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Philosophie

Sujet : L'Éthique de la liberté, de Murray Rothbard
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Daolong
Niveau 10
01 décembre 2021 à 15:01:48

https://www.noelshack.com/2021-48-3-1638366883-2560px-flag-of-anarcho-capitalism-svg.png https://youtu.be/X1UucF11oms https://www.noelshack.com/2021-48-3-1638366574-2560px-anarcho-gadsden-flag-svg.png

Bonjour :noel:

Finalement ça va, mon résumé ne fait que 24 pages sur word. Je dis résumé mais je ne fais que reprendre des parties telles qu'elles sont dans le livre, car ça prend trop de temps de réfléchir à bien résumer des parties ET sans faire de légers détournements par rapport à ce qu'a voulu dire l'auteur dans le récit premier !

Je ne mets pas des parties de tous les chapitres du livre. Je n'ai plus mis tous les titres du livre avec une barre, car ça prend de l'espace.

J'ai pensé à le mettre sur dropbox : https://www.dropbox.com/s/mq7gd966ce4y98i/L%27%C3%A9thique%20de%20la%20libert%C3%A9%20de%20Murray%20Rothbard.docx?dl=0

J'ai peut-être zappé des parties qui pourraient être intéressantes pour autrui :(

Vous pouvez me poser des questions éventuellement et j'essaierai d'y répondre. :(

Je vais maintenant tout remettre sur JVC, merci de ne pas répondre au topic :ok:

Daolong
Niveau 10
01 décembre 2021 à 15:08:16

:d) L’Éthique de la liberté, de Murray Rothbard

Première partie : Le Droit naturel

La loi naturelle comme discipline « scientifique »

P 43 (début de chapitre) :

On devrait tout de même s’étonner que tant de philosophes modernes froncent le nez chaque fois qu’on parle de la « nature » d’une chose, comme s’il s’agissait d’introduire dans la discussion des éléments de mystique ou de surnaturel. Une pomme, si on la lâche, il faut bien qu’elle tombe par terre : nous observons le phénomène et l’attribuons à la nature de la pomme (et du monde en général). Deux atomes d’hydrogène combinés à un atome d’oxygène produiront une molécule d’eau – phénomène qui est caractéristique de la nature de l’hydrogène, de l’oxygène et de l’eau. Il n’y a rien d’ésotérique ni de mystique dans ce genre d’observations. Pourquoi donc se battre sur le concept de « nature » ? Le fait est que l’univers consiste en une myriade de choses ou entités observables. On ne peut douter qu’il s’agisse là d’un fait d’observation. Puisque l’univers n’est pas constitué d’une masse homogène, d’une seule entité, il s’ensuit que chacun des choses diverses qui le composent possède des attributs différents, sans quoi il s’agirait d’une seule et même chose. Mais alors, si A, B, C, etc. ont des attributs différents, il s’ensuit forcément qu’ils ont des natures différents. Il s’ensuit que quand ces différentes choses viendront en contact et en interaction, cela produira un résultat spécifique et bien défini. Bref, des causes spécifiques et circonscrites produisent des effets spécifiques et circonscrits. Le comportement observable de chacune de ces entités représente la loi de sa nature, laquelle loi embrasse ce qui se produit comme résultat des interactions. L’édifice construit à partir de ces lois peut être appelé la structure de la loi naturelle. Où se trouve la « mystique » là-dedans ?

Note : « Il faut avoir recours à une notion plus ancienne que celle qui est maintenant à la mode chez les scientifiques et les philosophes des sciences contemporains… Il est évident que dans ce monde quotidien de notre existence ordinaire où, quel que soit notre raffinement, nous pouvons difficilement cesser de vivre, d’agir et d’être, nous faisons en fait sans cesse appel à une conception de la « nature » et de la « loi naturelle » qui est plus ancienne et même terriblement banale. Est-ce que nous ne reconnaissons pas qu’une rose est différente d’une aubergine, un homme d’une souris, et l’hydrogène du manganèse ? Reconnaitre de telles différences entre les choses implique forcément de reconnaitre qu’elles se comportent différemment : on n’attend pas d’un homme exactement le même comportement que d’une souris, et vice versa. Bien plus, si nous nous attendons à ce que différents types d’entités fassent des choses différentes, agissent ou réagissent différemment, c’est tout simplement parce qu’il s’agit d’entités différentes. Elles sont de « nature » différente, pourrait-on dire, en utilisant la terminologie ancienne. » Henry B. Veatch, For an Ontology of Morals : A Critique of Contemporary Ethical Theory.

Et « Socrate distingue de ses prédécesseurs en identifiant la science de… Tout ce qui est avec la compréhension de ce qu’est chacun des êtres. « Être », en effet, signifie « être quelque chose » et par conséquent, « être différent de choses qui sont quelque chose d’autre » ; « être » signifie par conséquent « être à part » ». Léo Strauss, Natural Rights and History (Droit naturel et histoire).

[…]

Le Droit naturel et les Droits naturels

P 64 ++++ :

La myriade d’auteurs qui ont théorisé sur les Droits naturels à la suite de Locke et des niveleurs soulignaient bien que pour eux, les Droits en question trouvent leur origine dans la nature de l’homme et du monde qui l’entoure. Voici quelques citations frappantes. Francis Licher, théoricien germanico-américain du XIXe siècle, écrit dans un de ses premiers traités, l’un des plus libertariens :

« Le Droit de la nature ou Droit naturel […] est la structure juridique, l’ensemble des Droits, que nous déduisons de la nature essentielle de l’homme. »

William Ellery Channing, célèbre pasteur unitarien américain du XIXe siècle :

« Tous les hommes possèdent la même nature rationnelle et la même faculté de conscience, et tous sont également créés pour améliorer indéfiniment ces facultés divines et trouver le bonheur dans leur utilisation vertueuse. »

Theodore Woolsey, un des derniers théoriciens systématiques du Droit naturel dans l’Amérique du XIXe siècle, disait des Droits naturels qu’ils sont ceux « dont, à partir de ses caractéristiques physiques, morales, sociales et religieuses, on peut proprement déduire que l’homme doit être doté afin d’atteindre les fins que sa nature lui propose ».

Si comme nous venins de le voir, le Droit naturel est dans son essence une théorie profondément révolutionnaire, cela est encore plus vrai de sa version personnaliste des Droits de propriété individuelles. Elisha P. Hurlbut, théoricien américain de la propriété naturelle au XIXe siècle, l’exprime bien :

« Les lois ne doivent rien faire d’autre que déclarer ce que sont les Droits naturels et les actes naturellement injustes, et… tout ce qui ne concerne pas les lois de nature doit être laissé de côté par la législation humaine. […] c’est de l’abandon de ce simple principe que nait la tyrannie légale. »

Un exemple notable de l’emploi des Droits naturels à des fins révolutionnaires est évidemment la révolution américaine, qui s’inspira d’un progrès dans le sens radical de la théorie lockéenne au XVIIIe siècle. Comme Thomas Jefferson le disait lui-même, le fameux libellé de la Déclaration d’indépendance n’a fait que résumer avec éclat ce que tous les Américains pensaient à l’époque :

« Nous tenons les vérités suivantes pour évidentes en elles-mêmes : que tous les hommes sont créés égaux ; ils sont dotés par le Créateur de certains Droits inaliénables et que parmi des Droits figurent la vie, la liberté et la recherche du bonheur [la triade plus commune à l’époque était « la vie, la liberté et la propriété »]. Que pour assurer ces Droits, les Etats sont institués parmi les hommes, et que la légitimité de leur pouvoir émane du consentement des gouvernés. Que chaque fois qu’une forme quelconque de gouvernement devient destructrice de ces fins, c’est le Droit des gens que de le remplacer ou de l’abolir… »

On peut être particulièrement frappé par la prose enflammée du grand abolitionniste William Lloyd Garrison, qui appliquait de manière révolutionnaire la théorie des Droits naturels à la question de l’esclavage. Dans sa « Déclaration d’opinions » à la Convention américaine contre l’esclavage de décembre 1883, il écrivait :

« Le Droit de jouir de la liberté est inaliénable […]. Chaque homme a un Droit sur son propre corps, sur le produit de son travail, et le droit d’être protégé par la loi […]. Toutes ces lois en vigueur qui consacrent l’esclavage sont donc, devant Dieu, totalement nulles et sans effet […] et par conséquent […] il faut les abroger sur-le-champ. »

Nous allons, tout au long de cet ouvrage, parler de « Droits », surtout des Droits de propriété des individus sur leur propre personne et sur les objets matériels. Encore faut-il définir le concept de « Droits ». Les « Droits ont été définis avec force et clarté par le professeur Sadowsky :

« Quand nous disons qu’une personne a le Droit de faire certaines choses, nous voulons dire ceci et seulement ceci : qu’il serait immoral que toute autre personne, seule ou en groupe, l’empêche de le faire par l’emploi de la force physique ou la menace de son emploi. Nous n’impliquons en rien que la manière dont un homme utilise sa propriété à l’intérieur de cette limite soit nécessairement morale ni vertueuse. » (James A. Sadowsky, « Private Property and Collective Ownership », dans The Libertarian Alternative)

La définition de Sadowsky met en lumière la distinction absolument cruciale, que nous maintiendrons tout au long de cet ouvrage, entre le Droit d’un homme et le caractère morale ou immoral de son exercice. Nous soutiendrons qu’un homme a le Droit de faire tout ce qu’il veut avec sa personne ; que c’est son Droit de ne pas être importuné ni contraint par la violence dans l’usage qu’il fait de ce Droit. En revanche, dire que les manières d’exercer ce Droit sont morales ou immorales relève de l’éthique privée et non de la philosophie politique – qui traite exclusivement des question de Droit et des jugements qu’on peut porter sur l’emploi de la violence physique dans les relations humains. On ne saurait trop souligner à quel point cette distinction est essentielle. Elisha Hurlbut le résume en quelques mots :

