En même temps, au risque d'être un peu dur, c'est pas à des types nourris au grain américain et gavés de films pour adolescents que l'on va demander d'avoir un avis pertinent sur les circuits du cinéma français 
Surtout si c'est pour qu'un Youtubeur inculte vienne cracher un texte convenu avec une étagère pleine de funko pops en arrière-plan....
Je reconnais que l'organisation du cinéma français est un peu trop rigide par moment mais ce n'est pas que nos institutions dans le domaine soient particulièrement lentes ou inadaptés, c'est juste que nous avons une barrière de sécurité qui s'appelle : la tradition. Faut quand même pas oublier que la France (avec p-e l'Italie) c'est historiquement LE pays du cinéma, et pas seulement pour l'attribution un peu fautive de l'invention aux Lumière, mais pour la pérennité de nos institutions, pour la qualité artistique de notre cinéma, pour l'avant-gardisme des français dans le domaine du septième art, et c'est pas une génération bourrée au soft power américain qui nous fera croire le contraire. C'est un peu du même niveau que les débats autour de l'immobilisme des sénateurs ou des académiciens français alors qu'ils sont justement assis où ils sont pour leur conservatisme. C'est bien beau de se jeter sur les nouveaux modèles économiques et logistiques mais y a une cohérence à maintenir et surtout une identité. Faut aussi comprendre qu'économiquement les modèles américains et français sont COMPLETEMENT à l'opposé, les philosophies qui régissent nos courants économiques et sociaux sont eux-aussi complétement opposés, nos groupes sanguins ne sont pas les mêmes, il faut arrêter de vouloir calquer bêtement ce qui semble marcher aux Etats-Unis. On a des leçons à retenir certes concernant les nouveaux modes de consommations qui s'étendent au-delà de la salle de cinéma, mais on réfléchira par nous même ou en consensus avec l'Europe et ça sera bien ainsi. Pour un pays comme la France, copier les USA c'est quand même la faire régresser, on vaut mieux que ça respectons-nous.
Surtout que y en a quand même des gars qui font la promotion du modèle américain décliné utopiquement (c'est pas comme si l'actualité depuis au moins 10 ans pointait du doigt justement la grande crise du modèle américain, m'enfin.....) en ce qui concerne la diffusion/distribution comme si ce modèle avait déjà eu un quelconque effet bénéfique sur la qualité du cinéma international. Je comprends même pas comment le modèle Netflix a pu s'imposer populairement chez nous alors qu'il suffit de se documenter juste 2 minutes pour comprendre à quel point Netflix est mauvais pour l'industrie mais surtout à quel point ces plateformes sont conçus autour de l'économie comportementale, autour de tous les outils de manipulations pour faire de l'internaute un simple consommateur béta qui perdra du temps sur la plateforme en se gavant de contenu taillé pour le stimuler. En temps normal t'as toujours une masse pour venir agiter sa petite référence dystopique à Black Mirror quand on parle d'innovation mais ça vient consommer son petit Netflix une fois rentré à la maison. Le Binge-Watching est un outil d'asservissement des masses, et même les quelques bons films qui y passent, sont étudiés non pas pour leur fond mais pour leur contenu, pour leur effet sur la consommation etc.... Je rappelle quand même cette phrase du pdg de Netflix "Mon ennemi c'est le sommeil car quand on dort on ne consomme pas". (cf une interview des cahiers du cinéma de souvenir) Ca veut tout dire.
Et je voudrais aussi rebondir sur cet argument qu'on entend souvent selon lequel les blockbusters et autres succès prémâchés américains tiendraient à bout de bras le cinéma français, cet erreur logique grave est tellement fautive qu'elle en devient dangereuse. Ce n'est pas que le cinéma américain tienne le cinéma français à bout de bras, c'est que le modèle est fait de telle sorte qu'il ne puisse exister à l'international que le cinéma américain. Mais ça veut pas dire que les gens fuiront des salles en courant si un jour on remplace tout ça par du cinéma qualitatif et ouvert sur le monde Une masse ça s'élève par ce qu'on lui propose, et en 1960 la Vérité de Clouzot et Le passage du Rhin de Cayatte ça a fait son 5M de vues..... Si on promeut et met en avant des films de qualité, les gens se pousseront pour aller voir ces films de la même manière qu'ils se battent pour aller consommer leur MCU. Mais ça demande évidemment de repenser tout ça. Les campagnards comme moi sont en général très souvent exposés à ce monopole des mauvais films américains car la plupart des films d'auteurs internationaux ne sont pas diffusés à 45 minutes à la ronde. Je me souviens qu'il a fallu que je déniche à 40 minutes de chez moi une séance de 16h dans un cinéma monopièce pour visionner ce chef d'œuvre qu'est Jusque à la Garde. Une séance paumée alors que Jusqu'à la garde est un chef-d'œuvre français et qu'il a en plus obtenu le Lion d'argent, donc c'était pas un film inconnu. Malheureusement le système tel qu'il est conçu l'a passé à la trappe. Et c'est la même pour tellement de films, la nouvelle vague allemande il a fallu attendre qu'une association dirigé par un français d'origine allemande résidant près de chez moi achète les droits de certains films pour que notre cinéma fasse une séance de 22h. Résultats deux films exceptionnels qui repensaient totalement l'Europe contemporaine. De la même manière, on peut pas dire que les gens ne vont pas voir Zviaguinstev car ils préfèrent Les gardiens de la Galaxie, les gens vont voir les Gardiens de la Galaxie plutôt que Zviaguinstev car Zviaguinstev existe peu dans leur écosystème, n'est pas mis en avant, ne fait pas l'objet d'une publicité intensive etc. et pourtant on va pas me faire croire que Le Retour ou Elena ne plairaient pas, même aux regards moins avisés. Je vous encourage à regarder le box-office français par année pour vous faire une idée. L'an dernier, sur 51 films, 36 films américains, 14 français, 1 coréen..... Y a deux ans à peu près même ratio.... on nous vante les mérites de la mondialisation à tout va mais au final on se retrouve avec un cinéma complétement étanche au monde qui l'entoure. Y a 200 pays dans le monde, dont au moins 60 qui produisent du cinéma en grande quantité, et on n'est pas foutu de les promouvoir.
Bref, pour revenir un peu sur le sujet, plonger tête baissée à la poursuite du modèle américain ne ferait qu'empirer la qualité du cinéma en France. Oui le cinéma doit se métamorphoser pour prendre en compte les phénomènes sociétaux contemporains, mais il incombe aussi aux instances qui le régissent de sauvegarder ce qui fait aussi à proprement parler le cinéma. Y a un équilibre à trouver car les conséquences pourraient être graves, et potentiellement irréversibles.
Si une plateforme investit 20 % de son chiffre d’affaires français dans la production cinématographique et audiovisuelle (séries TV), elle pourra diffuser des films à partir de 12 mois.
après ils trouveront bien un moyen de tricher et enregistrer leurs revenus dans un pays non taxé...
