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Animation

Sujet : [Tragédie] Rose of Versailles
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Titimathy
Niveau 32
26 avril 2014 à 15:42:56

Hello ! :-d

Pas d'anime saisonnier cette fois-ci mais plutôt une antiquité que je me propose de déterrer pour vous la présenter.

:d) Informations générales

Nom : Rose of Versailles / Versailles no Bara / Lady Oscar
Année de production : 1979-1980
Studio : Tokyo Movie Shinsha
Nombre d'épisodes : 40
Réalisateur : Tadao Nagahama / Osamu Dezaki (Black Jack, Ashita no Joe)
Chara-design : Shingo Araki, Akio Sugino et Michi Himeno
Musique : Kouji Makaino
Adaptation : Manga écrit et dessiné par Riyoko Ikeda
Licence : Oui. Les dvds sont édités par IDP.

:d) Synopsis

L'histoire de la rose de Versailles se passe à la fin du XVIIIème siècle en France. Oscar est une jeune femme élevée en garçon par un père excédé de n'avoir que des filles. L'éducation militaire d'Oscar lui permet de devenir le capitaine de la garde royale, chargée de la protection de la jeune dauphine Marie-Antoinette. Aux côtés d'Oscar, il y a André, son ami d'enfance, secrètement amoureux d'elle. Ensemble, ils devront affronter les premiers troubles annonçant la Révolution française.

:d) Mon analyse

I : INTRODUCTION

L’anime Rose of Versailles méritait plus qu’une fiche traditionnelle, c’est pourquoi cet avis ressemblera bien plus à une analyse complète plutôt qu’à une simple critique. Certes les défauts et les qualités seront cités et bien cités, mais nous sommes ici en présence d’un anime de qualité supérieure. Un anime qui chez moi a pu susciter une passion comme presqu’aucune série d’animation n’a pu le faire. Donc, non, ce pavé n’est pas une branlette intellectuelle étalée sur des dizaines de pages word, il s’agit d’une synthèse de ce qui fait selon moi la grandeur de cette œuvre, de tout ce qui mérite d’être dit à son propos (et encore, il y aurait tellement plus à dire, je culpabilise déjà à l’idée d’oublier la moitié). Il n’est pas toujours facile de faire saisir aux lecteurs la portée d’une œuvre, surtout quand il s’agit d’un anime où nombre de personnes ont encore des préjugés quand au « potentiel intellectuel limité » du médium. A fortiori lorsqu’il s’agit de parler d’un chef d’œuvre, (très vieux qui plus est et ayant été vu pour la plupart d’entre vous à un trop jeune âge), comme peut l’être la rose de Versailles, il convient de faire de preuve du plus d’objectivité possible et d’aborder en détail tout ce qui pourra amener le potentiel spectateur à abandonner ses préjugés pour accepter pleinement de découvrir la série. C’est là le but de ce post et c’est pourquoi il sera si long.

Afin de faciliter votre lecture, puisque je sais bien que vous râlerez quand même tous pour la longueur du pavé, je vais diviser cette critique en plusieurs parties relativement indépendantes. Ainsi vous pourrez lire à votre convenance une partie plutôt qu’une autre. Bien sur pour un avis vraiment global et cohérent, il est conseillé de tout lire et d’ailleurs pour faire le lien entre les différentes parties, il risque fortement d’y avoir des effets de répétition et de redondance, j’espère que vous me pardonnerez cette sénilité précoce. J’essaierai à chaque fois de vous indiquer quelle section il faut consulter pour bénéficier d’informations supplémentaires quant à un thème. Dans le pire des cas, pour voir simplement un avis synthétique sur la qualité de l’anime, vous pouvez aller directement à la conclusion. Ceci étant dit, place à l’index :

I Introduction
II : La jeunesse et la noblesse – première période
III : L’âge adulte et la décadence – seconde période
IV : La pertinence historique : propagande ou non ?
V : Le shojo-manga et l’exacerbation des sentiments
VI : Une réalisation scindée : Osamu Dezaki et les harmony cels
VII : Conclusion

Les parties II et III analysent et critiquent globalement la série, tout d’abord ses 18 premiers épisodes, puis les 22 derniers qui sont marqués à la fois par des changements profonds au niveau du scénario mais aussi de la réalisation. Il y a aura pas mal de résumé, toujours dans le but de faire apparaitre l’intérêt de la série. La partie IV se charge d’approfondir tout ce qui concerne les points historiques soulevés précédemment. On se posera notamment la question des sources et inspirations de l’auteur ainsi que de la fidélité historique. Pour terminer on contrera aussi une critique formulée quelques fois contre la série, à savoir une accusation de propagandisme. La partie V s’intéressera d’avantage au mangaka (bien qu’on ne parlera pas trop du manga non plus, vu le thème de ce forum), à l’importance dans l’histoire des animes et des mangas de la Rose de Versailles, des changements importants qu’il a pu engendrer dans le genre du shojo et évidemment du trait caractéristique de l’œuvre qui est l’exacerbation des sentiments et la puissance émotionnelle. Enfin dans la dernière partie, nous nous pencherons surtout sur la réalisation de la série, les différents réalisateurs et chara-designer qui y ont insufflé une âme incomparable et ce au moyen de divers procédés comme les harmony cels d’Osamu Dezaki.

Je pense que vous pouvez lire sans trop de craintes de spoil (peut-être légèrement dans la partie III). Disons que toute manière il y a très peu de choses à spoiler sur les grandes lignes, l’anime se chargera d’ailleurs de le faire à ma place. Il est en effet très fréquent de voir le narrateur vous annoncer bien longtemps à l’avance des événements tragiques qui se produiront tard dans l’histoire. Et pour cause l’histoire vous la connaissez si vous avez été à l’école. Il n’y a pas à en douter, l’anime ne fera pas de concessions pour faire une happy end de ce qui est une véritable boucherie historique. C’est en ce sens, notamment, qu’il s’agit ici d’une véritable tragédie. La connaissance a priori de tous les événements vous donnera, je vous l’assure, un sentiment très particulier et très intense lorsque vous vivrez l’évolution des personnages. Une réflexion naturelle s’amorcera aussi spontanément sur ce qui aurait pu (ou du) être fait pour éviter la catastrophe. Mais la puissance tragique-épique sera plus explicitée par la suite.

Sur ce, maintenant que vous avez courageusement fini ce premier (petit) morceau), je vous souhaite une bonne lecture pour la suite !

Titimathy
Niveau 32
26 avril 2014 à 15:43:39

II : LA JEUNESSE ET LA NOBLESSE – PREMIERE PERIODE

Il n’était pas facile de choisir au mieux les titres. On pourrait croire à tort qu’il n’y a de la noblesse que dans la première partie et de la déchéance que dans la seconde alors que c’est bien entendu faux. J’ai simplement voulu mettre en évidence ce qui ressortait « le plus », ce qui apparaissait comme étant au final le vainqueur de chaque partie.

D’abord la jeunesse, en effet au début du récit l’héroïne, Oscar de Jarjayes, n’a que 14 ans et la dauphine Marie-Antoinette qui débarque en France est à peine plus âgée. Immédiatement une des problématiques est présentée : le père d’Oscar désespère d’avoir un garçon et à la naissance de sa dernière fille, il décide qu’elle devra vivre la vie d’un homme pour représenter sa famille. Ainsi Oscar est-elle éduquée à la dure, apprenant toutes les connaissances intellectuelles qu’un noble doit avoir, mais aussi l’art de l’épée et du pistolet. Elle s’y entraine avec son ami d’enfance André, palefrenier au service de la famille Jarjayes. La première chose que l’on constate est qu’une éducation pareille ne laisse évidemment pas sans séquelle la personne qui l’a subie, Oscar est tout simplement monstrueusement charismatique. Non pas car il s’agit d’une femme « virile » (l’anime ne la représente d’ailleurs absolument pas comme une femme déguisé en homme, mais lui laisse au contraire toute son élégance et tout son charme), il s’agit surtout et avant tout d’une authentique noble, et noble pas seulement au niveau du statut social, mais surtout de la personnalité. Bien sur le père d’Oscar a lui-même une attitude très noble, ce qui est au final déjà rare à l’époque, mais ce n’est pas seulement cet héritage qui pousse Oscar à être autant attaché à ses valeurs et son intégrité. Cette attitude est en effet le meilleur moyen d’accepter le sort qui lui est réservé, d’accepter de mettre de côté sa féminité, pour gagner en retour ce sentiment incomparable de la fierté du chevalier, de l’honneur du chevalier qui sert le roi et la reine. Cet esprit chevaleresque est à la fois une bouée de sauvetage mais au final un véritable ascenseur qui pousse Oscar à s’élever toujours plus haut. Tout cela on le comprend très rapidement et l’admiration pour le personnage est alors immédiate. Le chara-design du personnage n’y est pas pour rien également, mais nous en parlerons plus en détail dans la section VI.

Cependant tout n’est pas rose, et ça André, le fidèle (et oh combien sympathique) serviteur le comprend parfaitement. Il est mauvais de vouloir renier toute sa sensibilité et sa féminité et Oscar ne peut y arriver sans tôt ou tard en payer le prix. Ce débat enflammé entre la maîtresse et son valet ne fera que renforcer l’envie d’Oscar de poursuivre dans cette voie. Sa sensibilité elle le gardera et ça c’est un fait certain. C’est en cela que je dis qu’on n’a pas à faire à un traitement d’homme. Qu’elle le veuille ou non, ses réactions aux différents événements se font avec une sensibilité typiquement féminine, même si son éducation l’oblige à la manifester de manière très pudique. Sa féminité, son attirance pour les hommes, ça par contre elle essaiera de l’enfuir au plus profond d’elle-même et c’est ce qui engendrera nombre des drames futurs. Tout au long de ces dix-huit premiers épisodes, Oscar sera présenté comme un personnage qui refoule sans cesse ses réels désirs, qui finit par méconnaitre ses propres désirs. D’une façon inattendue c’est aussi ça qui fera toute la complexité de sa relation avec Marie-Antoinette.