« Le seul usage qu’[un individu] puisse faire d’une faculté, c’est de l’exercer. La manière dont il l’exerce sur une chose ; c’est cela qui relève de l’éthique. Le Droit de l’exercer est une chose absolument différente. »

Daolong
Niveau 10
01 décembre 2021 à 15:15:37

Deuxième partie : Théorie de la liberté

La philosophie du Droit chez Robinson Crusoé

P 77++ :

Robinson se retrouve donc confronter à de multiples besoins qu’il essaie de satisfaire, des objectifs qu’il tente d’atteindre. Certains de ces objectifs pourront être atteints au prox d’un effort minimum de sa part : si son île est ainsi faite, il pourra cueillir des baies comestibles dans des buissons tout proches. Dans ce cas, sa « consommation » d’un bien ou d’un service peut être obtenue facilement et de manière presque instantanée. Cependant, pour presque tous ses besoins, Robinson va découvrir que la nature qui l’entoure ne les satisfait pas sans effort ni sans attente. Bref, que ce n’est vraiment pas dans le jardin d’Eden qu’il est tombé. Pour réaliser ses buts, il doit au contraire, de la manière la plus économe en temps et en efforts, s’approprier les ressources que lui donne la nature et les transformer en objets utiles, par un changement de leur forme ou de leur disposition, qui les rende propres à satisfaire ses besoins.

Autrement dit, il lui faut : a) choisir ses objectifs ; b) apprendre comment les atteindre en se servant de ressources mises à sa disposition par la nature ; et ensuite c) appliquer l’énergie de son travail à donner à ces ressources des formes et des affectations plus utiles, c’est-à-dire en faire des « biens de capital » et finalement des « biens de consommation » directement utilisables. Par exemple, Robinson peut, à partir des matières premières prises dans la nature, se fabriquer une hache (un bien de capital) avec laquelle il abattra des arbres pour se construire une cabane (un bien de consommation). Ou il peut fabriquer un filer (bien de capital) pour pêcher le poisson (bien de consommation). Dans chacun de ces cas, il utilise les connaissances techniques qu’il a apprises pour appliquer ses efforts à la transformation de la terre en capital matériel et finalement en bien de consommation courante. Ce processus de transformation des ressources de la terre constitue sa « production ». C’est dire que Robinson doit produire avant d’être en mesure de consommer, et s’il produit, c’est pour consommer. Par ce processus de production de transformation, l’homme façonne et modifie son milieu naturel pour ses propres fins au lieu d’être, comme un animal, simplement déterminé par lui.

Ainsi, l’homme qui ne possède aucune connaissance innée, instinctive, automatiquement acquise des buts qu’il doit poursuivre ni des moyens qui permettent de les réaliser, doit apprendre tout cela et, pour ce faire, il doit employer ses pouvoirs d’observation, d’abstraction, de réflexion ; en bref, sa raison. La raison est l’instrument qui permet à l’homme d’acquérir l’information et, par conséquent, de survivre ; se servir de son esprit et le développer, apprendre ce qui lui convient le mieux et les moyens d’y arriver, voilà la façon proprement humaine de vivre et de s’accomplir. Et c’est là un trait spécifique à la nature de l’homme ; l’homme, comme le notait Aristote, est l’animal rationnel ou, pour être plus précis, l’être rationnel. Grâce à sa raison, l’homme singulier observe et les faits et les lois du monde extérieur, et les faits qui tiennent à sa propre conscience, y compris ses émotions : il use à la fois de l’ « extraspection » et de l’introspection.

Robinson, avons-nous dit, s’informe sur ses fins et sur les moyens de les réaliser. Mais que fait exactement sa capacité d’apprentissage – sa raison – dans ce processus de création d’informations ? Elle apprend comment les choses marchent dans l’univers, c’est-à-dire la nature des entités singulières et des classes de choses dont l’homme découvre l’existence. Bref, il apprend à connaitre les lois naturelles qui gouvernent le comportement des choses dans le monde. Il apprend qu’une flèche tirée d’un arc peut abattre un daim et qu’un filet de pêche attrape beaucoup de poissons. Qui plus est, il découvre sa propre nature, apprenant quels sont les types d’événements et d’actions qui le rendent heureux ou malheureux : autrement dit, il apprend à connaitre les fins qu’il doit réaliser et celles qu’il doit éviter de poursuivre.

[…]

En faisant l’examen introspectif de sa propre conscience, la personne découvre en même temps le fait naturel primordial de sa liberté ontologique : liberté de choisir, liberté d’exercer ou non sa faculté rationnelle à propos d’une question quelconque. Bref, le fait de nature qu’est son « libre arbitre ». Il découvre aussi le fait de nature qu’est le contrôle de son esprit sur son corps et sur ses actions : à savoir le fait de la possession naturelle qu’il exerce sur lui-même.

Robinson, donc, possède son propre corps : son esprit est libre d’adopter toutes les fins qu’il désire, de faire usage de sa raison pour découvrir quelles sont les fins qu’il doit choisir, et d’apprendre les procédés propres à employer les moyens disponibles pour atteindre ses fins. […]

P 81 bas + :

Nous avons vu que Robinson, comme c’est le cas de tout homme, est libre de ses décisions, et a la liberté de choisir ses actions et de déterminer le cours de sa vie. Certaines critiques ont objecté que cette liberté serait illusoire parce que l’homme reste contraint par les lois de la nature. C’est là une fausse interprétation, et un des nombreux exemples de la confusion entre la liberté et la capacité qui a la vie dure à notre époque.

L’homme est libre d’adopter des valeurs et de décider de ses actions ; mais cela ne signifie absolument pas qu’il puisse impunément violer les lois naturelles – par exemple sauter d’un bond par-dessus l’océan. Autrement dit, quand nous disons que « l’homme n’est pas « libre » de sauter par-dessus l’océan », nous ne parlons pas d’un manque de liberté mais d’un manque de capacité à traverser l’océan du fait des lois de sa nature et de celle du monde. La liberté de Robinson d’adopter des idées, de choisir ses fins reste inviolable et inaliénable ; d’un autre côté, comme l’homme n’est pas plus omnipotent qu’il n’est omniscient, il trouvera toujours des limites à son pouvoir de faire toutes les choses qu’il voudrait faire. En somme, son pouvoir est nécessairement limité par les lois de la nature, mais elles n’affectent pas la liberté de sa volonté. Autrement dit il est particulièrement absurde de définir la « liberté » d’une entité comme sa capacité éventuelle d’accomplir une action contraire à sa nature.

Si le libre arbitre de l’homme dans le choix de ses idées et jugements de valeur est inaliénable, sa liberté d’action – sa liberté de mettre en œuvre ces idées dans le monde – n’est, hélas, pas aussi bien lotie. Il ne s’agit pas ici des limites aux pouvoirs de l’homme qui sont imposées par sa nature et par celle des autres entités. Ce dont il s’agit maintenant est l’ingérence d’autrui dans le domaine d’action d’une personne – mais là, nous nous aventurons ailleurs que chez Robinson. Notons seulement que, si nous entendons la liberté dans le sens de liberté politique, comme le fait de ne pas être importuné par d’autres personnes, Robinson est parfaitement libre, mais qu’il nous faudra reprendre ce raisonnement et le développement dès lors qu’il s’agira d’un monde où agit plus d’une personne.

Les relations entre les personnes :
1. L’échange volontaire

P 86 bas + :

Si quelqu’un veut toucher du doigt tout ce que nous devons aux processus d’échange, qu’il imagine seulement ce qu’il adviendrait du monde moderne si l’on interdisait tout d’un coup à chaque homme d’échanger quoi que ce soit avec quiconque. Chacun serait forcé de produire lui-même tous les biens et services dont il veut disposer. On peut tout de suite imaginer le chaos absolu qui s’ensuivrait, la famine qui frapperait la grande majorité de la race humaine, et le retour à une subsistance primitive pour la petite poignée de survivants.
Un autre aspect remarquable de l’action humaine se trouve en ceci que A et B ont chacun avantage à se spécialiser et à échanger, même s’il y en a un qui est meilleur que l’autre dans les deux domaines de la production. […]

P 96 + :

On peut caractériser le régime de la liberté complète – la société libertarienne – comme une société dans laquelle aucun Droit de propriété n’a été « distribué », c’est-à-dire où aucun homme ne subit d’ingérence de la part d’autres personnes dans le contrôle qu’il exerce sur sa personne ou sur ses biens tangibles. Cela signifie que la liberté absolue, au sens politique du terme, est possible non seulement pour un Robinson Crusoé solitaire, mais pour chaque homme dans toute société, quel que soit son degré d’avancement et de complexité. Car pour que chaque homme jouisse de la liberté absolue, de la liberté totale, il suffit qu’à l’image de ce qui se passe pour Robinson, sa possession naturelle (de sa personne et de ses biens tangibles) soit à l’abri des ingérences et des violences d’autrui. Quand elle se trouve dans une société d’échanges strictement volontaires, toute personne peut à l’évidence profiter de la liberté absolue, non pas dans un isolement à la Robinson mais dans un cadre de civilisation, d’harmonie, de sociabilité, et d’une productivité énormément accrue par la circulation et l’échange des Droits de propriété entre ses congénères. Il n’y a donc aucune nécessité à ce que l’abandon de la liberté absolue soit le prix à payer pour l’avènement de la civilisation. L’homme est bel et bien né libre, et il n’a jamais à être dans les chaines. Il est possible à l’homme d’obtenir la liberté en même temps que l’abondance, et la libre disposition de soi aussi bien que la civilisation.

