Se connecter

Pro Cycling Manager Saison 2018

Sujet : Les chroniques de Vizbragz ft. Le blabla de Christophe
1
Vizbragz
Niveau 8
27 mai 2019 à 15:52:19

En collaboration avec l'équipe du blabla de Christophe, voici les chroniques de Vizbragz ! Un projet hebdomadaire dévoué à la synthèse de concept, d'idées et de culture à travers des écrits brefs et percutants.

Vizbragz
Niveau 8
27 mai 2019 à 15:53:13

1. Comment les mèmes ont castré Internet

Il y a encore quelques années, les contrées virtuelles étaient le théâtre de violents affrontements opposant une bande d’autoproclamés bons samaritains aux « trolls ». Créé de toutes pièces, ce nouveau monde numérique ne présentait pour exclusive menace que ses conquérants. Une telle mythologie ne viendrait certainement pas à l’esprit des internautes d’aujourd’hui, offerts malgré eux à un monde virtuel politisé, en particulier sur les réseaux sociaux. La maîtrise des outils virtuels, pourtant très faillible chez la majorité de nos belligérants, a laissé place à des clivages plus traditionnels et moins complexes. Cette limpidité, couplée à la souplesse qui caractérise les échanges sur Internet, n’a pas tardé à donner lieu aux pires niaiseries.

L’art du « trolling » a une place toute particulière dans l’histoire humoristique d’Internet, si ce n’est son histoire en général. D’abord considérée comme une menace et proscrite par les pacifistes en puissance, la discipline s’est inévitablement vue détournée par ses victimes au fil des coups d’éclat. L’intérêt ici est de s’intéresser au modèle français et d’abandonner les perspectives d’une analyse générale et du lot de variations qui l’accompagnerait. Grosso modo, l’Hexagone a un train de retard sur le monde anglo-saxon (étant donnée la (sur-)politisation récente du milieu, l’analogie peut tout à fait être extrapolée au domaine politique).

C’est à l’aube des années 2010 que survient le point de cassure. Les réseaux sociaux commencent à sérieusement pousser tandis que les premières initiatives coulent du fait de leur portée trop restreinte (requiescat in pace, MSN). Internet s’universalise et un lissage de la culture virtuelle s’impose. À aucun moment ignorer cette mode n’était envisageable pour les communautés de « trolls » qui aspiraient au renouvellement : les réseaux s’imposaient progressivement comme la première marche d’un périple virtuel qui pourrait bien rivaliser avec la longueur d’une vie humaine. Ainsi, de nombreuses initiatives fleurissent, en particulier sur Facebook, afin de transmettre le flambeau à la nouvelle génération.

Cette véritable ruée vers l’or culturelle du XXIe siècle constitue également une opportunité pour des personnages mineurs dans leur clan d’accéder à de nouvelles opportunités. Ainsi, Karl Lapointe, fantomatique membre du 15-18, exporte sur les réseaux sociaux les guerres de clan du forum en créant le « Parti Noeliste ». Autour de ce dernier se développent de nombreuses communautés, moins coutumières et plus accessibles. Les victimes de cette vague de « néo-trolls » se voient attribuer le doux sobriquet de « kikoos », terme utilisé à tort et à travers pour désigner des enfants pénibles, particulièrement immatures voire béotiens. Un clivage d’autant plus flou qu’il définit dans ses grandes lignes la crise d’adolescence, épreuve surmontée par la majorité de nos amis.

Là encore, les réseaux jouent rapidement le rôle de rouleau compresseur. De moins en moins hermétiques à ce qu’elles prétendaient combattre, les communautés succombent face à l’entrisme. On en vient à cibler des groupes restreints et évidemment dépassés : « directioners », « emos », et caetera. Les critères de l’humour s’effondrent et la porte est ouverte au développement de projets toujours plus démocratiques et déracinés. L’humour noir sans contexte succède sans suer au « trolling », on conserve la fausse identité des « trolls » mais laisse de côté tout le panache. Ne restent donc plus que des « fakes », dont la frontière avec l’utilisateur lambda n’est plus qu’un pseudonyme, voire un calembour mal alambiqué.

Les rapprochements inhérents aux communautés composées de membres ayant à leur disposition un temps libre hallucinant font aisément le reste. Le besoin de lier des relations de plus en plus intimes fait s’effondrer les dernières barrières. Les « fakes » apparaissent à autrui dans leur plus simple appareil : ils ont mis de côté leur valeur mais pas leur prétention. On peut désormais assister gratuitement à des farces où les acteurs, tout au mieux les pairs du spectateur, sont persuadés de dominer psychologiquement une population apparemment aliénée, ou du moins, moins aliénée qu’eux.

Leurs capacités s’évaporant indubitablement, nos « fakes » n’ont plus qu’à leur disposition ce qui faisait le succès des pages d’humour grand public : coller un texte sur une image pour en faire ressortir un mème. Le besoin de hiérarchie fait que de nombreuses dichotomies apparaissent, au point de faire du mème une discipline. On en vient à le théoriser, les templates fleurissent et les plus grands « mèmeurs » jettent toutes leurs compétences graphiques (parfois honorables) dans un ouvrage souvent creux. Le paroxysme de ce système est atteint avec le label Neurchi. Il n’y a qu’à l’observer pour se rendre compte d’une chute aussi cruelle.

Chancla2006
Niveau 7
27 mai 2019 à 21:03:08

Excellent travail, qui n'a pas eu le succès mérité mais toute l'équipe du Blabla de Christophe est à fond derrière le projet !

Browl
Niveau 10
28 mai 2019 à 22:40:36

Les communautés succombent face à l’entrisme.

:)

1
Sujet : Les chroniques de Vizbragz ft. Le blabla de Christophe
   Retour haut de page
Consulter la version web de cette page