Marie-Antoinette parlons-en ! A peine débarquée, est-elle placée sous la protection d’Oscar. Impressionnée de voir une femme si combattive et si noble, elle lui voue immédiatement une grande admiration. Parce que oui, bien qu’incroyablement capricieuse et immature, Marie-Antoinette a elle aussi reçu une éducation de la plus haute noblesse, la royauté s’exprime en elle non pas seulement par le statut mais dans l’attitude-même. Ces deux femmes, remplies de défauts ne pourront que se rejoindre sur ce point, ce qui marquera la naissance de leur amitié. Un exemple frappant qui est le premier donné dans l’anime est celui de la marquise du Barry, maîtresse de Louis XV. Ancienne prostituée, elle est parvenue à se hisser au sommet de la monarchie, ce qui donne déjà au passage une idée de la valeur des habitants de Versailles de l’époque. Marie-Antoinette refuse tout simplement de lui adresser la parole, considérant qu’une ancienne prostituée n’a absolument pas à donner des ordres et à influencer un roi. Pari gagné pour l’auteur, on s’attache au personnage de Marie-Antoinette, à sa bonne humeur, sa joie de vivre, son indéfectible sens de la royauté, la conscience qu’elle a du rôle supérieur qu’elle a à jouer. Cependant l’on sait bien que tout ne fut pas rose avec cette reine oh combien méprisée par l’histoire et les articles à son sujet. Dans la partie IV nous développerons plus en détail les sources utilisées pour créer ce personnage, au final très humain et non manichéen. Non manichéen, cela est évident et on le constatera assez vite, au point même qu’il peut devenir compliqué d’avoir un avis forgé sur elle, tant elle est sans cesse nuancée, gratifiée de nouvelles subtilités dans son attitude, que l’on ne percevait pas forcément auparavant.
Ces modifications dans son comportement ne sont pas de bonne augure, la reine est d’une naïveté affligeante, d’aucun dirait même qu’elle est idiote. Enchainant les mauvaises fréquentations, elle dilapide beaucoup trop d’argent et n’a pas pleinement conscience des énormités qu’elle commet. Pour la remettre sur le droit chemin ? Oscar bien sur. Sauf que non ce serait trop simple, ce serait sous-estimer l’anime de penser qu’on aura ce cliché du noble guide qui arrive à sortir la reine de ses turpitudes. Si Oscar influence Marie-Antoinette et arrive à la convaincre de la nécessité d’écouter son peuple et ses sujets, elle-même se fait influencer par la compagnie de l’épouse de Louis XVI. Parce que bien entendu Marie-Antoinette est une femme ! Et même une femme dans tout ce qu’il y a de plus fragile, de plus mignon, de plus élégant, de plus doux (là encore le rendu visuel est excellent pour transmettre cette vision de la dauphine). Elle est d’une certaine façon ce qu’Oscar ne peut plus être et là entre en jeu la problématique posée par l’anime dès l’épisode 1. Comment Oscar pourrait-elle prendre la décision de se montrer dure envers la souveraine qu’elle aime tant, alors que celle-ci ne veut que s’épanouir et être heureuse avec les loisirs auxquels Oscar n’a pas droit ? Comment pourrait-elle arriver à dissuader Marie-Antoinette de passer autant de temps avec Axel von Fersen, historiquement son amant le plus connu, pour qui elle nourrit une passion idyllique (et réciproque) ? Pire même, peut-elle seulement réprimer son propre besoin d’amour, ce besoin d’aimer un homme de valeur, alors qu’il est là sous ses yeux, mais malheureusement aussi sous les yeux de la reine ? Et plus tard quand la reine néglige totalement ses devoirs pour s’occuper pleinement de ses enfants qui sont tout à ses yeux, comment Oscar pourrait-elle la condamner ? Tout est complexe mais profondément humain, c’est ce qui renforce l’aspect tragique déjà bel et bien présent. A ce stade, on a énormément de mal à juger les décisions des personnages, qui font toujours au mieux dans leur esprit, en essayant de garder néanmoins leur humanité et leur dignité. Parce que Marie-Antoinette dans sa jeune naïveté pense réellement que le peuple peut être heureux si elle-même est heureuse dans sa vie privée et que son éclat peut s’étendre au pays tout entier. Ce bonheur est cristallisé à travers le personnage d’Axel von Fersen.

Fersen est un personnage intéressant, notamment mis dans le contexte du Versailles de l’époque. J’ai choisi aussi le titre à ce propos, la noblesse de l’époque est décadente, pour ainsi dire même « détruite ». Formé de petits bourgeois, d’opportunistes, de nobles n’ayant plus rien de noble que le nom. Face à cette situation qui pourrait s’apparenter pourtant à du pessimisme, l’anime choisit pour autant de rester du côté de la lumière pour cette première partie et de montrer un noyau dur formé par ses personnages principaux, noyau qui s’élève au dessus de la médiocrité de son époque et n’accepte pas de faire de concessions. Fersen en fait partie, noble suédois, très cultivé, très élégant, très « parfait » si l’on peut dire, il ne manque pas de séduire la reine. Et bien entendu ce jeu de séduction se transforme rapidement en un amour passionnel et évidemment un amour interdit. L’idylle entre les deux protagonistes n’était pas aussi jolie et innocente dans la réalité historique, mais comme on le verra dans la partie IV il n’y a pas non plus une volonté de coller à 100% à la réalité. Cela reste une fiction et une fiction romancée. Et la romance interdite entre ses deux amants va rapidement enflammer la cours et le peuple qui voit en cette union un nouveau prétexte pour Marie-Antoinette de dilapider son argent. Marie-Antoinette – Fersen – Oscar, la narratrice le dit dès le début de la série, ce trio ne va cesser de se plonger lui-même dans le désespoir et c’est peut-être une des raisons qui fait que Fersen ne sera un personnage autant apprécié que les autres.

Titimathy
Niveau 32
26 avril 2014 à 15:44:06

Tout simplement parce qu’on lui préférera toujours André. André le palefrenier, le serviteur d’Oscar, « le gueux » ! Pas si gueux que ça pourtant, André fait pleinement partie du noyau noble qui est au centre de la première partie et cela se comprend facilement : Il a vécu avec Oscar depuis sa prime enfance, il a partagé tout ce qu’elle avait à offrir, y compris ses valeurs et sa mentalité. C’est un des thèmes favoris de l’anime, montrer comment une personne aussi supérieur moralement qu’Oscar arrive à influencer son entourage et à transmettre ses valeurs pour inciter les gens à s’élever plus haut. André est évidemment le premier concerné et ce qui s’avère être une admiration (mais une admiration qui ne se voile cependant pas la face comme on l’a déjà dit) va se muer rapidement en amour également. Pas de spoil rassurez-vous, si vous regardez les épisodes en entier c'est-à-dire avec l’ending et l’opening (ce que je vous recommande de faire, je le fais rarement mais vu la douceur et l’émotion qui se dégagent de ces deux chansons, ce serait sacrilège de les zapper), vous constaterez qu’à la fin de l’ending on entend André crier son amour pour Oscar. Le serviteur amoureux de sa maîtresse ? Le prolétaire amoureux de la noble ? Un cliché ? Pas du tout, pas dans cet anime où tout est développé et nuancé sans cesse pendant quarante épisode avec une très grande densité. André est le personnage auquel le spectateur veut s’identifier, c’est le « bro », le mec à qui on souhaiterait du bonheur, celui dont on voudrait qu’il puisse vivre son amour avec Oscar, tout simplement car il le mérite et car il est extrêmement sympathique. Beaucoup plus pour le coup que Fersen, bien qu’il soit dur de reprocher quelque chose à ce dernier. Néanmoins le réel développement d’André ne se fera que dans la seconde partie de l’œuvre, c’est là que le personnage, adulte, prendra tout son sens et deviendra ce qu’Helen McCarthy a appelé le « true working class hero ».

Première partie donc, comme vous pouvez le constater très character-drivée. Les épisodes sont presque indépendants et l’on préfère développer en détail les mentalités d’Oscar, d’Antoinette de Fersen et encore d’un dernier protagoniste dont je parlerai bientôt. Que l’anime prenne son temps pour nous présenter les personnages avant « d’envoyer la sauce » est une très bonne chose, cela amène énormément d’enjeux, cela renforce grandement le contexte de la future tragédie et le déchirement que cela peut produire chez le spectateur, attaché aux personnages. Mais cela n’est pas aussi sans de minuscules défauts, n’occultant en rien la qualité générale de l’œuvre, mais bel et bien présents. Dieu que les méchants peuvent sembler caricaturés a priori, j’entends par là les nobles opportunistes qui s’opposeront, voire manipuleront la reine et qui seront tour à tour déjoués par Oscar. Un truc très particulier ce sont les rires, on a vraiment affaire à des rires surjoués de méchants type Bowser, c’est très perturbant quand on sait à quel point tout est toujours très sérieux dans cette série. Bon, faut se dire que ces méchants déjà ont un rôle très minoritaire, ce ne sont heureusement pas des personnages principaux. Et même quand ils deviennent plus importants dans l’histoire, les rires se font plus rares, ne tâchent pas les scènes importantes, du moins extrêmement rarement. C’est un peu ridicule, mais je pense que c’est plus un effet « pédagogique » qu’autre chose, histoire de faire comprendre à un enfant qui regarderait la série qui est un méchant. Cela dit je continue de penser qu’un enfant ne doit surtout pas regarder cet anime et qu’on est clairement avec un public cible très adulte, du moins pour pleinement apprécier le potentiel de l’œuvre. Autre défaut, qui lui, n’apparait qu’une seule fois, lors d’une scène précise, un zapping complet d’explication. Vous allez assisté à un événement totalement brusque et ahurissant vers l’épisode 5 qui sera à peine expliqué. C’est vraiment un défaut tout à fait négligeable, vu qu’il s’agit de la seule et unique faille dans l’écriture du récit en 40 épisodes (qui plus est des épisodes d’une densité bien supérieure à la normale…) mais bon je tiens à le signaler pour que vous ne soyez pas surpris.

Pour conclure cette section, parlons du dernier personnage principal et développé : la petite Rosalie. Ce personnage-là ne fera pas l’unanimité, moi-même j’ai pu avoir quelques difficultés avec elle, bien que s’inscrivant totalement dans la logique de l’anime évoquée plus haut. On a déjà parlé de l’influence bienfaisante d’Oscar sur André et sur Marie-Antoinette, Rosalie en est un autre bénéficiaire. Roturière, Oscar la recueille à la suite d’événements que je ne vous raconterai pas et l’éduque pour lui apprendre à devenir plus forte. Très sensible, noble dans l’attitude bien sur comme tous les héros de la première partie, elle pourra vous exaspérer par ses multiples pleurnichements. Les pleurs sont fréquents dans la rose de Versailles, probablement même à chaque épisode, sauf qu’ils ont tendance à être pudiques et à viser l’intensité profonde, voire héroïque, plutôt que de simplement être des apitoiements. Ces apitoiements Oscar va essayer de les transformer pour faire de Rosalie une femme forte qui pourra donner du sens à ses larmes, mais aussi à affronter ce qui la fait pleurer. Un tel personnage ne peut au final être exaspérant quand on voit la relation si bien écrite qu’il y a avec Oscar. D’ailleurs, l’attachement qu’a la gamine pour sa protectrice a fait jaser. Certaines scènes entre elles deux s’apparenteraient à du lesbianisme. Bon honnêtement c’est un peu du n’importe quoi, je ne comprendrai jamais ceux qui s’acharnent à essayer de faire d’Oscar une bisexuelle, alors que tout l’anime la montre monstrueusement hétérosexuelle. Les gestes tendres qu’elle a pour la fillette, sont la marque d’un amour beaucoup plus « filial » que « sexuel ». N’oublions pas le rejet d’Oscar par rapport au fait qu’elle ne pourra jamais être mère, il n’est pas difficile de voir quelle place tient Rosalie dans son cœur. En revanche Rosalie, elle, aime Oscar et l’aime de manière ambiguë, souhaiterait tant qu’elle puisse être un homme. Là non plus pas de réel lesbianisme, juste un rêve d’enfant face à son chevalier sauveur, un rêve qui reviendra progressivement à la réalité.