Nous perdons de vue cette liberté si nous persistons à confondre la « liberté » d’agir avec le pouvoir de faire. Nous avons déjà relevé l’absurdité qu’il y a à prétendre que l’homme n’a pas de libre arbitre sous prétexte qu’il n’a pas la pouvoir de passer outre aux lois de sa nature […]. Il est tout aussi absurde de dire qu’un homme ne sera pas « vraiment » libre dans la société libre parce qu’il n’y serait pas « libre » d’agresser autrui ni de violer sa propriété. Encore une fois, cette critique ne porte pas sur la liberté mais sur le pouvoir. Dans une société libre, il ne serait permis à personne (ou personne ne se le permettrait) de violer la propriété d’autrui. Cela impliquerait certainement que le pouvoir d’action de chacun serait limité, de même que le pouvoir de l’homme est toujours limité par sa nature ; mais cela n’impliquerait en rien une diminution de sa liberté. Car si nous définissons encore une fois la liberté comme l’absence de violence commise par un homme sur la personne ou sur la propriété d’un autre, la confusion entre la liberté et le pouvoir, destructrice de la pensée, disparait.

P 98 bas + :

[…] si quelqu’un prétend que chaque homme aurait un « Droit naturel » à trois bons repas par jour, il est d’une évidence criante que nous avons là une fausse théorie de la loi ou des Droits naturels, car il existe une infinité de circonstances et d’endroits où il est matériellement impossible de fournir trois bons repas par jour à l’ensemble de la population et même à une majorité de ses membres : on ne peut donc pas le présenter comme un « Droit naturel » à quelque titre que ce soit.

Observons, à l’inverse, le caractère universel de l’éthique de la liberté, ainsi que du Droit naturel de la personne et de la propriété qui prévaut sous ses auspices. A chaque personne, en tout temps et en tout lieu, s’appliquent les mêmes règles fondamentales : propriété de la personne sur elle-même et sur les ressources préalablement inutilisées qu’on a occupées et transformées ; reconnaissance de tous les titres de propriété issus de cette propriété première, que ce soit par l’échange volontaire ou par le don. Ces règles – que nous pouvons appeler les « règles de la propriété naturelle » - sont évidemment applicables, de même qu’il est possible de protéger ces formes de possession en tout temps et en tout lieu et quel que soit le niveau économique de la société. Il n’est possible à aucun autre système politique de satisfaire aux critères d’une loi naturelle universelle, car il suffit qu’il existe une personne ou un groupe de personnes qui, d’une façon quelconque, en domine d’autres par la force (et toute domination participe de cette hégémonie) pour qu’il soit impossible d’appliquer à tous la même règle. Seul un monde sans maitre, un monde purement libertarien, peut correspondre aux exigences du Droit et de la loi naturels et surtout, ce qui est plus important, aux conditions d’une éthique universelle pour tous les hommes.

Daolong
Niveau 10
01 décembre 2021 à 15:26:30

2. Possession et agression

La propriété et l’agression

P 118 bas + :

[…] la question cruciale pour la société n’est pas de savoir, comme tant de gens le croient, si la propriété doit être privée ou publique, mais plutôt de savoir si les propriétaires, nécessairement privés, détiennent un patrimoine légitime ou d’origine délictueuse. Car en fin de compte, il n’y a pas de « puissance publique » ; il n’y a que des gens, qui se réunissent dans des groupes qu’ils appellent des « Etats », et qui agissent en tant qu’hommes de l’Etat. En conséquence, toute propriété est toujours privée ; la seule question, la question cruciale, est de savoir si elle doit se trouver entre les mains de voleurs ou entre les mains de ses vrais propriétaires légitimes. Les libertariens n’ont en réalité qu’une seule bonne raison de s’opposer à la constitution d’un « domaine public » ou réclamer son démantèlement : c’est la conscience du fait que les hommes de l’Etat n’en sont propriétaires qu’à titre illégitime et criminel.

Le monopole des terres hier et aujourd’hui

P 137 :

Il existe deux régimes de titres fonciers moralement indéfendables (ndlr : en plus, bien sûr, des titres d’Etat, qui seront traités plus loin) : la féodalité, caractérisée par une agression permanente des propriétaires fonciers contre les paysans qui travaillent la terre, et l’accaparement des terres, où l’on interdit aux colons de s’établir sur des terres vierges au nom de titres de propriété sans fondement. On peut appeler ces deux sortes d’agression le « monopole des terres », non pas qu’une seule personne ou un seul groupe soit propriétaire de toutes les terres mais au sens où, dans les deux cas, des privilèges arbitraires grèvent la propriété foncière, en violation d’un principe libertarien selon lequel la terre n’appartient à personne sinon à ses premiers utilisateurs, ou à leurs héritiers et ayants droit.

La légitime défense

P 151 bas ++ :

La riposte défensive doit se limiter à la riposte aux intrusions violentes – agressions immédiates ou implicites, ou menaces directes et explicites. Ce principe étant acquis, jusqu’où va le Droit de se défendre par la violence ? Ce serait évidemment une révoltante agression criminelle que de tirer sur un homme de l’autre côté de la rue parce que son regard hargneux vous a semblé préluder à une agression. Le danger doit être « manifeste et imminent » - pour reprendre le critère qu’il faut appliquer non pas aux restrictions de la liberté d’expression (restrictions qui ne sont jamais légitimes quand on considère la liberté d’expression comme un sous-ensemble des Droits de la personne et de la propriété) mais bien au Droit de prendre des mesures coercitives contre une agression qui se présente comme imminente.

Deuxième question : doit-on être d’accord avec ces libertariens qui reconnaissent au boutiquier le Droit de tuer le gamin qui a dérobé un chewing-gum ? Cette position, que l’on peut qualifier de « maximaliste », se défend comme suit : « En volant le chewing-gum, le gamin se place en dehors de la loi. Ses actions démontrent qu’il ne soutient ni ne respecte la vraie théorie des Droits de propriété. Il s’ensuit qu’il perd tous ses Droits, et le boutiquier peut légitimement le tuer en représailles. »
La démesure de cette thèse est grotesque. Accrochée au Droit du boutiquier sur son chewing-gum, elle méprise totalement un autre Droit de propriété très précieux : le Droit de chaque homme – y compris le gamin – d’être propriétaire de soi. En vertu de quoi devrait-on croire que celui qui viole très légèrement la propriété d’autrui se retrouve par le fait même déchu de tout ce qu’il possède ? Je propose un autre principe fondamental de criminologie : le délinquant, c’est-à-dire l’envahisseur, se trouve déchu de ses Droits dans la mesure où il a privé un autre homme des siens. Selon que l’on prive quelqu’un de sa propriété sur sa propre personne ou l’extension de cette propriété dans les choses physiques, on perd ses propres Droits dans la même mesure. De ce principe découle immédiatement la théorie de la proportionnalité des délits et des peines, que réside le vieil adage : « A chaque infraction, une peine proportionnée. »
Nous en déduisons qu’en tirant sur le petit voleur, en le blessant ou en le tuant, le boutiquier est allé au-delà de la perte proportionnelle de ses Droits ; cet excès est en lui-même une violation des Droits que le voleur de chewing-gum possède sur sa propre personne. En fait, l’épicier est devenu un criminel, pour avoir blessé ou tué sa victime, son infraction étant de loin plus grave que le vol d’origine.

Les enfants et les Droits

P 177 :

Nous avons maintenant établi le Droit de propriété de chaque homme sur sa propre personne et sur les terres vierges qu’il trouve et que son travail transforme ; et nous avons montré que, de ces deux principes, on peut déduire toute la structure des Droits de propriété sur toutes choses, incluant celles que l’on acquiert par l’échange et par le don volontaire ou l’héritage.

Reste le cas difficile des enfants. Notre démonstration du Droit de propriété sur soi-même s’applique aux adultes, à ceux qui sont naturellement propriétaires d’eux-mêmes et qui doivent utiliser leur raison dans le choix et la poursuite de leurs buts. Or, il est évident qu’un nouveau-né n’existe pas naturellement comme propriétaire de soi, il ne l’est qu’en puissance.

(John Locke le disait ainsi : « J’admets que les enfants ne sont pas entièrement nés dans cet état d’égalité naturelle (de Droit à leur liberté naturelle), quoique leur naissance le leur ait conféré. Leurs parents ont sur eux une sorte d’autorité morale et juridique lorsqu’ils viennent au monde, et pour quelque temps par la suite, mais il s’agit d’une autorité temporaire. Les liens de cette sujétion sont come les langes qui les enveloppent et les soutiennent, dans la faiblesse de leur petite enfance. L’âge et la raison les desserrent à mesure qu’ils grandissent, jusqu’à tomber tout à fait, et laissent un homme à sa propre libre disposition. » Locke, dans « Two Treatise of Government ».)

Ce qui pose un problème difficile : à quel moment, de quelle manière un enfant qui grandit acquiert-il son Droit naturel d’être libre et propriétaire de soi ? Graduellement ? Tout d’un coup ? A quel âge ? Et quel critère établir pour ce changement ou cette transition ?

P 185 bas ++ :

A la naissance de son enfant, la mère en devient donc possesseur « à titre fiduciaire », avec pour seule obligation en Droit de ne pas commettre d’agression contre sa personne puisque l’enfant dispose en puissance de la propriété de soi. Cela étant, aussi longtemps que l’enfant vit à la maison, il relève forcément de la juridiction de ses parents puisqu’il vit dans un endroit qui leur appartient. Or, les parents ont le Droit d’établir des règles gouvernant l’usage de leur maison et de leur propriété et qui s’imposent à tous ceux qui y vivent, leurs enfants inclus.

