Bonjours à tous les quais du M&N !
Devant la récente recrudescence de topics liés au mal de dos et autres hernies, je vous propose un dossier vous permettant de savoir quoi faire, quand consulter et qui consulter. La très grande majorité de ces conseils sont issus des guides de bonnes pratiques communs à la plupart des pays occidentaux, de mes formations et de mon expérience personnelle.
Pour me présenter rapidement, je suis un Kiné diplômé de 2016 en France exerçant exclusivement en libéral. Je développe une spécialisation dans le traitement des problèmes liés au rachis et dans le domaine ostéo-musculaire (plus particulièrement l’épaule).
Du fait de mon parcours de formation, je privilégie certaines approches et je ne possède pas la vérité absolue, donc n’hésitez pas à apporter votre point de vue sur ce discours.
Enfin, ayez conscience qu’un texte écrit sur internet ne remplace pas une consultation physique avec un professionnel de santé.
Epidémiologie :
Commençons par quelques chiffres, la lombalgie est une pathologie extrêmement courante puis qu’environ 80% de la population mondiale l’expérimentera au moins une fois au cours de sa vie. Et 40% de la population adulte souffre de lombalgie chaque année. Le principal facteur prédictif indiquant que quelqu’un est davantage susceptible d’avoir mal au dos est que cette personne a déjà eu mal au dos.
C’est pourquoi certains professionnels de santé envisagent le traitement de la lombalgie comme un traitement au long cours au même titre que l’asthme par exemple. La bonne nouvelle c’est que l’évolution tend naturellement vers la guérison en moins de 6 semaines chez 80% des gens.
Quand faut-il consulter ?
Important, si dans la plupart des cas le mal de dos est tout à fait bénin (bien que très handicapant dans la vie de tous les jours), dans environ 2% des cas cela peut être plus grave.
Aussi, si vous ressentez ou remarquez un ou plusieurs de ces signes alors il vous faut absolument consulter :
-Incontinence ou rétention urinaire et/ou fécale -> c’est possiblement une urgence chirurgicale donc mentionnez le quand vous prenez rendez-vous ou alors allez aux urgences.
-Même chose pour une insensibilité de la région génitale et anale.
-Des douleurs ou sensations de fourmillements dans les deux jambes, d’autant plus si les douleurs suivent un trajet très précis.
-Notion de trauma concomitante aux douleurs, avec notamment apparition d’un hématome.
-Perte de poids inexpliquée
-Impuissance
-Si vous avez des antécédents de cancer
-Douleur nocturne, présente même au repos et allant en s’aggravant.
-Fièvre apparaissant simultanément à votre douleur.
-Paralysie ou perte de force dans certains muscles (exemple : difficulté à marcher sur la pointe des pieds ou sur les talons).
La liste n’est pas exhaustive mais rassemble les principaux signes d’alerte.
Radio/scanner/IRM et échographie:
Concernant l’utilisation de l’imagerie médicale, si vous ne ressentez aucuns des signes précédemment énoncés et que vous avez mal depuis moins de 12 semaines et alors ce n’est pas forcement utile ou significatif de quoi que ce soit.
Pire, dans l’imaginaire collectif voir une protrusion ou une hernie est automatiquement signe de problème grave (alors que c’est loin d’être toujours le cas) et peut provoquer une aggravation des douleurs du fait de cette croyance.
Cette infographie résumant une étude réalisée sur plus de 3000 sujets totalement asymptomatiques démontre que de nombreux signes dégénératifs observables sur l'imagerie font probablement partie du vieillissement normal et ne sont pas à associer systématiquement à la douleur.
https://www.ncbi.nlm.nih.gov/pubmed/25430861?fbclid=IwAR1WVtlzKe7kKi_ldboiIj1C1rR6vlq-h_Qld16k61aaD0huoc6dw1pSd4s
Que faire ?
:
"C’est bien beau de savoir tout ça Eirton mais concrètement nous on fait quoi avec notre dos une fois qu’on a mal ?"
Et bien tout d’abord, toutes les recommandations internationales déconseillent de ne pas bouger, donc allez marcher, faites ce que vous voulez mais ne restez pas sans rien faire.
https://www.ncbi.nlm.nih.gov/pubmed/29971708
Il n’existe peu voir aucune preuve permettant de soutenir l’utilisation de :
Les ultrasons, le laser, les tractions lombaires (qui n’apportent un soulagement qu’à court terme), le thermalisme, les stimulations électriques à moyen et long terme.
Dans ma pratique quotidienne, j’utilise la méthode McKenzie (ou MDT : Mechanical Diagnosis and Therapy®). Je vais donc un peu plus loin en essayant de définir une préférence directionnelle chez les patients souffrants de lombalgie. La préférence directionnelle décrit le phénomène selon lequel une direction spécifique de mouvements et/ou de positions maintenues induit une amélioration clinique des symptômes.
Ainsi tout mouvements répétés induisant une centralisation des symptômes est positif et doit être répété régulièrement. La centralisation peut se décrire comme une douleur remontant le long de la jambe, ou passant du flanc au dos. Et ce peut importe l’intensité de la douleur.
Au contraire, des mouvements ou position induisant une périphérisation des symptômes est à éviter.