Je crois avoir plus ou moins bien réussi à faire ressortir les problématiques de cette première partie et sa noblesse omniprésente. Pour autant la balise tragédie s’applique bien sur aussi à cette période de l’anime. La plupart des épisodes contiennent des événements dramatiques, provoquent l’émotion, mais de manière très différente qu’ils ne le feront dans la seconde partie de l’anime. (Confer section VI pour voir la différence de réalisation entre les parties) Plutôt que d’être ému par l’événement tragique en lui-même, on aura surtout un pincement au cœur quand on verra les réactions d’Oscar et de ses amis face à l’adversité, comment ils se servent de leur noblesse comme d’un bouclier pour renvoyer les attaques et se tenir debout entre un Versailles décadent et un peuple qui gronde. La faiblesse d’Oscar qui n’arrive plus à contenir Marie-Antoinette, incapable de la priver de ses joies, joies qu’elle désirerait elle-même tant avoir, est l’élément qui va faire progressivement basculer l’histoire dans la seconde partie. Fin de l’épisode 18, après l’un des événements les plus troublants de la série, et en même tant que la réalisation passe aux mains d’Osamu Dezaki, la réelle tragédie commence à se mettre en place.

Voilà pour cette partie. N’ayez crainte ! Je ne vous ai pas raconté tout, dites-vous qu’en réalité je ne vous ai même presque rien raconté. Que ceci n’a de sens que grâce aux multiples événements de chaque épisode, tous là toujours dans un but précis. Qu’il s’agit simplement du reflet d’une qualité d’écriture presqu’inégalée dans le medium. Ceci n’est que l’explication des thèmes soulevés, j’en conviens avec énormément de détails, mais cela est simplement du à la très grand nuance de l’œuvre et à l’énorme densité de chaque épisode. Un épisode de Rose of Versailles c’est en contenu équivalent à 7 ou 8 épisodes de séries actuelles, et encore je suis gentil. Forcément dès qu’on veut en parler de manière non superficielle, beaucoup de choses deviennent vite longues. Il faut aussi savoir, qu’à titre personnel je pense légèrement préférer cette partie à la seconde, quoiqu’il soit dur de trancher. L’ambiance plus optimiste et plus valeureuse me plait d’avantage, mais d’autre part toutes mes scènes cultes sont dans la seconde partie… Bref, sans plus tarder examinons les changements qui s’opèrent dans la seconde moitié de l’œuvre.

Titimathy
Niveau 32
26 avril 2014 à 15:45:03

III : L’AGE ADULTE ET LA DECADENCE – SECONDE PERIODE

Comme je l’ai dit dans la section précédente, la jeunesse des protagonistes est très character-drivée, fondée sur pas mal d’épisodes indépendants. Dans cette seconde partie, l’histoire en elle-même, le suspens si j’ose dire, a une place prépondérante. On commence sur les chapeaux de roue avec la fameuse affaire du collier. Si vous ne la connaissez pas, ce sera un petit cours d’histoire gratuit, contenant d’ailleurs très peu d’erreurs ! Au passage tant que j’y suis, je vous déconseille vivement d’aller vous renseigner sur wikipedia, à propos des personnages (la plupart ayant réellement existé) ou des affaires célèbres, cela risque de lourdement vous spoiler.

Au sein de cette histoire, l’anime décide enfin d’aborder ce qui est au final en suspens depuis 20 épisodes : les conséquences du refoulement extrême des sentiments et des désirs d’Oscar. Ceci l’amène à devoir quitter la dauphine et nous abandonnerons donc Marie-Antoinette qui deviendra à présent un personnage plus secondaire, s’occupant de ses enfants, essayant de laver les affronts qu’elle subit quotidiennement. (Sa culpabilité ou sa non-culpabilité, on pourrait en disserter vraiment longtemps, la section suivante en parlera) Pareil pour Rosalie et Fersen, qui bien sur continueront d’avoir un rôle à jouer, mais globalement tout a déjà été dit. La volonté de l’auteur, qui est également celle du réalisateur est très claire, le personnage non-exploité jusqu’à présent est André. Le passage à l’âge adulte amène énormément de modifications et de maturation chez le personnage. Notamment physiquement il n’est plus du tout le même, on passe d’un jeune homme frêle à une véritable armoire à glace (un peu choquant au début je l’avoue) et une coupe de cheveux plus « spéciale » dirons-nous, je vous laisse découvrir. De plus, le fait de n’avoir jamais été considéré comme un amant potentiel par la femme qu’il aime est évidemment source de remise en question. Chose intéressante, André a beau être un prolétaire, il n’a jamais vécu en tant que tel, hébergé par la famille Jarjayes, suivant Oscar partout, il n’a jamais connu que le faste de Versailles. Le trio Oscar-Antoinette-Fersen le remet fameusement à sa place, il ne peut désormais plus nier qu’il est et restera un simple serviteur, issu du peuple.

Ce fut ma grande crainte dans cette partie, qu’André perde son « cœur noble » pour retourner à la masse populaire et devienne un héros révolutionnaire se battant dans les rues. Parce que le décor de cette seconde partie se situe en effet principalement dans la ville-même de Paris, au sein de la caserne des gardes françaises (constituées essentiellement de prolétaires cherchant à nourrir leur famille avec leur solde, et peu soucieux en fait de défendre leur pays). Fini le faste de Versailles, les décors princiers, les tendres jeux d’enfants dans les grands jardins, la réalité arrive à grand pas et la révolution est en marche. Il est intéressant de voir comment la rébellion progressive du peuple est perçue par les différents intervenants. André n’est pas totalement idiot, mais c’est un idéaliste, il pense toujours qu’il sera possible d’éviter le drame et de simplement entrer dans une ère nouvelle. Il n’a pas cette prétention de révolutionner le monde, il souhaite au contraire simplement découvrir le nouvel horizon de la France avec Oscar. C’est cette espèce de naïveté qui sera malmenée tout au long de la seconde partie, les drames s’enchaineront, la situation se faisant de plus en plus inextricable. A ses côtés un nouveau personnage, le très sympathique Alain de Soisson. Le bon ami, le conseiller, le violent aussi, car ce cher Alain et ses compagnons auront bien du mal à accepter d’être commandé par Oscar, nouveau chef du régiment ! Et pour sur, un noble à la tête d’une troupe de gueux qui n’ont que l’envie de lui dévisser la tête ! Plus que jamais, la prestance et le charisme d’Oscar sont exacerbés à l’écran, car c’est bel et bien là la définition même du charisme. Et c’est là que je fus rassuré, l’anime garde sa constance, garde son thème de prédilection, ce n’est jamais Oscar qui courbe l’échine pour accepter la médiocrité de son entourage, c’est au contraire ceux qui l’entourent qui finissent par la respecter et l’admirer.

Quid de la tragédie alors ? Après tout, comme je vous l’avais annoncé, ces 20 derniers épisodes sont beaucoup plus « lourds » et pessimistes que ce qui précède. Bon elle se situe déjà très clairement au niveau de la réalisation, mais cela nous en parlerons dans la partie VI, mais aussi simplement dans la désillusion totale qui va submerger nos héros. Les faits nous les connaissons, le retour à la barbarie, les morts par milliers, la destruction complète d’une noblesse certes affaiblie mais pour autant encore présente par endroit. L’idée d’une ère nouvelle salutaire, Oscar et André voudraient y croire et ces épisodes n’auront jamais de cesse de détruire tout ce qui aurait pu être construit. Voir ces personnages lutter contre un destin malheureusement déjà immuable est ce qui constitue réellement la tragédie de l’œuvre, à la manière de ces pièces de théâtre historiques dont on connait déjà la fin mais qui nous bouleversent quand même. Tout simplement car on sait que ces personnages auraient mérités tellement mieux, mérités d’être plus que des anonymes, d’être de véritables sauveurs. Et même quand tout semble perdus, il y a cette étincelle, ce minuscule espoir, même plus l’espoir de sauver la France, même plus celui de se sauver soi-même, mais l’espoir de sauver celui ou celle qu’on aime, essayer de sauvegarder cet amour comme dernière marque d’une noblesse déchue. Ca peut paraître incroyablement niais, mais non seulement il s’agit d’une véritable nécessité scénaristique (cf partie V) mais en plus même cela va partir en fumée. L’anime l’annonçait pourtant, même l’inébranlable sera ébranlé, et quand il ne reste au sol que des miettes après l’épisode 39, qui est de très loin l’épisode le plus émouvant que j’aie vu en japanimation, l’épisode 40 finit totalement de vous achever. Vous achever de manière très abrupte et très inattendue, à la manière je dirais même d’un froid documentaire. Toute les dernière chaleurs de l’anime s’étant évaporées après l’avant-dernier épisode, il ne reste plus qu’un courant d’air glacial pour ponctuer la fin du drame. Franchement autant vous dire qu’on a légèrement envie de s’immoler après avoir terminé l’anime, on a beau être prévenu, ça laisse pas insensible !