Mais à quel moment dans le temps fixer la fin de cette juridiction fiduciaire des parents sur leurs enfants ? Le choix d’un âge particulier (21 ans, 18 ans, etc.) ne saurait être que tout à fait arbitraire. La clé de ce problème difficile se trouve dans le Droit de propriété des parents sur leur demeure. En effet, l’enfant accède à la plénitude de ses Droits de propriété sur lui-même quand il démontre qu’il est détenteur de fait, autrement dit quand il quitte la maison ou quand il s’en enfuit. On doit reconnaitre à tout enfant, quel que soit son âge, le Droit de quitter sa maison, soit pour trouver de nouveaux parents volontairement disposés à l’adopter, soit pour essayer de vivre par ses propres moyens. Les parents peuvent essayer la persuasion pour faire revenir un enfant qui s’est enfui, mais l’emploi de la force pour le ramener constituerait un asservissement et une transgression tout à fait illicites de son Droit de propriété sur lui-même. Le Droit absolu de s’enfuir constitue l’expression ultime du Droit de propriété de l’enfant sur lui-même, quel que soit son âge.
Si un parent est propriétaire de son enfant (dans les limites de la non-agression et du Droit de propriété), alors il lui est aussi loisible de céder ce Droit de propriété à quelqu’un d’autre. Il peut donner son enfant en adoption ou, par contrat volontaire, vendre les Droits qu’il détient sur lui. Autrement dit, nous devons accepter que le marché libre des enfants connaisse un grand développement dans une société totalement libre. A première vue, cela peut sembler monstrueux et inhumain. Mais, à l’examen, l’humanisme supérieur de ce marché apparait. Car nous devons prendre conscience qu’un marché des enfants existe bel et bien aujourd’hui, mais que, à cause de l’interdiction étatique de vendre les enfants pour de l’argent, la seule transaction permise aux parents consiste à les donner gratuitement à une agence agréée par les hommes de l’Etat. Cela signifie que nous avons actuellement un marché des enfants mais que les hommes de l’Etat y contrôlent les prix, plafonnés à zéro, et qu’ils n’y admettent que quelques agences privilégiées et monopolistes. La situation qui en résulte est typique d’un marché où les hommes de l’Etat maintiennent les prix au-dessous de leur niveau du marché libre : une énorme « pénurie » du bien en cause. De manière générale, en effet, la demande excède de beaucoup l’offre de bébés et d’enfants, comme n témoignent tous les jours les tragédies d’adultes qui se voient refuser la joue d’avoir un enfant par des services d’adoption inquisiteurs et tyranniques. En même temps qu’une pléthore de bébés non désirés que leurs parents négligent et maltraitent, on observe, de la part d’adultes et de couples, une forte demande d’enfants qui n’est pas satisfaite. Un marché libre d’enfants, s’il était autorisé, comblerait ce déséquilibre et permettrait une redistribution des enfants appartenant à des parents qui n’ont pas d’amour ou qui ne sont pas faits pour avoir des enfants appartenant à des parents qui n’ont pas d’amour ou qui ne sont pas faits pour avoir des enfants, vers des parents adoptifs qui désirent fortement en avoir. Tout le monde – parents naturels, enfants et parents adoptifs – seront avantagé pas ce type de société.

P 191 :

Mais plus encore que les Droits des parents, ce sont les Droits des enfants qui ont été violés par les hommes de l’Etat. Les lois sur l’obligation scolaire, qui pullulent depuis le début du siècle aux Etats-Unis, forcent les enfants à fréquenter les écoles publiques ou les écoles privées qui ont la faveur des hommes de l’Etat. Prétendument humanitaire, la législation sur le travail des enfants a systématiquement, et par la force, interdit à ceux-ci d’entrer sur le marché du travail, pour le plus grand bénéfice de leurs concurrents adultes. Empêchés par la force de travailler et de gagner leur vie, forcés de fréquenter des écoles qu’ils n’aiment pas ou auxquelles ils sont mal adaptés, les enfants sombres fréquemment dans la délinquance, ce dont les hommes de l’Etat prennent ensuite prétexte pour les enfermer dans des institutions pénales appelées « institutions spécialisées » où les enfants sont emprisonnés pour s’être rendus coupables d’actions ou de non-actions qui ne seraient pas considérées comme des « fautes » si elles étaient le fait d’adultes.

Les « Droits de l’homme » comme Droits de propriété

P 200 + :

Disons d’abord que les Droits de propriété sont identiques aux Droits de l’homme de deux manières : premièrement, il n’y a que les hommes pour posséder des biens, de sorte que leurs Droits sur la propriété sont des Droits d’êtres humains ; deuxièmement, le Droit de la personne sur son propre corps, sa liberté personnelle, est un Droit de propriété dans sa propre personne aussi bien qu’un « Droit de l’homme ». Mais ce qui importe surtout pour notre propos actuel, c’est que les Droits de l’homme, s’ils ne sont pas formulés en termes de Droits de propriété, se révèlent vagues et contradictoires, ce qui amène les socialistes à les affaiblir au nom de « politiques publiques » ou de « l’intérêt général ». […]

Bref, il n’existe pas de « Droit à la liberté d’expression » ; ce que l’on a, c’est le Droit de louer une salle et de parler aux personnes qui en franchissent le seuil. Il n’y a pas de « Droit à la liberté de la presse » ; ce que l’on a, c’est le Droit de rédiger et de publier un écrit et de le vendre à qui est disposé à l’acheter (ou de le distribuer gratuitement à ceux qui l’acceptent). Ainsi, dans chacun de ces cas, les Droits dont on est titulaire sont des Droits de propriété, qui incluent la liberté contractuelle et la liberté de céder sa propriété. Il n’y a pas de « Droit à » la liberté d’expression ou à la propriété de la presse qui s’ajouterait aux Droits généraux de propriété dont on dispose.

[…]

Les « Droits » des animaux

P 263 + :

Une nouvelle mode se répand depuis quelque temps qui consiste à étendre le concept de Droits aux animaux et à affirmer que ceux-ci disposeraient de tous les Droits des hommes, et qu’il serait donc illégitime – c’est-à-dire qu’aucun homme n’aurait le Droit – de les tuer ou de les manger.

Cette thèse souligne évidemment un grand nombre de difficultés, dont celle d’établir un critère pour choisir entre les animaux à inclure dans la sphère des Droits et ceux qui en sont exclus. (Par exemple, peu de théoriciens iraient aussi loin qu’Albert Schweitzer, qui niait à quiconque le Droit d’écraser une blatte. Et s’il fallait que la théorie s’applique non seulement aux êtres conscients mais à tous les êtres vivants, bactéries et plantes comprises, la race humaine s’éteindrait rapidement.)

Cependant, le vice essentiel de la doctrine des « Droits des animaux » est plus fondamental et d’une portée plus grande. En effet, l’affirmation des Droits de l’homme ne relève pas de l’émotivité ; si les individus ont des Droits, ce n’est pas parce que nous « sentons » qu’il doit en être ainsi, mais parce que l’examen rationnel de la nature de l’homme et de l’univers le démontre. Autrement dit, l’homme a des Droits parce que ce sont des Droits naturels. Ils sont ancrés dans la nature de l’homme : dans sa capacité individuelle de poser des choix conscients, dans la nécessité pour lui d’employer sa raison et son énergie pour adopter des objectifs et des valeurs, pour appréhender le monde, pour poursuivre ses fins de survie et de prospérité, dans sa capacité et son besoin de communiquer, d’interagir avec d’autres êtres humains et de participer à la division du travail. Bref, l’homme est un animal rationnel et social. Aucun autre animal, aucun autre être ne possède la même faculté de raisonner, de poser des choix conscients, de transformer son milieu aux fins de sa prospérité, de participer consciemment à la société et à la division du travail.

[…] Le Droit naturel est nécessairement lié à l’espèce [humaine].

Daolong
Niveau 10
01 décembre 2021 à 15:35:52

:d) Troisième partie : L’Etat contre la liberté

La nature de l’Etat

P 279 bas + :

[…] Les idéologues de l’étatisme ont pour fonction de tisser les faux habits de l’empereur, de faire admettre à la population un système de deux poids, deux mesures, vu que lorsque les hommes de l’Etat commettent le pire des crimes, en fait ce n’en est pas un, mais quelque chose d’autre, qui est nécessaire, juste, vital et même – à d’autres époques – conforme à la volonté même de Dieu. Le succès immémorial de ces chiens de garde idéologiques de l’Etat dans leur entreprise représente peut-être la plus grande supercherie de l’histoire de l’humanité.

L’idéologie a toujours été essentielle à la survie de l’Etat comme le montre son utilisation systématique depuis les anciens empires d’Orient. Bien sûr, le contenu de l’idéologie varie selon les époques, les conditions et les cultures. Dans le despotisme oriental, l’Eglise officielle considérait souvent l’empereur comme un dieu ; à notre époque plus profane, l’argument est devenu celui de l’ « intérêt général » ou du « bien public ». Mais le but est toujours le même : convaincre la population que l’Etat ne représente pas, comme on serait porté à le croire, la criminalité sur une échelle gigantesque, mais plutôt quelque chose de nécessaire et de vital qui mérite soutien et obéissance. Si l’Etat éprouve un tel besoin d’idéologie, c’est qu’il se fonde toujours en définitive sur l’appui de la majorité de la population, qu’il soit « démocratie », dictature ou monarchie absolue. Cet appui n’est rien d’autre que l’acceptation du système par la majorité (et non pas, répétons-le, par chaque individu), qui consent à payer l’impôt, à se battre sans trop rechigner dans les guerres voulues par les hommes de l’Etat, à se soumettre à leurs réglementations et décrets. Point n’est besoin d’un enthousiasme actif pour garantir l’efficacité de cet appui, la résignation passive suffit. Mais l’appui est nécessaire. Car si la population est vraiment persuadée que l’Etat est illégitime, qu’il n’est ni plus ni moins qu’une immense bande de gangsters, il s’effondrerait rapidement et ne serait rien de plus qu’une mafia parmi d’autres. D’où la nécessité des idéologues stipendiés par les hommes de l’Etat et aussi de la complicité séculaire avec les intellectuels de cour qui ressassent l’apologie de la domination étatique.

