Le football arriva dans l'Empire Russe, comme partout ailleurs, grâce aux marins britanniques durant la fin du XIXe siècle.
Ce dernier mets un peu de temps à devenir populaire dans le pays des Tsars mais à la veille de l'année 1917 et de ses deux révolutions qui vont chambouler l'histoire du pays, le ballon rond a percé au sein du prolétariat russe, et la plupart des usines moscovites possèdent leur équipe de football, composée aussi bien d'ouvriers que de cadres.
Flash-forward vingt ans plus tard : nous sommes en 1937.
Joseph Staline règne sans partage sur L'URSS et les Grandes Purges sont en train de renforcer la domination du Vojd.
Mais en Espagne, 1937 est synonyme de Guerre Civile. Au milieu du chaos, des combats et des morts, une équipe de football basque, composée de joueurs de l'Athletic Bilbao, arrivent à Moscou dans le but de lever des fonds pour les républicains espagnols.
Leur accueil est euphorique, l'amitié des peuples est de mise entre le peuple soviétique et les basques oppressés.
Ces derniers joueront plusieurs matchs en l'espace de deux mois et cette tournée soviétique aura une influence majeure sur l'évolution du football en URSS mais également dans le monde.
Le football soviétique n'a quasiment pas évolué depuis l'arrivée des marins britanniques. Les équipes de l'Union jouent encore en 2-3-5. La pyramide n'est cependant plus utilisée dans le reste du monde depuis l'avènement du W-M d'Herbert Chapman durant les années 1920.
Les soviétiques n'avaient jusqu'ici affrontés de médiocres équipes d'ouvriers étrangers et la tournée des Basques tombent au bon moment pour les Soviétiques qui pourront affronter une équipe de classe mondiale sans risquer d'être humiliés par une formation "bourgeoise".
Et le 24 juin 1937, le XI Basque mets une véritable claque au Lokomotiv Moscou : 5-1 !
Trois jours, les joueurs du Dynamo ont pour consigne de joueur un jeu rude pour essayer de ne pas subir la même correction, résultat le score est de 2-1 en faveur des Basques. La défaite est honorable mais d'autres matchs sont mis à l'affiche : le 30 juin, une sélection de plusieurs équipes de Leningrad rencontrent les Basques dans la Venise du Nord et réussissent à tenir le match nul 2-2.
On se félicite de cela mais certains n'oublient pas de dire que les Basques ont été fantomatiques et que l'arbitre plus que partial...
Deux autres matchs auront donc lieu à Moscou, une revanche contre le Dynamo puis un ultime match face au Spartak.
La revanche voit les invités mettre sept buts pour une victoire 7-4 avant de perdre 6-2 contre un Spartak renforcé par quelques joueurs d'autres équipes et d'un arbitrage plus que favorable aux locaux.
Les soviétiques ont enfin leur victoire mais le niveau réel du football soviétique à été révélé, il ne fait pas le poids contre celui du monde bourgeois...
Arrive alors Boris Arkadiev.
Ce dernier a vu la différence fondamentale entre le Spartak et les autres équipes durant cette tournée. L'équipe du peuple fût la seule à imiter le W-M des Basques et cela joua grandement en leur faveur.
Entre la tournée et son arrivée à la tête du Dynamo Moscou, il s'était passé 3 ans. Tout le football soviétique était passé au W-M mais le Dynamo, pour des raisons identitaires, fût l'un des derniers à prendre ce virage.
A son arrivée, Arkadiev mis en place le W-M mais en le modifiant, laissant une plus grande créativité à ses joueurs et leur permettant de dézonner de leur poste.
La saison commence mal mais après une défaite contre le Dinamo Tbilissi, Arkadiev réunit ses joueurs et leur demande de faire un compte-rendu de leur performance et celle de leurs coéquipiers.
La réunion marquera le début de la domination des idées d'Arkadiev.
Le Dynamo Kiev est battu 8-5 à domicile puis 7-0 en Ukraine et le Spartak, champion en titre, est pulvérisé 5-1 chez lui. Le Dynamo gagne finalement le titre durant la dernière journée. Les sept dernières journées du championnat se seront terminés sur sept victoires, vingt-six buts marqués et seulement trois encaissés.
Le style de jeu du Dynamo est nommé "désordre organisé" et marquera l'histoire tactique, c'est l'une des premières fois que l'on parle de dézonnage et surtout la première fois que l'on voit une défense à quatre, le milieu défensif Arkady Chernyshev jouant parfois si bas qu'il pouvait être considéré comme un quatrième défenseur.
Pour citer le génie lui-même : "Notre ailier gauche, Sergei Ilyin, marquait essentiellement en position d'avant-centre, notre ailier droit, Mikhaïl Semitchastny, depuis le flanc gauche, notre avant-centre, Sergueï Soloviov, depuis les ailes."
La guerre éclate néanmoins et stoppe Arkadiev, lorsque le football soviétique reprends, il est au CDKA et la lutte pour le titre n'existe qu'entre deux clubs, son actuel club et son ancien. Arkadiev contre Arkadiev.
Cette situation de monopole durera jusqu'en 1952, il entraîne l'équipe qui va aux JO et perds contre la Yougoslavie en pleine rupture Tito-Staline. Le Vojd ne lui pardonne pas, le CDKA est dissous en milieu de saison et jamais plus Boris Arkadiev n'atteindra les mêmes sommets.
Néanmoins, il influencera les deux coachs les plus importants dans l'URSS post-Staline : Viktor Maslov et Valeriy Lobanovksiy, les deux hommes qui feront du Dynamo Kiev un club du gratin mondial.