Titimathy
Niveau 32
26 avril 2014 à 15:45:30

Il n’empêche qu’on parle beaucoup de Révolution, mais qu’en fait elle ne commence qu’à l’épisode 32 ! Rose of Versailles est vraiment mal connu à ce niveau, il s’agit surtout d’un anime sur ce qui a précédé la révolution, les causes bien entendu sont développée via Marie-Antoinette, mais surtout vu d’un œil externe fictif, celui d’Oscar et André. Pour autant, si l’anime met vraiment au centre de son histoire les personnages et leurs émotions, bien plus que de simples faits historiques présentés de manière documentaire (en ce sens il est très différent de legend of the galactic heroes), les personnages historiques ne sont pas à négliger. Le premier qui est pourtant d’importance n’a pas encore été abordé dans ce texte, il s’agit bien sur de Louis XVI ! Défaut ou pas de l’anime, difficile à dire mais on s’attarde vraiment peu sur ce personnage, on lui donne peu de consistance, peu de nuances. Je pense à titre personnel que c’est une bonne chose pour la simple et bonne raison qu’il faut faire des choix, il est impossible de développer en « seulement 40 épisodes » un grand nombre de personnages avec subtilité et intérêt comme cela est fait pour Oscar, André ou Marie-Antoinette. Louis XVI n’a pas ce privilège, on se contentera donc de choses classiques à son sujet mais néanmoins pas inintéressantes. Présenté comme un roi gentil, timide et doux, il ose à peine approcher sa promise. L’anime évite de nous parler de la fameuse affaire de « la consommation du mariage », autrement dit du fait que Louis XVI a mis plus de sept années à avoir son premier rapport sexuel avec Marie-Antoinette, mais cela est quand même sous-entendu à de multiples reprises. Passionné par la serrurerie (et oui !), par la chasse aussi, Louis XVI est un roi « bon » et pas si idiot qu’on le croit, il n’ose simplement pas autant s’affirmer qu’il le devrait. C’est assez dommage je trouve quand même de rester sur cette image « faible » du roi qui n’a pas d’autorité. Historiquement on sait qu’il a fait vraiment pas mal de réformes, qu’il a autant que faire ce peu essayé de renflouer les caisses d’un état à l’agonie à cause de ses prédécesseurs. On se consolera par deux passages extrêmement jouissifs où Louis XVI remet à sa place l’amant de la reine, lui rappelant bien qui est le compagnon officiel de la reine et où un amant doit se tenir ! On se consolera aussi en se rappelant que le roi est un des seuls personnages non corrompus moralement dans l’œuvre et que s’il n’est certes pas le roi qui sauve la France, il aurait très bien pu amorcer un début d’amélioration, qui aurait pu être bonifié par ses successeurs. Mais bon vous connaissez la suite…

La suite elle est notamment due à un personnage dont on a tous entendu parler : Robespierre ! Difficile de savoir comment l’anime veut le représenter. De mon point de vue, il apparait clairement comme un homme désireux d’avoir le pouvoir et de guider la révolution, de l’autre il n’est pour autant pas prêt à accepter toutes les turpitudes pour y arriver. Non-manichéisme habituel là encore, j’ai du mal à me prononcer quand à son statut de « gros connard ». Celui qui est un gros connard par contre, et là la série ne s’en cache pas c’est Saint-Just ! C’est amusant, au lycée on m’apprenait que Robespierre avait beau être un assoiffé de pouvoir, il était un seul à n’avoir pas enrichi sa fortune d’un sous pendant la révolution, à côté de cela Saint-Just (et d’autres bien sur) était un véritable psychopathe, assoiffé de sang et d’argent. Et c’est marrant car l’anime le montre ainsi aussi. Pas tant assoiffé d’argent mais alors mon dieu qu’est-ce qu’il est assoiffé de sang ! Un beau gros fêlé sans aucune nuance là pour le coup, le méchant dans toute sa splendeur, qui ne représente que trop bien le retour à la barbarie. Rassurez-vous une telle caricature ne se veut pas réaliste (le vrai Saint-Just a bien été envoyé en maison de redressement mais il n’était pas fou à ce point) juste un exemple de tout ce que la mentalité putride de l’époque peut créer comme monstre. Ces deux révolutionnaires ne sont heureusement d’ailleurs que des personnages secondaires. Je dis heureusement car je vois mal comment on aurait pu faire passer toute l’émotion de l’œuvre avec des héros pareils…
Je crois que le passage à la décadence est assez clair à présent, cela étant il reste à parler de l’âge adulte, l’âge adulte ou tout ce qui a été vécu pendant l’enfance prend maintenant un sens plus grand, où les erreurs du passé reviennent en pleine figure des protagonistes. C’est là qu’on s’aperçoit que rien n’était écrit au hasard depuis le début, que toutes les décisions prises par Oscar ou Marie-Antoinette ne pouvaient les conduire que là où l’anime les entraine. Chez Oscar, il s’agit du refoulement de la féminité et de son incapacité à totalement guider la reine, chez la reine c’est l’oubli progressif du peuple dont nous parlerons plus en détail dans la section suivante. Mais ce qui est remarquable donc, à ce stade, c’est que l’on a une connaissance parfaite de la philosophie des personnages grâce aux 20 premiers épisodes. Ainsi il n’y a nullement besoin de continuer de tout expliciter avec des mots, les images peuvent prendre le pas. Et ça, la seconde partie en est parsemée ! Que de jeux de regard, renforcés par l’intensité du chara-design, que de petits gestes plein de sens, lourd de sens-même qui a eux seuls en révèlent énormément sur ce qui est à venir. La réalisation à ce stade ne laisse plus rien au hasard, sous la coupe du maitre Osamu Dezaki. La sauce est envoyée à l’épisode 28, elle remonte encore d’un cran au 32, puis au 35… A la fin du 36 je pense qu’on le meilleur exemple d’une scène où toute l’intensité est dans le « non-dit », c’est l’archétype même de la suprématie du procédé. Des images très précises, un jeu de regard incroyable, quelques mots à peine, presque rien, et tout un anime prend son sens, toute une construction de récit de plus de 36 épisodes atteint sa portée tragique à son paroxysme. C’est pour ça que plus haut je disais que, bien que je préfère un tant soi peu l’ambiance de château de la première partie, toutes mes scènes cultes se trouvent dans la seconde partie. Il y a moins de fautes de goût également, presque plus aucun rire de grand méchant pas beau (faut avouer que c’était quand même sacrément ridicule !), ce ne sont pas seulement les personnages qui sont devenus des adultes, c’est l’ambiance en elle-même qui l’est encore davantage. Là encore je pense que c’est André qui bénéficiera le plus du procédé, Osamu Dezaki ne s’en cache d’ailleurs pas, il adore le personnage, il adore l’idée du couple tragique, du duo qu’il peut former avec Oscar. Quelque soit les choix que les persos feront à ce propos, je vous le laisserai bien sur découvrir, il faut comprendre qu’ils ne sont pas simplement écrits dans un but artificiel (celui de créer le plus d’émotions, ou le plus de drame ou je ne sais quoi) mais simplement pour apporter une véritable conclusion à toutes les problématiques ouvertes depuis l’épisode 1. L’œuvre est pensée presqu’à la manière d’un roman, avec toute la densité que cela implique et à aucun moment – surtout dans cette seconde partie – les choses ne seront laissées au hasard. Des décisions scénaristiques parfois un peu dures à avaler sur le moment-même sont toujours pensées depuis le début.

Mais les duos tragiques il y en a plus d’un… Marie-Antoinette bien qu’en retrait sera pourtant au centre de la tragédie et c’est à ce sujet notamment que je me propose à présent de parler dans la section suivante.

Titimathy
Niveau 32
26 avril 2014 à 15:46:25

IV : LA PERTINENCE HISTORIQUE : PROPAGANDE OU NON ?

Dans cette partie on s’intéresse à plusieurs choses. D’abord les sources utilisées par Riyoko Ikeda (la mangaka) pour créer son œuvre, le but littéraire et historique qu’il y a derrière. Ensuite la fidélité historique, ce qui est de l’ordre de la fiction ou de la réalité, et dans quels buts tels choix ont été fait. On utilisera surtout comme exemple le personnage de Marie-Antoinette. Enfin, et c’est assez naturel de se poser la question vu le contexte de la révolution française, on se demandera si oui ou non il y a du propagandisme dans l’œuvre, qu’il soit en faveur du peuple « incompris et soumis » ou des nobles.

A la base Ikeda voulait écrire un manga avec Marie-Antoinette en héroïne, c’était elle au départ « la rose de Versailles ». Se rendant compte qu’un personnage historique n’était pas aussi malléable qu’un personnage fictif, elle accepta très vite l’idée qu’Oscar est et doit être le véritable personnage principal. Dans une de ses interview elle explique que la rose blanche, son éclat et sa pureté sont les symboles d’Oscar, alors que la rose rouge est celle destinée à Marie-Antoinette, oh combien ravissante aussi mais plus enflammée, puis passionnée, plus déraisonnée même. Des roses jaunes et noires sont également prévues pour les antagonistes. Amusant de constater que l’opening de l’anime a ajouté une nuance à cette distinction. On peut en effet y voir la rose blanche, se gorger de sang pour progressivement devenir une rose rouge, je vous laisse en tirer les conclusions… Mais donc, pour en revenir au fait, il est clair qu’Ikeda nourrit une très grande passion pour le personnage de Marie-Antoinette, elle continue encore aujourd’hui de tenir une grande place dans sa vie puisqu’elle va sur scène réciter plusieurs textes écrits par la défunte reine. Le seul ennui est que les sources et les biographies de la reine sont très variées, la plupart en font d’ailleurs un portrait sinistre. S’ils reconnaissent tous la noblesse de Marie-Antoinette face à la mort, ils se chargent en revanche de la faire passer pour un monstre, égoïste, débauché, qui n’a aucune limite et aucune retenue. Or la volonté d’Ikeda était tout de même d’associer à une réalité historique, une fiction romancée où l’on peut s’attacher aux personnages et apprécier leurs qualités. Où donc aller chercher pour atteindre ce but sans non plus totalement massacrer l’histoire de France ? Elle trouva sa réponse auprès de Stefan Zweig et sa biographie de Marie-Antoinette. Dans cet ouvrage, la reine est décrite en tant qu’être humain, certes avec des faiblesses, mais aussi avec sa dignité et la rédemption qu’elle a été capable de trouver avant sa mort. Il ne fait pas spécialement de concession sur le personnage, mais tend simplement à cesser l’effet de diabolisation qu’il y a autour d’elle. C’est ce qui a intéressé Ikeda !