Les contradictions internes de l’Etat

P 289 +++ :

Un problème majeur quand on discute de la prétendue nécessité de l’Etat est le fait que toutes ces discussions ont lieu dans un contexte où l’Etat existe depuis des siècles, et où le peuple a pris l’habitude de cette domination. L’association cynique de la mort et des impôts dans le dicton populaire qui exprime la certitude nécessaire des deux montre bien que les gens se sont résignés à l’existence de l’Etat, perçu comme un fléau, mais un fléau naturel inéluctable contre lequel il n’y a pas de solution. Le poids de l’habitude qui cimente la domination étatique a été relevé dès le XVIe siècle dans les écrits de La Boétie. Mais comme nous voulons invoquer la logique contre le poids des habitudes, nous ne devons pas nous contenter de comparer l’Etat que nous connaissons avec une situation inconnue, nous devons plutôt commencer au point social zéro, dans la diction logique de « l’état de nature », et mettre en balance les arguments en faveur de l’Etat et les arguments pour une société libre.

Imaginons qu’un nombre assez important de personnes viennent soudainement au monde et aient à choisir le type d’organisation sociale sous lequel elles devront vivre. Certaines défendent l’opinion suivante (argument typique en faveur de l’Etat) :

« Si on permet à chacun de nous de demeurer libre sous tous rapports, plus particulièrement si chacun peut détenir des armes et conserve son Droit d’autodéfense, il s’ensuivra une guerre de tous contre tous qui mènera la société au naufrage. Par conséquent, confions nos armes et notre pouvoir ultime de décision, incluant le pouvoir de définir et de faire respecter nos Droits, confions cela à… tenez, à la famille Tartempion là-bas. La famille Tartempion nous protégera contre nos instincts de prédateurs, maintiendra la paix sociale et fera respecter la justice. »

Est-il possible d’imaginer que quelqu’un (excepté peut-être la famille Tartempion) envisage un plan aussi absurde ? Il serait réduit au silence par ce cri :

« Et qui nous protégera contre la famille Tartempion, surtout quand nous serons privés de nos armes ? »
Et pourtant, bien que la prétendue légitimité de la famille Tartempion ne découle que de la durée de leur pouvoir, c’est le type d’argument que nous acceptons sans discussion. Le recours à la logique de l’état de nature est utile pour nous débarrasser du poids de l’habitude et voir l’Etat tel qu’il est – voir que, de fait, le roi est bien et bien nu.

Si, en effet, nous portons un regard logique et détaché sur la théorie de « l’Etat limité », on voit tout de suite quelle chimère il représente, quelle utopie incohérente il propose. En premier lieu, on n’a aucune raison de croire que le monopole de la violence, une fois acquis à la famille Tartempion ou à quelque autre dirigeant étatique, continuera de se « limiter » à la protection de la personne et de la propriété. L’expérience de l’histoire montre sans l’ombre d’un doute qu’un Etat n’est longtemps demeurer limité. Et il existe d’excellentes raisons pour croire qu’aucun Etat ne le sera jamais. Premièrement, une fois le principe cancéreux de la coercition – le financement par le vol et le principe du monopole violent sur l’emploi de la force – légitime et établi au cœur de la société -, on a toutes les raisons de s’attendre à ce que ce précédent ne fasse que croitre et embellir. Plus spécifiquement, l’intérêt économique des dirigeants de l’Etat les pousse à travailler activement à l’expansion de leur pouvoir. Plus les pouvoirs coercitifs de l’Etat se développent au-delà des limites que chérissent les théoriciens de l’Etat libéral, plus s’accroissent le pouvoir et la richesse de la classe dirigeante aux commandes de l’appareil d’Etat. C’est pourquoi, impatiente de maximiser son pouvoir et sa richesse, cette classe étendra les compétences de l’Etat – et elle ne rencontrera que peu d’opposition, étant donné la légitimité qu’elle et ses supports intellectuels ont réussi à obtenir, étant donné aussi l’absence de liberté sur les méchés, l’insuffisance des moyens institutionnels de résister au monopole étatique de la violence et sa capacité de faire prévaloir par la force ses conceptions. C’est un heureux trait du marché libre que la maximisation de la richesse d’une personne ou d’un groupe profite en retour à tous ; dans le domaine de la politique en revanche, dans le domaine étatique, la maximisation des revenus et de la richesse ne peut profiter qu’aux parasites que sont l’Etat et ses dirigeants, et ceci au détriment du reste de la société.

Les partisans de l’Etat limité défendent souvent l’idéal d’un Etat au-dessus de la mêlée, qui ne prendrait pas parti ni ne ferait étalage de sa puissance, d’un « arbitre » qui trancherait avec impartialité entre les différentes factions de la société. Mais quelle raison les hommes de l’Etat auraient-ils de se comporter ainsi ? Etant donné leur pouvoir sans contrepoids, l’Etat et ses dirigeants agiront de manière à maximiser leur pouvoir et leur richesse et, par conséquent, dépasseront inévitablement leurs prétendues « limites ». Ce qui est important, c’est que l’utopie de l’Etat limité et du libéralisme ne fournit aucun mécanisme institutionnel pour contenir l’Etat à l’intérieur de ses limites. Pourtant, l’histoire sanguinaire de l’Etat aurait dû prouver qu’on use nécessairement, et donc qu’on abuse, de tout pouvoir quel qu’il soit, dès lors qu’on l’a reçu en partage ou qu’on s’en est emparé. Comme le remarquait Lord Acton, le pouvoir corrompt.

De plus, au-delà de l’absence de mécanisme institutionnel capable d’assurer que l’ultime décideur et utilisateur de la force se « limite » à la protection des Droits, il existe, dans l’idéal même de l’Etat neutre ou impartial, une grave contradiction interne. Il ne peut y avoir d’impôt « neutre », de régime fiscal qui laisse le marché inchangé par rapport à ce qu’il aurait été en l’absence d’impôt. […] Quel que soit le niveau de l’impôt, il créera toujours au moins deux classes sociales antagonistes : la classe « dirigeante », qui profite et vit de l’impôt ; et la classe « dominée », qui paie les impôts. Bref, deux classes en lutte : les payeurs d’impôts nets et les consommateurs nets d’impôt. A tout le moins, les fonctionnaires de l’Etat sont forcément des consommateurs nets d’impôt ; et on trouve d’autres membres de cette classe parmi les personnes et les groupes subventionnés par les dépenses inévitables des hommes de l’Etat.

Le statut moral des relations avec l’Etat

P 307 bas + :

Une justification courante de l’Etat est que l’homme est un « animal social » obligé de vivre en société, alors que les individualistes et les libertariens n’envisageraient que des « individus atomisés », sans influence réciproque et détachés de leurs frères humains. Aucun libertarien n’a jamais soutenu que les individus seraient des atomes isolés ; au contraire, tous les libertariens reconnaissent la nécessité et les énormes avantages de la vie en société et de la division sociale du travail. Les défenseurs de l’Etat, y compris les philosophes aristotéliciens et thomistes classiques, sont tombés dans cet énorme non sequitur qui consiste à sauter de la nécessité de la société à la nécessité de l’Etat. En fait, comme nous l’avons montré, l’Etat est un facteur anti-social qui empêche l’échange volontaire entre les hommes, la créativité individuelle et la division du travail. La « société » est une étiquette commode pour décrire la libre interaction entre les personnes dans les échanges volontaires. Il convient ici de rappeler la distinction établie par Albert Jay Nock entre le « pouvoir social », fruit de l’échange volontaire qui caractérise l’économie et la civilisation, et le « pouvoir étatique », qui consiste dans l’interférence coercitive et l’exploitation de ces avantages. Dans cette perspective, Nock a montré que l’histoire humaine est essentiellement une course où s’opposent le pouvoir social et le pouvoir étatique : d’un côté les fruits bienfaisants de la production et de la créativité pacifique et libres et, de l’autre, le fléau parasitaire des hommes de l’Etat s’abattant sur les processus volontaires de la société civile. Tous ces services dont on croit généralement qu’ils nécessitent l’intervention de l’Etat – de la frappe de la monnaie à la sécurité publique en passant par le développement du droit pour la protection de la personne et de la propriété – peuvent être, et ont été produits beaucoup plus efficacement et certainement de manière plus morale par des personnes privées. Il n’y a rien dans la nature de l’homme qui rende l’Etat nécessaire, bien au contraire.

Des relations entre Etats

P 311 bas ++ :

La guerre, et même une guerre défensive juste, n’est [donc] légitime que quand la violence s’exerce exclusivement contre les auteurs mêmes de l’agression. On laissera au lecteur le soin de déterminer combien de guerres ou de conflits dans l’histoire ont satisfait cette condition.

