Vous veniez de réussir à vous resservir vous et vos deux nouvelles connaissances lorsque celui avec des lunettes, dont vous aviez appris qu’il s’appelait Charles, tire la manche de son ami.
- Lucas, il y a Arthur qui te fait signe. 
Depuis l’estrade, Arthur Marchand regardait dans votre direction et effectuait des mouvements de bras pour exprimer une interrogation.
- C’est vrai qu’on devait passer les voir. 
- Je ne suis pas très emballé par l’idée, je vais rester discuter avec Célestin. 
- Non, viens Charles, fait pas ton solitaire. Et viens aussi Célestin si tu veux, on va te présenter. 
- Pourquoi pas. 
- Bon... d’accord. 
Devant vous, Lucas ouvre le chemin parmi les invités tandis que vous le suivez. Charles, lui, peine derrière vous, affichant une mine de déception. Atteindre les marches vous demandant plus de chemins, vous grimpez tous directement sur l’estrade en chêne qui surélève le petit salon de cinquante centimètres. Assis dans le premier des deux canapés du salon se trouve l’homme que vous aviez bousculé aux côtés de Sarah Turpinier et de Chloé Brun-Mauroy. Dans le second sont assis Léonie Rose et Arthur Marchand. Ce dernier se lève pour accueillir Lucas.
- J’ai bien cru que tu te refuserais à nous, Lucas ! 
- Je ne te ferais jamais ça, voyons. 
Arthur porte désormais son regard sur Charles et vous.
- Et voici l’inoubliable Charles ainsi que... on se connaît ? 
- On discutait avec lui lorsque tu nous as appelés. Il est super sympa. 
Arthur vous tend une main que vous lui serrez.
- Arthur Marchand. 
- Célestin... Gréville. 
- Et d’où nous viens-tu, Célestin Gréville? 
Sa question abritait un ton suspicieux qu’il ne dissimulait pas.
- Que veux-tu dire ? 
- Eh bien, c’est moi l’organisateur de cette soirée. J’aime connaître les gens qui y sont venus.
Arthur continuait de vous tenir la main et vous empêchait de relâcher la sienne.
- Oh mais laisse-le Marchand... tu vois bien que tu le mets mal à l’aise. 
Il fit un demi pas vers vous sans lâcher votre main. Son visage s’assombrit un peu plus.
- Je te demande seulement avec qui tu es venu, car je ne t’ai jamais vu à la fac.
- Euh... 
- Avec moi, c’est mon +1. On avait bien tous le droit à un +1 tant qu’on payait notre participation ?
Arthur continuait de piéger votre regard dans le sien.
- À part Lucas qui te fait la charité, tu n’as aucun ami, Charles. Tout le monde le sait.
- Arthur ! 
- S’il a besoin d’avoir une justification dans l’immédiat, je te dis que c’est mon +1. J’en ai le droit. C’est toi qui avais fait les règles. 
- Comment es-tu rentré dans cette maison ? Réponds. 
- Avec moi. 
Tous les regards se tournèrent vers Charlotte Samain. Elle venait de déclarer cela depuis le bord de l’estrade. D’un bond, elle monte sur l’esplanade et s’approche d’Arthur et de vous.
- Il est rentré avec moi. 
- Tu le connais ? 
- On habite dans le même quartier. On s’est croisé plusieurs fois. Il était sympa, alors je lui ai proposé de venir à la soirée. 
- ... 
- C’est bon, tu as fini ton petit numéro Arthur ? Tu peux laisser ce jeune homme tranquille ? Tu es le pire hôte que l’on puisse faire.
- Elle a raison, tout le monde nous regarde. 
Arthur libère enfin votre main et retourne s’asseoir dans son canapé, le visage fermé. Vous chercher sur le visage de Charlotte une explication à son intervention : vous n’y trouvez qu’une douce malice. Chloé s’appuie sur ses poings pour libérer un espace de canapé en se décalant sur l’accoudoir matelassé.
- Venez ici Célestin et Charlotte. Ne vous mettez pas à côté de cet affreux. 
Arthur lança un regard noir à Chloé qui se contentait de lui rendre un sourire satisfait. Vous prenez place à côté de Sarah Turpinier. Son petit ami vous adresse un signe de tête.
- Comme on se retrouve ! 
- Vous vous connaissez ? 
- Non, je l’ai seulement aidé à s’orienter dans la maison tout à l’heure. 
Charlotte prend la dernière place libre entre Chloé et vous. Vous entendez alors cette dernière se pencher à l’oreille de votre sauveuse.
- Petite cachotière, il faudra que tu me racontes. 
- Il n’y aura pas grand-chose à raconter. 
Je croyais qu’elle ne les côtoyait pas. 
Vos pensées intérieures sont brusquement interrompues par la jeune femme assise sur le canapé d’en face.
- Et donc, c’est Célestin, c’est ça ? 
- Tout à fait.
- Moi, c'est Léonie. 
Vous accueillez cette information avec un mouvement de tête.
- Mais tout le monde l’appelle Léo. Moi, c'est Sarah, je ne sais pas s’il te l’a dit, mais le beau blond derrière moi, c'est Alexis et voici Chloé... 
- Salut !
- Enchanté à tous.
- D’ailleurs, tu n’as pas vu Émilie, Lucas ? 
- ... Non, pourquoi ? Elle n’est pas là ? 
- Aucun de nous n’arrive à la joindre. Elle est toujours en retard pour tout, mais là, c'est de l’abus, même pour elle.
- J’espère qu’elle n’a pas eu de problème sur la route. 
La conversation reprend progressivement dans le petit salon et se fait plus légère malgré le mutisme d’Arthur. Une voix dans votre oreille en profite pour se manifester.
- Tu me dois un nom et un rendez-vous chez le cardiologue. 
- Ne l’écoute pas. C’était très bien. Un peu mouvementé, mais l’essentiel est assuré. Ce n’est pas grave que tu aies oublié le nom d’emprunt prévu, ça fera très bien l’affaire, Gréville. Maintenant, si tu le peux, il va falloir que tu saisisses les opportunités pour les amener sur le sujet de Léa ou de leur soirée. On compte sur toi. 
C’est déjà incroyable que je sois dans ce canapé, alors leur demander ce qu’ils faisaient avec leur copine morte avant qu’elle se fasse attacher à un arbre me parait encore plus inconcevable. 
