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The Elder Scrolls V : Skyrim

Sujet : [Fic] Tohrj. Tohrj tout-court.
Spector62
Niveau 7
18 mai 2011 à 07:42:50

J'aime ton style. Ta fic me plait.

Vaetrem
Niveau 10
18 mai 2011 à 19:56:52

L'une des meilleures fics du forum, un style qui me plait beaucoup, c'est bien fun, un très bon moment de lecture :)

J'adore :ok:

Arduilanar
Niveau 10
22 mai 2011 à 20:29:50

« Allez, activez-vous donc ! Grom, allez me chercher la Flamme d’Eternité. Torbal, essayez de trouver ce qu’on a fait des Sistres de Sinistrose. Et vous, Halof, fouillez le coffre du fond, je croie me souvenir y avoir rangé les Candélabres d’Incarnation. »
Sans un mot, les trois nécromanciens s’exécutèrent, l’échine courbée. Ah, qu’il était bon de se montrer servile ! C’était pour cela qu’au fond ils aimaient tous Sjorling, pour sa sévérité et pour sa façon unique de les traiter comme des chiens. C’est que lorsque l’on est maître de la vie et de la mort, on aurait tendance à vite attraper la grosse tête. Mais Langue-de-Glace était le remède miracle à ce mal, et d’un seul mot il était capable de faire dégonfler les chevilles les plus enflées et de ramener à la raison le plus vaniteux des nécromanciens. Un traitement cruel, mais nécessaire – avant l’arrivée de Sjorling à la guilde, quelques membres, à force de se croire invincibles, avaient fini par défier les dieux et étaient allés montrer leur toute-puissance sur la mort en se jetant du haut du Pic du Frisson. La plupart des morceaux n’avaient jamais été retrouvés.
« -Maîîître ?, intervint l’un d’entre eux timidement.
- Qu’y a-t’il encore, Grom ?
- La Flamme d’Eternité est éteinte, ô maître.
- Encore ? Mais c’est la troisième fois ce mois-ci !
- Pardonnez-moi, maîître…, fit-il piteusement en s’inclinant.
- Bon, ça ira pour cette fois. Rallumez-la, et on fera semblant de n’avoir rien vu. »

« Maître ?
- Quoi - encore ?!, cracha Sjorling avec rage.
- Je, euh, je…
- Oh, excusez-moi, Ulkar, je ne vous avais pas reconnu. J’ai cru que Grom avait encore des soucis avec la Flamme d’Eternité.
- Vous voulez dire, hum, le flambeau qui reste allumé depuis l’Aube des Temps, en signe de notre dévotion éternelle à notre Seigneur le Dieu des Vers ? La Flamme sacrée dont on dit que la moindre interruption scellerait notre destin et marquerait notre fin en nous plongeant dans les Tréfonds du Néant ?
- A peu de choses près, oui. Mais vraiment très peu de choses.
- Maître, euh… Tout le monde s’active à préparer cette cérémonie, mais je me demande, euh, si ce que nous faisons est très… éthique.
- Tant que nous nous abstenons de faire passer le gamin sur la table de dissection, je suis sûr que les comités n’y trouveront rien à redire. Et puis, il est consentant – du moins il n’a pas dit qu’il refusait. On est dans les limites légales.
- Ce n’est pas de cela que je parlais, ô chef. Mais, euh, hum, comment dire, peut-être d’une certaine déontologie… qui nous recommanderait de ne pas entraîner une jeune âme innocente dans les abysses de notre turpitude…
- Déon-quoi ?
- Vous savez bien, maître… Des, euh, des règles qui codifieraient notre pratique… Une certaine ascription morale au paradigme de notre action, encadrée et contrôlée par des codes, dans un souci d’universalité potentielle et afin de trouver la ligne montante de l’humanisme en réalisant la quintessence de l’humanitude, et, et … »
Au regard d’incrédulité de Sjorling, Ulkar se mit à bafouiller et jugea plus prudent de ne pas poursuivre.
« Ulkar, Ulkar…, fit patiemment Sjorling en le prenant par l’épaule. Vous connaissez l’estime que je vous porte…
- Oui, m-maître, balbutia-t’il.
- …et vous savez que vous êtes peut-être le seul à qui je fasse confiance dans cette bande de dégénérés...
- Oui, m-mais je…
- …que je respecte votre opinion et votre sagesse…
- Mais, je…
- …alors pour l’amour des Vers, Ulkar, lâchez-moi donc et prenez un peu de repos. Vous allez finir par exploser, à force de réfléchir à des trucs pareils.
- Oui, maîître, fit Ulkar penaud. Mais peut-être que… peut-être n’est-ce pas le meilleur endroit pour élever un enfant, fût-il orphelin.
- Je ne vois pas pourquoi vous dites ça. Tohrj a eu de la chance en venant nous trouver. Il aurait pu tomber sur bien pire que nous… »
Ce fut au tour d’Ulkar de lancer à son supérieur un regard lourd de doute.
« - Oui, bon, admit le maître de guilde, peut-être pas pire que les nécromanciens. Mais ce petit a du potentiel, j’en suis persuadé. C’est le fils de Kvir, ne l’oublions pas.
- Monsieur, j’ai retrouvé la fourchette ! »
D’effroi, les deux vieux nécromants sursautèrent. Il allait de toute évidence leur falloir un long temps d’adaptation avant de se faire à la petite voix criarde aux interventions inopportunes.
Tohrj se tenait devant eux, un large sourire ouvert d’une oreille à l’autre, laissant apparaître quelques dents manquantes. Les deux grands yeux enfoncés dans leur orbite pétillaient, et la petite main décharnée était serrée sur une fourchette. Encore humide et brillante.
« Par les Vers, mais où es-tu allé planter cette fourchette, mon enfant ?, demanda Ulkar.
- Dans l’œil de mon papa, pour voir si y bougeait, répondit Tohrj tout sourire. Et comme y bougeait pas, bah j’ai enlevé la fourchette et j’ai refait pareil avec l’autre œil, pour être sûr. »
Ulkar gémit, horrifié. Cet enfant avait bien la trempe d’un nécromant.

