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2023 (S6), Chapitre 38 (n°246) : Phénix
Dimanche 3 septembre 2023, Circuit de Spa-Francorchamps, Francorchamps
Il n’y a pas eu de scandale chez Audi hier. Officiellement, c’est le moteur Mercedes qui a pêché hier. Malgré tout, il y a des vérités derrière toute cette histoire, des choses que je ne peux pas dire pour l’instant parce que je me dois de garder une relation cordiale avec les gars mais cette vérité éclatera, un jour ou un autre. Disons que la casse de mon moteur soulève des questions auxquelles seules six ou sept personnes sur cette planète ont la réponse, Sebastian et moi faisant partie de ce groupe restreint.
Si on se place du côté de Seb, il a connu un problème à Monaco - la pire course pour que ça arrive - alors je me console en me disant qu’au moins, à Spa, on peut dépasser. Et c’est tout à fait ce que je compte faire, bien sûr. Moteur Mercedes dans le dos, je compte bien remonter rapidement, en espérant être sur le dos des Ferrari après deux ou trois tours au maximum.
La réalité est assez différente, disons-le comme ça. Auteur d’un très bon envol, je dépose Gunther et Ghiotto dès l’extinction des feux et prend ma place sur la droite du circuit pour l’intérieur de La Source et là, c’est le carnage : un contact, une monoplace qui quitte le sol, une pluie de carbone et, immédiatement, un Safety Car. Je ne sais pas ce qui s’est passé, j’ai juste vu une Aston sauter plus haut que les autres comme pour prendre un rebond, il y a au moins trois ou quatre voitures impliquées, je dirai. Alors que je suis à la queue-leu-leu derrière Maini, Steven me fait un point à la radio.
Steven : Tu es actuellement P13. Zoranovic, Ráfaga et Verstappen sont out. Ocon a des dégâts, de même pour de Vries.
Niki : de Vries ? Il était loin devant, comment est-ce qu’il peut avoir des dégâts ?
Steven : On ne sait pas encore, on attend les replays.
Alors que tout le monde effectue son tour au ralenti, Ocon s’immobilise aux Combes à cause des dégâts sur sa voiture et, à la fin du tour, de Vries rentre au stand. C’est à ce moment que Steven me l’annonce : Nyck a percuté Sebastian au premier virage dans un incident séparé. Bon garçon. Pour ma part, j’ai profité du chaos pour m’infiltrer devant Schumacher, Zhou et Pérez, tous trois ayant ralenti pour esquiver les débris que je n’ai pas eu à éviter autant qu’eux.
A la reprise, je saute au cou de Maini pour le déposséder de ce qui est désormais la onzième place. P11 au cinquième tour, je tablais à peu près sur ça mais pas de cette façon, disons-le. Devant, il reste encore Sainz, les Williams et les Ferrari, alors la remontée est plus facile que prévue, même si ces gars restent de très bons pilotes.
Bottas ne sait pas me résister dans Kemmel et m’offre une place dans les points au tour suivant, il en est de même pour Sainz dans la longue pleine charge qui amène à la chicane finale.
Lors des tours 7 et 8, je parviens à avoir la peau de Ricciardo, Sette Câmara et Leclerc pour me hisser d’ores et déjà au sixième rang. Les circonstances de course ont été favorables, c’est clair, mais avoir déjà gagné seize places en huit tours est une performance que je ne pensais possible que dans mes rêves !
Lorsque le tour 12 arrive, je suis le premier à rentrer. Etrange, pas vrai ? C’est une tentative d’undercut que je mène là, en sachant très bien que, si nécessaire, je peux économiser mes pneus lors du reste de la course pour compenser cette stratégie. Il faudra attendre le tour 15 pour voir Seb ravitailler et le tour 16 pour que Russell ne fasse de même. Le rythme de mon Audi et cet undercut m’ont bien aidé à réduire l’écart sur le quintuor de tête et, au bout de 21 tours, la course est de nouveau neutralisée car Luca s’est arrêté dans Kemmel avec un moteur en rade. C'est une réelle bénédiction pour moi car le temps que j'ai perdu dans le trafic vient de s'évaporer : je suis dans le diffuseur de Ticktum et j'ai les cinq hommes de tête dans mon champ de vision. Steven profite de l’occasion pour faire un point sur la situation.
