faire simple l'Action Française à 3 lignes économiques : la principale (défendue par Maurras) c'est celle typique du corporatisme sauce DSE (très commun sous diverses modalités de la démocratie-chrétienne au royalisme), celle de Valois défendue entre autre au cercle Proudhon qui est absolument minoritaire et qui va finir par faire scission quand elle verra qu'elle ne pourra pas s'imposer (d'où le Faisceau) et enfin celle de Bainville plus libérale/bourgeoise. De nos jours y a toute une relecture de ce qu'a été l'Action Française pour en faire un truc radicalement anticapitaliste dans lequel le cercle Proudhon aurait eu une grande influence intellectuelle, c'est faux.

C'est bien beau de faire un c/c chez les matérialistes mais le dit slogan maurrassien à rien à voir avec la propriété (du moins pas la propriété auquel on l'entend), si tu ne voulais pas dire ça je t'ai pas compris. Ce slogan c'est un résumé en quelques sortes de la pensée fédéraliste maurassienne > le royaume maurassien c'est la fédération des corps "naturels" de la société (famille, paroisse, province, corporation de métiers etc.) dans le plus pur style corporatiste chrétien capable de s'auto administrer. Avec à son sommet le roi de France et la monarchie garants de l'unité nationale.

Petite digression, on parle souvent de l'antisémitisme de Proudhon est d'une partie des socialistes du XIXe mais on oublie souvent qu'il se couple (y compris à l'action française) d'un anti-protestantisme au moins aussi forcené (le protestant étant ou le capitaliste anglo-saxon, ou sa 5e colonne française).

Pseudo supprimé
Niveau 10
07 mai 2015 à 02:01:45

Enfin tu regardes Mussolini c'est un mec qui a disjoncté, il faisait l'apologie du syndicalisme révolutionnaire, disait que l'initiation du militant c'était le passage par la case prison et critiquait vivement la social-démocratie, écrivait pour le Lotta di Classe, voyait l'homme nouveau à travers le combat syndical, on peut pas nier ses origines socialistes :noel:

Pseudo supprimé
Niveau 10
07 mai 2015 à 02:02:58

C'est qu'un exemple mais c'est assez marquant.

Et certains des faisceaux oscillait vers le socialisme voir même une sorte d'anarchisme confus, notamment dans les milieux paysans.

Trisom
Niveau 10
07 mai 2015 à 03:00:37

Une partie des faisceaux a rejoint les Arditi surtout.

Trisom
Niveau 10
07 mai 2015 à 10:50:00

Les anti-conformistes des années 30 sont vraiment pas tous fascistes ne serais ce que parce que le personnalisme est un courant très important et que y a toute une partie technocrate à X-crise et autres qui tombera pas dans le fascisme. Le plannisme c'est qu'un courant parmi tout un tas de bordel dont la plupart auront leur postérité à Vichy et au Plan.

Pour le fédéralisme proudhonien, me semble pas qu'il soit poreux. Qu'il ait été récupéré c'est un fait mais au final il est pas tant éloigné d'un Pi i Margall ou de toute autre fédéraliste républicain (les italiens notamment). Sa présentation du fédéralisme en tant que double fédération producteurs-communes et àmha assez éloignée de l'interprétation qu'a pu en donner Maurras, d'ailleurs Proudhon sert plus de caution qu'autre chose là dessus > ce sont des idées développées dès après la Révolution par le courant contre-révolutionnaire.

Pour ce qui est de ton dernier paragraphe > :oui:

Pseudo supprimé
Niveau 10
07 mai 2015 à 10:57:44

Ouais j'ai lu une biographie de Mussolini c'est dingue de voir qu'il était à l'origine un véritable socialiste, mais effectivement il critiquait (et d'autres maximalistes avec lui) déjà le marxisme, même complètement anticlérical quand on sait qu'il permettra au Vatican de se recréer et de faire du catholicisme religion officielle de l'Italie, et qu'il était resté athée en plus, ça fait drôle.

Trisom
Niveau 10
07 mai 2015 à 10:59:39

Mais vraiment, le socialisme national à l'action française c'est plus que négligeable. La figure révérée et placée en haut du panthéon économique c'est Albert de Mun.