***

Immense et sinistre, la statue de pierre étendait ses bras de géants vers l’assemblée, en un geste à la fois menaçant et protecteur. Le bras droit tenait le couteau rituel, la main gauche était ouverte en signe d’affection pour les fidèles. La folie et la mort dansaient dans les orbites creuses, cruelles flammes rouges symboles de la destruction, images vivantes de la colère du Dieu des Vers . Terrifié, Tohrj n’osait détacher ses yeux des prunelles incandescentes, le regard comme happé par cette lueur malsaine. Ah, l’effet de simples bougies sur un esprit influençable…

Avec la voix gutturale qui sied aux pratiques occultes, Sjorling commença à déclamer : « Ô Roi puissant, écoute tes fils ! »
Les nécromanciens entamèrent une lente psalmodie aux paroles incompréhensibles, la voix de basse d’Heifnir se mêlant aux criaillements éraillés d’Aenius et au chevrotement hésitant d’Ulkar.
« Que résonnent les Sistres de Sinistrose ! »
Avec application, Torbal agita ses instruments, empli d’une fierté muette par la tâche sacrée qui lui était confiée. Les instruments de métal rouillé bruirent d’un son désagréable et mélancolique, rythmant les paroles du chant des nécromants.
« Que les Candélabres d’Incarnation brûlent de la Flamme d’Eternité ! »
Pieusement, Grom s’avança et alluma les candélabres placés aux pieds de la statue. Le feu jaillit dans un impressionnant crépitement vert – rien de tel que la magie des poudres alchimiques pour impressionner les nouveaux venus.
« Et maintenant, avance-toi, toi qui viens chercher le Savoir auprès de notre Dieu ! »
Timidement, Tohrj s’avança, empêtré dans une robe beaucoup trop grande pour lui et qui traînait derrière lui, telle un voile nuptial. Elle sentait mauvais, la robe. Encore plus mauvais que quand son papa oubliait de sortir les ordures. Et même que des fois, et bah il y avait des rats, et que les rats, fallait les tuer à coup de pelle. Et aussi, même que la cervelle elle giclait partout et que ça c’était drôle. Tohrj sourit. La cervelle, ça c’était un bon souvenir.

« Et arrête de sourire ! », siffla Sjorling à voix basse.
Un sourire devant le Roi des Vers, voilà qui ne faisait pas sérieux. Un peu de tenue, tout de même. Kvir n’avait-il donc même pas enseigné à son fils que les mines sombres et sinistres étaient de mise lors des cérémonies ?
Sjorling tenta tant bien que mal de se concentrer de nouveau sur sa noble tâche. C’est que le petit l’avait perturbé, avec sa sotte idée de sourire au moment inopportun. Hum, oui, la litanie. Se concentrer sur la litanie. C’est qu’elle n’allait pas se réciter toute seule.