Mais cela ne s’arrête pas là, en dépit des contraintes imposées par son époque et par le genre du shojo dont nous parlerons dans la partie suivante, Ikeda veut réaliser une véritable œuvre intellectuelle, qui n’aura pas à rougir face aux connaisseurs de la révolution française. Quelque chose d’adulte et de présentable, qui pourra plaire aussi à un public plus adulte, plutôt que seulement aux petites filles et adolescentes. Il faut se replacer dans le contexte des années 70, le manga est vu encore comme une sous-culture qui n’a que peu d’intérêt et dont les parents et les profs déconseillent la lecture. Elle, veut au contraire créer une œuvre qui persistera dans le temps, une œuvre qui sera intéressante à lire, émotionnellement et culturellement parlant, tout comme peut l’être une œuvre littéraire. Dans son interview, elle décrit ses recherches de la manière suivante : « Il fallait se documenter, savoir comment les hommes et femmes se mariaient à l’époque, traiter des difficultés socio-économiques et des finances publiques françaises… Je ne m’étais alors jamais rendue en France. Je n’en avais pas les moyens. J’ai utilisé toute la documentation possible, les livres d’histoire, j’ai interviewé des historiens. Pour 100 documents récoltés, je ne pouvais en retenir que 10. Le plus difficile a été d’éliminer. » Tout ça pour dire qu’Ikeda est une passionnée d’Histoire, quelqu’un qui traite l’Histoire avec respect et qui estime qu’il est un devoir de ne pas en parler en caricaturant, même si l’on souhaite grandement romancer les choses. On peut donc déjà répondre maintenant aux ridicules accusations de propagandisme, jamais à aucun moment cela n’a été la volonté de l’auteur, et nous verrons que dans les faits cela ne l’a pas été non plus. Seule la version française a amené un peu de propagande, rien que dans son générique on entend la chanteuse dire « qu’Oscar a chassé les tyrans ». Ont-ils seulement regardé l’anime ? Surement 5 minutes au début et 5 minutes à la fin…

Revenons à présent à Marie-Antoinette et sa personnalité, c’est vraiment là le sujet principal qu’il faut traiter quant aux références historiques. A ce propos, voici ce qu’en dit la mangaka : « C’était une femme pas nécessairement talentueuse, ni intelligente presque bébête, mais elle a été happée par la Révolution, et a gagné en maturité. C’est ce qui m’a fasciné et m’a donné envie d’en faire une œuvre. » L’œuvre en elle-même romance encore davantage, notamment au niveau des intrigues amoureuses, on ne va pas se le cacher la reine a eu de multiples amants, ce n’est même pas vraiment amoral, tellement banal et ancré dans la société royale, mais le fait est là. Dans l’anime elle est présentée comme une femme passionnée qui ne brûle que d’un amour unique pour son amant Fersen. Elle entretient également une relation douce avec son mari, sur qui elle peut compter lors des moments difficiles, bien que cette amitié et ce respect mutuel ne soit jamais véritablement de l’amour. Ce qui pouvait paraitre banal (l’adultère) devient pour autant un sujet moral très important de la première partie de l’anime. La reine ne veut pas céder, elle ne doit pas céder, c’est un principe qu’elle se fixe. C’est ce qui crée l’attachement au personnage, ce à quoi tenait très fortement Ikeda dans la conception de son personnage, la reine n’est pas naturellement « viciée », elle a au contraire une grandeur d’âme qui lui vient de son éducation. Mais Marie-Antoinette garde ce côté un peu bêbête et naïf décrit plus tôt et se laisse charmer très facilement. C’est là que j’en viens au non-manichéisme et à la question qu’il est vraiment difficile de se poser : Est-elle coupable ? Dans la réalité, c’est un sujet compliqué qui demanderait de plus amples recherches, mais parlons juste de la présentation de se culpabilité dans l’anime. Personnellement c’est vraiment la question la plus difficile à résoudre concernant l’anime, je n’ai pas envie de dire que la série ne tranche pas ou qu’elle n’apporte pas de réponses, mais elle essaie tellement de ne jamais caricaturer qu’on finit par se rendre compte que la complexité de l’œuvre ne peut fournir une réponse « tout blanc tout noir ». Elle manque d’intelligence c’est un fait, elle dilapide de l’argent à tort et à travers c’est un fait. Mais quand elle fait ça, elle a à peine 20 ans et veut découvrir comme toute jeune fille les plaisirs de la vie.

Titimathy
Niveau 32
26 avril 2014 à 15:47:25

Alors première chose, un roi ou une reine doit-il se priver totalement de son bonheur personnel pour se consacrer au peuple ? Ne peut-on pas justement bien mieux savoir comment rendre un peuple heureux en sachant personnellement comment l’être ? C’est ce que se dit Marie-Antoinette au début et qui justifie chez elle son attitude, toujours dans l’idée d’être une bonne reine aimée de son peuple. Sauf que ce principe elle va finir par l’oublier. Ses devoirs protocolaires aussi d’ailleurs. Mais à ce sujet on ne sait pas vraiment dire à quels points ils étaient essentiels et on ne peut que la comprendre quand elle doit supporter les plaintes ridicules de petits bourgeois venus à Versailles réclamer on ne sait quelle futilité. Vous le voyez, à chaque défaut, j’ai tendance à essayer de trouver une justification. Ce n’est pas juste une préférence personnelle c’est ce que l’anime tente de faire, on ne veut pas qu’elle puisse devenir un être détestable, et surtout pas dans la première partie où l’on montre la joie et l’innocence de son adolescence. Une fois devenue adulte, la reine semble plus distante, plus aigrie dirait-on même. Il faut dire qu’elle subit nombre d’humiliations et de calomnies de la part de son peuple, avec qui elle finit par rompre presque tout contact. Passant d’une fragilité, prête à casser comme du verre, à une beauté envoutante mais aussi très dure, Marie-Antoinette essaie pourtant de se ressaisir. Essaie de rompre tout lien avec Fersen, essaie de prendre de meilleurs conseillers, d’écouter Oscar, car au fond d’elle son vœu d’être « LA » reine de France ne la quitte jamais. Mais elle finit toujours pas craquer, systématiquement. C’est la je pense son véritable crime : Elle peut faire preuve d’une force et d’une volonté indéfectible lorsqu’il s’agit d’affronter ses opposants et de faire valoir son honneur, mais elle devient une femme incroyablement fragile et faible quand elle doit traiter avec ses plus proches amis. Et comme elle a tendance à mal choisir ses amis, la boucle est bouclée… Si vous finirez peut-être, je l’ignore, par être exaspéré par le personnage, Ikeda ne tenait pas à ce que l’on garde indéfiniment cette image d’elle. Elle utilise principalement la Révolution française pour la remettre au devant de la scène. On le sait, Marie-Antoinette a historiquement gardé une grande dignité et même une grande « royauté » jusqu’au bout, c’est ce qu’elle fait également dans la série. Jamais elle ne courbera l’échine devant le peuple qui veut la voir laisser sa place. Même si elle ne peut ignorer sa part de culpabilité, c’est impensable pour elle de remettre en cause la royauté. Et pour une raison simple, elle a des enfants ! Son fils notamment Louis-Joseph, qu’on a le temps d’apercevoir dans la série est vraiment tout pour elle et dieu que ce petit bonhomme est impressionnant les moments où on le voit ! On sent en lui tout ce qu’il y a de bon à espérer dans la royauté j’en parlais avant. Louis XVI n’est peut-être pas encore totalement à la hauteur mais il s’agit d’un homme idéal pour éduquer un fils qui un jour sera un grand roi. Et cette grandeur elle se sent immédiatement, chez le petit garçon, une grande conscience du devoir à accomplir et des erreurs à réparer. Alors finalement peut-on réellement souhaiter ce qui va arriver à Marie-Antoinette et ses enfants ? Ne se rachète-t-elle pas un peu en ayant éduqué avec autant de justesse un futur roi ? Loin de moi l’idée de faire un laïus pro-Antoinette, mais il est très important d’expliquer en quoi l’œuvre rend le personnage plus profond qu’une simple femme victime de ses passions. Cependant à la fin de la série, quand la révolution est vraiment présente de la manière la plus violente qui soit, son visage changera totalement. Plus aucune douceur, plus aucune gentillesse, juste la nécessité de se battre pour la survie de la royauté ! Et pourtant et cela jusqu’au bout, une grand élégance et une grande politesse, allant jusqu’à saluer le peuple qui veut venir mettre sa tête sur une pique ! Oscar n’aura donc jamais cessé d’être un modèle pour Marie et ce, au delà de leurs nombreux désaccords, c’est à son précieux chevalier qu’elle continuera de penser, même aux portes de la mort. On peut donc dire sans mentir qu’Ikeda a réussi à retransmettre les pensées de Zweig tout en introduisant parfaitement ses personnages fictifs.

Titimathy
Niveau 32
26 avril 2014 à 15:47:42

Ceci permet d’embrailler sur le thème suivant, la fidélité historique, très exactement qu’est-ce qui est fictif et qu’est-ce qui ne l’est pas ? Au niveau des personnages, Oscar est très légèrement inspiré d’un militaire français du même nom. Au final seul le nom est gardé et tout le reste n’est qu’invention, conformément à l’idée de l’auteur de s’autoriser le plus de libertés possibles quant à son personnage. André est totalement inventé. Fersen est énormément romancé, il n’existe dans l’anime presqu’uniquement qu’au travers de sa relation passionnée et torturée avec Marie-Antoinette, alors qu’il a fait beaucoup d’autres choses dans la réalité. Rosalie a existé mais là aussi son rôle est totalement modifié pour gagner en importance. A contrario les antagonistes eux sont tous très fidèles à l’histoire, qu’il s’agisse de la du Barry, de Jeanne Valois, de madame de Polignac ou encore du duc d’Orléans. Certes, il faut dire que certaines rencontres sont inventées et n’auraient pas pu se produire réellement. Pareillement au niveau des dates, il y a quelques petits changements, des personnages qui débarquent plus tôt qu’ils ne le devraient, etc… Des relations familiales inventées également, ainsi qu’une volonté à quelques endroits de donner une portée à des événements qui n’en ont peut-être pas réellement eu. Tout ça est très maitrisé et utilisé avec parcimonie, n’oublions pas que Rose of Versailles reste un anime et non un documentaire et ENCORE HEUREUX D’AILLEURS ! On regarde des séries aussi pour l’émotion et pas juste pour avaler des sacs d’information sans aucune structure ni puissance dramatique. Tous les choix effectués dans un but de romancer ou dramatiser les événements sont très bien pensés et qui plus est, ces légères infidélités historiques donnent envie d’aller se renseigner et de découvrir plus en détail les coulisses de la fin du XVIIème siècle. Et ça, je trouve que c’est fondamental pour un anime historique, une très grande qualité : Il donne envie de se cultiver ! Il vous apportera des choses culturellement parlant en lui-même, mais aussi par ce que vous en ferrez une fois terminé, on gagne sur tous les tableaux.

