Salut !
Bonne lecture et n'hésitez pas à dire ce que vous en pensez.
Inconscient
Prologue :
Ce soir-là, Andy passa un long moment à contempler le croissant de lune perché au dessus de sa tête. L'inspiration l'envahit peu à peu, il trouvait au ciel quelque chose d'ensorcelant. Les notes jaillissaient dans sa tête, et sa main se resserra sur le manche de sa guitare. Lentement, Andy détacha une lanterne de sa ceinture puis l'actionna. Il progressa prudemment à travers la crique et s'arrêta devant un énorme rocher au bord de la mer.
Le jeune homme s'y hissa, posa la lanterne à ses côtés, puis empoigna sa guitare. Il s'assit les jambes croisées et se mit à gratter les cordes de son instrument. Il improvisa sur quelques accords, la tête levée vers le ciel d'un bleu de plus en plus profond. L'inspiration l'emplissait, il se sentait créatif, presque mélancolique. Ses doigts sautaient d'une corde à l'autre, et le son émis par sa musique était fabuleux.
Ce soir au bar Chez Abe, il allait faire verser des larmes.
I.
La ville de Kerling se situait entre une immense forêt de sapins et un long sentier qui menait vers la crique de l'île. Son gros clocher sonna onze coups lorsqu'Andy, guitare à la main, ouvrit la porte du bar Chez Abe et s'installa à son comptoir.
« J'ose espérer que tu nous as préparé un petit morceau pour ce soir, fit le gérant du bar en lui servant un verre de bière fraîche. J'ai l'impression que tout le monde s'apprête à partir. En plus, le tourne-disque a claqué, ça n'aide pas. Alors je t'en prie, joues-nous un petit truc.
J''ai pas ramené ma guitare pour rien, t'en fais pas, répondit Andy dans un ton enjoué. Prépare les mouchoirs, Abe ! »
Le gérant éclata de rire.
« Je suis trop de bonne humeur pour pleurer, Andrew. »
Sur ces mots, Abe décocha son plus beau sourire et poussa le verre de bière vers Andy.
« Bois, ça va te détendre.
— Au point où j'en suis, répondit Andy en avalant une gorgée de sa bière.
— Qu'est-ce qui ne va pas ? »
Un instant, Andy regarda ses mains. Elles ruisselaient de sueur.
« Il serait peut-être temps de me payer, finit-il par dire.
— Il est surtout temps de monter sur scène. Bouge ton cul ! »
Abe lança un regard lourd de reproches à Andy et quitta le comptoir de sa démarche traînante, ses cheveux gris virevoltant derrière-lui. Lentement, il disparut derrière la petite foule du bar, profondément las.
Andy le suivait du regard lorsqu'une voix claire résonna dans sa tête. Elle disait :
« Tue-le. »
Ce n'était pas la première fois qu'il entendait cette voix, mais à cet instant, elle avait quelque chose de convaincant. Andrew avait presque envie de saisir le couteau de cuisine posé sur le comptoir avant d'élaborer un plan sadique pour se débarrasser définitivement d'Abe. À partir de là, il lui aurait fait les poches et se serait éclipsé par la fenêtre.
Une main se posa sur l'épaule d'Andy. Celui-ci sursauta et dans un mouvement brusque, renversa son verre de bière qui vint se fracasser contre le parquet du bar. Les bouts de verres s'éparpillèrent un peu partout et le liquide coula sous le tabouret du guitariste.
« Mais tu peux pas faire attention ? pesta Abe. M'enfin c'est pas bien grave... prends ta guitare avant qu'elle ne s'encrasse et installe-toi à la table numéro huit. »
Lorsqu'Andy se baissa pour attraper sa guitare, la voix claire sur un ton plus posé répéta trois fois ces mots :
« Écoute-moi, Andy. »
