Yop.
Je suis actuellement entrain d'imaginer petit à petit une suite au récit "L'anneau de commandement", que j'avais posté ici> https://m.jeuxvideo.com/forums/42-58-46507208-1-0-1-0-l-anneau-de-commandement.htm
J'ai pas mal écrit ces derniers temps, et si rien n'est définitif si ce n'est les grandes lignes, je me suis dit que ca pourrait-être pas mal d'avoir quelques retours. Voila une sorte de mini prologue, qui sert d'introduction avant un premier "vrai" chapitre.
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L'héritage des Maelys.
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Les traits d'eau battaient les pavés en mesure, dirigeant sa course folle à travers la cité. Absorbé par les perspectives que la nouvelle qu'il venait apporter pouvait signifier, l'orage résonnait comme une mélodie agréable, apaisante. Un mélange de fracas et de contrôle qui paraissait bien ironique. Les ruelles, submergées par les forces de la nature, se dégorgeaient péniblement, déversant tout leur surplus dans les avaloirs qui peinaient à maintenir la cadence. Lancé comme une flèche vers une finalité qui le dépassait, il ne pensait plus qu'à accélérer le rythme. Plus vite, plus fort, plus longtemps. Les peaux colorées pouvaient se targuer de dominer le monde, le plus fort d'entre eux, a arme égale, n'aurait pu rivaliser avec ce qu'il se faisait de mieux chez eux. Une réflexion qui prit sens lorsqu'il percuta l'un de ses semblables de plein fouet. Ils retombèrent tout deux sur le sol sale et détrempé. Prêt à reprendre sa marche en avant, il fut retenu dans son élan par une main ferme, agrippée beaucoup trop fortement sur son avant-bras.
— Doucement... doucement. Tu viens de renverser mon frère, l'ami.
Il les reconnu de suite. Quatre gaillard qui passaient leur temps, depuis peu, à vider les maigres poches des habitants de la cité. Jamais par violence –entre Blanchâtre, c’était strictement interdit- mais par intimidation. Ce qui n’était qu’un moyen de contourner les règles éditées par leur maître à tous. Ostrük hésita une seconde, puis se décida à assumer une possible sanction. Vu l’importance de ce qu’il venait apporter, il supposa qu’une petite entorse au règlement pouvait s’envisager. Il n’avait pas de temps à perdre avec ce genre d’individu. En tirant son bras vers le bas, il fit basculer l’individu tout en relevant son genou en direction de sa mâchoire. Il sentit l’une de ses incisives démesurées, caractéristique propre à son peuple, comme cette peau livide et ses traits tirés, se fendre sous l’impact. Les trois autres blanchâtre présent se ruèrent vers lui, pour finir comme leur camarade d’infortune, mêlant leur sang impur à l’eau de pluie qui continuait de ruisseler sur les pavés de la cité. Décidément, s’entraîner avec cet homme n’avait pas que des désavantages. Au fils des mois et des années, il poussa son corps et ses capacités physique toujours plus en avant.
Lorsqu’il arriva au porte du château, il s’accorda quelques minutes pour reprendre son souffle. Déjà détrempé, il ne pouvait se permettre de se présenter devant son maître le souffle coupé. Ostrük avait posé les pieds il y a presque dix ans dans cette cité en ruine. Un endroit abandonné par les hommes, reclus dans les montagnes au fin fond du continent. Un endroit lugubre, inhospitalier, mais qui devint, au fils du temps, la première cité ou prospérait ceux de son espèce. Un endroit ou être un blanchâtre ne signifiait pas d’éviter constamment de finir sur un bucher, ou, au mieux, d’être chassé et méprisé comme un nuisible. Tout cela, ils ne le devaient qu’au projet d’un homme, un homme qui représentait, à ses yeux, l’équivalent d’un dieu vivant. Comme quoi les peaux colorées pouvaient aussi donner naissance à autre chose qu’a des êtres méprisables. Il poussa la lourde porte de la tour qui surplombait le château. Après avoir escaladé une volée de marche quatre à quatre, il s’agenouilla, visage vers le sol.
— Relève toi donc, mon garçon. Quelqu’un comme toi ne devrait poser le genou à terre que pour prier un dieu, un vrai. Et puisqu’ils sont absent, tu ferais tout aussi bien de rester debout.