Trisom
Niveau 10
07 mai 2015 à 11:04:16

Sinon faut pas croire, les Accords de Latran c'est loin d'être un cadeau fait à l'Eglise. C'est plus une neutralisation et une mise sous contrôle, l'Eglise étant obligée de se cantonner aux activités purement pastorale et encore, l'Action Catholique est sous surveillance et reçoit très régulièrement des menaces. Le poids politique du Pape c'était pas rien (ça l'a toujours pas) de même que le PPI et Luigi Sturzo. Le maintien de l'influence de l'Eglise, y compris dans le champ politique, s'est faite par l'AC.

Pseudo supprimé
Niveau 10
07 mai 2015 à 11:15:35

Ah ouais pour le coup je pensais vraiment que c'était le cas. Faut dire que c'était aussi pour satisfaire la bourgeoisie qui l'avait appuyé.

Trisom
Niveau 10
07 mai 2015 à 11:19:48

La bourgeoisie italienne est pas spécialement plus catholique que le reste de la population et comme je l'ai dis les accords ont surtout pour but d'afficher l'unité de la nation italienne après 60 ans de galère sur la question et surtout de neutraliser l'influence politique de l'Eglise.

Si tu cherches vraiment ce que Mussolini a fait pour la bourgeoisie italienne c'est pas de ce côté et ça commence 10 ans plus tôt surtout :hap:

le_litchi01
Niveau 55
07 mai 2015 à 11:40:05

J'avais pour projet de le livre de Berstein et Winock récemment paru pour critiquer les thèses de Sternhell.
http://www.cnrseditions.fr/histoire-contemporaine/6963-fascisme-francais.html

Ca vaut le coup?

Trisom
Niveau 10
07 mai 2015 à 11:44:31

Je l'ai pas lu mais je doute qu'ils fassent plus que ressasser leur thèse. Chope une recension pour voir s'il y a du neuf sinon le bouquin d'Olivier Forlin est très bon > Le fascisme, historiographie et enjeux mémoriels.

le_litchi01
Niveau 55
07 mai 2015 à 11:47:09

Ok.

Tyler_Durden_68
Niveau 10
07 mai 2015 à 13:33:19

Le 07 mai 2015 à 10:59:39 Trisom a écrit :

Les anti-conformistes des années 30 sont vraiment pas tous fascistes ne serais ce que parce que le personnalisme est un courant très important et que y a toute une partie technocrate à X-crise et autres qui tombera pas dans le fascisme. Le plannisme c'est qu'un courant parmi tout un tas de bordel dont la plupart auront leur postérité à Vichy et au Plan.

Je n'ai pas mis tout les anti-conformistes des années 30 sous l'étiquette de fasciste, pour cette raison, car il y avait une oscillation de positionnement qui se retrouve quasiment dans le projet de Soral, c'est à dire gauche du travail et droite des valeurs. Le cas de Vichy est important au niveau économique justement, car les chantres du corporatisme deviendront les grands défenseur du libéralisme américain à la sortie de la guerre. Ce que je voulais dire en parlant des anti-conformistes des années 30, ce qu'il y a un balancement entre fascisme, socialisme, communisme sans arrêt. Il y avait des affiches de Vichy assez marrante sur "Voilà ce qu'est le socialisme bolchevique et voilà ce qu'est le socialisme français !" en énumérant des points plus ubuesque les uns que les autres. Ceci dit, faut noter que les socialistes nationaux préfèrent se référer à des Proudhon ou à des Blanqui, plutôt qu'à ce qu'on nomme le "socialisme scientifique". Cela vient aussi du fait que le collectivisme est associé à une doctrine juive. Ce qui est marrant, car Bakounine disait de Marx qu'il était autoritaire et collectiviste forcené parce qu'il combinait le fait d'être à la fois juif et à la fois allemand... :noel:

Mais vraiment, le socialisme national à l'action française c'est plus que négligeable. La figure révérée et placée en haut du panthéon économique c'est Albert de Mun.

C'est toute la doctrine sociale de l'Église qui servait de justificatif idéologique et économique pour une grande partie de l'extrême-droite française, pendant un sacré moment. C'est aussi à cause de l'encyclique Rerum Novarum de l'ultra-réactionnaire Léon XIII, qui mettait en garde contre le socialisme destructeur, etc etc. Jaurès avait répondu que le pape s'intéressait au pauvre à partir du moment où ces derniers commençaient à s'organiser pour lutter efficacement contre le capitalisme. Quand à Drumond (Là on est de l'autre côté de l'échiquier politique), se foutait de la gueule des 'Cercles Catholiques Ouvriers' en les tournant en ridicule notamment par le biais de toute la foi chrétienne qui repose sur la charité, etc etc.

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