Art

Perso je comprends bien la volonté d'être frappé par quelque chose d'imposant, de profond, de très humain, qui va nous façonner, nous refiler le virus de la découverte et de la connaissance, nous envoûter. Je pense que la plupart d'entre nous ont commencé la lecture ainsi, en s'attaquant à quelque chose qui semblait trop gros, trop adulte, qui ne nous était pas recommandé. Alors ce serait un peu bête par la suite de décourager à notre tour quelqu'un qui veut commencer par les frères Karamazov ou autre "grande chose".

Après, c'est bien de se rendre compte que la littérature, c'est aussi des ouvrages plus courts, plus drôles, plein d'esprit ou d'imagination. Des auteurs avec des points de vue très différents, des préoccupations qui ne sont pas que philosophiques ou psychologiques, mais aussi sociales, politiques, des problèmes très concrets. Ou alors au contraire des choses plus esthétiques, plus vagues et mystérieuses, voire mystiques. Ou du pur divertissement, du sensible, de la pure joie (c'est tout un art également, à mon avis pas moins grands).

Alors oui, lis les frères Karamazov, absolument, et l'Iliade si ça te fascine. Mais ne fais pas l'erreur d'empiler classique sur classique, pavé sur pavé, grand nom sur grand nom. Privilégie la diversité, car toi aussi tu n'es pas juste quelqu'un qui veut accumuler de la connaissance générale, tu as forcément plusieurs sensibilités.

Lis pas Zarathoustra en premier. Tu vas tout rater. De toute façon pour lire de la philosophie je trouve qu'il faut déjà avoir pas mal d'heures de lecture à son actif, concernant l'attrait et la concentration. Après ça n'engage que moi.

Merci pour ta vision des choses Everlasting, je suis d'accord avec tout ce que tu as dit. Je pense avoir fait l'erreur autrefois d'avoir commencé par des choses un peu trop complexes, par exemple avec voyage au bout de la nuit de Céline que je n'ai pas réussi à terminer et à tout à fait saisir, même si le voyage de Bardamu m'a quand même quelque part touché, d'ailleurs je compte évidemment le relire un jour. J'ai aussi lu le rêve d'un homme ridicule, et pas mal d'autres nouvelles de Dostoievski, j'ai adoré l'expérience, le sens du détail de cet auteur, le développement psychologique des personnages, excellent. Après je suis étudiant, j'ai eu une licence en Anthropologie et j'ai dû appréhender pas mal de textes assez complexes, donc je me considère comme un lecteur moyen, mais qui a quand même un petit bagage intellectuel... Après c'est sûr que c'était pas de la littérature, mais le plus souvent des ethnographies etc...

Après n'hésite pas Everlasting à me faite part de certains petits livres sympas à lire. J'en ai un de Poe que j'ai acheté il y a quelques temps aussi, un recueil de nouvelles. Après en ce moment je suis dans une période de doute dans ma vie, je cherche à murir, à apprendre à repenser un peu mon existence, ce genre de choses... C'est pour ça du coup que je me vois plus aller voir du côté de certains Philosophes qui proposent en quelque sorte des pensées qui se rapprochent du développement personnel etc...

C'est toujours assez difficile de transposer l'expérience, parce que chacun se construit son parcours, et c'est à chaque fois des livres différents qui nous parlent parce qu'ils se répondent entre eux. Mais trêve de bavardage, parce qu'au final il y a effectivement tout un tas de classique auquel on échappe pas vraiment. Au fond je disais juste qu'il est toujours mieux de voir large que de se confiner.

Essayons donc:
Le Livre de Sable / Fictions / Aleph (Borges) - philosophie et énigme des paradoxes
Zazie dans le métro (Queneau) - philosophie de la spontanéité
Le Baron Perché (Calvino) - mélancolie de l'enfance et de la découverte
Le cycle de Dune (Herbert) - la maîtrise et la transcendance
Musashi (Yoshikawa) - idem
Cent ans de solitude (García Márquez) - l'éternel retour et l'alchimie de la vie
Les racines du ciel (Gary) - l'obstination et l'idéalisme
Une si longue lettre (Bâ) - le combat, l'endurance et la dignité de la femme
Cahier d'un retour au pays natal (Césaire) - l'aliénation et l'identité
Siddharta (Hesse) - l'appprentissage et la confrontation avec soi-même
La Mort du Roi Tsongor (Gaudé) - cycles de violence et de destruction
Ubu Roi (Jarry) - non-philosophique

Gary - Herbert - Márquez - Yoshikawa sont longs. Tous les autres sont courts.

Super liste, je garde ça précieusement, merci !

Ah ben si tu es passé par de l'Anthropo, tu dois quand même avoir un bagage minimum.
Un peu de Freud, de Lévi-Strauss, de Mauss, de Girard, etc, non ?
Ca peut faire des points de raccords. Et pour le coup, Nietzsche peut être un point d'entrée encore plus intéressant, vu qu'ils sont nombreux à apprécier le bonhomme dans le domaine.
Mais pas forcément Zarathoustra.

bon je vais faire un peu de pub à un auteur antique trop souvent oublié c'est Quintus de Smyrne si tu lis l'Iliade et l'Odyssée d'Homère et que tu veux connaître un poème qui raconte la fin de la guerre de Troie et le lien entre les deux oeuvres homériques c'est ton homme les gens sont souvent frustrés de pas savoir la fin et ne pensent pas à ce dernier

Le 15 juin 2017 à 16:27:41 MaisonVelaryon a écrit :
Super liste, je garde ça précieusement, merci !