Cependant, à aucun moment l’anime ne désinforme et ne voudrait faire passer pour honorable quelque chose qui a été historiquement monstrueux, en ce sens et malgré la romance, il reste très attaché à la réalité. C’est ici que j’aimerais donc contrer une critique faite à son encontre : celle de propagandisme ! L’anime serait-il populiste, essaierait-il de faire passer la révolution pour une grande réforme nécessaire qui fit un bien fou à la nation et sauva le peuple opprimé ? Juste non, je me gausse à l’idée que quelqu’un, un jour, ait pu penser ça. Il y a tellement de raisons qui poussent à se rendre compte que cela est totalement faux. Bon on a suffisamment parlé de la défense de Marie-Antoinette qui est une noble, du personnage d’Oscar qui est le plus noble d’entre tous, d’André qui en tant que représentant du peuple tend à s’élever vers la noblesse, bref comme vous pouvez le constater tous les protagonistes qui suscitent notre admiration sont de l’autre côté… Mais ce n’est bien sur pas tout, il n’y a pas de concessions faîtes par rapport à la réalité historique, la Révolution fut une boucherie, l’expression d’une foule barbare qui finit par juste vouloir tout massacrer sans aucun contrôle et cela dirigé par des gens bien moins intègres qu’ils n’y paraissent. Des révolutionnaires tels que Robespierre ou Saint-Just qui finissent par se condamner entre eux, par s’entretuer pour avoir du pouvoir et amasser de l’argent tout comme les nobles qu’ils critiquaient. C’est une idée courante, des gens du peuple qui sont prêt à vendre tout, y compris leur famille pour essayer de devenir bourgeois et un jour peut-être accéder à Versailles, l’exemple le plus frappant est celui de Jeanne Valois (en opposition avec celui de Rosalie qui sera son exact contraire), mais aussi celui de la du Barry, rappelez-vous l’ancienne prostituée devenue au final maîtresse du roi !

Il faudrait néanmoins se garder de croire que l’anime voudrait faire de la propagande « anti-révolution » et idéaliserait le côté de la noblesse. Ce n’est évidemment pas le cas, tout le monde en prend pour son grade et en particulier les nobles bien sur ! Quand on voit des nobles commettre des atrocités envers des citoyens prolétaires, et ce à plusieurs reprises, ce n’est pas juste pour créer une pitié envers les pauvres gueux de la cité, non c’est simplement qu’il ne faut pas se voiler la face. Bien sur que certains bourgeois étaient emplis de vicissitudes, de cruauté et de malveillance envers le peuple. Qu’ils ne le considéraient que comme de la chaire à canon. Alors oui, l’anime montrera aussi cette vision des choses, car après tout il y a bien des raisons à la révolution. Elle ne nait pas de rien même si le résultat est loin d’être glorieux. L’autre endroit où s’exprime la médiocrité de la noblesse est évidemment le château de Versailles, lieu des manipulations et des intrigues de cours. Certains nobles désireux d’évincer le roi et de prendre sa place, n’hésiteront d’ailleurs pas à s’allier à des révolutionnaires et à provisoirement changer de camps pour gagner en popularité. Tout est prétexte à la quête de pouvoir plutôt qu’à la quête d’un réel idéal. Cette vision très pessimiste du monde est elle, très présente dès le début. Plutôt dans le cadre du château pour la première partie et dans celui de la ville pour la seconde. Il y a vraiment une dénonciation claire de la noblesse déchue, embourgeoisée depuis plusieurs décennies maintenant. Egalement une dénonciation des précédents règnes, ceux de Louis XIV et Louis XV qui ont asséché le pays. Mais le peuple oublie qu’il souffre en réalité depuis des siècles, et voyant en Marie-Antoinette un possible espoir de redressement, sa déception finit par le conduire aux pires extrémités. Heureusement il y a aussi des gens biens du côté du peuple ! Nous avons parlé d’Alain de Soisson plutôt, mais à de nombreuses reprises l’on nous montre également des citoyens honnêtes et souffrants, souhaitant simplement se nourrir. Et dieu sait à quel point l’homme est prêt à aller loin uniquement pour se nourrir ! Tous ces événements mis ensemble font qu’on ne peut décemment croire que l’anime ait souhaité à un seul moment simplifier la réalité pour en faire un message de propagande. Les événements ne peuvent certes pas êtres tous subtils, mais en tout cas ils ne sont jamais gratuits et jamais là dans un but de vous faire pencher du côté d’un camp et de ne jamais vous en déloger. C’est aussi ce non-manichéisme et ces situations inextricables qui créent en grande partie le drame dans lequel n’anime nous plonge. Cette difficulté que l’on a à juger les situations, à bien déterminer qui est le coupable ne cesse de nous torturer et de nous investir plus profondément dans l’histoire.

L’autre raison évidente est la puissance émotionnelle du récit, ce qui me permet de passer à la section suivante.

Titimathy
Niveau 32
26 avril 2014 à 15:48:07

V : LE SHOJO-MANGA ET L’EXACERBATION DES SENTIMENTS

Pour bien saisir l’importance qu’a pu avoir la Rose de Versailles dans le monde du shojo, il convient de refaire encore un peu d’histoire à propos de la publication du manga. Bien qu’il y ait quelques shojos connus de ci, de là, ce dernier n’a pas encore gagné ses lettres de noblesse, et si le manga en général ne vole déjà pas haut dans l’estime des gens, celui destinés aux petites filles se trouve encore bien plus bas en terme de considération. Il n’y a qu’une seule chose qui compte, le côté commercial et le nombre de ventes. C’est tout du moins la philosophie du magazine Margaret, qui publie Rose of Versailles à l’époque. Qui plus est nous sommes dans les années 70, il commence à y avoir une odeur de « révolution », si j’ose dire, du côté des femmes, notamment des femmes artistes qui veulent devenir indépendantes. A ce sujet, l’auteur livre le témoignage suivant : « J’appartenais à cette mouvance contestataire s’opposant aux valeurs traditionnelles professées par la famille, les enseignants et la société en générale. Encore chez mes parents, j’ai décidé de vivre par mes propres moyens et le milieu du manga a bien voulu de moi. » Avant de créer Lady Oscar, Ikeda a réalisé d’autres œuvres pour économiser de l’argent et progressivement se faire un nom, chose qui était mal perçue par les hommes de l’époque. Il était toujours beaucoup moins bien considéré d’être une femme seule qui travaille pour gagner sa vie, que d’être une bonne mère de famille élevant ses enfants. Ce féminisme presque « obligé » qui anime l’auteur n’est donc certainement pas étranger à l’idée d’avoir créer un personnage féminin, haut en couleur, qui tient tête aux hommes. Rose of Versailles ne fait absolument pas l’apologie du féminisme, entendons-nous bien, femmes et hommes sont respectés dans l’œuvre, mais il ne faut pas non plus nier les origines du personnage.

Une des autres raisons d’avoir crée ce héros qui se « travestit » un homme est celle de pouvoir rendre hommage au shojo que lisait Ikeda quand elle était plus jeune : princesse Saphyr de Tezuka ! Mais au-delà de la simple référence, c’est aussi une tradition au sein du théâtre japonais, les hommes déguisés en femme dans le théâtre Kabuki et réciproquement des femmes qui jouent des rôles d’homme dans le théâtre Takarazuka ; théâtre qui par ailleurs aura interpréter de nombreuses fois la Rose de Versailles. Cependant je l’ai dit et je le redis, je trouve ça peu intéressant de disserter des heures sur le travestissement du personnage et sur une quelconque ambiguïté sexuelle. Ce n’est absolument pas la volonté de l’auteur et à aucun moment l’anime ne semble vouloir aborder ce sujet. (Contrairement à Utena, qui est clairement inspiré de Rose of Versailles et que je vous recommande également, même si à mon sens il a une portée totalement différente) L’intérêt de créer une femme-soldat est double. Pouvoir inventer un personnage féminin chevaleresque, qui combat comme un homme mais qui garde sa sensibilité. Et en même temps aborder la thématique du refoulement et du déni de soi dont nous avons déjà beaucoup parlé au début de ce texte. Le pari est réussi, Oscar est un des personnages féminins le plus marquant de la japanimation, peut-être même le plus marquant ? Je ne serais d’ailleurs pas étonné d’apprendre qu’il s’agisse de l’arrière-arrière-arrière-…-arrière-grand-mère de Reinhard von Lohengramm !

Mais revenons à nos moutons. Toutes ces ambitions sont bien jolies mais le fait est que pour pouvoir publier dans le Margaret à l’époque, il faut être rentable. Chaque semaine, le chapitre doit se terminer sur un twist et doit être élu meilleur chapitre de la semaine par les lectrices pour que l’histoire puisse continuer. Or ces lectrices ont en général 12 ou 13 ans… Alors comment réussir une histoire de qualité, destinée à perdurer comme une œuvre littéraire conformément à l’ambition d’Ikeda, tout en plaisant et captivant de jeunes adolescentes qui n’ont certainement pas que ça à faire d’analyser la profondeur d’une œuvre comme je suis en train de le faire ? La réponse est très simple et tiens en un mot : l’intensité ! Montrer des personnages et des situations qui exacerbent les réactions et les sentiments. C’est un procédé aujourd’hui bien connu et presqu’une marque de fabrique de l’animation japonaise, mais à l’époque on en était encore aux balbutiements. On peut comprendre alors encore plus à quel point la Rose de Versailles s’est imposé comme un classique, historiquement important dans l’histoire des animes et des mangas. Car non seulement cette émotion tout puissante apportait un divertissement, une envie de toujours savoir la suite (et les jeunes filles étaient contentes) mais en plus même les hommes et les adultes en général étaient pris au jeu et commencèrent à apprécier le manga. Petite anecdote à ce sujet d’ailleurs : Rose of Versailles a été un des premiers mangas (et d’après plusieurs sources il s’agit même du tout premier) à introduire une scène de sexe relativement explicite dans son histoire. Au niveau de l’anime, elle est bien présente mais a été pour le coup beaucoup plus édulcorée, plus « poétisée ». Néanmoins ça n’a pas manqué de faire jaser à l’époque et l’auteur a refusé catégoriquement qu’on l’enlève, estimant qu’il n’y a aucune raison valable de freiner cette liberté d’expression et qu’en plus cette scène est d’une importance capitale pour donner du sens à ce qui suit ! Nous sommes donc typiquement face à une œuvre qui a réussi à toucher plusieurs générations malgré ses contraintes de base.

