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Philosophie

Sujet : Conscience : théorie de l'espace de travail neuronal global
Pseudo supprimé
Niveau 7
03 octobre 2018 à 20:08:48

Le 03 octobre 2018 à 20:04:37 toto_au_bistro a écrit :

Le 03 octobre 2018 à 19:58:41 Pardes a écrit :
Décrire un processus neurobiologique ce n'est pas expliquer comment du subjectif naît de l'objectif.

Déjà, je ne me sens contraint aucunement par ta formulation d'un problème.

Ne sois pas parano, je ne cherche pas à te piéger avec ma vilaine formulation.

De l'objectif et du subjectif, ça ne veut rien dire.

Bah voyons.

Pour un physicaliste, tout est objectivable car tout est physique...

Objectivable ne veut pas dire qu'il n'y a pas d'expérience subjective.
Simplement pour un physicaliste cette expérience naît de l'objectif.
De neurones naissent l'idée vécue d'une maison, par exemple.

Ce que relève du sujet dans le problème de la conscience, c'est l'expérience consciente. La conscience d'accès ne pose pas de problème particulier. La conscience phénoménale, j'en ai déjà parlé et je t'invite à relire ce que j'ai déjà écrit.

Comment du subjectif nait de l'objectif.
Évidemment tu n'as pas de réponse, mais tu ne veux pas l'avouer.
D'abord tu me dis que c'est résolu et maintenant que de toute façon ma question est nulle.
Tu iras le dire a John Searle...

toto_au_bistro
Niveau 10
03 octobre 2018 à 20:25:26

J'ai déjà donné une réponse. Je t'invite à présenter tes contre arguments plutôt de me harceler.

Tu iras dire à Dehaene qu'il a rien compris, hein.

Pseudo supprimé
Niveau 7
03 octobre 2018 à 20:31:16

Dehaene ne prétend pas expliquer comment du subjectif naît de phénomènes objectifs ; il décrit des processus neurobiologiques.
Si ça suffisait ça fait bien longtemps que le problème serait résolu.

toto_au_bistro
Niveau 10
03 octobre 2018 à 20:39:13

La blague. Sa théorie de la conscience entend englober tous les phénomènes conscients ce qui comprend l'expérience subjective. Sa théorie ne fait pas que décrire des processus neurobiologiques. Elle explique comment mon expérience subjective se forme et quel est son substrat.

La théorie de Dehaene rajoute l'explication neurobiologique a un cadre conceptuel qui existait déjà (théorie de Baars). Tu montres que soit tu n'as rien compris, soit tu n'as pas lu.

Pseudo supprimé
Niveau 7
03 octobre 2018 à 20:45:49

C'est plutôt toi qui ne comprends même pas le point que je soulève.
Sa théorie propose une explication de comment tout s’emboîte, à aucun moment elle n'explique comment tout ça produit une expérience subjective et unifiée.
Je parle de "comment" au sens strict : pas de "cette zone fait ci, cette zone fait ça" mais bien comment cet agencement parcouru de signaux électriques produit une expérience consciente.

toto_au_bistro
Niveau 10
03 octobre 2018 à 21:16:18

Le 03 octobre 2018 à 20:45:49 Pardes a écrit :
C'est plutôt toi qui ne comprends même pas le point que je soulève.
Sa théorie propose une explication de comment tout s’emboîte, à aucun moment elle n'explique comment tout ça produit une expérience subjective et unifiée.
Je parle de "comment" au sens strict : pas de "cette zone fait ci, cette zone fait ça" mais bien comment cet agencement parcouru de signaux électriques produit une expérience consciente.

Non mais, Dehaene ne fait pas juste dire qu'il y a des circuits électriques qu'on voit sur un IRM et que BOUM ça fait des chocapic.

On sait qu'on a des modules inconscients qui fonctionnent en parallèle. On sait que certaines parties de notre cerveau jouent des fonctions précises. On sait que l'association de ces fonctions permet un accès à la conscience tout simplement parce que la conscience c'est un accès à l'information. Quand je suis conscient, je peux manipuler ma représentation mentale (la stocker, la modifier etc.).