Ostrük obtempéra, et se releva tout en s’autorisant à laisser son regard pénétrer celui de son maître. Ce qui ne manqua pas de le mettre légèrement mal à l’aise. En plus de celui à qui il devait tout, se trouvait dans la pièce, comme bien trop souvent à son goût, les deux gamins colorés. Si la fille paraissait toujours absente, comme déconnectée, le gamin, lui, lui glaçait le sang avec son regard de tueur. C’était comme si, en le fixant trop longtemps, il sentait sa température baisser, son rythme cardiaque s’accélérer et le bout de ses membres s’engourdir. Un étrange duo auquel il avait du mal à s’habituer.
— Je… Je me suis permis de venir jusqu’ici le plus rapidement possible, et cela sans vous prévenir de mon arrivée. Ce que je viens d'apprendre ne pouvait pas attendre.
L’homme sourit et s’approcha. Il passa une main affectueuse sur le visage du Blanchâtre. Comme un homme caressant un chien de race, prenant soin de son poil et de sa vigueur. Son aura ne manqua pas de le faire légèrement vaciller, comme s’il venait de boire quelques verres de Geordin de trop. Lorsqu’il se recula légèrement, Ostrük respira enfin, et retrouva un rythme cardiaque plus ou moins stable. Cet homme avait quelque chose dans le regard, malgré son âge avancé, qui ne cessait de placer automatiquement son corps sur la défensive, tendant ses muscles, aiguisant ses réflexes. A chaque fois que ses yeux de chat brillaient pour enjoliver un visage ridé mais qui avait conservé toute sa grâce d’autrefois, son invité ne pouvait s’empêcher de retenir son souffle.
— Je t’écoute, annonça-t-il de sa voix suave.
Le blanchâtre s’autorisa un sourire discret. Il ne connaissait pas bien le passé de son maître, mais suffisamment cependant pour être sûr de l’effet qu’allait plus que probablement provoquer l’information qu’il venait lui livrer.
— Salak Maelys est mort.
Dans un premier temps, le vieil homme ne cilla pas. Son regard se durcit, et il s’absorba dans ses pensées. Aucun son ne vint perturber le silence glacial qui s’installa dans la pièce, il semblait même avoir arrêter de respirer. Seul le garçon au regard de tueur, derrière lui, releva la tête pour afficher un rictus dérangeant, indescriptible. Ostrük commença à se demander s’il avait bien tout compris au rapport de force qui unissait ses deux hommes. Annoncé la mort du souverain de Libéria, tout sourire, serait-il son dernier faits d’arme ?
— Pourrais-tu, mon garçon, me répéter ce que tu viens de dire, lui demanda-t-il tout en le fixant intensément, comme pour sonder la véracité de ses propos.
— Je… Salak Maelys est décédé il y a quelques jours. Je pensais que cette nouvelle pourrait vous intéresser. Je… suis sincèrement désolé !
Ostrük venait de s’aplatir encore une fois face contre le sol. Il ne savait pas de quoi il s’excusait, ne comprenait pas ce qui lui avait échappé dans la haine que semblait vouer son maître au souverain de Libéria. Lorsqu’il releva légèrement la tête, il aperçut le vieil homme trembloter. Les tremblements se changèrent en convulsion nerveuse, et l’homme explosa littéralement d’un rire démoniaque qui resterait gravé dans sa mémoire jusqu’à sa mort. Le blanchâtre ne savait plus quelle attitude adopter. Lorsque son maître reprit ses esprits, il se pencha sur lui et le caressa de nouveau comme un animal de compagnie qui venait de réussir un tour.
— Tu es décidément plein de surprise. Je ne me suis pas trompé, lorsque je t’ai recueilli. Je bénis la grande roue du temps de t’avoir placé sur ma route.
— Mon existence vous est consacrée, maître, répondit-il respectueusement.
— Ton existence t’appartient, le contredit il le plus sérieusement du monde. Cela dit, si ton désir est de me servir, j’ai quelque chose à te proposer qui pourrait bien faire de nous des acteurs majeurs de notre siècle. Le rideau de fer que représentait l’existence même de ce sale gamin prétentieux est tombée plus tôt que prévu. Libre à nous, désormais, de faire danser les dieux, mon garçon…