« Euh, et, euh… et maintenant, ô Toi que nous révérons, je, euh… nous T’implorons de prendre sous Ton aile bienveillante le jeune… Tohrj , comme tu pris jadis sous ton aile son père Kvir… » Ca ne lui avait pas trop réussi, d’ailleurs, à ce vieux bougre, quand il y repensait. Hum. Oui. Se concentrer sur la litanie…
« D’en faire un disciple écoutant et désireux d’apprendre, studieux et prompt à comprendre… » Ca aussi, c’était mal parti. Hum, la litanie.
« Qu’il inspire aux ignorants la crainte de Ton nom, et l’effroi de Ta puissance… » Ca, par contre, c’était mieux. Rien que le sourire, par exemple. Avec ses dents plantées de travers dans une bouche trop étroite, il y avait de quoi faire frémir. Ah, oui, la litanie.
« Oui, ô Maître incontesté de la vie et de la mort, consacre parmi nous ce nouvel adepte, le… treizième de notre confrérie ! » Treize. Voilà qui était un bon chiffre. Le Dieu des Vers aimait les comptes ronds. Et puis ça sonnait bien. Mystérieux et ésotérique.
« Oui, ô Roi puissant, qu’il en soit ainsi et que Tohrj devienne le treizième de Tes serviteurs en ce lieu. Puisse-t’il être en ce jour marqué par Ta suprême volonté, pour devenir le plus grand de Tes servants. Ainsi soit-il, ô sombre Seigneur.
- Aaaaainsi soit-il, oôo Seigneur », psalmodièrent les nécromants.

Sjorling poussa un léger soupir de soulagement. Le plus dur était passé, du moins le croyait-il. Et il allait s’en mordre les doigts.

ManiKatti
Niveau 12
22 mai 2011 à 20:33:07
  • Lit*
ManiKatti
Niveau 12
22 mai 2011 à 20:40:29

Toujours aussi plaisant, on y retrouve l'humour qui fait tout le charme de ta fic. Et toujours sans faute aucune !

Fake. "je croie " :rire:

:-)))

Arduilanar
Niveau 10
22 mai 2011 à 21:14:19

Palsambleu, voilà qui m'a échappé. :(

ManiKatti
Niveau 12
22 mai 2011 à 21:16:01
  • Se moque*
[RandyMarsh]
Niveau 10
23 mai 2011 à 00:44:34

Toujours aussi bien écrit, là dessus rien à dire. C'est fluide, intéressant, ça se lit vraiment naturellement. Il y aurait pas mal de commentaires positifs à faire, mais c'est pas le genre du forum n'est ce pas? :noel:

Alors il y a 2 trucs qui me gênent dans ton texte: la première chose, c'est la trop grande place qu'occupent les dialogues. Non pas que les répliques soient mauvaises, mais tu excelles quand même dans le récit.

La deuxième chose, c'est la focalisation qui est parfois un peu brouillon. D'une manière générale, on a l'impression qu'on passe de perception interne de personnage à une autre. Ce ne sont pas des interventions du narrateur, ce sont bien des réflexions de personnages, et ça mène parfois à des confusions. Par exemple, dans ce passage "Ah, l’effet de simples bougies sur un esprit influençable…", on se demande de quelle subjectivité il s'agit. On se rend compte bien vite qu'il s'agit de Sjorling qui réfléchit, ce qui n'était pas clair vu qu'on était auparavant dans les pensées de Tohrj (Tohrj "n'osait" détacher les yeux...).

Ce qui serait bien, c'est d'avoir parfois du récit neutre, ou bien qu'on se limite à quelques focalisations internes. Je pense par exemple que la première fois que tu utilises ça dans ce texte, à savoir la réflexion sur le bonheur de la servilité, est de trop. Dans un texte aussi court ça étouffe un peu le lecteur, il faudrait se limiter à la perception de Tohrj et de Sjorling, alterner entre les 2, mais pas en plus de s'insérer dans les pensées des autres nécromanciens.

Voilà c'est une réaction à chaud, elle vaut ce qu'elle vaut. Comme j'ai dit, y'aurait beaucoup de points positifs à aborder, notamment l'histoire qui est bien en place et la crédibilité des personnages.