Si je devais décrire le fonctionnement de mon ordinateur. Je dirais qu'il y a la partie hardware qui est le substrat de la partie software. Cette partie software est un niveau d'abstraction codé par des bits. Au sein de la partie software, on peut avoir encore différents niveaux d'abstraction (couches de logiciel). Dehaene fait le même type d'explication :

  • on a le hardware (cerveau)
  • on a des processus spécialisés qui produisent des représentations mentales (couche logicielle de base), ces processus sont plus ou moins bien connus (voir l'exemple du processus de la perception amodale dans mon post)
  • on a l'espace de travail global qui met à disposition une représentation mentale des autres processus (couche logiciel supérieure).

Si tu veux des détails, il faut lire Dehaene et Naccache, puis lire les articles scientifiques. Mais c'est pas la caricature que tu fais.

Pseudo supprimé
Niveau 7
04 octobre 2018 à 15:44:11

Très bien, ça n’explique toujours pas comment, de ces systèmes qui produisent x et y en s'assemblant de manière w, une expérience subjective naît.

toto_au_bistro
Niveau 10
04 octobre 2018 à 16:10:53

Le 04 octobre 2018 à 15:44:11 Pardes a écrit :
Très bien, ça n’explique toujours pas comment, de ces systèmes qui produisent x et y en s'assemblant de manière w, une expérience subjective naît.

"Quand ton interlocuteur est buté, va chasser le crocodile"
Dicton d'indigènes malgaches

thebabouche
Niveau 12
05 octobre 2018 à 04:15:45

c'est génial et je rage d'avoir vu ça aussi tard et de ne pas pouvoir y répondre ce soir

la partie sur le tennis et visiter l'appart est ... fascinante. Balance les infos, balances les infos !!!

:O

toto_au_bistro
Niveau 10
05 octobre 2018 à 14:51:19

thebabouche : Moi aussi je trouve la dernière expérience mentionnée assez dingue. Qu'on arrive à communiquer avec une personne juste en regardant son cerveau, c'est fou. Alors en plus quand ça permet de détecter des gens qui sont conscients mais incapables de toute communication physique...

toto_au_bistro
Niveau 10
05 octobre 2018 à 14:59:20

L'article : https://sci-hub.tw/https://www.ncbi.nlm.nih.gov/pubmed/20130250

clementdousset
Niveau 2
30 octobre 2018 à 08:22:28

Bonjour Toto,

Je vois que tu te bases beaucoup pour exposer la "théorie de l'espace neuronal global" sur l'essai : "Le code de la conscience" de Stanislas Dehaene. J'ai écrit un article critique sur cet ouvrage et sur la théorie de la conscience qu'il expose que je t'invite à lire : https://www.agoravox.fr/tribune-libre/article/stanislas-dehaene-nous-a-t-il-170388
Cordialement

toto_au_bistro
Niveau 10
30 octobre 2018 à 09:33:38

Le 30 octobre 2018 à 08:22:28 clementdousset a écrit :
Bonjour Toto,

Je vois que tu te bases beaucoup pour exposer la "théorie de l'espace neuronal global" sur l'essai : "Le code de la conscience" de Stanislas Dehaene. J'ai écrit un article critique sur cet ouvrage et sur la théorie de la conscience qu'il expose que je t'invite à lire : https://www.agoravox.fr/tribune-libre/article/stanislas-dehaene-nous-a-t-il-170388
Cordialement

J'ai survolé vite fait et j'ai l'impression que ce que tu lui reproches le plus au final tourne autour de l'expérience subjective et des qualias. J'ai développé ce point dans la partie sur la conscience phénoménale. Voir la slide sur l'illusion de percevoir ici : http://podcastfichiers.college-de-france.fr/dehaene-20100105.pdf

Dehaene ne dit pas que toutes les expériences phénoménales sont expliquées aujourd'hui par la science. Mais elles le sont de plus en plus. Nous avons des explications bottom-up de phénomènes qui nous paraissaient échapper aux modèles scientifiques (voir par exemple les effets de type Gestalt theory).