Steven : Tu es actuellement P6. Gasly mène devant Russell, Vandoorne, Vettel et Ticktum.
Niki : Sebastian quatrième ? Comment c’est possible ?
Steven : Sebastian a des dégâts à l’arrière après le contact du premier tour, sa voiture est endommagée.
J’ai coupé la radio au bon moment car sinon je crois que tout le monde aurait entendu le “YES” que j’ai lâché tel un réflexe. Néanmoins, je dois rester dans ma course : il reste un peu plus de vingt tours, je suis P6 et avec toujours la même faim de dépassement alors que mon rythme effraie tout le monde.
Inévitablement, il ne me faut que quelques centaines de mètres après la relance pour déposséder Dan Ticktum de la cinquième place et je parviens à obtenir la peau de la numéro 7 de mon équipier dans Bruxelles. C’était un dépassement forcément plaisant pour moi mais qui ne doit pas me divertir de mon objectif ; les Renault sont juste devant et Russell est désormais à la mène, ce qui constitue une vraie mauvaise nouvelle.
Ma seconde partie de course est consacrée à la chasse ; les Renault devant moi sont en bagarre et ont fini par figer les positions pour ralentir mon retour mais celui-ci est inexorable. La puissance du bloc Mercedes pèse cinq à six dixièmes par tour face au bloc français et, même en mettant Vandoorne dans le diffuseur de Gasly, mon image finit par grossir dans leurs rétros. Après plusieurs tours à réduire l’écart, je me retrouve dans l’aileron arrière du local de l’étape, qui n’y peut pas grand-chose quand je me présente à ses côtés dans Blanchimont. Ce dépassement est risqué et peut très mal se finir mais, ici, ce n’est pas le cas et je m’empare de la troisième place ! Pour quelqu’un qui est parti dernier, ce n’est pas mal, je l’avoue. Mes attaques sur les Renault prennent cependant fin au tour 29, lorsque je suis le premier des leaders à enlever les mediums pour reprendre des tendres. Pierre tente à nouveau de me couvrir mais ce tour que j’ai passé en air libre avec des pneus rapides et tout neufs a fait la différence : me voilà second !
Deux tours plus tard, c’est une autre voiture qui se présente devant moi et elle est grise ; George n’a plus que quelques hectomètres d’avance alors que la lutte des deux Renault lui avait permis de prendre quelques secondes avant les arrêts. Nous voilà donc, à douze tours de la fin, avec deux prétendants au titre qui se disputent une victoire et qui se tiennent à une seconde l’un de l’autre. A ce moment précis, j’ai des flashbacks de Lonneker. J’étais devant George et je lui avais résisté en allant au bout de moi-même pour signer une victoire de haut vol et, aujourd’hui, il va essayer de me rendre la monnaie de ma pièce.
Bien évidemment, vous pouvez me crier que c’est facile quand Audi domine de la sorte à Spa et que la voiture de mon équipier est endommagée mais être en lutte pour la victoire en étant parti dernier, malgré les circonstances de courses, est quelque chose d’hallucinant. Malgré tout, il reste un obstacle et pas des moindres : déposséder Russell de sa place peut s’avérer compliqué et, sur ce plan, je suis heureux d’être à Spa et pas en Australie. Les secteurs 1 et 3 sont à mon avantage mais, comme si j’avais voulu insister sur le fait que je n’avais pas spécialement besoin d’une telle voiture pour faire le job, c’est dans le Pouhon que je me décide, avec neuf tours à parcourir. Ce virage est très technique à passer quand vous êtes seul alors, quand vous êtes deux, c’est d’une difficulté extrême. En F2, il y a cinq ans, Luca avait pensé que c’était une bonne idée de vouloir me prendre la tête de la course dans ce virage et il nous avait mis tous les deux hors-course mais, certainement fort de cette expérience, je m’y prend très correctement par l’intérieur. George me laisse la place, je lui laisse la place, notre lutte est cordiale mais, finalement, la McLaren s’incline deux virages plus loin dans Campus. Blotti dans mon aspiration, mon rival tente de reprendre son bien en tentant l’extérieur au Bus Stop mais je parviens à le croiser alors qu’on prend la direction de la ligne de chronométrage.
