Origine (partie 4) :
-2500 avant J-C, Egypte…
Les jours passèrent. Les barbares semblaient vouloir reprendre des forces car ils cessèrent leurs attaques contre le royaume. Ils s’étaient retranchés au-delà des vallées, de l’autre côté du fleuve, pour rassembler leurs troupes au vue d’une offensive ultime.
Les soldats du pharaon se préparaient eux-aussi. Et ils attendaient.
Horbaf, tel une ombre, suivait son frère partout, où qu’il aille, de loin. Il ne se passait pas une minute sans qu’il n’ait les yeux tournés vers Minkhaf.
Celui-ci ne faisait rien qui aurait pu compromettre sa vie.
Il vaquait à ses occupations habituelles mais Horbaf voyait qu’à chaque fois qu’une femme implorante, tenant un enfant entre ses bras, venait au palais en suppliant Minkhaf de faire revenir son époux, le vizir serrait les poings, de rage et de désespoir.
Horbaf doutait.
Chaque jour, il vacillait entre sa fidélité à son roi et à ses dieux et entre les paroles de son frère. Minkhaf avait raison, oui. Il avait aussi tord.
Mais Horbaf, tiraillé, préférait à chaque fois délivrer ses doutes au pharaon et celui-ci, après un long discours, finissait par le convaincre qu’il ne fallait pas utiliser l’ankh. Les désastres que cela entraînerait seraient beaucoup trop graves. Bien pire que si on ne l’utilisait pas.
Mais un soir, Minkhaf disparut.
Horbaf l’avait quitté des yeux quelques minutes et ne l’avait plus retrouvé. Le soir tombait et le vizir avait déambulé dans tout le palais à la recherche de son frère, en vain. Finalement, paniqué, il avait couru chez Kephren.
-Frère !
Le pharaon s’était tourné vers Horbaf.
-Oui ?
-Minkhaf a disparu !
Kephren se leva d’un bond.
-Que dis-tu ?!
-Il a disparu ! Je crains qu’il ne tente de… de s’emparer du fragment !
Kephren devint pâle.
-Si c’est ce qu’il a décidé, il se dirigera vers la cachette. Rattrape-le et fais ce que tu as à faire.
Horbaf baissa les yeux.
-C’est un ordre, fit Kephren.
L’ankh avait été caché dans un temple, non loin du palais, dont l’entrée était cachée et gardée par des hommes en arme. Horbaf avait sauté sur un cheval et galopé jusqu’à cet endroit. La lune se levait, dans le ciel, quand il y arriva.
Le silence était total.
Les quatre gardes, à l’entrée, gisaient au sol. Une mare de sang les entouraient.
Horbaf craignait d’être arrivé trop tard mais il entendit du bruit à l’intérieur. Il s’y précipita, le sabre sortit, et arriva dans la grande salle où l’ankh reposait dans un coffre scellé.
Minkhaf l’avait ouvert et il tenait le fragment entre ses doigts.
Horbaf se stoppa, hypnotisé par la lueur dorée. L’ankh semblait l’attirer, aspirer son esprit, l’envoûter totalement. Minkhaf se retourna et écarquilla les yeux en apercevant son frère. Il posa la main sur la poignée de son cimeterre.
-N’approche pas Horbaf ! Je t’avais prévenu ! Tu as fait le mauvais choix ! Tu aurais du m’écouter plutôt que Kephren ! Ne t’approche pas !
Horbaf, tiré de son hypnose par les cris de son frère, secoua la tête. Il fixa Minkhaf.
-Non Min, ne fait pas ça. S’il-te-plait.
-Kephren t’a ordonné de me tuer n’est-ce pas ? Qu’est-ce que tu attends ? Qu’est-ce que tu attends ?!
Horbaf bondit, l’épée en avant.
Minkhaf posa l’ankh dans son réceptacle et dégaina son sabre. Les deux lames s’entrechoquèrent brutalement en produisant une pluie d’étincelles.
Les deux frères enchaînèrent une série d’attaques rapides et fulgurantes, précises et puissantes. Mais aucun ne reculait ni ne laissait une ouverture dans sa garde. Les deux hommes méritaient bien leur titre de « faucheurs de guerre ».
Horbaf esquiva un coup de taille en se baissant, répliqua d’une pirouette et d’une attaque verticale, para un coup d’estoc rapide et fit un pas sur le côté tout en assaillant son adversaire de petits coups vifs, destinés à le déconcentrer, dans l’espoir de voir une ouverture et de le blesser mortellement.
Mais Minkhaf n’était pas le genre de guerrier à faire ce genre d’erreur. Il avait trop d’expérience pour tomber dans un tel piège. Horbaf le savait parfaitement. Personne ne connaissait mieux Minkhaf que lui. Pas même Kephren.