Et là où il fait un saut dans son analyse, c'est qu'il nous dit qu'il n'y a pas de raison a priori de croire que les autres phénomènes similaires seraient de nature différente. Je replacerais ça aussi dans le cadre général de la théorie de l'évolution et du principe de clôture causale du monde physique. Ça ne me semble pas cohérent aujourd'hui de postuler du dualisme pour des phénomènes de plus en plus limités (certaines expériences phénoménales). Ça ne me semble pas non plus cohérent avec la théorie de l'évolution de postuler (en l'absence de toute preuve concrète) que la conscience se situerait au niveau quantique alors qu'elle n’apparaît que tardivement d'un point de vue évolutionnaire.

clementdousset
Niveau 2
02 novembre 2018 à 17:45:10

Les « expériences phénoménales » dont tu parles ne sont pas « de plus en plus expliquées par la science ». Elles ne le sont aucunement et pour aucune d’entre elles. Les « expériences phénoménales », ce sont bel et bien les qualia dont Dehaene nie l’existence avec une totale désinvolture (Le C de la C, p356). Les qualia, c’est à dire toute la réalité affective, celle des sensations, des sentiments, des émotions, celle du plaisir et de la douleur, celle aussi des forces psychiques que sont le désir, la volonté, l’effort. Dehaene qui parle de la conscience me fait penser à un physicien qui prétendrait parler de la matière en niant l’existence des forces fondamentales (la force gravitationnelle, électromagnétique, nucléaire forte et nucléaire faible). Il dépouille en réalité son objet de toutes les réalités qui en constituent l’essentiel.

Tout en niant explicitement la réalité des qualia, il est bien obligé de s’y référer malgré tout si l’on veut qu’on croit qu’il s’intéresse au contenu réel, c’est à dire intimement subjectif de la conscience. C’est ainsi qu’il parle de l’image visuelle et du mécanisme qui serait censé lui donner existence. A titre d’exemple, il évoque l’image de la Joconde qui se formerait dans la conscience par suite de l’intégration des informations données par différents modules sensoriels épars dans le cerveau.

Je t’invite à relire les pages 242 à 245 du Code de la Conscience pour convenir que Dehaene parle bien du quale de l’image visuelle faite de couleurs et de formes disposées dans un espace à deux dimensions (il parle d’un tableau, pas d’une image en relief), celle que nous pouvons voir toi et moi au Louvre mais qu’un aveugle ne pourrait pas voir même si on lui donnait la totalité des informations supposées être intégrées dans l’espace de travail global. Or il n’est pas possible le moins du monde d’apercevoir le rapport d’un travail d’intégration purement computationnel produit par les connexions des neurones et l’apparition de l’image dans le champ de la conscience.

Supposons malgré tout que ce mécanisme à l’oeuvre aboutisse à la création du quale même si nous n’en connaissons pas la cause. Tu conviendras alors que ce quale est bien l’objet fini et dernier que nous avons dans la conscience, qu’il n’y a pas besoin de le modifier pour que nous en soyons conscients, qu’il surgit comme le résultat définitif et unique de l’intégration. Pourquoi existerait-il alors un processus « descendant » pour modifier le quale, un processus qui se manifesterait après coup, après analyse des informations par les diverses aires corticales pour modifier ces informations elles-mêmes afin de constituer un nouveau quale ? L’existence de ce processus descendant qui agit sur le cortex visuel primaire et modifie, colonne corticale à colonne corticale, l’activité sur l'aire rétinotopique est avéré par exemple dans le cas de l’échiquier d’Alderson dont Dehaene parle justement mais aussi dans bien d’autres exemples.

Dans mon article : « deux points de vue sur la vision », j’oppose cette production en quelque sorte miraculeuse du quale par processus d’intégration à une production plus simplement mécanique, plus satisfaisante pour l’esprit et plus en phase avec les observations qui sont déjà faites sur l’activité du système visuel. Je copie ici le passage essentiel :