Arduilanar
Niveau 10
23 mai 2011 à 00:54:58

J'suis tout à fait d'accord avec tes remarques. Faut dire aussi que j'ai écrit ça sous l'impulsion du moment, de manière assez brouillonne en général et pas toujours aussi drôle que je le voudrais. Et encore, j'ai un peu réécrit le dernier paragraphe parce que c'était pire avant. Disons que j'ai eu quelque peu la flemme de tout reprendre bien comme il se faudrait... J'ferai un effort pour la partie 4, pour essayer d'avoir quelque chose d'un peu mieux construit, et non plus de jeter sauvagement les idées sur le papier - enfin, sur le clavier, disons. Pour les dialogues, je me suis fait exactement la même remarque. J'essaye de commencer avec le récit, mais ça part très vite dans les dialogues et après, difficile de s'arrêter.
Mais content de voir que ça t'a plu quand même.

PS : Crédibilité, je sais pas. Je m'attends pas à croiser des gens comme ça dans la rue. :noel:

Arduilanar
Niveau 10
28 mai 2011 à 13:26:09

Une bonne chose de faite, assurément. Sjorling se félicita intérieurement d’avoir remédié aussi rapidement à ce problème. Il avait presque peine à croire de l’aisance avec laquelle la crise avait été résolue. En l’espace d’une journée, l’intrusion impromptue d’un enfant avait réussi à se muer en l’adhésion d’un nouveau membre à la guilde. Et un souci réglé…

Mais le maître de guilde avait tort de croire s’être débarrassé aussi facilement des ennuis. Car, le problème du fils résolu, il restait encore le problème du père. Tandis que Tohrj paradait fièrement dans sa robe trop grande pour lui, quelques nécromanciens conspiraient à voix basse.
« -…un cadavre tout frais, on peut quand même pas rater ça.
- Tu ferais ça à un vieux camarade ? C’est vrai qu’on manque de corps, mais ça me gêne un peu pour le vieux Kvir.
- De là où il est, t’inquiète qu’il s’en fout.
- Et puis si ça se trouve, ça ne l’aurait pas dérangé. C’est quand même un nécromancien, même s’il a été radié. Il doit bien avoir le sens de la solidarité envers ses collègues…
- N’empêche qu’il est pas là pour nous le confirmer. Ca me chiffonne, quand même.
- Tout frais du jour ! Qu’est-ce qu’il te faut de plus ?
- Faudrait demander au petiot où il est, d’ailleurs. On a jamais su où il était parti quand il s’est fait expulser.
- Chht, v’là Ulkar ! »
Le cercle des conspirateurs se rompit, chacun tentant de prendre l’air le plus innocent possible – si tant est qu’un nécromancien puisse avoir ne serait-ce que l’apparence de l’innocence.
« - Je, hum, commença Ulkar d’un air soupçonneux, je ne voudrais pas m’immiscer dans votre conversation, mais…
- Mais c’est bien ce que tu fais. D’ailleurs, qui te parle de conversation ? On discutait même pas. Pas vrai ? »
Les autres opinèrent du bonnet.
« -Je vous ai entendus.
- Tu nous espionnais, oui !
- Non, non, j-je… Je, euh… , balbutia Ulkar avant de se reprendre. C’est, hum, c’est pas bien, ce que vous faites.
- De quoi te mêles-tu, Ulkar ? On a besoin de corps, tu le sais. On a déjà dû réduire nos effectifs de zombies le mois dernier, il ne nous en reste plus qu’un.
- Un demi, en fait. C’est celui qui n’a plus ni tête, ni bras.
- Et il me semble bien qu’il lui manque aussi la jambe gauche. On parle bien du même ?
- Oui, c’est bien celui-là. On le reconnaît facilement, c’est celui qui avance à cloche-pied.
- Je, euh…
- Oh, la ferme, Ulkar. C’est pas comme si on te demandait ton avis.
- Et puis on en a besoin, voilà tout.
- Je… vous… Vous feriez mieux de demander, quand même. A Sjorling. Ou bien, hum, il ne va pas aimer.
- Et, mais c’est pas si bête, c’qu’il dit, en fin de compte. Si Langue-de-glace nous donne son aval, ça officialise le truc, c’est un peu comme si le Roi des Vers lui-même il nous autorisait à l’faire.
- Et, euh, hum, vous allez demander à l’enfant, aussi ?.. Non ?
- Faut pas trop nous en demander non plus. »