Suis pas sa liste les 3/4 des trucs sont chiants à mourir

Essayons donc:

Le Livre de Sable / Fictions / Aleph (Borges) - philosophie et énigme des paradoxes
Zazie dans le métro (Queneau) - philosophie de la spontanéité
Le Baron Perché (Calvino) - mélancolie de l'enfance et de la découverte
Le cycle de Dune (Herbert) - la maîtrise et la transcendance (la famosa)
Musashi (Yoshikawa) - idem
Cent ans de solitude (García Márquez) - l'éternel retour et l'alchimie de la vie
Les racines du ciel (Gary) - l'obstination et l'idéalisme
Une si longue lettre (Bâ) - le combat, l'endurance et la dignité de la femme
Cahier d'un retour au pays natal (Césaire) - l'aliénation et l'identité
Siddharta (Hesse) - l'appprentissage et la confrontation avec soi-même
La Mort du Roi Tsongor (Gaudé) - cycles de violence et de destruction
Ubu Roi (Jarry) - non-philosophique

Et pour Calvino et Gary j'aurais pas proposé ceux là

Lol

Ne commence surtout pas par Ainsi parler Zara, malheureux

Mais si mais si, perso j'ai lu le Zarathoustra à 16-17 ans, ça m'a persuadé d'être intelligent pendant bien quelques temps. Nietzsche est une pierre angulaire de l'athéisme et de l'individualisme moderne, de la critique sociale et du relativisme historique et moral (et philosophique), un précurseur de la psychologie, un penseur de la liberté et de l'autonomie. Ses notions du dépassement de soi, de la compréhension de soi, ses idéaux et ses dynamiques "vitales" en fin de période romantique sont fascinantes et grandioses. Il n'est pas étonnant qu'il soit "populaire" et beaucoup lu par les jeunes.

Je vois que mon topic a crée le débat, j'aime bien quand les idées se confrontent.

J'ai finalement décidé de lire Marc Aurèle en premier et par la suite j'aviserai, je garde évidemment toutes les propositions citées ici, sous le coude.

Zegatt, ouais j'ai un bagage minimum vraiment. J'étais pas celui de la promo qui lisait le plus, j'ai surtout lu beaucoup de textes anthropologiques, du Levy Strauss, des passages de tristes tropiques, Mauss évidemment et Girard un petit peu aussi ! Et du coup pour Nietzsche ben je sais toujours pas les gars, vu que certains semblent le proposer alors que d'autres sont plus réticents. J'ai aussi commandé dans la foulée Les cimes du Désespoir de Cioran.

Nietzsche c'est un piège. ça a l'air facile de prime abord, on pense avoir tout compris, et on s’aperçoit plus tard qu'on a fait que des contresens en fait.

En même temps il n'y a pas qu'une seule manière de lire un philosophe, surtout Nietzsche, donc il n'y pas besoin de s'obséder avec question "est-ce que t'as compris Nietzsche" qui est un peu vague. Au moins, on peut pas reprocher à Nietzsche d'avoir sa langue dans sa poche ou de parler à demi-mots, et qu'on ait 20 ou 25 ans, on peut comprendre ce qu'est une parabole. Nietzsche revient inlassablement sur ses thèmes, mais toujours un peu différemment. Alors si tu veux faire une thèse dessus, alors ouais c'est compliqué et il faut avoir beaucoup de bagage philosophique et pas seulement.
L'avantage du Zarathoustra, c'est que c'est le plus cool et le plus littéraire. Humain, trop humain ça m'a fasciné, mais c'est plus long et plus organisé. Par-delà le bien et le mal est pas mal, mais avec l'Antéchrist etc c'est déjà "la philosophie à coup de marteaux" et j'aime moins Nietzsche quand il perd en subtilité.
Après c'est que mon avis. Pour un anthropologue, on peut tout à fait plutôt conseiller de lire Foucault, Barthes, ou Bourdieu etc qui sont des intellectuels d'une grande ampleur et profondeur. Au fond c'est sans doute une meilleure idée que Nietzsche, mais j'ai pas le coeur à le déconseiller.

Alors effectivement si t'as déjà une licence en anthropologie je retire ce que j'ai dit concernant la philosophie. C'est pas comme si t'avais jamais ouvert de bouquin de ta vie quoi. Et c'est vrai que tu risques de retrouver pas mal de références suivant comment. Je suis pas spécialiste mais les anthropologues se basent parfois sur certains philosophes et vice versa.

Merci à tous pour vos contributions, j'ai déjà lu du Bourdieu, c'est dépassé sur certains aspects tout de même. Après c'est évidemment pas dénué d'interêt. De Foucault j'ai lu sa réfléxion sur les hétérotopies, très intéréssant.

Justement Nietzsche ça me fait sortir un petit peu de ma formation initiale, et ça fait du bien ! Pour le moment je suis sur Marc Aurèle, je trouve ça sympa pour la culture perso et s'ouvrir au Stoicisme, mais je ne retrouve pas réellement ce que certains y trouvent de si "actuel".

Proust c'est dur a lire si tu debute.

J'ai terminé Marc Aurèle, il y avait des choses intéressantes.

Là je suis passé à Cioran, c'est vraiment prenant.

D'un côté ça me tarde de commencer Proust aussi, je pense beaucoup m'y retrouver.