Et pour démontrer mes dires, voici ce que dit le Conseil d'Etat, que je cite à la lettre près (je vais seulement rajouter un passage à la ligne pour améliorer la lisibilité):
Pour refuser de mettre en demeure l'éditeur de ce service de se conformer à ses obligations en matière de pluralisme, l'Arcom s'est bornée à apprécier le respect du pluralisme au seul regard du temps d'antenne accordé aux personnalités politiques, en considérant, comme cela ressort de sa réponse à la demande de mise en demeure ainsi que de ses écritures en défense, que le non-respect allégué de la diversité des courants de pensée et d'opinion exprimés par l'ensemble des participants aux programmes diffusés n'était pas susceptible, par lui-même, de constituer un manquement à cette exigence.
En s'en tenant ainsi à la seule prise en compte du temps d'antenne accordé aux personnalités politiques pour l'appréciation des obligations du service en matière de pluralisme de l'information, l'Arcom a fait une inexacte application des dispositions de la loi du 30 septembre 1986.
Y'a littéralement RIEN DE PLUS. Le Conseil d'Etat reproche à l'Arcom de se baser EXCLUSIVEMENT sur les invités politiques pour souligner un problème de pluralisme ou non.
Il n'impose ni:
- De recevoir, avec une parité totale et radicale (même pourcentage pour tout le monde), des invités politiques
- D'appliquer le même régime de décompte aux chroniqueurs présents à la télévision
Et c'est on peut plus légitime, pour deux raisons. Déjà, c'est totalement conforme à l'esprit de la loi Léotard, compte rendu de l'AN et du Conseil Constitutionnel à l'appui.
Ensuite, d'un point de vue pratique, ça évite justement de s'arrêter à une bête question statistique. Il va de soi que si tu traites pas tes invités de la même manière, y'a un problème. J'ignore en vrai si ce constat est généralisable à CNews ou d'autres chaînes. Mais là n'est pas la question puisqu'on parle d'une règle générale et abstraite que l'ARCOM n'a pas appliqué correctement.
Ce qui me fait penser que c'est le cas concernant CNews, c'est justement car la chaîne n'a cessé de faire "prout" pendant une semaine après la décision rendue alors qu'elle préjuge d'absolument QUE DALLE ! Le reproche ici n'est pas fait à CNews, mais bien avant tout à l'ARCOM.
D'autant plus qu'en faisant prout à ce point, CNews a littéralement creusé sa tombe en traitant la question sous un angle unique, celui de la légitimité. Sans bien entendu interroger le moindre spécialiste du droit sur la question.
Logique, si tous ne sont pas d'accord sur le sujet, j'ai vu personne soutenir pour autant la position de CNews. Soit ils sont raccord avec le juge administratif, soit ils pointent effectivement du doigt l'obligation retenue non pas en raison de sa légitimité (aucun ne pointe un quelconque Gouvernement de juges rouges) mais bien sur le fond en estimant qu'elle ne tient pas en raison de l'évolution des technologies (la loi Léotard est effectivement dépassée, encore que) et de la lourdeur du contrôle d'une telle obligation de pluralisme. Y compris dans des médias pourtant bien ancrés à droite, comme Le Point.
https://www.lepoint.fr/economie/affaire-arcom-cnews-le-pluralisme-menace-au-nom-du-pluralisme-19-02-2024-2552794_28.php
https://www.lemonde.fr/idees/article/2024/02/27/en-france-comme-ailleurs-le-pluralisme-des-medias-ne-resulte-pas-du-jeu-du-marche-il-se-construit_6218798_3232.html
https://www.la-croix.com/a-vif/en-visant-cnews-et-sa-ligne-editoriale-le-conseil-d-etat-menace-tout-laudiovisuel-20240229
En faisant ça, CNews a fait deux choses:
1) Ils ont bien confirmé l'absence de pluralité, vu qu'on a eu quand même une boucle de deux jours sur le même sujet malgré une actu assez riche, traité sous un angle unique et sans admission d'une diversité d'opinion (et, précisons-le clairement, en racontant de la merde).
2) Ils ont, en prime, fait le choix (qui n'est pas nouveau) de complètement discréditer une institution nationale en sapant sa légitimité. Comme dirait le grand politicien Hober Mallow: "Par Seldon, c'est illégal". En plus d'être un procédé sophistique et d'avoir un impact scandaleux sur la population.
Cocasse.