***

« - Non.
- Mais, maîître…
- Je, hum, je vous l’avais bien dit…
- La ferme, Ulkar !
- Euh, hum. D’accord. »
Ulkar battit sagement en retraite. Ce n’était décidément pas son jour. Mieux valait aller observer la scène de plus loin, quelque part à l’abri.
« - Maître, votre réponse est donc définitive ?
- Il est hors de question que nous ramenions le corps de Kvir ici, vous dis-je.
- Dites-z’y voir, intervint Aenius, vous causeriez pas d’aller chercher le cadavre du Dément ? Parce que je vous le dis tout net, j’ai eu l’idée avant tout le monde ! Oui monsieur !
- Aenius, non ! grogna Sjorling. J’ai dit : nous-n’irons-pas-chercher-le-corps !
- Bon, bon, faut pas vous énerver comme ça, mon bon maître. J’voulais seulement m’assurer qu’on se souviendrait que c’était mon idée…
-Aenius….
- Oui, maître ? »
Sjorling soupira.
« - Non, rien. »

« - Maître…. Pourquoi ce refus ? Ne serait-ce pas une question de… morale ?
- Je vous interdis de m’insulter de la sorte, Halof.
- Veuillez m’excusez, maître. Les mots ont dépassé ma pensée, je le regrette sincèrement.
- Hum, bon. Ca ira pour cette fois. Mais je ne supporterai pas une deuxième fois des insinuations aussi offensantes.
- Oui, maîître. Pardon.
- Mais alors, Sjorling, pourquoi donc refuser ? Vous savez mieux que quiconque que nous manquons de sujets d’expérimentations, et ce corps qui nous tend les bras…
- Rappelez-vous donc de qui il s’agit, Vidkun. De Kvir. Le Dément. Avec tout le respect que nous lui devons, il serait quand même bon de se rappeler qu’il n’a posé que des problèmes ici. Il a toujours été un membre à part de notre communauté, très… original. Mais pas doué pour quoi que ce soit. Et même après sa mort, il reste encore à mes yeux bien trop imprévisible.
- Oooh… Oui, maître, nous comprenons parfaitement.
- C’est vrai que j’me rappelle la fois où il avait pas fermé la porte de l’enclos à momies… Toute la nuit, qu’on avait passée à courir derrière les bandelettes !, fit Aenius en riant.
- Ou le fruit de ses travaux sur la zombification des hamsters ? Pendant des mois on a eu peur de se faire grignoter les orteils !
- C’est vrai que même mort, j’lui ferais pas confiance, à ce vieux tocard.
- Bon, l’affaire est donc close, coupa Sjorling. Allez donc prévenir vos petits… camarades, je suis sûr que vous n’êtes pas les seuls à avoir eu l’idée du recyclage. »

Les quatre nécromants s’éloignant, Ulkar se rapprocha.
« -Dites-moi, maître, murmura-t’il. Les, hum, les raisons que vous avez invoquées sont elles vraiment les seules ? Vous savez qu’à moi, hum, vous pouvez tout dire.
- Et bien, admit le maître de guilde à voix basse, peut-être pas exactement. Mais je ne pouvais pas décemment leur avouer que cela me gênait de placer l’enfant devant le corps de son père.
- Un peu de, hum, sensibilité ?
- Peut-être. Je ne saurais le dire. Vous connaissez mon aversion pour ce mot, pourtant. »
Sjorling garda le silence en moment, les yeux rivés sur Ulkar. Un drôle de nécromancien, lui aussi, mais pas dans le style de Kvir. Il se demandait d’ailleurs souvent comment il avait pu en arriver à la pratique des arts sombres. Il l’aurait plutôt imaginé comme un grand-père aimable entouré de ses petits enfants, que comme un démoniaque serviteur du Roi des Vers. Il n’allait pas s’en plaindre, car malgré ses concepts souvent… exotiques, Ulkar était de loin plus intelligent que le reste de la guilde. Ce qui expliquait pourquoi son manque de réel intérêt pour la chair morte restait à peu près toléré. Ils avaient besoin de lui, c’était un fait, et tant pis s’il croyait en des principes moraux aussi farfelus que la défense des enfants ou le respect de la personne humaine.

« - Maître, vous, euh… vous êtes songeur ?
- Hum ? Oh, pardon, Ulkar, je réfléchissais. Peut-être n’est-ce là qu’un des premiers changements apportés par l’arrivée d’un enfant à la guilde. Peut-être allons-nous tous nous radoucir, nous affaiblir, nous rabaisser jusqu’à éprouver des sentiments humains.
- Vous, hum, vous regrettez donc d’avoir accepté Tohrj ?
- Non. C’est une expérience comme une autre, après tout. Une occasion unique de façonner un individu dès son plus jeune âge, de le modeler à notre convenance pour la plus grande gloire de notre Seigneur. Tant pis pour les risques que nous prenons.
- Je comprends, maître. Je, heu, je crois que je vais vous laisser. Pour, hum, vérifier que les autres ne font pas de bêtises.»