« 2- L'image formée dans le cortex visuel primaire.
Il faut toujours se méfier des « dans ». En titrant cette partie de cette façon, je ne veux pas dire que l'image psychique se forme dans le cortex visuel primaire comme l'image physique se forme sur la rétine. Ce que je veux précisément dire c'est que les mécanismes neuronaux qui induisent l'existence de l'image dans sa particularité sont déclenchés dans le cortex visuel primaire et pas autre part.. Dans le cortex visuel primaire et, plus précisément, dans les colonnes corticales qui le constituent pour l'essentiel.
Nous savons que ces colonnes corticales ne sont pas uniquement reliées aux récepteurs rétiniens qui leur correspondent topologiquement et ce serait à mon avis se méprendre totalement que de voir ce qui se passe dans le cortex visuel primaire quand les signaux « visuels » y parviennent comme l'équivalent d'une « perception rétinienne ». Dehaene écrit dans son ouvrage ceci qui me paraît acceptable globalement : « Nous ne voyons jamais le monde tel que notre rétine le perçoit. Ce serait d'ailleurs un bien étrange spectacle : un amas confus de points sombres ou lumineux, monstrueusement élargi en son centre (la fovea), masqué en partie par des vaisseaux sanguins, troué d'une vaste « tache aveugle » à l'endroit où le nerf optique quitte la rétine. »(9) Mais la perception qui s'élabore point par point dans les colonnes corticales peut donner une image d'une toute autre nature et qui pourrait être bien très précisément celle qui s'impose dès l'abord à notre regard.
Il faut pour cela considérer que l'activité des colonnes qui induit l'image n'est pas celle qui se produit à la réception du message rétinien. C'est celle qui se produit en fin de cycle quand une onde parcourt le cerveau de l'avant où se trouve le cortex supérieur vers l'arrière où se situe le cortex visuel primaire selon l'observation de Dehaene (10). L'hypothèse que je fais est que cette onde accompagne la réactivation ou la modification d'activation des colonnes corticales en y distribuant des messages par des voies descendantes. Ces messages traduiraient le travail d'intégration des informations visuelles qui vient d'être effectué et dirigeraient une nouvelle phase d'activation des colonnes selon l'emplacement qu'elles occupent sur « l'écran du champ visuel ». Notre cerveau, comme le dit Dehaene, « infère la position des sources de lumière et en déduit la forme, l'opacité, la réflectance et la luminance des objets. »(11) On peut ajouter qu'il en délimite précisément les contours jusqu'à sembler les faire se détacher du champ visuel où ils se fondraient autrement à demi estompés dans une brume de points. Bref tout le travail des divers processeurs cérébraux qui analysent la scène visuelle ainsi que tous les calculs statistiques associés auxquels ils se livrent et qui se déroulent dans l'obscurité de l'inconscience déboucheraient là et se traduiraient, colonne par colonne, par un simple regain ou par une modification d'activité.
Cette nouvelle phase d'activité est celle qui, pour moi, précède la naissance de l'image. Elle va induire autant de sensations qu'il y a de colonnes activées. Ces sensations ont deux caractéristiques principales, une d'occuper un point du champ visuel correspondant à leur emplacement dans l'espace rétinotopique, l'autre d'avoir une certaine luminance. A ces deux qualités pourra s'ajouter une troisième si la vision chromatique fonctionne, c'est celle d'avoir une couleur : bleue, verte ou rouge. A partir de ce moment-là et à partir de ce moment-là seulement, l'image existe, que ce soit celle de la Joconde ou celle d'un mur lépreux où rien ne se distingue d'une manière immédiatement nommable et qui emplit tout le champ visuel de sa singularité brute.
Par quel mécanisme la sensation localisée, lumineuse et colorée apparaît-elle ? C'est la question à laquelle je propose une réponse dans mon article : « Une niche pour la conscience 2 : le modulisme ». En voici le lien : https://www.agoravox.fr/tribune-libre/article/une-niche-pour-la-conscience-2-2-177798
Comme je le dis en fin d'article, si la corrélation entre une modulation donnée du champ magnétique interne et tel type de quale aisément repérable ( la sensation éprouvée à un produit odorant donné par exemple) est accessible à l'observation, le mécanisme qui transformerait cette modulation d'intensité d'une force physique en une modulation d'intensité d'une force psychique ne peut être que supputé. Il nous renvoie cependant à une propriété de la matière fondamentale qu'il est loisible de supposer même si la forme précise qu'elle prend n'est pas encore déterminable.

