Au delà même du fait que ça arrive à surprendre autant les gens qui s'attendaient à ce que la fin se passe comme dans le jeu original autant que ceux qui penseraient que ça changerait complètement, y'a aussi tout ce qui s'adresse au joueur lui-même à travers cette fin.
Encore une fois je la trouve brillante pour ce qu'elle apporte au sein de l'univers lui-même, scénaristiquement quoi, mais aussi pour ce qu'elle apporte symboliquement.La saga FF VII R est une saga qui a conscience de l'existence de la saga FF VII. Qui a conscience de son poids, de son importance, et de l'emprunte culturelle qu'elle a laissé dans le jeu vidéo. Non seulement l'écriture utilise ça de façon directe, intradiégétique, avec le principe des timelines et du destin, mais elle l'utilise aussi de façon indirecte au parlant au joueur. Le projet FF VII R sait que tu as joué à FF VII et que, même si ça n'est pas le cas, la mort d'Aerith dans FF VII reste LA mort la plus connue de l'histoire du jeu vidéo, et de loin.
Ce que nous propose Rebirth pour sa conclusion, c'est un véritable Adieu à Aerith. Un adieu qui prend la forme de ce qu'on a vécu en tant que joueurs non seulement en faisant FF VII, mais aussi et surtout en continuant à vivre avec ces personnages au fil des années.
Aerith est morte oui, mais elle est toujours restée avec nous, quelque part. Non seulement parce que la saga FF VII originale l'a faite revenir plusieurs fois, soit via des préquelles, soit via la rivière de la vie, mais aussi et surtout parce que nous, dans le monde réel, on a jamais abandonné Aerith. On a refait les jeux plusieurs fois, on a pensé à elle, on s'est demandé "et si elle n'était pas morte" ?Le but de FF VII Rebirth ce n'est pas d'offrir aux joueurs la conclusion heureuse qu'ils auraient voulu pour le personnage, ni même de leur faire revivre la perte qu'ils ont de toutes façons déjà vécue dans le jeu original. On a déjà vécu cette émotion, on a déjà vécu ce sentiment de perte, le refaire une seconde fois n'aurait peut-être pas eu la même intensité. Ou peut-être que si après tout, mais encore une fois ce n'était pas le but.
Là on a une conclusion qui adopte une approche beaucoup plus douce et mélancolique, nettement moins dramatique. Une fin qui offre l'occasion à Aerith non pas de s'en sortir, mais simplement de faire ses adieu. Tout comme Cloud, et donc les joueurs, peuvent lui faire leurs adieux.
D'ailleurs Cloud n'est pas triste. Il sait que Aerith est morte, mais qu'elle est aussi vivante, ailleurs, qu'elle ne mourra jamais vraiment. Pour lui, qui comme les joueurs et comme Aerith, a une vision d'ensemble qui transcende les lignes temporelles, il n'y a pas de deuil à faire. Comme pour nous qui n'avons jamais vraiment perdu Aerith, Cloud ne l'a pas vraiment perdue non plus. Et d'ailleurs elle reviendra peut-être. On en sait rien, on verra si cet adieu était définitif.
En tout cas il était hyper touchant.D'ailleurs c'est précisément pour ça que la scène de la mise à l'eau du corps d'Aerith n'apparait pas. Pourtant les personnages ont surement fait quelque chose de son corps, ils ne l'ont pas laissée là ou elle est morte. Il est même fort probablement que Cloud, comme dans le jeu original, l'ai mise dans la rivière de la vie.
Seulement si cette scène n'est pas montrée c'est justement parce qu'elle est là pour faire vivre à Cloud, et au joueur, un véritable déchirement. Cette scène c'est une conclusion abrupte sans au-revoir, c'est un point final.
Or ça irait en totale contradiction avec l'approche de Rebirth, qui justement ne veut pas nous faire revivre une fin déchirante qu'on a déjà vécue, mais plutôt nous permettre de faire le deuil de cette fin de façon douce et mélancolique tout en nous rappelant que, dans l'univers de FF VII R tout comme dans le monde réel, Aerith n'est pas vraiment partie. Elle sera toujours un peu avec nous.
Ne pas mettre cette scène c'est un choix radical mais parfaitement cohérent.Après on adhère au parti-pris ou non. Mais putain, la saga FF VII R c'est quand même un putain de morceau. C'est sacrément couillu.
Si le troisième opus est à la hauteur des deux premiers, et je ne doute pas du fait qu'il le sera, on tiendra sans forcer LA plus grande saga des années 2020.Dommage que ça laisse autant de monde sur le carreau. Mais en même temps avec des partis pris aussi radicaux, c'était inévitable.
C'est une saga qui fait les choses en très grand, mais qui paradoxalement que s'adresse pas à un public si large que ça. Fallait oser.Il reste encore un gros morceau à venir, mais je pense qu'on peut déjà saluer la vision qu'ils ont eu pour ce "Remake". C'est probablement l'approche la plus intelligente qu'ils aient adoptée depuis l'avènement ou mode des remakes dans l'industrie. Celui qui a lancé cette mode des remakes finalement, transcende lui-même la désignation, et se jouent des joueurs de l'original jusqu'au bout. C'est très très bien vu de la part des scénaristes.
Dans quelques années, on retiendra finalement cette trilogie pour tout, sauf pour ce à quoi on l'attendait.
Effectivement. Et pourtant ils auraient pu se contenter de faire un "simple" remake modernisé, ça aurait été génial. J'en aurais été le premier ravi d'ailleurs, et un paquet de gens auraient probablement été bien plus satisfaits.
Mais ils ont décidé de faire autre chose. Et plutôt que de se limiter à refaire FF VII, ils ont décidé de parler de FF VII. Ils savent qu'ils ont un monument entre les mains, ils savent le poids qu'il a eu sur nous comme sur eux, ils savent même le poids qu'il a eu sur ses propres personnages, et ils se sont mis à cogiter là dessus tout en gardant une immense forme de respect pour la saga FF VII originale. Et je parle bien de saga, pas juste de FF VII. Ils ne renient rien et sont fiers de tout.
Ce projet FF VII R c'est vraiment l'oeuvre de gens de plusieurs générations qui travaillent ensemble. Des gens qui ont conçu FF VII et toutes ses suites, et des gens qui ont grandi avec pour finir par travailler dessus. C'est une combinaison de leurs différents regards, c'est un dialogue entre eux, les joueurs et leurs personnages.
Au sein de cette grande vague de remakes, parfois géniaux d'ailleurs, ça se situe effectivement à un tout autre niveau en terme de démarche et de propos.
Qui plus est ils auraient pu se limiter à faire du méta qui s'adresse juste aux joueurs, sans jamais l'inscrire au coeur du récit de façon intradiégétique. Histoire de ne pas altérer, de ne pas toucher au sacro-saint FF VII. Et pourtant ils ont fait l'inverse et ont décidé que cette approche analytique de la saga originale constituerait le coeur même du scénario de cette nouvelle saga, que ce serait ce qui guide le destin des personnages.
Chapeau les mecs. Très risqué, pas forcément le meilleur choix d'un point de vue purement commercial, mais chapeau. Surtout que le défi est pour le moment relevé haut la main