Sjorling regarda Ulkar partir en frémissant. Des sentiments humains. Brrr. Il espérait quand même ne jamais être réduit à cette sombre extrémité.

ManiKatti
Niveau 12
28 mai 2011 à 13:28:42
  • Commence à traquer les fautes*
ManiKatti
Niveau 12
28 mai 2011 à 13:34:42

Je proteste. Il n'y a pas de faute. Et en plus, j'ai trouvé ça court. Remets toi à écrire ! :content:

Arduilanar
Niveau 10
28 mai 2011 à 13:36:12

C'est court parce que c'est des dialogues, et que j'étais pas super inspiré pour ce passage, mais il était nécessaire. J'ai déjà une page Word de pur récit pour le prochain chapitre. :content:

ManiKatti
Niveau 12
28 mai 2011 à 13:40:01

C'est ça. Active. :content:

Arduilanar
Niveau 10
28 mai 2011 à 13:40:58

Oui, maîîître. :-(

Annihilus
Niveau 39
28 mai 2011 à 13:45:45

Ah, enfin, j'vais lire alors :( !

Arduilanar
Niveau 10
29 mai 2011 à 15:31:50

L’herbe fraîche, délicieusement humide, caressait ses pieds nus. Le parfum enchanteur des fleurs sauvages emplissait l’air doux de ce matin de printemps, et Tohrj l’inspirait avec plaisir. Haut dans le ciel bleu, le soleil brillait de toutes ses forces, paraissant lui sourire. Tohrj lui sourit en retour, et courut droit devant lui, gambadant gaiement dans la pelouse verte, riant et tentant d’attraper le soleil. Apercevant Sjorling au loin, il l’enjoignit de le suivre. Sjorling lui répondit en souriant et, relevant ses robes noires, gambada lui aussi à la poursuite du soleil qui, d’humeur joueuse, refusait de se laisser attraper. Puis vinrent Aenius, Heifnir et les autres, qui se mêlèrent à leur tour en riant à la course. Les petits oiseaux chantaient pour les encourager, tandis qu’ils sautillaient tous les treize avec entrain dans les champs de fleurs…

Tohrj se réveilla en sursaut, baigné de sueur, tremblant de tout son corps. Un cauchemar… atroce. Horrible. Abominable. Et qui fait très très peur. Inquiet, Tohrj se tourna et se retourna, inspectant les lieux. L’obscurité, l’atmosphère moite, la puanteur cadavérique, les ronflements sonores des nécromants… Oui, il était bien chez lui. Tohrj soupira, rassuré, serrant contre lui sa fourchette.
Les fleurs, les oiseaux… Il grimaça rien qu’à y penser. Comme tous ses compagnons, il détestait les fleurs. L’odeur, déjà. A proprement parler insupportable pour tout nécromancien qui se respecte. Et puis, les fleurs ne pouvaient pas se disséquer. Elles ne gémissaient pas quand on les coupait, ne saignaient même pas. Le Dieu des Vers haïssait les fleurs, et à raison. Cela avait fait l’objet d’une des premières leçons.
Puis ça avait été le tour du soleil. Les nécromanciens le haïssaient aussi, lui qui brûlait les yeux et desséchait les cadavres, les rendant inutilisables. Les fidèles de Mannimarco préféraient assurément les ténèbres pour leurs viles actions. Et puis, il fallait bien se résoudre à admettre que les expérimentations machiavéliques étaient autrement plus classieuses quand elles sont réalisées au plus profond de catacombes, à la lueur des bougies. Franchement. Réaliser des expériences contre-nature à l’air libre et à la lumière du soleil, c’était se priver du charme ésotérique du Mystère.
Tohrj avait beaucoup appris, oui, ou du moins reçu beaucoup de leçons. Mais les cauchemars continuaient à le hanter presque chaque nuit. Sjorling avait diagnostiqué une exposition trop prolongée au monde extérieur. Ce qu’il lui fallait, à cet enfant, c’était une bonne petite grotte sombre et humide, un lieu sain et rassurant où il pourrait se remettre de ces atrocités.