Tu évoques à la fin de ton message une explication de la conscience qui se réfère à la matière quantique. Je la connais et je ne la crois pas bonne. Mais il est vrai que je suppose une propriété de la matière fondamentale qui existerait aussi à un niveau élémentaire. L’argument que tu utilises selon lequel la conscience aurait dû apparaître beaucoup plus tôt dans l’évolution si elle s’appuie sur un mécanisme mettant en jeu des propriétés fondamentales de la matière élémentaire peut être alors aussi valable pour une conception « quantique » de la conscience que pour une conception « moduliste ». Cependant cet argument ne me paraît pas bon. Il présuppose que l’apparition de la conscience est le résultat d’une progression dans la complexité et que cette progression n’atteindrait le degré nécessaire qu’au bout d’un temps très long. Je ne partage pas ces présupposés.
Dans mon article : « Le générateur de conscience peut être un objet simple » (https://www.agoravox.fr/tribune-libre/article/le-generateur-de-conscience-peut-193182) , je m’intéresse au cas du nématode qui n’a que 300 neurones et chez lequel le mécanisme générateur de qualia pourrait être déjà en place. Cet animalcule est apparu tôt dans l’histoire de l’évolution. Bien sûr il est apparu plus tard que les organismes vivants monocellulaires mais on peut très bien admettre qu’une propriété de la matière fondamentale actualisée dans un organisme vivant, existait auparavant à l’état latent et virtuel. Je ne crois pas que la conscience existe dans la matière primitive inerte mais je crois que la propriété qui l’engendre existe dès l’origine et qu’elle a besoin pour s’actualiser qu’un mécanisme se mette en place à l’intérieur d’un individu vivant. Les forces qui sont à la base de la matière fondamentale existent toutes dès l’origine mais leur symétrie s’est brisée successivement au cours de l’évolution de l’univers engendrant des phénomènes et en particulier les atomes des éléments qui ne pouvaient pas exister aux premiers stades. On peut ainsi penser que la propriété génératrice du quale existait à l’origine mais qu’elle a dû attendre qu’existassent des êtres vivants pourvus de ces oscillateurs électromagnétiques que sont les neurones pour s’actualiser.

toto_au_bistro
Niveau 10
02 novembre 2018 à 19:22:41

Je réponds depuis mon téléphone donc je vais essayer de découper les sujets.

La conscience qui se base sur une propriété fondamentale de l'univers

C'est du bon sens de relier l'apparition de la conscience dans l'histoire évolutionnaire à la nature de la conscience. Cela dit, le bon sens n'implique pas la vérité scientifique. Mais j'ai apporté de nombreux éléments en faveur de cette thèse. Il n'y a qu'à voir l'aspect empirique et testable de la théorie de Dehaene.

De plus ta théorie ne me semble pas fondée sur des résultats empiriques. Où est le générateur de qualia chez l'homme ou le nématode ? Si ta théorie semble être physicaliste, il y a un manque par rapport à celle de Dehaene qui fournit déjà une explication mécanique (elle est peut être fausse in fine mais c'est un autre débat). Donc je ne ressens aucune pression à changer de théorie.

La mécanique quantique ou je ne sais quel champ magnétique sont des hypothèses qui me semblent aller à rebours de notre connaissance de la psychologie humaine. C'est pas impossible, mais ce serait très surprenant. Et qui dit these scientifique improbable dit preuves très solides à apporter. Ce serait quand même bizarre que tous nos processus conscients soient expliqués par des théories fonctionnalistes neurobiologiques, mais qu'un petit bout sorte complètement de ce cadre...

toto_au_bistro
Niveau 10
02 novembre 2018 à 19:38:38

Sur ton développement biologique et le propos de Dehaene que tu cites

J'ai un peu la flemme de lire ça avec attention et je n'ai pas bien compris où tu voulais en venir.

Je dirais juste que Dehaene ne dit pas que dans le cas de l'illusion visuelle dont tu parles il y a un premier quale, puis un deuxième quale qui corrige le tir. J'ai l'impression que c'est ce que tu essaies de lui faire dire.

Il dit que la perception consciente survient une fois qu'on a un état stable :

"La perception consciente s’achève dès qu’ils convergent vers un état relativement stable. La « super-assemblée » de cellules qui abrite le contenu de la conscience est donc éparpillée dans le cerveau – mais ses fragments s’ajustent comme les pièces d’un puzzle parce que les assemblées locales se synchronisent grâce aux messages descendants propagés par les neurones à axones longs."

Donc les va et viens, entre le bottom-up et le top-down est déjà fait.

toto_au_bistro
Niveau 10
02 novembre 2018 à 20:29:26

les qualia dont Dehaene nie l’existence avec une totale désinvolture

J'ai relu vite fait, mais j'ai l'impression que j'ai pas les mêmes numéros de page que toi dans la version numérique.

Pour moi tu fais un mauvais procès à Dehaene. Ça dépend ce que tu appeles qualia. Dehaene ne nie pas l'expérience subjective. Il ne dit pas que ça ne provoque pas un effet subjectif que d'avoir peur. Ce qu'il dit c'est que cet effet est expliquable neurobiologiquement. Je n'y vois pas de désinvolture. D'ailleurs, quand il énonce les phénomènes que doit expliquer la conscience, laspect phénoménal est bien présent.

