Quel timing
Chapitre 54 : « Le sacrifice d’un père »
Peut-être que Fex espérait pouvoir sortir du palais sans être vu ni reconnu, mais ce
ne fut pas le cas. À peine la porte franchie, une masse s’abattit sur sa nuque, le
faisant s’écrouler sur les dalles de marbre. Trois demi-elfes baraqués étaient
positionnés de part et d‘autre de la porte. Raine eut juste le temps d’apercevoir le
Rénégat tomber au sol qu’elle fut assommée à son tour. Heureusement plus
prévenant, Génis évita la massue qui lui tombait dessus. Surpris, le demi-elfe perdit
l’équilibre et manqua de s’étaler sur Raine, qui elle-même était déjà étalée sur Fex.
Il fut rattrapé au dernier moment par un de ses congénères.
Pendant ce temps, Lloyd et Kratos avaient dégainé leurs épées respectives.
- Tu vas y arriver, cette fois ? lança Kratos à son fils sur un ton légèrement
moqueur.
Lloyd se contenta de grommeler puis se jeta sur ses ennemis. Les trois demi-elfes,
aussi barbus que des ours, se placèrent en position défensive et repoussèrent
ensemble l’attaque de Lloyd. Celui-ci retomba au sol avec violence.
- Aouch ! marmonna-t-il.
Mais déjà ses ennemis l’attaquaient. Le plus grand était face à Lloyd et les deux
autres étaient de chaque côté du jeune garçon. Ils levèrent les bras et
murmurèrent :
- Disparais ! Disparais dans les profondeurs du monde !
Des petites flammes bleues apparurent tout autour de Lloyd. Elle s’intensifiaient
petit à petit. Lloyd était paralysé par un pouvoir étrange . . . ou peut-être bien par la
peur ! Les trois demi-elfes continuaient de marmonner des phrases en un langage
étranger tandis que les flammèches devenaient flammes et ne laissaient plus aucune
échappée à Lloyd.
Personne ne bougeait. Bientôt, Lloyd disparaîtrait sous une couche impressionnante
de flammes. Sans prévenir, Kratos se jeta au beau milieu du cercle de feu qui
entourait son fils.
Kratos s’attendait à sentir son corps parcouru d’une horrible douleur causée par les
flammes. Mais rien ne le brûla. Il passa au travers des flammes sans problème et se
retrouva vite face à Lloyd, pétrifié de peur. D’un geste brusque, le mercenaire
poussa son fils hors du cercle enflammé. Colette et Génis virent Lloyd atterrir à
leurs pieds. La tête du jeune garçon heurta le sol dans un bruit sourd et Lloyd
s’évanouit. Toujours à l’intérieur du cercle de flammes, Kratos éprouvait le plus
grand mal à en sortir. Les flammes se faisaient de plus en plus pressantes lorsque
Kratos comprit :
- Tant qu’un corps se trouve dans le cercle, murmura-t-il, peu importe qui est ce
corps. Il m’est impossible de sortir d’ici . . .
Aussi soudainement qu’elles étaient apparues, les flammes s’évaporèrent, et Kratos
avec. Les trois demi-elfes ricanèrent et se tournèrent en direction de Colette et
Génis, les deux derniers amis à être conscients.
- Tu crois qu’ils vont nous attaquer ? gémit doucement Colette.
- Bien sûr que non, railla Génis, ils vont nous faire un gros bisou !
Colette regarda son jeune ami avec une mine effarouchée :
- Quoi ? Mais je ne vais pas les laisser m’embrasser !
Génis soupira.
De leur côté, les trois demi-elfes avaient les mains jointes et recommençaient à
marmonner.
- Drôle de méthode pour embrasser, remarqua Colette.
Génis ne prêta pas attention à la remarque et dressa une barrière de protection à
l’aide d’un sort. Colette l’aida aussitôt en fortifiant la barrière grâce à un sort
angélique. Les trois ennemis semblèrent impressionnés mais lancèrent tout de même
leur sort :
- BLIZZARD !
Une tempête de couleur apparut et fonça sur les deux enfants, qui tentaient tant
bien que mal de maintenir leur protection. La barrière de protection se fissura mais
tint bon. Les trois demi-elfes fuirent à toute vitesse, laissant les deux enfants à
leur triste sort : la protection n’allait pas tarder à s’effondrer.
Puis un miracle se produisit. Un homme arriva et balaya l’attaque d’un simple
mouvement.
- Kratos, espérait Génis.
Il fut déçu d’apercevoir Botta lorsque celui-ci vint à sa rencontre. Après un long
repos, il avait fini par se réveiller et il était apparemment en pleine forme. Heureuse
d’être sauve, Colette se jeta presque à son cou :
- Merci ! Merci beaucoup ! Vous n’imaginez pas ce qu’ils projetaient de nous faire !
Ils voulaient . . .
Génis la fit taire avant qu’elle ne dise une bêtise.
- Bien, dit le Rénégat, où sommes-nous ?
- Dans le palais de l’Impératrice, répondit Génis, au fait, il faudrait qu’on s’en aille
vite fait avant de s faire repérer !
À ces mots, il se mit à genoux sur le carrelage qui pavait le couloir et tenta de
réanimer ses amis. Pressés, Colette et Botta l’imitèrent. Raine et Fex s’éveillèrent
assez vite mais Lloyd ne voulait pas revenir à lui.
- Je m’en occupe, dit Raine en retroussant ses manches.
Elle s’abaissa pour que sa bouche arrive au niveau de l’oreille de Lloyd.
- DEBOUT ! ARRÊTE DE DORMIR !
Rien n’y fit, Lloyd ne bougea pas.
- Je ne comprends pas, s’étonna Raine, ça marche toujours lorsqu’il dort en classe . .
.
Génis poussa doucement sa grande sœur sur le côté et vint à son tour se pencher
au-dessus de son ami.
- Lloyyyyd ! chantona-t-il doucement, il y a une assiette de pancakes toute prête
pour toiiiii !
Raine lança un regard interrogateur à son frère :
- Lloyd n’aime pas les pancakes ! C’est toi, le gourmand du groupe !
Génis rougit et se vexa :
- C’est faux ! Je ne suis pas gourmand ! J’apprécie la bonne cuisine ! Ce n’est pas
pareil.
Raine rit discrètement mais n’insista pas.
- On n’a pas le temps de discuter plus longtemps, intervint Fex, allons-nous en.
Il hissa Lloyd sur son dos et tous quittèrent le palais et, bizarrement, ils ne
rencontrèrent personne.