Un puissant coup de taille, paré in-extremis, déstabilisa Horbaf et faillit lui faire perdre l’équilibre. Il recula de quelques pas et se rattrapa à une torche, sur un mur, avant de se remettre en garde avec une vivacité exceptionnelle.
Minkhaf s’élança, lame en avant.
Horbaf esquiva et la pointe du sabre du vizir traça une profonde coupure le long de sa joue.
Le jeune homme répliqua rapidement. Minkhaf bloqua l’attaque et partit dans un assaut endiablé. Il mettait toute sa puissance et son talent dans ses attaques, à tel point que Horbaf finit par s’essouffler.
Les coups s’enchaînaient avec une fluidité parfaite et une maîtrise incroyable. Et ils venaient de partout.
Horbaf savait que s’il ne faisait rien, l’un de ces coups passerait sa garde et le tuerait. Car Minkhaf frappait pour tuer, Horbaf n’en doutait pas.
Il ne reconnaissait plus son frère. La lueur de l’ankh l’avait rongé, perturbé, changé. Le fragment d’Eden semblait le posséder et se battre à travers lui. Horbaf savait qu’il y avait un maléfice derrière tout ça mais il n’avait ni le temps ni l’énergie d’y penser.
Toute son attention était concentrée sur les assauts de Minkhaf.
Soudain, comme un coup du sort, Minkhaf trébucha. Comment ? Il se prit bêtement le pied dans un renfoncement du sol. Pourquoi ? Il donnait tellement de force dans ses coups qu’il en oubliait son équilibre et se laissait emporter par l’élan de son sabre. Cela arrivait même aux meilleurs.
Et Horbaf ne laissa pas passer l’occasion.
Tel un serpent qui attaque, sa lame se déroula en une fraction de seconde et siffla dans les airs.
Minkhaf posa un genou à terre, une profonde plaie sanglante remontant tout son bras droit, partant de son poignet et rejoignant le sommet de son épaule. Il gémit de douleur et lâcha son cimeterre. Son tendon tranché net, il ne pouvait plus tenir son arme.
Néanmoins, il leva les yeux sur son frère. De la sueur dégoulinait sur son visage.
-Tue-moi.
Horbaf secoua la tête.
-Non.
-Tue-moi, j’ai trahis. Je n’ai que ce que je mérite.
-Non !
-Frappe ! Tranche-moi la tête, que je finisse en guerrier ! Allez, tue-moi !
-Non !!!
Horbaf frappa le mur de toutes ses forces, brisant son sabre en deux. Les morceaux de lame tombèrent sur les dalles du sol et rebondirent en tintant. Horbaf s’adossa au mur, les yeux levés vers le plafond, en relâchant un profond soupir.
-Non, mon frère, non. Je ne peux pas.
-Le pharaon te l’a ordonné. Tu dois le faire.
Horbaf regarda son frère avec douleur.
-Je ne le ferais pas. Jamais.
-Je n’aurais de cesse de récupérer le fragment ! Tu le sais très bien !
-Je le protègerais. Je protègerais le fragment, et tous les autres.
-Je te tuerais !
-Pas moi.
-Je te traquerais où que tu ailles ! Quel que soit le nom que tu porte ! Tu ne pourras pas fuir Horbaf ! Tu es coupable de trahisons envers ton pharaon ! Tu as désobéis à ses ordres ! Tu seras traqué par ses soldats et par moi !
Horbaf sourit et se dirigea vers le coffre où reposait l’ankh. Il le prit dans ses mains et l’admira avant de le ranger dans sa tunique.
Minkhaf s’était levé et tenait son bras ensanglanté. Il avait l’air à la fois enragé et désespéré.
-Je te jure que je te retrouverais, Horbaf ! Et si ce n’est pas moi, ce seront mes descendants !
-« Le faucheur se séparera en deux. L’un sera la proie, l’autre le prédateur. »
-Ma volonté perdurera ! Ma lignée n’aura de cesse que de détruire la tienne !
-« Et leurs descendants porteront la volonté de leurs ancêtres. »
Horbaf se dirigea lentement vers la sortie. Il ne retournerait pas au palais. Jamais.
En épargnant son frère, il avait désobéis à un ordre royal, et donc trahis. Mais il avait aussi trahis ses dieux. Il ne pouvait plus porter son nom.
-Reviens ! hurla Minkhaf, en retombant à genoux.
Horbaf sortit.
Magerlan. Ce serait son nom.
Et celui de ses descendants.
Voila, vous connaissez maintenant l'origine des Magerlan et des As de Pique Un conflit d'idées qui s'est transformé en guerre fratricide s'étalant sur plusieurs millénaires.
Je vais réactualiser ma liste de chaps et l'arbre généalogique