Maintenant est-ce que sa théorie de l'expérience subjective tient la route ? Dans l'exemple des illusions d'optique cela me paraît très convaincant. Et là j'aurais envie de te demander ce que devrait faire une théorie pour rendre compte de ces phénomènes.

Pour moi, si on a un modèle qui démarre de l'input sensoriel (des donnes brutes avec par exemple le trou de perception dans la rétine) et qui arrive à reproduire le résultat mental (l'illusion visuelle pourrait être testée par un modèle informatique) et qu'on a un substrat physique (les groupes de neurones) qui reproduit ce modèle et que l'expérience subjective rapportée par les sujets est concordante, alors je crois qu'il n'y a plus rien à expliquer. Sinon qu'est-ce que ce serait ? Et c'est là où la comparaison de Dehaene avec le vitalisme me semble éclairante. Pour les vitalistes, l'explication physique n'était de toute manière jamais suffisante. Pour les partisans des qualia comme matière irréductible à nos modèles classiques c'est pareil.

clementdousset
Niveau 2
04 novembre 2018 à 10:12:30

Il y a un point sur lequel j’attendais ta réaction et dont tu ne dis rien, c’est quand j’écris dans mon premier paragraphe : « Dehaene qui parle de la conscience me fait penser à un physicien qui prétendrait parler de la matière en niant l’existence des forces fondamentales… ». Peut-être n’as-tu pas réagi parce que ça te paraît trop gros, qu’aucun physicien à tes yeux ne pense un instant nier l’existence de ces forces. Peut-être d’ailleurs que tu as raison mais l’impression que donnent certains modèles est plutôt que tout l’univers tient dans une équation algébrique, que l’algèbre justement et la géométrie vectorielle peuvent contenir la vérité dernière de l’univers, son explication ultime et qu’on peut faire abstraction totale des réalités que sont la gravitation, l’énergie nucléaire, la force électromagnétique. . Je crois qu’il y a une différence entre les mathématiques et la physique, entre le discours mathématique et le discours physique et que cette différence c’est tout simplement le réel dans sa matérialité. D’une certaine façon même si je sais qu’il faut toujours manier l’analogie avec prudence, on trouve cette opposition entre le discours neuroscientifique de Dehaene et le discours de ceux qui, comme moi, posent l’existence dernière et incontournable des qualia et que cette différence s’appelle justement la conscience.
Cette réalité de la conscience échappe si bien à Dehaene qu’il n’a pas grande difficulté à concevoir des machines conscientes pour peu qu’elles soient pourvues de « communication flexible », de « plasticité » et d’ « autonomie ». Il écrit p. 353 (livre imprimé) : « Dans une machine consciente, il faudrait avant tout que les programmes puissent communiquer entre eux avec une grande flexibilité…Les ordinateurs actuels interdisent généralement ce type d’échanges. Seule exception : le presse-papier…L’architecture envisagée permettrait d’augmenter massivement la flexibilité des échanges d’informations en fournissant une sorte de presse-papier universel et autonome : l’espace de travail global. »
Tu conviendras alors, Toto, que je puis légitimement limiter la conception de la conscience de Dehaene à celle d’un « presse-papier universel et autonome ». Et pourquoi ne serait-elle pas cela ? me diras-tu. Sans doute hésiteras-tu à voir cette machine désirer, s’efforcer, souffrir ou jouir mais tu envisageras peut-être sans grande peine que cette machine puisse penser comme elle pourrait voir et entendre à notre manière. La pensée semble appartenir à un univers abstrait, purement conceptuel, indépendant de l’existence de la matière, donc des forces et de l’énergie. Or c’est bien justement ce que je ne crois pas. Pour parler vulgairement, nous pensons avec nos tripes. L’affirmation, la négation, la concession, la remise en cause, toutes ces opérations par lesquelles s’agence et progresse notre pensée sont des opérations dans lesquelles nous investissons de l’énergie qu’on peut appeler affective ou psychique et qui transparaît à notre conscience lorque nous nous regardons penser. Cela épuise d’ailleurs de penser comme cela épuise de courir. Et il n’y a rien de plus douloureux et tragique pour le malheureux atteint d’Alzheimer que de voir sa pensée qui lui échappe malgré tous les efforts qu’il fait pour l’agencer encore.
Je ne vais pas m’épuiser pour te convaincre que la vue, souvent donnée comme le plus abstrait de nos sens, n’est pas le moins sensuel, que les peintres jouent avec cette sensualité si peu perceptible lorque nous fixons les caractères noirs stéréotypés s’aligner sur l’écran de notre ordinateur. Mon idée de la vision que j’ai déjà développée et qui conçoit chaque image comme la coexistence dans le temps d’une multitude d’images-points permet justement de lier la perception visuelle à l’énergie psychique puisque j’en fais la substance même qui donne à chaque image-point son existence.
Ce que je fais pour la perception visuelle, on pourrait le faire plus aisément pour la perception auditive et encore plus aisément pour la perception olfactive. Je te renvoie alors à mon article sur le modulisme et aux travaux des neurobiologistes menés par Carleton que j’y évoque. On y voit la façon dont, chez les souris, on passe d’une mécanique connexionniste dans l’activité du cerveau quand elles sont anesthésiées et qu’elles sont mises en contact d’odorants à une mécanique moduliste losqu’elles sont éveillées, une mécanique qui module l’onde gamma de façon particulière et propre à l’odorant perçu.
Ces travaux que j’évoque sont bien sûrs insuffisants pour démontrer la validité de ma théorie. Il en faudrait de plus diversifiés et à une plus grande échelle. Et puis ce ne serait pas parce qu’on aurait démontré que la mécanique moduliste serait à l’œuvre dans toutes les activités cérébrales corrélées à un état de conscience qu’on aurait définitivement expliqué la conscience. Il faudrait, je le répète, expliquer et prouver l’existence d’une propriété non perçue encore de la matière fondamentale. Mais, crois-moi, Toto, il ne faut pas avoir peur de ne pas tout savoir, de ne pas tout comprendre à un moment donné si on sent que s’ouvre la voie d’une compréhension nouvelle des choses. A la différence de Dehaene, je ne dis pas que j’ai trouvé le code ou la clé de la conscience, je dis seulement que j’ai trouvé une autre voie de recherche pour une conception alternative. Mais je dis aussi, plus fermement que jamais, que la voie suivie par Dehaene approfondit notre compréhension de l’activité computationnaliste du cerveau mais ne nous permettra jamais, pas plus qu’aucune autre voie d’ailleurs, de construire des ordinateurs conscients. Je ne peux peut-être pas dire aujourd’hui absolument ce qu’est la conscience. Mais je puis affirmer le plus fortement possible que Dehaene l’ignore totalement.