Tohrj tenta de se rendormir, serrant fort sa fourchette préférée – il ne passait pas une nuit sans elle. Le lendemain, Aenius et lui devaient entamer une séance de dissection. Et Aenius, il était pas très gentil. Oh non, pas du tout très gentil. Même que des fois il se mettait en colère, et alors ça faisait peur à Tohrj, parce qu’il devenait tout rouge et tout furieux. Alors, il fallait que Tohrj il dorme bien pour pas être fatigué et pour pas faire de bêtises. Parce que les bêtises, et bah Aenius il aimait pas ça. Alors, il fallait pas en faire.

***

En grognant, Aenius se pencha sur la table d’opération. Encore un coup de ses lombaires. Les rares fois où ils acceptaient de lui foutre la paix, c’était sa sciatique qui se réveillait. Quand ce n’étaient pas les deux à la fois. Ah, les grottes, c’était bien beau pour la jeunesse, mais passé un certain âge, l’humidité c’était plus tenable !
Même les séances de dissection devenaient douloureuses. Il faudrait qu’il demande à Langue-de-Glace une table d’opération à hauteur réglable. C’aurait quand même été vachement mieux que de devoir se pencher tout le temps. Le mioche, lui, était trop petit, et sautillait sur place pour tenter d’apercevoir ce qu’il se passait. Comme quoi, le monde était quand même sacrément mal fichu.
Aenius soupira. Non seulement son dos lui faisait un mal de chien, mais en plus les sautillements du gamin lui tapaient sur le système, à la longue.
« - Gamin, grommela-t’il, arrête de gesticuler comme un asticot ! Tu m’donnes mal à la tête !
- Mais, monsieur Aenius, j’arrive pas à voir qu’est-ce que vous faîtes !
- Et bah monte sur une chaise, crétin ! Tu m’donnes le tournis à t’agiter ! »
Aimable, lui avait demandé Sjorling. Et quelque chose d’autre, aussi. Paye-truc. Paye-dague-og, peut-être, ou un truc qui r’semblait. Il n’avait pas vraiment compris, mais il avait acquiescé de la tête. Langue-de-glace avait l’air inquiet qu’il s’y prenne mal avec les enfants. Aenius ne comprenait pas pourquoi, d’ailleurs. Cinquante ans d’expériences avec les mômes, qu’il lui y avait dit. Y en avait pas un qui s’y connaissait mieux que lui, même ; que ce soit pour appâter les gamins, les tuer ou les découper, y avait pas plus fort dans toute la guilde. Et bah allez savoir pourquoi, mais Sjorling restait dubitatif. Comme s’il ne lui faisait pas confiance pour s’occuper correctement de Tohrj. C’était un comble.
«- Dis, monsieur, c’est toi qui sens bizarre comme ça ?
- De qu… Bon sang, gamin, j’t’ai déjà dit l’aut’fois que c’est le cadavre qui pue ! »
Du calme, Aenius. Reprends-toi, mon grand. Sois aimable et… paye-dague-og.
« Humrf. Reprenons où on en était. »
Aenius se pencha sur la table d’opération, ce qui lui arracha un nouveau grognement de douleur. Groumf. Calme et amabilité. Plus facile à dire qu’à faire.
Les yeux vides du mort semblaient le fixer. Il avait l’habitude, à force. Les yeux étaient les plus durs à trouver, c’était toujours la partie que les corbeaux commençaient par picorer. Ils avaient eu de la chance avec celui-ci, il ne manquait pas d’autre partie du corps. C’était le cadavre d’un aventurier trouvé presque frais, conservé dans la neige. Un vrai coup de chance.
Enfin, bref. C’était bien beau de s’extasier sur la qualité cadavérique, mais bien conservé ou pas il n’allait pas se disséquer tout seul. Aenius se saisit du couteau rituel et bredouilla à la va-vite ses incantations :
« Ô Seigneur des Vers….grmblbrmbl…jour de ténèbres….grmblglbl….rituel sacré….brmgl….le respect qui se doit….mrblm…sacrifice à ta gloire. Ainsi soit-il ! »
Le vieux nécromant leva sa dague, prêt à frapper…
« - Monsieur ?
- Quoi, encore ?!
- Et bien, heu… Il faut que je la dise moi aussi, la chanson ? »
Grumpf. Allez, un peu de paye-dague-ojie.
« Sjorling te dirait que oui, mais…. »
Voyons, que dirait un vrai paye-dague-og en pareilles circonstances ?
« … mais en fait, personne n’en a quoi que ce soit à foutre. Je les marmonne pour la forme, ces incantations, et encore je les écorche plus qu’autre chose. Si le Roi des Vers a pas encore jugé bon de me putréfier sur place, c’est qu’Il s’en tamponne le coquillard, avec tout le respect que je Lui dois.
- Alors c’est pas grave si je le dis pas ?
- Fais donc comme moi, bredouille d’un air sérieux. Personne ne remarquera rien et ça ira toujours plus vite que de se coltiner les formules rituelles à chaque nouveau cadavre. Bon, j’peux y aller maintenant ? »
Aenius leva haut la dague rituelle, puis la planta avec férocité sous le sternum. D’un geste habile, révélateur d’années de pratique, il incisa l’abdomen jusqu’à l’hypogastre, puis réalisa une seconde incisure, perpendiculaire à la première, en-dessous des côtes.
« Passe-moi les crochets, gamin. »
Avec appréhension, Tohrj lui tendit les instruments recourbés à l’air menaçant. Aenius enfonça la pointe dans l’épaisseur du flanc droit, puis accrocha l’autre extrémité du crochet à un anneau de la table prévu à cet effet, décollant par là même la gaine musculaire et révélant la couche graisseuse sous-jacente. Une odeur pestilentielle emplit l’air, faisant tousser Tohrj.
« Ah, gamin, fit Aenius en humant avec délice, tu sens l’odeur pure de la chair en putréfaction ? Pas deux macchabées qui aient la même odeur ! Allez, c’est à ton tour, fais pareil de l’autre côté. »
Avec appréhension, Tohrj se saisit du crochet. Les yeux du mort le fixaient avec insistance – sauf qu’en fait, il avait perdu ses noeils. Mais quand même, il le regardait, il était sûr. Il aurait voulu planter sa fourchette, pour être bien sûr, mais Aenius, et bah il aurait pas aimé. Tohrj gémit. C’était vraiment trop pas juste.
Prenant son courage à deux mains, Tohrj approcha la pointe cruelle du corps inerte. Il retint sa respiration et la planta dans la peau grise.
« Faut y aller plus fort, morveux ! »
Plus fort, il avait dit le monsieur. Mais le crochet il voulait pas rentrer. Tohrj insista. Sans résultat.
« Retire-le et fous-lui un grand coup, si t’es pas capable de faire autrement ! »
Un grand coup, oui. Tohrj allait essayer.