La nouvelle attaque de George aux Combes me met en difficulté mais, finalement, je parviens tout juste à maintenir la tête de la course et je finis par prendre mes distances avec la tête de la course entre les mains.
Deux heures de combat plus tard, m’y voilà donc et c’est difficile de le dire : je franchis la ligne en vainqueur, deux secondes devant Russell et cinq et demie devant Vandoorne. Parti vingt-deuxième, je signe ma quatrième victoire de la saison, ma sixième en F1, mais celle-là est incontestablement la plus incroyable.
Steven : Je n’ai pas les mots pour décrire ce qui vient de se passer...Tu es une légende, Niki.
Niki : YEEEEEEEEEEEEEEEEEESSSSSSSSSSSSSSSSSSSSSSSS !!!! YEEEEEEEEEEEEEESSSSSSSSSSSSSSSSSS ! Je n’y crois pas, c’est incroyable...Qu’est-ce qui vient de se passer ?
Steven : C’est historique, Niki. Tout simplement fabuleux.
Niki : Voilà une démonstration qu’il ne faut jamais abandonner, les gars. Toujours se battre, c’est la clé. Ca finit par porter ses fruits à un moment ou un autre et ça fait du bien, je peux vous le dire.
Gagner en partant vingt-deuxième, c’est simple, c’est la meilleure performance de l’Histoire. Je rejoins John Watson, auteur de la même prestation aux Etats-Unis il y a quarante ans mais, en près de 1100 courses, seulement deux types ont réussi à faire un truc aussi incroyable : lui et moi. Dans le parc fermé, mains sur le casque, je peine à réaliser ce qui vient de se passer mais c’est bel et bien vrai. J’ai bel et bien réalisé une des meilleures performances de l’Histoire.
Vous me direz sûrement “Facile avec une voiture et un moteur pareil”, mais je vous demanderai “Comment était la voiture de Watson en 83 ?” et je n’aurai pas de réponse, parce que ce que l’Histoire retiendra, c’est une seule chose : “P22→P1”.
George se dépêche de venir me congratuler et c’est là que je me dis que cette course aura une grande importance dans quelques mois alors que, pour la deuxième fois en deux rounds, j’ai pris le dessus sur lui. Ca fait donc quatorze points que je lui ai pris de manière directe et c’est très important car, dans une lutte pareille, ces points comptent double ; non seulement George ne les inscrit pas mais, en plus, c’est moi qui les obtient.
Classement final du Grand Prix :
1 Kofler (Audi)
2 Russell (McLaren)
3 Vandoorne (Renault)
4 Gasly (Renault)
5 Vettel (Audi)
6 Ticktum (Red Bull)
7 Sainz (Aston Martin)
8 Sette Câmara (Williams)
9 Ricciardo (Ferrari)
10 Bottas (Williams)
Championnat pilotes Championnat constructeurs
Ce circuit semble décidément bien me réussir ; j’étais déjà le plus rapide l’année dernière mais, cette fois, je repars avec le trophée de vainqueur. Au championnat, Seb pointe à trente points de la tête tandis que je ne suis qu’à quatre points d’un George Russell presque infaillible. Même si je parviens à le battre en piste comme ce fut le cas aujourd’hui ou aux Pays-Bas, mes trous d’air lui profitent : sur les cinq derniers Grand Prix, nous avons marqué autant de points l’un que l’autre. Il va falloir se lever de bonne heure pour déloger George mais je suis prêt à essayer et ça se comprend quand on voit ma performance d’aujourd’hui.