toto_au_bistro
Niveau 10
04 novembre 2018 à 10:44:26

Mais encore une fois il ne nie pas. Ton problème c'est que tu vois certaines caractéristiques de la conscience comme irréductibles à un système fonctionnaliste. C'est ton droit, mais Dehaene lui considère que ces mêmes caractéristiques (l'expérience phénoménale) sont réductibles à un système fonctionnaliste. Il embrasse donc tous ces phénomènes.

Au fond le désaccord se situe sur le fonctionnalisme et peut être illustré par l'expérience de pensée de Ned Block sur le cerveau chinois :

Suppose that the whole nation of China was reordered to simulate the workings of a single brain (that is, to act as a mind according to functionalism). Each Chinese person acts as (say) a neuron, and communicates by special two-way radio in the corresponding way to the other people. The current mental state of the China brain is displayed on satellites that may be seen from anywhere in China. The China brain would then be connected via radio to a body, one that provides the sensory inputs and behavioral outputs of the China brain.

Thus, the China brain possesses all the elements of a functional description of mind: sensory inputs, behavioral outputs, and internal mental states causally connected to other mental states. If the nation of China can be made to act in this way, then, according to functionalism, this system would have a mind. Block's goal is to show how unintuitive it is to think that such an arrangement could create a mind capable of thoughts and feelings.

Personnellement en tant que fonctionnaliste je pense que cet assemblage de chinois avec des talkie walkie reproduit des états mentaux et une forme de conscience.

Pseudo supprimé
Niveau 8
04 novembre 2018 à 14:07:48

Personnellement en tant que fonctionnaliste je pense que cet assemblage de chinois avec des talkie walkie reproduit des états mentaux et une forme de conscience.

Là tu serais davantage un déterministe. Le fonctionnalisme se concentre aussi sur l'activité du système qui est irréductible en tant que phénomène de réalisation. Et la conscience dépendrait de cet automatisme.

Sujet : Conscience : théorie de l'espace de travail neuronal global
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