Le crochet s’abattit, décrivant une courbe parfaite. Comme au ralenti, la peau se distendit au point d’impact, se rompit, laissant pénétrer la pointe d’acier rouillé, qui s’enfonça dans les tissus en provoquant chez Tohrj un grand sourire. Un sale sourire, songea Aenius. Il comprit trop tard l’erreur – la pointe continuait de s’enfoncer, prise dans son élan. Et à l’endroit où elle passait…
« Nooooo… », aurait-il voulu crier. Il n’en eut pas l’occasion. Le gros intestin, boursouflé par les dégagements gazeux des processus de décomposition, explosa dans une gerbe de produits de digestion. Qui s’échappèrent par l’accès le plus simple, c'est-à-dire le flanc droit débarrassé de sa couche de muscles. C'est-à-dire vers Aenius.
En l’espace d’une seconde, le nécromant fut couvert de la tête aux pieds de selles en fermentation. Il n’avait même pas eu le temps de fermer la bouche.
« Bordel de m… GAAAAAMIIIN ! », vociféra-t’il, postillonnant des débris brunâtres.
Tohrj s’était déjà enfui.

Annihilus
Niveau 39
29 mai 2011 à 17:01:42

Franchement, j'aime :noel: ..

Par contre, ça traîne en longueur. Alors c'est bien beau de faire de l'humour et des dialogues de 15 pieds de longs, mais perso, je commence vite à m'emmerder là.

Ps : je sais pas pourquoi, mais un passage m'a fait penser aux deux modos qui arrêtent pas de se mettre sur la tronche. :hap:

Arduilanar
Niveau 10
29 mai 2011 à 17:06:17

Trop long ? :-(

Lloyd trouve ça trop court, lui. Mettez-vous d'accord. :nah:

Annihilus
Niveau 39
29 mai 2011 à 17:07:27

J'parle des dialogues. T'en fais pleins. Ils sont bien écris, mais du coup. L'action stagne. Et du coup, c'est chiant.

Sujet : [Fic] Tohrj. Tohrj tout-court.
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