Un argument souvent entendu, surtout dans la bouche des conservateurs, est que les armes modernes avec leur effroyable capacité de tuer (bombes nucléaires, missiles, armes bactériologiques, etc.) ne représentent qu’une différence de degré, et non de nature, par rapport aux armes plus simples du passé. Une première réponse est évidemment que la différence est capitale quand le degré se mesure en nombre de vies humaines. Mais une réplique plus typiquement libertarienne serait plutôt qu’avec l’arc et même avec le fusil, on pouvait, si on le voulait, viser seulement les vrais criminels, alors que les armes nucléaires modernes ne permettent plus ce pointage précis. Voilà une différence de nature qui est cruciale. Il est vrai que l’arc pouvait servir à des fins agressives, mais il demeure que la flèche pouvait aussi être dirigée sur les seuls agresseurs. Les armes nucléaires et même les bombes classiques larguées d’un avion ne peuvent être aussi précisément dirigées. Ces armes sont, de par leur nature même, des engins aveugles de destruction de masse. (La seule exception concernerait le cas rarissime où un vaste territoire ne serait habité que par une horde de criminel.) La conclusion s’impose donc que l’emploi ou la menace d’armes nucléaires ou d’armes du même genre n’est qu’un crime contre l’humanité qui ne se justifie d’aucune manière.

Voilà pourquoi on doit rejeter le vieux cliché selon lequel ce ne seraient pas les armes mais l’intention de leur utilisateur qui compte dans les questions de guerre et de paix. Car la caractéristique des armes modernes est justement qu’on ne peut pas les employer de manière sélective, d’une manière libertarienne. Par conséquent, on doit s’opposer à leur existence même, et l’objectif du désarmement nucléaire devient une fin en soi. En fait, de toutes les formes de lutte pour la liberté, le désarmement nucléaire représente la plus valable politiquement dans le monde moderne. Car de même que l’assassinat est un crime plus odieux que le larcin, de même l’assassinat de masse – et, en l’occurrence, sur une échelle telle que la civilisation et la survie même de l’humanité sont en cause – est le pire crime qu’un homme puisse commettre. Et ce crime est aujourd’hui possible. Les libertariens s’indigneront-ils devant les contrôles de prix ou l’impôt sur le revenu tout en considérant avec indifférence, voire approbation, le crime suprême d’assassinats de masse ?

Or, si la guerre nucléaire est tout à fait illégitime même quand elle est menée par des gens qui combattent des agressions criminelles, combien plus illégitime est la guerre nucléaire ou même conventionnel entre Etats !

Daolong
Niveau 10
01 décembre 2021 à 15:40:10

:d) Quatrième partie : Autres théories modernes de la liberté

La théorie libérale utilitariste

A. Introduction : L’utilitarisme comme philosophie sociale : /
B. Les principes d’unanimité et de compensation : /
C. Ludwig von Mises ou le libéralisme sans l’éthique :

P 342 bas :

Donc, si la théorie économique praxéologique se révèle extrêmement utile pour fournir des données et des connaissances afin de formuler la politique économique, elle ne saurait à elle seule habiliter l’économiste à poser des jugements de valeur ou à proposer quelque politique que ce soit. Plus exactement, et n’en déplaise à Ludwig von Mises, ni la théorie de la praxéologie ni même le libéralisme utilitariste qu’il défendait ne suffisent à fonder la cause du laissez-faire et de l’économie du marché libre. Il faut pour cela dépasser l’économie politique et l’utilitarisme et établir une éthique objective qui affirme la valeur prioritaire de la liberté et condamne, au nom de la morale, toute forme d’étatisme, de l’égalitarisme au massacre des rouquins (ndlr : c’était un exemple de Murray Rothbard pour contredire le principe de la majorité qui déciderait de se débarrasser des rouquins du pays, encore une fois dans une sorte de bien de tous, intérêt général) en passant par la soif du pouvoir, l’assouvissement de la haine envieuse et autres objectifs du même genre. Un argumentaire complet en faveur de la liberté est hors de portée de quiconque [qui] est méthodologiquement asservi aux objectifs que la majorité de la population peut se trouver préférer.

Robert Nozick et l’ « immaculée conception » de l’Etat

P 377 bas ++ :

Ce qui nous amène à une idée très utile de Williamson Evers : il faut, dit-il, « assumer les risques normaux de la vie ». Le monde dans lequel nous vivons se caractérise par l’inéluctable variété et l’incommensurabilité de l’incertitude et des risques. Dans une société libre, assurée de tous les Droits individuels, c’est à chaque individu d’assumer les risques normaux qui affectent sa propre personne et sa propriété légitime. Ainsi, s’agissant de ses risques à soi, nul n’a le Droit de forcer quelqu’un d’autre à les réduire : forcer quelqu’un à assumer les risques d’autrui constitue une agression et une violation du Droit que le système judiciaire doit justement empêcher et punir. Bien sûr, une société libre permet à chacun, pour contrôler ses risques, de prendre des mesures qui ne violent pas les Droits et la propriété d’autrui – par exemple, en souscrivant des assurances, en faisant des opérations de couverture sur les marchés financiers, en contractant des garanties d’exécution, etc. Mais il s’agit d’actes volontaires dont aucun ne relève de l’impôt ni du monopole coercitif. Et Roy Childs a bien montré que toute interférence coercitive dans la prise en charge des risques par le marché éloigne de l’optimum la couverture du risque par la société et, par conséquent, augmente le risque auquel celle-ci est exposée. »

Un exemple d’acceptation par Nozick de la transgression des Droits de propriété se trouve dans l’inquiétude qu’il manifeste (p77-78) pour le propriétaire foncier privé qui serait entouré de propriétaires ennemis lui interdisant de sortir de chez lui. A la réponse libertarienne selon laquelle n’importe quel propriétaire rationnel aurait d’abord pris soin d’acheter des Droits de passage auprès des propriétaires environnants, Nozick oppose le cas de celui qui a tellement d’ennemis qu’il demeurerait dans l’incapacité d’aller où que ce soit. Ce problème n’est pas seulement un problème de propriété du sol. Sans même se placer dans la société libre, on peut imaginer aujourd’hui même quelqu’un qui serait tellement détesté par le monde entier que personne ne commercerait avec lui ni ne lui ouvrirait sa propriété. Eh bien, la seule réponse est qu’il doit assumer ce risque. Toute tentative pour faire lever le boycott par la coercition physique constituerait une transgression illégitime des Droits des boycotteurs. Notre homme ferait aussi bien de se trouver des amis ou d’acheter des alliés, et vite.

Comment Nozick passe-t-il de son Etat ultraminimal à son Etat minimal ? Il soutient que l’Etat ultraminimal est moralement obligé d’indemniser celui à qui il interdit d’acheter les services des agences de protection indépendantes en lui offrant gratuitement ses services de sécurité – d’où l’Etat « veilleur de nuit » ou l’Etat minimal.

(Note : en plus, dans la progression de Nozick, chacun des étapes de l’émergence de l’Etat est censée être morale, puisqu’elle est censée se dérouler sans violation des Droits moraux de qui que ce soit. Dans ce cas l’Etat ultraminimal est censé être moral. Mais s’il en est ainsi, comment Nozick peut-il dire ensuite que l’Etat ultraminimal est moralement obliger d’aller jusqu’à l’Etat minimal ? En effet, si l’Etat ultraminimal ne le fait pas, alors il est apparemment immoral, ce qui contredit la supposition originelle de Nozick. Sur cette question, conféré R. L. Holmes, « Nozick on Anarchism », Political Theory, 1977, p 247 et suivantes.)

Notons d’abord que l’on a, ici aussi, affaire à une décision consciente et visible et certes pas à un processus de « main invisible ». Mais il est plus important de comprendre que le principe de compensation de Nozick pèche encore davantage contre la philosophie, s’il était, en droit pénal, l’indemnisation n’est qu’une méthode pour dédommager la victime et ne représente en aucun cas une sanction morale du crime. De son côté, Nozick se demande (p 81) si la notion de Droits de propriété signifie que les autres peuvent les transgresser « à condition qu’ils offrent une compensation à la personne dont la limite des Droits a été transgressé ». Or, n’en déplaise à Nozick, on doit invariablement répondre : « non ». Dans sa critique de Nozick, Randy Barnett le dit bien : « A l’opposé du principe de compensation de Nozick, toute violation des Droits doit être interdite. C’est cela qu’un Droit signifie. » Il explique que « si le paiement volontaire du prix d’achat rend l’échange licite, l’indemnisation ne rend pas une agression licite justifiée » (Barnett, dans « Whither Anarchy ? », p 20). Les Droits ne doivent pas être violés, un point c’est tout. L’indemnisation n’est qu’une méthode de réparation ou de punition après le fait : il ne m’est pas permis de m’introduire cavalièrement dans la maison de quelqu’un et de casser ses meubles sous prétexte que je suis disposé à l’indemnité par la suite.
[…]

Daolong
Niveau 10
01 décembre 2021 à 15:53:38

:d) Cinquième partie : La stratégie de la liberté

P 400+ :

[…]

Le libertarianisme est donc une philosophie à la recherche d’une politique [ndlr : et pas l’inverse : une politique à la recherche d’une philosophie]. Mais qu’est-ce que la philosophie libertarienne peut ajouter à la réflexion sur la stratégie de la « politique » ? En premier lieu, il y a ce que disait Acton : la liberté est « la plus haute valeur politique », l’objectif prioritaire de la philosophie libertarienne. La plus haute valeur politique ne signifie évidemment pas la plus haute valeur de l’homme. En effet, chaque individu a ses propres fins personnelles et chacun établit sa propre hiérarchie des objectifs dans son échelle personnelle de valeurs. La philosophie politique est le sous-ensemble de la philosophie morale qui traite spécifiquement de la politique, c’est-à-dire des cas où il est légitime d’employer la violence dans la vie des hommes (et donc de l’explication de concepts comme le crime et la propriété). Et tel serait un monde libertarien : chaque individu serait, enfin, libre de rechercher et de poursuivre ses propres fins – de « rechercher le bonheur », selon l’expression de Jefferson.