Titimathy
Niveau 32
26 avril 2014 à 15:48:23

Mais alors comment s’y est-elle prise pour insuffler à l’œuvre ce « tragique-épique » dont on parle depuis le début, ces émotions très fortes, et qui apparaissent régulièrement sans jamais que cela ne devienne lassant ou répétitif ? Le dessin et la mise-à-scène ont un rôle à jouer bien sur, mais là comme nous sommes plutôt dans une petite section dédiée à l’œuvre originelle qui est un manga, nous allons éviter de parler de ce sujet qui n’est pas destiné à notre forum. Mais parlons du fond, qui lui a été fidèlement retranscrit par l’anime ! Il n’est pas facile d’exacerber les sentiments en permanence sans exaspérer le spectateur. Voir en permanence des personnages gueuler ou pleurnicher, ça tape très vite sur les nerfs et c’est un écueil qu’il faut impérativement éviter. Lady Oscar évite cet écueil, bien qu’elle fasse régulièrement pleurer ses personnages, mais il y a bien sur un « truc » qui permet d’assurer la pertinence de cette tactique et ce truc c’est de donner de l’enjeu à l’histoire. Toujours et continuellement renouveler les intrigues, renouveler les défis à surmonter, toujours refaire apparaitre les problématiques habituelles mais en complexifiant, en augmentant l’intensité des situations dans lesquelles elles s’expriment. Bien sur cela ne suffit pas, il faut que les scènes prises de manière indépendantes soient toutes réussies et créent de l’empathie. Pour ce faire, plusieurs moyens, la réalisation dont nous parlerons après, mais aussi les dialogues ! Qu’il est agréable dans les très bons anime comme celui-ci de bénéficier du « bon mot au bon instant ». Qu’il est plaisant d’éviter les longues tirades gorgées de pathos tournées et retournées dans tous les sens pendants trois plombes, pour plutôt préférer les petites phrases puissantes, les mots murmurés à l’oreille qui sont emplis d’un sens profond. Qu’il est agréable de voir un anime qui ne prend pas le spectateur pour un con en commençant à lui raconter tout dans les moindres détails au cours de dialogues interminables, mais de plutôt voir un anime qui profite pleinement de son médium audiovisuel pour faire passer l’information aussi par l’image et le son, et ponctué cela seulement par quelques mots très bien placés. Bien sur je parle là des scènes à fortes tendances émotionnelles (souvent à chaque fin d’épisode), il ne faut pas croire que Lady Oscar est un anime muet où ça parle peu, au contraire ça parle tout de même beaucoup. Mais ça ne parle jamais de trop, et ce juste dosage est je pense une de ses qualités principales. C’est vraiment parvenir à estimer à quel moment il faut se retenir et rester pudique et à quel moment on peut se lâcher et envoyer la sauce sans retenue.

D’ailleurs ce dosage, il s’équilibre fortement entre les protagonistes féminins et masculins, faut pas croire que seuls les femmes vont pleurer et que les hommes vont toujours rester droits comme des statues. Moi je ne trouve pas ça ridicule de montrer un homme capable de verser quelques larmes, parce que dans la Rose de Versailles, ces larmes sont toujours un symbole très fort. Le symbole d’un amour qui ne peut voir le jour, d’une noblesse déchue, d’un idéal brisé, bref de quelque chose de puissant qui anime totalement l’être humain et qui donne du sens à sa vie. Et quand ce quelque chose vole en mille morceaux, on ne peut que comprendre et avoir des frissons en voyant de fines larmes perler sur le visage du personnage, qu’il soit homme ou femme. Après ne nous voilons pas la face, les femmes-elles pleurent très souvent et sont souvent torturées par beaucoup de choses, et dans les femmes je comprends Oscar qui n’a nullement renié les pleurs en reniant sa féminité. Par contre ces quelques moments « superficiels » où les larmes sont versées très rapidement se trouvent presqu’exclusivement dans la première partie, c'est-à-dire l’époque de l’adolescence, l’époque où les jeunes gens sont à fleur de peau, d’autant plus à fleur de peau qu’ils ont tous des destins exceptionnels ponctués par des drames précoces, des drames qui vont bouleverser toutes leurs vies. Alors non au final, on ne peut jamais réellement parler de gratuité ou de « forced drama » comme diraient certains.

Il y a une autre raison, beaucoup plus fondamentale encore qui fait que jamais le drame n’est forcé et que toujours il a un très grand impact sur le spectateur, ce sont les liens ! Dans Rose of Versailles ce qui émeut ce n’est jamais, ou pratiquement jamais, le twist en lui-même (comme je l’ai dit, la narratrice se charge souvent de vous l’annoncer à l’avance) mais c’est la simple conséquence d’une multitude de liens et petits détails qui s’accumulent en 40 épisodes. C’est quelque chose qui selon moi est une des qualités d’un grand anime et en général d’une grande œuvre, ne pas chercher à impressionner par la scène en elle-même mais surtout par tout ce qui a pu amener à une telle scène, faire ressentir au spectateur que la situation est intense PARCE QU’elle découle de toute une évolution bien écrite depuis 30 épisodes. C’est quelque chose qui arrive lorsqu’on donne du sens à toutes les actions des personnages, à toutes les scènes, quand rien n’est laissé au hasard et que l’écriture est d’une qualité constante. Et ça c’est pleinement le cas de la Rose de Versailles, c’était un des buts fondateurs de Riyoko Ikeda. Ainsi le tragique s’exprime comme la connaissance du destin inéluctable formé de toute pièce par chacune des décisions prises par les héros, et le souffle épique vient de la lutte incessante des dits-héros contre cette fatalité. On en vient même à avoir toujours de l’espoir, à toujours chercher de l’espoir alors qu’on sait bien qu’il n’y en a plus et ce, tellement l’attachement aux personnages devient viscéral. Cela étant, ne négligeons pas la qualité intrinsèque des scènes prises à part, elles sont souvent en elle-même réalisées de manière telle que seul un torrent d’émotions puisse surgir. Ainsi il est à présent temps d’aborder le dernier point de cette synthèse et de parler enfin de la forme et de la réalisation de la série !

Titimathy
Niveau 32
26 avril 2014 à 15:49:08

VI : UNE REALISATION SCINDEE : OSAMU DEZAKI ET LES HARMONY CELS

Il est évident que pour représenter au mieux la beauté et la noblesse des sentiments des personnages, l’enjeu historique et le drame également, il est vital d’avoir une réalisation sans failles, intense, agréable à regarder. Une mise en scène surtout qui met en valeur de manière efficace les points importants, les regards, les visages, etc… Rose of Versailles possède cette qualité, et cela n’étonne personne, un grand nom du manga et de l’animation a travaillé dessus : Osamu Dezaki ! Mais ce que beaucoup de gens ignorent, c’est qu’il n’a repris la série qu’à l’épisode 19, suite à l’abandon de Tadao Nagahama (qui a eu quelques différents avec d’autres membres du staff). Un certain nombre de puristes n’hésiteront pas à snobber la première partie de l’anime pour cette raison, préférant se concentrer sur ce qu’a fait leur réalisateur fétiche. C’est pourquoi avant même de parler d’Osamu Dezaki, nous devons un peu nous attarder sur le travail et les qualités de Nagahama.

Ce qui a été beaucoup reproché par Nagahama, et d’ailleurs même Dezaki en prenant sa suite n’a pas spécialement apprécié, c’est le fameux côté « fabulous » de Rose of Versailles. Ca scintille de partout, ça met plein de petites paillettes, de petits points lumineux pour donner un sentiment d’éclat et de pureté à l’arrivée de chaque jolie fille. Ca cristallise les sentiments en faisant briller les yeux de milles feux, ça joue beaucoup sur les lumières et sur des tons colorés très doux. Bref ça fait shojo pour petite fille, disent les détracteurs. Il est important de se rappeler une chose, la première partie de Lady Oscar parle de jeunesse, d’adolescence, de naïvetés, d’idéaux qui ne sont pas encore brisés mais qui au contraire viennent de naître et veulent s’épanouir. L’admiration aussi joue un grand rôle, c’est à cette époque que les protagonistes choisissent leurs modèles, les gens qu’ils vont suivre, à qui ils vont vouer leur vie. Toute cette innocence est parfaitement retranscrite dans la réalisation de Nagahama, qui avait bien compris la structure en deux parties du scénario. Il y a un véritable souci de fidélité par rapport à l’esprit de l’œuvre, sans pour autant vouloir l’abrutir. Soyons clair il y a beaucoup de scènes « dures » également dans la première partie, des scènes sans fautes de goût, sans strass et paillettes. Celles-ci ne sont utilisées qu’aux moments propices, pour décrire les sentiments adéquats. D’ailleurs il y a chez Nagahama (comme chez Dezaki bien sur) une volonté de toujours représenter adéquatement le sentiment, de directement le faire parvenir au spectateur dans sa forme la plus essentielle. Pas de superflu, seulement ce qui importe réellement. Pour ce faire il utilise énormément de « trucs d’animation » différents, des plans entrecoupés, des jeux de couleurs, des effets de répétition, des prises de vue très spéciale. Bon je n’ai pas envie d’entrer dans les détails et de partir dans un discours technique rébarbatif. Parfois c’est cheap, parfois pas. Je pense que c’est efficace largement 95% du temps, mais bon quelques moments totalement foirés à ce niveau ne sont certainement pas à exclure.

Il n’empêche qu’il y a dans Rose of Versailles, quelque chose que j’estime être réellement perdu aujourd’hui dans les animes, c’est cette notion d’efficacité dans la réalisation. Dezaki le dit lui-même dans son interview (disponible dans le coffret collector) : « le travail d’un réalisateur est que chaque image ait du sens ». Pas question de faire du remplissage, de créer 5 minutes de vide total, pour arriver péniblement à tenir 20 minutes chaque semaine. Lady Oscar ce sont 40 épisodes où pendant toutes les secondes de ces 20 minutes, à chaque épisode, tout est pensé et structuré et mis en forme dans un but précis. C’est la densité narrative ET la densité de la réalisation qui donne cette immense sensation de contenu. Personnellement, je regardais un épisode chaque soir, ça me suffisait amplement, j’en avais largement pour mon argent, sans devoir m’en enfiler 10 d’affilée. Et donc pour en revenir à Nagahama et à ses diverses techniques cheap, elles ont le mérite à chaque fois de viser l’efficacité et de donner de l’intérêt à ce qui est montré. C’est vraiment une série qu’il faut montrer à tous ceux qui pensent que la qualité d’un anime est proportionnel aux nombres de dessins par seconde. Avec la Rose de Versailles, vous réapprendrez à apprécier les plans fixes, à voir l’utilité d’un plan fixe, des changements de rythme, à sentir toute la puissance qu’une seule image peut délivrer. Et là je ne parle pas encore des harmony cels qui sont les plus beaux plans fixes de la japanimation, non simplement d’images plus classiques mais totalement éblouissantes.