Je ne peux pas traiter ici de la totalité des possibilités de traitement car c’est difficilement faisable à l’écrit. Mais je vais vous proposer les plus simples (qui sont aussi les principales).
Cas le plus fréquent :
Si vous avez surtout mal au dos, mais pas aux jambes lorsque vous restez assis un long moment mais que votre douleur disparaît immédiatement lorsque vous vous levez alors vous avez probablement un simple syndrome postural, rien de grave c’est ultra courant. J’en ai moi-même un.
Ce n’est pas pathologique, c’est une façon qu’a votre corps de vous dire qu’il vous faut bouger. Donc levez vous marchez un peu puis rasseyez-vous. La meilleure chaise est celle dont on se lève régulièrement.
Deuxième cas de figure le plus courant :
Si vous ressentez des douleurs dans le dos et/ou dans une jambe, que vous ne présentez aucun des signes vu au début de ce dossier, que vos symptômes sont augmentés ou diminués en fonction de certains mouvements répétés et restent augmentés ou diminués après ces mouvements alors vous avez peut-être un dérangement lombaire.
Le tableau clinique le plus courant concerne les individus présentant des douleurs lorsqu’ils sont assis, ou qu’ils se lèvent d’une chaise, ou lors de toute activité en flexion lombaire (travailleur du BTP ou infirmière/aides soignante devant faire de la manutention de patients par exemple).
Si vous ressentez comme une douleur en barre dans votre dos, vous avez de bonnes chances d’avoir une préférence directionnelle en extension.
Pour le vérifier, commencez par prendre un repère qui ne soit pas en flexion, marchez sur quelques mètres, tenez-vous debout, bien droit et déplacez votre bassin sur la droite puis sur la gauche, si vous ressentez une gêne alors vous avez un repère qui s’améliorera lorsque vous aurez trouvez le bon exercice. Si la douleur descend le long d’une de vos jambe, un autre repère est le point de douleur le plus bas qui devra remonter au fur et à mesure de l’amélioration.
Première option :
La première chose à essayer consiste à vous placer sur le ventre et à réaliser la posture du Cobra au Yoga comme sur cette vidéo à 5 :46
https://www.youtube.com/watch?v=9SKuFe2SERs&t=269s ce coach utilise la méthode McKenzie même sil n’y fait pas référence.
N’hésitez pas à faire plusieurs dizaines de répétitions (jusqu’à 40). Puis marchez sur quelques mètres et recommencez le test de tout à l’heure.
Si vous sentez une amélioration ou que votre douleur est remonté le long de votre jambe ou passée du flanc au centre du dos, alors vous savez ce qu’il vous reste à faire.
Deuxième option :
Dans le cas où ne ressentez rien et que vous n’avez pas mal la nuit, vous pouvez recommencez l’exercice, mais cette fois expirez comme pour souffler une bougie lorsque vous êtes en fin d’extension. Vous devriez sentir une petite pression au niveau des lombaires. Décomposez bien le mouvement, vous devez être à l’arrêt lorsque vous soufflez.
Puis refaites votre test.
Si un de ces deux exercices vous soulage alors vous avez à coup sur une préférence directionnelle en extension (comme les 2/3 des patients ayant un dérangement lombaire) et je vous invite à réaliser plusieurs dizaines de répétitions quotidiennement, à évitez les postures en flexion (au moins pendant quelques temps ) et à placer un coussin au niveau de vos lombaires pour augmenter la cambrure lorsque vous êtes assis (mais ne restez pas assis trop longtemps).
Troisième option :
Si au contraire, vos symptômes augmentent ou s’ils ne changent pas et que vous avez mal d’un seul côté alors vous pouvez essayer de recommencer (dans l’ordre) les exercices en plaçant le pieds du côté douloureux sur le genou opposé (comme une demie-grenouille).
Quatrième option :
Si cela ne fonctionne toujours pas, alors il reste une autre option, mettez vous debout, contre un mur, l’épaule opposée au côté douloureux contre le mur, écartez les pieds du mur (mais gardez-les serrés), puis rapprochez votre bassin du mur comme à 4 :23
https://www.youtube.com/watch?v=9SKuFe2SERs&t=269s
Cinquième option :
Après plusieurs dizaines de répétitions sans résultats ni augmentation de la douleur, vous pouvez augmenter la force que vous appliquez avec votre main du côté douloureux qui appuie sur la hanche pour forcer votre bassin à se rapprocher du mur.
Dans tous ces cas de figure, il se peut que la douleur augmente sensiblement sur les 5 ou 6 premiers mouvements, il peut s’agir de ce qu’on appelle une réponse paradoxale, qui pourrait complètement s’inverser après cela, si ce n’est pas le cas, arrêtez-vous.
Enfin :
Si aucuns de ces exercices ne fonctionnent ou si vous présentez encore des douleurs 1 mois après le début des exercices qui vous soulagent (en les ayant fais sérieusement), alors il vous faut surement consulter pour aller plus loin. (sur ordonnance) :
https://www.mckenzieinstitute.org/france/fr_FR/patients/trouver-un-praticien/
Le sujet est vaste et mérite amplement d’être approfondie donc ce dossier n’est surement qu’un début.