On pourrait penser que le libertarien, celui qui s’engage en faveur du « système de liberté naturelle » (pour reprendre les termes d’Adam Smith), considère, presque par définition, la liberté comme son plus important objectif politique. Mais, très souvent, cela n’est pas le cas : pour nombre de libertarien, s’exprimer soi-même ou porter témoignage de l’excellence de la liberté l’emporte sur l’objectif d’une victoire réelle de la liberté. Pourtant, comme nous le verrons plus loin, la liberté ne triomphera jamais à moins que l’objectif de la victoire dans le monde réel ne prenne le pas sur des considérations plus passives et esthétiques.

Cette fin politique suprême qu’est la liberté, quel est son fondement ? On devrait pouvoir tirer de ce livre l’enseignement que la liberté est, d’abord et avant tout, un principe moral ancré dans la nature de l’homme. Plus particulièrement, c’est un principe de justice, qui vise à la suppression de la violence agressive dans les affaires humaines. C’est donc dans un esprit de dévotion absolue envers la justice que l’on doit fonder et poursuivre l’objectif libertarien. Pour conserver cette dévotion sur une route qui pourrait bien être longue et difficile, le libertarien doit être possédé par une passion de la justice, qui découle d’une compréhension rationnelle des exigences de la justice naturelle et est guidée par cette compréhension. Si on veut atteindre la liberté, c’est la justice, et non la règle molle de la seule utilité, qui doit constituer notre force motrice.

P 404 milieu :

Le gradualisme théorique a pour résultat de saper l’objectif absolue de la liberté ; il ne fait pas qu’influencer la stratégie, il s’oppose à l’objectif lui-même et, pour cette raison, il n’a aucune place dans une stratégie de la liberté. En effet, abandonner l’abolitionnisme immédiat, c’est, par le fait même, reléguer l’objectif au deuxième ou troisième rang, au nom d’autres considérations, nécessairement antilibertariennes puisqu’elles volent à la liberté sa première place. Supposons que l’abolitionnisme eût dit de l’esclavage : « Je propose d’y mettre fin, mais dans cinq ans. » Cela impliquerait que l’abolition dans trois ou quatre ans, et a fortiori immédiatement, serait un mal, et qu’il serait donc préférable que l’esclavage continue encore un peu. Cela signifierait qu’on a laissé de coté les idées de justice, que notre abolitionniste (ou notre libertarien) ne place plus son objectif au sommet de ses valeurs politiques. Cela signifierait ni plus ni moins qu’il prône la continuation du crime et de l’injustice.

P 416 bas + :

[… Pour Rothbard, le monde a évolué sans cesse pour plus de liberté (individuelle) et moins de dirigisme, d’étatisme, de gouvernance d’en haut, et cela a particulièrement pris son envol vers le 17e siècle Occident, mais, cependant…]

La fin du XIXe siècle et surtout le XXe siècle ont connu plusieurs formes de retour à l’étatisme préindustriel (notamment le socialisme ainsi que plusieurs sortes de « capitalisme d’Etat ») qui, contrairement au conservatisme franchement réactionnaire et anti-industriel du début du XIXe siècle, ont voulu préserver et développer l’économie industrielle en même temps qu’elles s’en prenaient aux conditions politiques mêmes qui sont nécessaires à sa survie en longue période. La planification, la gestion et les contrôles étatiques, les impôts élevés et paralysants, l’inflation monétaire, tout cela mènera inévitablement à l’effondrement du système économique étatiste.

Donc, s’il est vrai que le monde affiche un parti pris irréversible pour l’industrialisme et le niveau de vie qui l’accompagne, et si l’industrialisme a besoin de la liberté, le libertarien peut être optimiste en longue période, le triomphe de la liberté ne peut manquer d’arriver un jour. […]

Daolong
Niveau 10
01 décembre 2021 à 15:53:48

Postface à l’édition française

P 429 bas ++++++ :

Depuis des décennies, les économistes « libéraux », utilitaristes ou positivistes, refusent d’utiliser les arguments moraux, soit pour la raisons (fausse) que la science doit être isolée des valeurs et qu’ils ne peuvent donc, comme savants, se risques dans le discours éthique, soit parce qu’ils sont persuadés que les arguments moraux sont « non rationnels », voire « irrationnels », et ne peuvent par conséquent convaincre personne. Il est pourtant évident pour un observateur impartial que lesdits arguments moraux sont largement utilisés dans les faits, et qu’ils convainquent pas mal de monde, quoique puissent prétendre positivistes et utilitaristes. Mieux : après avoir entendu un bel exposé utilitariste, l’auditeur concédera peut-être : « Ouais, c’est pas faux », puis retournera vaquer à ses occupations sans plus y penser, alors qu’un individu convaincu par vos arguments moraux deviendra un partisan, et même un militant, de votre cause.

Une grande partie de L’Ethique de la liberté est consacrée à fonder une doctrine de la liberté établie sur la morale et les Droits de propriété. J’affirme qu’aucun plaidoyer de politique publique, aussi « scientifique » qu’il se dise, ne peut ignorer les jugements de valeur : personne ne peut éviter d’adopter une position morale. Dès lors, mieux vaut énoncer clairement quelle éthique on a choisie plutôt que d’introduire en fraude parmi les hypothèses implicites de son analyse des jugements de valeur de circonstance, et acceptés sans examen.

Les « libéraux » ayant abandonné le terrain de l’éthique, ils ont catastrophiquement laissé la nouvelle engeance gauchiste et étatiste occuper le terrain de la morale, et ainsi dispenser l’éloge et le blâme sans riposte valable de leur adversaires. Face aux propositions interventionnistes, aussi extravagantes soient-elles, conservateurs et libéraux ne peuvent que mentionner faiblement l’énormité de leur cout économique, combat d’arrière-garde voué à l’échec. De leur côté, les étatistes font passer leurs propositions en commençant par des compromis sur leur financement, puis il se donnent à leurs programmes une ampleur toujours accrue au fil des ans, avec l’aggravation des couts qui s’ensuit. C’est d’ailleurs ainsi qu’au XIXe siècle les libéraux classiques avaient abandonné le terrain de la morale à leurs adversaires socialistes en plein essor : ils admettaient que le socialisme est une « théorie » morale merveilleuse, mais inapplicable « en pratique ». Les socialistes n’avaient qu’à répondre : « Laissez-nous une chance, laissez-nous un pays – et nous verrons bien si ce que vous-mêmes appelez une « théorie morale merveilleuse » peut marcher. » Jusque dans les années trente, le communisme soviétique était appelé « la grande expérience sociale » par les compagnons de route occidentaux. Il a fallu près de quatre-vingts longues années de catastrophes pour enterrer cette expérience, reconnaitre son échec, et essayer de s’extraire de ses décombres.

Pour être plus précis, il y a trois grands domaines dans lesquels l’étatisme de gauche a, du moins aux Etats-Unis, conquis la place forte de la morale et commencé à faire des classes faiseuses d’opinion. En accusant successivement tout adversaire d’extrémisme, d’intolérance, d’égoïsme et d’inculture, les étatistes ont réussi à confiner toute opposition à des poches de marginalité méprisables : des groupes de « beaufs ».

Voyons ces trois domaines de prédilection de la menace étatiste.

On peut appeler le premier l’ « égalitarisme communautaire ». Selon l’idéologie que l’écrivain Joseph Sobran qualifie de « victimologie officielle », certains groupes d’individus sont désignés comme Victimes d’Etat, on pourrait dire « Victimes en carte ». Ces groupes, toujours plus nombreux, sont censés être, ou avoir été, les victimes d’autres groupes appelés Oppresseurs officiels. Le devoir de l’Etat est alors de déverser richesses, emplois, postes et privilèges innombrables sur la tête des Victimes aux dépens, bien entendu, des prétendus Oppresseurs. C’est une forme particulièrement grotesque de réparation ou de compensation puisque les « Oppresseurs » n’ont personnellement fait aucun tort à quiconque et que les « Victimes » n’ont jamais souffert de leur fait. Privilèges et pénalités sont distribués sous le seul prétexte que des groupes similaires pourraient avoir été parfois fort lointain. Par-dessus le marché, on n’a jamais fait mention d’une date à laquelle cesseraient ces « réparations », apparemment destinées à se perpétuer à jamais, ou du moins jusqu’à ce que la communauté des Victimes soit déclarée en tous points « égale » à celle des Oppresseurs.

Comme c’est la « nouvelle classe dirigeante » qui devrait faire cette déclaration, alors qu’elle est installée dans un système de redistributions massives, tout en prélevant au passage de coquets pourcentages en « frais de dossier », on peut être bien sûr que le bulletin de victoire finale ne sera jamais publié.

A ce jour, l’ensemble des Victimes officielles inclut* : les Noirs, les Juifs, les Asiatiques, les femmes, les jeunes, les vieillards, les « sans-abri », les homosexuels et – dernière catégorie – les « handicapées ». Ce qui permet d’identifier les Oppresseurs comme étant des Blancs mâles, d’âge moyen, hétérosexuels, chrétiens, non handicapés et ayant un logement.

(* Murray Rothbard dit : « Je tiens à rappeler à l’attention des lecteurs français, qu’étant moi-même juif, je suis une Victime officielle, et donc officiellement autorisé à dire ces choses. ( :-p) )

La seconde menace étatiste n’est probablement que trop familière à mes lecteurs français : c’est tout le paquet qui se range sous la rubrique de l’ « environnement ». Quand « The Ethics of Liberty » fut publié en 1982, le souci primordial était la pollution de l’air et de l’eau. J’ai alors, avec d’autres économistes, démontré que la pollution résulte du refus obstiné des tribunaux d’ Etat de faire respecter les Droits de propriété, et que le problème serait résolu en définissant des Droits de propriété stricts sur l’air et sur l’eau. (Article « Law, Property Rights and Air Pollution » publié dans le Cato Journal du printemps de 1982, et réédité dans « Economic and the Environment », de 1990.)