Mais ceci n’est toujours pas suffisant, il y a bien évidemment aussi le character design ! On parle beaucoup du duo Dezaki/Sugino pour Rose of Versailles. Ce n’est pas tout à fait exact, celui qui a été le character design principal et le plus proche de Dezaki lors de la réalisation fut Araki Shingo, que vous connaissez tous pour son travail sur Saint Seiya. Les figures sont quand même très marquantes ! A dire vrai il y a nombres de similarités avec Saint Seiya, qu’elles soient volontaires ou non, moi je suis persuadé qu’il y a une inspiration évidente. Les fameuses femmes chevalières qui font évidemment penser au personnage d’Oscar, Aphrodite et sa rose blanche qui devient rouge en se gorgeant du sang des victimes (rappelez-vous l’opening), de manière générale ce même sentiment de tragique-épique, bien que Saint Seiya ne soit qu’un shonen bien moins réfléchi que la Rose de Versailles, et que dans son cas les musiques étaient également exceptionnelles. Mais la force du design est la même, surtout au niveau des yeux. Araki réalise pour moi réellement les plus beaux de la japanimation, ceux qui expriment le regard le plus intense, le plus saisissant. Des yeux qui savent montrer de la douceur, de la crainte, de la pudeur, de la tristesse, passer par des dizaines d’émotions, en étant toujours convainquant. C’est d’ailleurs amusant de comparer des screens de Saint Seiya ou de Rose of Versailles quand il y a des gros plans sur les yeux (notamment ceux d’Oscar), on peut à peine faire la différence. Oscar peut ressembler par moment à Hyoga, Shion du Bélier, Aphrodite, etc… André quand à lui dans sa jeunesse fait monstrueusement penser à Seiar lui-même. Même si en grandissant, comme je vous l’ai déjà expliqué, son visage devient beaucoup plus carré, sa coupe de cheveux en fait une espèce de héros romantique sauvage. C’est assez déstabilisant, au point même où je doute que ce soit Araki qui ait confectionné ce nouveau visage pour André.

Titimathy
Niveau 32
26 avril 2014 à 15:49:24

Dezaki a tout de suite repéré l’immense talent d’Araki pour donner de la tension dramatique dans les expressions des personnages. Il a pensé (à tort) que son talent n’était pas assez exposé dans la première partie, de nouveau à cause de l’ambiance trop douce et trop « shojo ». Son erreur au final a été de penser que Rose of Versailles ne devait traiter que de la révolution et du drame associé, alors que pendant 20 épisodes elle n’en parle même pas. C’est donc un peu par hasard si la réalisation de l’anime est si bonne, puisque chaque réalisateur a pu traiter la partie qui l’intéressait le plus en y insufflant l’ambiance qu’ils souhaitaient. Ambiance qui s’accordait naturellement avec celle pensée par le mangaka au départ ! Convainquant donc Araki de totalement se lâcher dans la seconde partie, plus que jamais l’intensité émanant du character design est mis à l’honneur sous la direction d’Osamu Dezaki. La fin de l’épisode 36 en est le plus bel exemple, j’espère que vous pourrez le voir. Fondamentalement le chara-design ne change pas, mais la manière de le mettre en scène et de l’animer, lui change totalement. Moins de scènes cheap pour le coup, une animation plus standard mais rudement efficace. De très beaux mouvements même à l’occasion, lors de danses ou de duels. Une mise en scène qui va chercher la portée dramatique tout le temps, c’était là ce qui intéressait Dezaki : le drame ! Pas le drame forcé mais la beauté diffuse qui s’échappe de l’histoire lors de sa phase décadente. Surement influencé par son précédent travail sur Ashita no Joe, il est clair que c’est vraiment Dezaki qui a apporté la touche ultime pour atteindre le niveau d’une grande tragédie. Il rappelle cela dit dans son interview, que la base pour mettre en scène un bon drame, c’est d’avoir un texte de base très solide qui peut donner naissance à de nombreuses inspirations. Le rendu visuel était d’ailleurs souvent retravaillé 4 ou 5 fois complètement avant d’être diffusé, tant de nouvelles idées naissaient régulièrement pour améliorer la tension des scènes.

Néanmoins Dezaki (et Sugino) sont férus d’une méthode pour économiser le nombre de dessins, des plans fixes très particuliers dessinés au crayon : les harmony cels ! J’en ai parlé dans le titre, je l’avoue, pour attirer votre attention mais je ne compte pas non plus passer 50 pages à vous décrire quelles sont toutes les caractéristiques picturales d’un harmony cel, ce qui constitue sa différence avec un cellulo normal. (C’est facilement trouvable sur le net pour les intéressés) Grosso modo il y a un fin travail au crayon noir sur le personnage sans peinture, qu’on superpose à un fond peint avec un personnage plus flou en gris clair. D’aucun aiment bien parler « d’effet impressionniste », une chose est sure, il s’agit régulièrement des plus beaux dessins présents dans l’anime. Très régulièrement d’ailleurs, on les voit en fin d’épisode pour mettre en valeur le cliff-hanger, l’animation du mouvement étant parachevée avec l’apparition d’un harmony cel. La volonté d’utiliser cette technique n’est pas seulement une question d’économie, il y a aussi un but artistique, celui de réaliser le plus beau plan fixe qui soit, celui qui arrivera au mieux à capter la force de l’instant, à figer cette puissance dans le temps pour qu’elle garde une empreinte profonde dans l’esprit du spectateur. Dezaki aime la beauté de la photographie qui peut parsemer une œuvre audiovisuelle, il confie penser qu’il a hérité de cette habitude à cause de ses débuts dans le manga. Il n’était bien sur pas le seul à utiliser cette technique de l’harmony cel, d’ailleurs Rose of Versailles en contient déjà quelques uns dans sa première partie, mais c’est avec lui que cela devient un automatisme, une technique régulière qui ponctue chaque fin, et souvent chaque milieu d’épisodes. Je refuse de vous montrer des images, pour que vous puissiez toutes les apprécier au moment même dans l’intensité de l’instant particulier où elles sont insérées.

Enfin, la dernière touche à apporter pour qu’une émotion passe au mieux, c’est évidemment la musique. Je n’ai pas trop envie de vous assommer avec une analyse des osts, analyse que je n’ai pas faite d’ailleurs et je ne prétends pas en avoir les compétences. Je ne pense pas qu’elles soient exceptionnelles (même s’il y en a 2 ou 3 vraiment magnifiques) mais par contre toujours associées aux moments propices. C’est amusant de constater que pour les scènes tristes, il n’y a qu’une ou deux ost, toujours les mêmes, mais qui font à chaque fois leur effet, qui à chaque fois arrivent à provoquer le petit pincement au cœur. Je pense que c’est tout ce qu’on peut raisonnablement demander à une musique d’anime. J’ai apprécié aussi le souci d’essayer de faire des musiques « d’époque » pour coller à l’ambiance Versaillaise dans la première partie. Il faut dire que visuellement, on est quand même loin de tout ce qu’on pourrait faire aujourd’hui pour représenter la magnificence du château donc des petites musiques chatoyantes sont de bons goût pour améliorer ce rendu.

Voilà pour la réalisation, il y aurait surement beaucoup de choses à dire, mais les discours techniques ce n’est pas spécialement ce que je préfère lorsque je parle d’une œuvre, donc j’espère que cela vous sera suffisant pour comprendre comment le travail technique a pu totalement servir l’œuvre de départ pour la magnifier. Comment le hasard a bien fait les choses et a permis à deux réalisateurs, très opposés idéologiquement, d’adapter la partie qui leur convenait le mieux pour en restituer fidèlement l’ambiance et lui donner même un sens encore supérieur ! Et surtout, que ce soit dans la douceur ou l’amertume, comment ils ont pu retranscrire la volonté d’intensité d’Ikeda par un côté tragique-épique que vous ne retrouverez nulle part ailleurs !

Titimathy
Niveau 32
26 avril 2014 à 15:49:50

VI CONCLUSION

Les gens qui ont tout lu jusqu’ici doivent se dire : ENFIN ! J’espère qu’ils comprendront que j’ai fait mon maximum (je doute que ça réussisse mais bon) pour ne pas faire le fanboy mais au contraire me fonder quasi exclusivement sur des faits de l’anime et des interviews des différents intervenants pour ne pas déformer la réalité. Et justement quand on utilise les faits et qu’on veut les analyser de manière une minimum complète et pertinente, ça prend vite énormément de temps et de place. L’anime donc, je le répète, possède des défauts, il est même certain qu’au moins quelques scènes vous paraitront ridicules ou vous exaspéreront, c’est malheureusement inévitable vu la quantité de choses proposées.

Mais néanmoins une dernière fois et de manière très synthétique je vais rappeler quelles sont ses qualités, ce qui fait qu’il est aujourd’hui incontestablement un de mes animes préféré, peut-être pas MON préféré (tout simplement car je suis plutôt fan d’happy end à la base) mais assurément par contre le meilleur que j’ai vu qualitativement parlant, au même titre que les Monster et autre Maison Ikkoku.

Rose of Versailles est une œuvre bouleversante, c’est un torrent d’émotions qui vous prend aux tripes, qui vous font passer par plein d’états différents. C’est une manière unique d’aborder le tragique dans l’animation japonaise en se servant de la réalité historique comme base pour en faire une véritable fiction épique. C’est aussi et surtout une œuvre d’une grande densité, d’un intérêt intellectuel voulu et porté jusqu’au bout par une réalisation adéquate. Et enfin, naturellement c’est une des romances la plus émouvante et réaliste qui soit.

Il n’y a plus rien à en dire si ce n’est que vous devez voir cet anime, que tout fan de japanimation est obligé de le voir. Tout simplement parce que c’est un classique indémodable, un anime historiquement important, adapté d’un manga culte et culte lui-même. Mais aussi encore plus simplement parce que c’est un chef d’œuvre. Un véritable joyau qui a été noyé par les préjugés qu’on pouvait en avoir à cause de sa diffusion française.

Sur ce, merci de m’avoir lu pour ceux qui en ont eu le courage et bon visionnage pour ceux qui me feront confiance et se laisseront tenter. N’hésiter pas à venir en débattre et à poster vos avis ! :o))

Pilou_CS
Niveau 48
26 avril 2014 à 15:51:05

Pas déçu... :noel:

Bon ben je pense que j'aurais plus vite fait de voir tous les épisodes que de lire ces pavés.

LeobatXIIIDuNom
Niveau 20
26 avril 2014 à 15:52:21

Je lirai après avoir vu l'animé :hap:

Ce pavay ultime :hap:

Otakours
Niveau 10
26 avril 2014 à 15:58:11

Hum... Intéressant, je prendrais le temps de tout lire quand j'aurais un peu de temps libre. :oui:

En tout cas, c'est sûr que ton texte doit être extrêmement documenté. :oui:

JamesJoyce
Niveau 10
26 avril 2014 à 16:02:52

La révolution est en marche. :content:

ZeIoft
Niveau 10
26 avril 2014 à 16:04:07

:ouch2: lady oscar

DiZ25
Niveau 25
26 avril 2014 à 16:04:56

J'ai jamais été aussi phobique de la proximité entre objets tranchants et mes yeux que depuis que j'ai vu cet anime.

Mais il était plutôt cool pour en parler très rapidement.

MoktarMaracana
Niveau 10
26 avril 2014 à 16:09:42

vu y a un ans en vost
c'est du classic classieux.

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Sujet : [Tragédie] Rose of Versailles
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