Mais depuis 1982 il est devenu évident que les écologistes ne se soucient pas des solutions de Droit aux problèmes de la pollution, ni de la préservation d’espèces animales incertaines, ni de quoi que ce soit d’autre. Ils sont animés par une idéologie littéralement hostile à l’espèce humaine, proche des religions païennes ou panthéistes et qui considère l’homme comme l’entité la plus basse et la plus méprisable de la nature. En revanche, toutes les autres entités du monde – animaux, plantes, insectes, arbres, et même les plages et les rochers – auraient des « droits » supérieurs à ceux de l’humanité. L’idée fondamentale est qu’avant l’arrivée de l’Homme, tous les animaux, plantes, cailloux, etc., étaient en « équilibre écologique » : le monde vivait dans une stase paisible et harmonieuse, selon la métaphore des cercles immuables. Mais soudain apparut l’Homme, ce destructeur. A la différence des autres entités ou créatures de la nature, l’Homme n’était pas limité ni déterminé par son milieu. Il se mit, ô drame ! à le changer et à le transformer, suivant la métaphore de la ligne droite. Si bien que l’écosystème, l’ « environnement », fut tragiquement, voire irréversiblement, altéré et déséquilibré. Le but des écologistes est de rétablir l’ordre du monde en le réduisant à l’état antérieur à l’homme, ou du moins en y tendant autant que faire se peut : bref, d’entraver, sinon interrompre, la production et la consommation, pour ne pas parler du développement et de la croissance. Tout l’écologisme actuel se fonde sur cette doctrine perverse et antihumaine, ce qui est particulièrement net dans les travaux des « deep ecologists », comme le philosophe norvégien Arne Naess, et, aux Etats-Unis, le mouvement « Earth First ! ».

L’interminable litanie des postulats hystériques et pseudo-scientifiques des dernières années – le « réchauffement de l’atmosphère » (après la « nouvelle ère glaciaire »), la « disparition des richesses naturelles », les pluies acides, le trouve dans l’ozone, la prétendue « crise de l’énergie », les gémissements du les forêts séculaires, le caribou et la chouette mouchetée, l’exclusivité donnée par les médias à une poignée de savants gauchistes avides de publicité tout en ignorant les savants authentiques et scrupuleux toutes ces chimères et tous ces mensonges ne sont que des armes de combat dans la guerre menée par les écologistes contre la production et la consommation humaine, et surtout contre les éléments du « confort bourgeois » qui rendent fous les écologistes, comme les grosses voitures « dévoreuses d’essence », les manteaux de fourrure, l’air conditionné, les récipients en plastique, les couches jetables et les bombes aérosols pour laques à cheveux ou déodorants.

Comme toute morale authentique doit se fonder sur le bonheur et le développement de l’humanité, il est exaspérant de voir ces écologistes, dont l’ambition est profondément antihumaine, occuper le terrain de la morale en toute impunité.

Le troisième élément de cette trinité profane est une nouvelle variante du puritanisme de gauche. Comme le vieux puritanisme, le nouveau cherche à priver l’homme du plaisir, à cette différence que la nouvelle variété a des objectifs plus vastes que l’ancienne, qui ne s’en prenait qu’à l’amour physique. Aujourd’hui, ce sont toutes les formes de plaisir, déclarées à quelque degré que ce soit « dangereuses pour la santé », qui sont passible de l’interdit. Le but du Nouveau Puritanisme semble de mettre hors la loi toutes les activités qui ne sont pas officiellement « bonnes pour vous », ou qui impliquent le moindre élément de risque. D’où l’actuelle hystérie antitabac aux Etats-Unis, avec diverses formes de répression réclamées par des emmerdeurs gauchistes, de l’ostracisme mondain aux interdictions réglementaires et institutionnelles. Fumer en public est presque interdit par la loi, comme l’est la publicité pour les cigarettes à la radio et à la télévision. La prohibition de l’alcool fait un retour en force avec l’interdiction de vendre des boissons alcoolisées aux moins de 21 ans, ou de conduire une voiture après avoir bu un verre. La criminalisation hystérique de l’usage de produits pharmaceutiques arbitrairement appelés « drogues » est bien connue, les Etats-Unis ayant même réussi à entrainer, de gré ou de force, d’autres pays dans leur « croissance antidrogue » évidemment vaine et destructrice.

En même temps, on interdit toutes sortes d’additifs pour les aliments, sous prétexte que des doses massives de ces additifs administrés pendant des années à quelques rats leur auraient donné le cancer. La propagande massive des hommes de l’Etat contre tout risque et en faveur de la « forme » montre que l’idéal du puritanisme actuel est un homme, ou une femme, qui ne mange que des produits officiellement déclarés « sains », de préférence insipides, et passe tout son temps à « s’entrainer » sur des machines. De préférence à la maison, parce que tout ce qu’un être humain fait à l’extérieur peut « porter atteinte à l’environnement ». Cet être ne pourrait d’ailleurs pas manger ni consommer beaucoup, de peur de porter de nouvelles atteintes à cet environnement.

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Bon, voilà, voilà, j'ai relu en diagonale, j'ai du faire des mini corrections. Je n'ai pas mis de texte sous "spoiler". C'est cool à voir mais c'est peut-être chiant de dérouler. Mais bon, du coup, là il y a 24 pages écrites. C'est assez lourd sur jvc :hap:

Bref :

https://youtu.be/uTvyTnUl-ss :coeur:

A nous la paix ! :ange:

toto_au_bistro
Niveau 10
27 décembre 2021 à 09:29:46

Flemme de tout lire, par contre j'ai commencé à lire un peu Rothbard pour connaître ses arguments. Je trouve son manifeste plus clair que L'éthique et la liberté. Je ferai peut-être un topic avec mes contre-arguments.

Daolong
Niveau 10
29 décembre 2021 à 21:04:15

Il a écrit un manifeste ?

Il a l'air super épais, même plus que l'Ethique de la liberté oO

On parle du même livre ?

Daolong
Niveau 10
22 janvier 2022 à 09:02:59

https://www.noelshack.com/2022-03-6-1642837279-fb-img-1642837140737.jpg

Je reviendrai faire un tour pour répondre à des messages sur différents topics mais je ne sais quand. Cette image pourrait être mise dans le topic "l'impôt c'est du vol", car lors d'un échange volontaire entre eux personnes de l'argent a été gagné par l'un et l'autre a gagné un service ou un bien matériel, etc. Les deux sont gagnants. Et s'il y a eu un gain d'une des deux parties en liquide, en argent. C'est comme ce que l'autre a gagné. Ce que l'autre a gagné on ne va pas lui retirer la chose ou une partie de la chose. (Encore qu'il y a ce machiavélisme (Machiavel héhé if you know...) de taxer bien souvent. On ne retire pas une partie ou le produit vendu, mais on augmente son prix. Pauvre acheteur qui n'a rien demandé ni fait quoi que ce soit de mal :-( pauvre échangeur je dirais, plutôt qu'acheteur) Et bien d'où peut-on s abroger le droit de retirer par l'impôt une partie de son argent ????

La personne paie ce dont elle a besoin. C'est tout. Si quelqu'un effectue un travail pour lui ou elle et qu'il n'a rien demandé, cette personne fait donc un don, un don d'elle même ou du bénévolat. Et si cette personne (de l'état ou de toute autre association) trouve que c'est dégueulasse de ne pas être payé, elle n'a qu'à plus aider cette personne qui ne paie pas.

De toute façon il n'y a que deux possibilités saines :

- je te donne quelque chose et tu me donnes quelque chose
- ou je te donne bénévolement quelque chose, tu ne me dois rien.

Tout ceci sans coercition, sans obligation, sans imposition. Par volonté personnelle. Libre choix. Entente cordiale et serrage de mains.

Je me souviens tout de même d'un sujet qu'avait donné un forumeur sur le topic de l'impôt. Je fais un petit apparté dessus ici. Par exemple il y a l'éclairage de la route. Beh moi je crois qu'on peut vivre sans éclairage de la route. Donc je ne vais pas payer si quelqu'un éclaire la route. Ou alors cette route n'est pas la mienne. Alors là le propriétaire peut me demander une taxation, un prix en correspondance avec l'entretien de sa route, l'éclairage étant compris dedans. Mais c'est comme si mettons dans une maison imaginez vous êtes en couple, votre femme dit je veux mettre une lampe dans le coin. Vous n'êtes pas d'accord. Finalement par discussion démocratique, vous arrivez à accepter. Mais en rien cela ne vous oblige à payer l'éclairage que votre femme veut mettre. Ou elle veut aménager une pièce pour son yoga et sa meditation. Une petite chambre de 9m2 à l'étage. Vous acceptez. Mais vous n'êtes pas obligé de lui payer son tapis de yoga, sa statue de Bouddha et son encens. En fait vous pouvez ne rien payer, ou payer totalement en don-cadeau, ou payer mettons moitié moitie par amour. Parce qu'en soi vous n'irez pas dedans, c'est sa passion à elle. A vous de vous mettre à votre place par rapport à cela.

(vous comprenez que dans un couple, dans une maison, c'est déjà bien difficile d'avoir une attention, une écoute pleine de l'autre, d'arriver à se mettre d'accord, de comprendre l'autre,... Ça prend énormément de temps sans être sur d'y arriver, de toujours être ok h24 avec tout le monde c'est à dire avec votre femme. Vous imaginez donc aisément que les big propriétés publics, sorte de grande propriété privée nationale, c'est n'importe quoi, c'est impossible, c'est une lubie, et ça ne peut être que discrimination, non écoute de tout le monde, imposition, coercition... Je ne trouve pas ça sain du tout.)

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Sujet : L'Éthique de la liberté, de Murray Rothbard
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